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  • Vous trouverez ici des Fans Fictions francophones et des traductions tournant autour de la série Xena la Guerrière. Consultez la rubrique "Marche à suivre" sur la gauche pour mieux utiliser le site :O) Bonne lecture !!
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20 février 2011

Les filles de Ra, chapitres 11 à 15

Chapitre 11

 

« Ils sont sur nous » hurla Kary. « Ma Reine où en sommes nous ? » « Douze coudées… onze… dix… » lança celle-ci à la guerrière qui avait revêtu son pagne de cuir, ainsi que des gants et des bottes de pêcheur et quelques autres protections improvisées avec ce qu’elle avait pu trouver à bord.

 

« Levez vos rames » ordonna le capitaine ennemi aux vingt guerriers qui formaient le principal de son équipage. Ses hommes empoignèrent leurs glaives et se précipitaient à l’abordage de l’embarcation plus petite où une lionne assoiffée de sang les attendait.

 

Un cri strident fendit les airs et déjà deux têtes roulèrent sur le pont, suivi immédiatement de deux autres corps à l’agonie. « X ! » ragea le capitaine qui reconnut immédiatement le cri unique de la Destructrice du monde. « Ta mort fera de moi le nouveau pharaon » ricana-t-il en délaissant à son tour le navire.

 

La Régente et les deux enfants ne purent détourner le regard devant le spectacle incroyable qui s’offrait à elle. La guerrière était menacée de tous les côtés par des glaives et des lances, mais voilà qu’elle s’en défit encore en poussant à nouveau son cri avant de sauter par-dessus les soldats médusés. « C’est incroyable ! » s’enflamma le jeune homme. « Oui, mais ils sont quand même beaucoup », dit Ankhty en se blottissant encore plus près de sa protectrice.

 

« Neuf… huit… sept… », mais que comptait la petite blonde à la proue du navire. Le capitaine n’eut pas le temps de comprendre, que déjà un énorme crissement se fit entendre, son vaisseau venait de s’éventrer sur le récif. Sa haine et son ambition lui avaient totalement fait oublier dans quelle partie de la mer il se trouvait : « Vous allez me le payer ! » hurla-t-il en se précipitant vers le trio insolite.

 

« Aaaaaah » hurla la fillette, alors que le guerrier enragé fondit sur eux, ne leur laissant aucun repli possible. Kary se précipita pour se jeter dans les flots, mais un bras à la peau blanche, bien plus puissant que ce qu’il aurait cru, le retint de justesse : « Tu es fou, ou tu désires réellement servir de petit déjeuner à Sobek ?! » Le jeune homme scruta les vagues et y distingua clairement les crocodiles[1], se délectant déjà des soldats que Sekhmet avait jetés par-dessus bord. La Reine, sans arme et coincée entre les deux enfants terrifiés, ne put que se résoudre à leur offrir son corps en bouclier. La lame de bronze allait pénétrer dans sa chair, lorsqu’un curieux objet en bois fendit les airs et percuta la main tenant le glaive de plein fouet, avant de revenir vers celle qui l’avait lancé.

 

Sekhmet se tint maintenant devant le capitaine désarmé et lui assigna un terrible coup de pied dans les côtes, alors que la poignée de guerriers restant se précipitèrent à son aide. La lionne croisa inquiète les yeux verts qui lui firent signe que tout allait bien. Ce bref instant de déconcentration suffit pour qu’un glaive s’abatte dans le dos de la Vengeresse qui sans même se retourner transperça son assaillant de son arme. Les trois soldats qui avaient échappé à la furie de la guerrière cherchèrent désespérément une échappatoire, mais leur navire gisait sur le flanc à près d’un demi iterou maintenant et la mer rouge-sang grouillait de reptiles les attendant la gueule grande ouverte. « Pitié ! » s’agenouillèrent-ils en déposant leurs armes tout en pleurant comme des enfants.

 

Jamais la Destructrice du monde n’octroyait la vie à ses adversaires, son nom était synonyme de deuil, des sources du Nil jusqu’au delta. X ne laissait que des veuves et des orphelins sur son passage, et même sachant cela, ils n’avaient plus que ce mot à la bouche : « Pitié ! » Elle les fixa de son regard le plus glacial, avant de les assommer de bons coups de pied dans la mâchoire.

 

C’était la première fois que la grande guerrière semblait avoir réussi à contenancer sa rage intérieure, l’excitation de la bataille s’estompa et la douleur s’insinua dans tout son corps. Le capitaine qui était revenu à lui chercha sournoisement à en profiter. Voyant sa guerrière à genou se tenant le dos maculé de sang, la Régente, soudain prise d’un élan insoupçonné, se défit des enfants, ramassa un objet traînant au milieu des filets de pêche et le lança de toutes ses forces vers leur ennemi. Un cri rauque retentit au-dessus de la tête de Sekhmet qui se retourna, alors qu’un corps transpercé d’un harpon s’affala sur elle.

 

*******

 

Chapitre 12

 

« Grande Isis, fais qu’elle ne soit pas morte », supplia Ankhty, alors que la Grande Epouse Royale s’empressa d’analyser leur nouvelle situation. « Debout ! » cria-t-elle aux hommes épargnés par la lionne en leur balançant un grand seau d’eau. « Toi et toi, aidez Kary à hisser les voiles ! » ordonna-t-elle à deux d’entre eux. « Kary, toutes voiles dehors vers la haute mer ! » « Aïe aïe mon capitaine ! » répondit-il en lui souriant. « Toi, aides-moi à la débarrasser de son armure, et pas de bêtise, Sobek veille toujours. » La Régente savait pertinemment qu’elle ne pouvait pas se passer de l’aide des trois survivants de Coptos et décida de les considérer non comme des prisonniers, mais comme de jeunes mousses devant faire leurs preuves. Les graciés de la Vengeresse, surpris d’être encore en vie, se soumirent naturellement à l’autorité de la jeune blonde.

 

Sekhmet avait perdu énormément de sang et gisait toujours inconsciente sur le pont. Ankhty dénicha du fil servant à réparer les filets de pêche et le tendit à la Grande Epouse Royale qui s’attela à recoudre la plaie béante au-dessus de l’omoplate droite de la guerrière, alors que le soldat la tenait fermement pour éviter les coups qu’elle cherchait encore à donner par pur reflexe. « T’inquiètes pas, je vais prendre soin d’elle, je l’ai déjà fait pour ma mère malade », se proposa la fillette avec assurance. La Reine hocha la tête lui signifiant sa confiance avant de rejoindre son équipage.

 

« Le navire n’a pas coulé, alors personne ne devrait s’en inquiéter avant que Nout n’avale Ra », déclara l’un des soldats. « Il va falloir se rationner en eau et naviguer en haute mer le plus longtemps possible pour ne pas prendre de risque », ajouta Kary d’une voix experte. Chou fit gonfler les deux voiles, alors que sa sœur et compagne Tefnout leva un brouillard qui les enveloppa pour les cacher aux yeux de leurs ennemis potentiels. « Cette jeune femme semble avoir la faveur des dieux », s’étonnèrent les graciés sous le regard espiègle de Kary tenant toujours la rame-gouvernail. Il avait fini par accepter l’idée que sa petite sœur puisse avoir raison au sujet de la belle blonde.

 

Celle-ci avait rejoins Ankhty pour prendre soin de la guerrière, qui, prise de fièvre, s’était mise à délirer. Alors que la fillette épongea le front de la terrible force de la nature, la douce et chaude voix de la Reine retentit dans les airs tout en berçant le corps meurtri sur ses genoux.

La belle Egypte au bord du Nil danse sur un air léger le long des eaux claires. La jolie fille aux reflets verts joue, cheveux au vent, robe filée avec soin. Le noir bédouin du grand désert crie sur ce sol sableux torride au vent si vif. Le garçon dur au corps massif court, œil de sang et ventre amer, il remporte la victoire. Les deux amants, flammes et miel, roulent, dans un éclair et des milliers de tournoiements. Le Nil discret paisiblement va, impavide et éternel.

Les cœurs des marins furent fortifiés par cette chanson qui leur rappelait les beautés de leur terre chérie.

La nuit finit par tomber et Tefnout se retira pour laisser l’astre d’Isis veiller à son tour sur l’étrange embarcation, tandis que la voix de la Régente continua par une berceuse que lui chantait sa mère. Ankhty apporta du poisson séché aux hommes qui s’organisèrent pour la nuit, car il fallait deux hommes éveillés en permanence pour ne prendre aucun risque sur le territoire de Sobek.

*******

 

Chapitre 13

 

 «Ga…bity… Ga… bity… » « Ma Reine, réveillez-vous, Sekhmet revient à elle », secoua la jeune fille la Régente qui avait fini par s’endormir au petit matin. « Ga… bity… », retentit une nouvelle fois la fébrile voix rauque de la Puissante. « Je suis là ma championne, grâce à toi nous sommes tous saufs. » L’étrange force de la nature fit mine de sourire dans une grimace indescriptible.

 

Qui était cette déesse aux yeux verts, car il devait bien s’agir là d’une déesse, pour apaiser si simplement la Destructrice du monde ? Les soldats subjugués décidèrent de jurer fidélité jusqu’à la mort à cette Gabity, l’incroyable amie de la grande Sekhmet.

 

« Nous entrons dans les eaux de Nekhen ! » s’écria Kary au sommet du grand mat. La flotte maritime de la capitale de Haute-Egypte était réputée pour être aussi puissante que celle qui fut jadis la gloire du pharaon Kheops, et elle repérerait leur bateau de pêche qu’importe la voie qu’ils emprunteraient. Sekhmet savait que de tous les nomarques, celui de Nekhen était non seulement le plus influant, mais aussi le plus sanguinaire. D’ailleurs, il devait s’être proclamé nouvel Horus depuis la destruction de Men-nefer. Il fallait trouver une solution et vite !

 

Frappé par la gloire de Ra en son zénith, une petite crique rougeâtre attira l’attention de la lionne. Un sourire digne des plus terrifiantes fresques de Seth s’inscrivit sur ses lèvres. « Mon glaive est à toi », « ainsi que le mien », s’engagèrent les trois rescapés de Coptos. « Kary, rapproche-nous immédiatement de la côte ! » Il obtempéra, bien que surpris qu’elle veuille accoster dans une baie désertique ne représentant absolument aucun intérêt.

 

A quelques coudées royales de la rive, X se jeta dans les flots, son glaive accroché dans le dos et une corde à la main pour aider Kary à amarrer leur embarcation. « Oh, tu as vu les merveilleux coquillages ma… euh… je veux dire Gabity ! » se reprit la fillette toute excitée. « Et maintenant ? » demanda perdu l’un des hommes. « On va ramasser le plus de coquillages possibles évidemment ! » répondit ironiquement la guerrière comme s’il s’agissait là d’une question stupide.

 

« Comment ces choses pourraient-elles nous aider ? » s’impatienta un soldat après plusieurs heures. « Sans oublier que nous n’avons presque plus d’eau… », « et que Ra s’amuse à déchiqueter nos chairs déjà entamé par le sel », ajoutèrent les deux autres. « Pourquoi sont-ils fâchés, moi je trouve génial que Sekhmet aime les coquillages comme moi. Ils sont tellement jolis, regarde, de toutes les couleurs », s’extasia Ankhty en ignorant le grondement de ses compagnons. La Régente était tout aussi perplexe, mais savait que lorsque la Puissante faisait quelque chose, c’était pour une bonne raison. Ses batailles remportées par des stratégies aussi diverses qu’ingénieuses ne lui avaient-elles pas permis de devenir une légende de son vivant bien au-delà des frontières égyptiennes ?!  

 

« Bien, ça devrait suffire », finit par dire X à la tombée du jour. « Vous trois, descendez les voiles et apportez-les moi ; les filles, délogez-moi ces petites bestioles de leurs carapaces et toi Kary, aide moi à délimiter un bassin. « Faites-ci, faites-ça, mais pour qui elle nous prend ?! » « Un bain pour la Destructrice du monde, évidemment, quand on est habitué à être traitée en déesse ! » « Je ne comprends pas, le poisson c’est bien meilleur. Ca, ç’a le goût de la résine qu’utilisent les serviteurs d’Anubis ! » grogna maintenant aussi la fille de pêcheur.

 

Bien qu’ayant les deux pieds sur la terre ferme, Gemethoues se sentait toujours aussi mal qu’en mer. Était-ce l’odeur des mollusques qui la rendait aussi malade ou couvait-elle quelque chose ? La jeune femme décida de ne rien dire, alors qu’Ankhty l’observait avec insistance.

 

 « Par tous les dieux ma Reine, tu t’es coupée… laisse-moi soigner ta main… » s’inquiéta soudain Ankhty en voyant le liquide rougeâtre qui maculait les mains blanches de la Souveraine. « T’inquiètes pas, ce n’est pas mon sang », la regarda la Régente avec bienveillance. « Mais alors, qu’est-ce ? » « Le secret du pourpre de Nekhen[2] », sourit, d’un nouvel élan d’admiration pour les yeux azurs, le Lotus d’Egypte.

 

La soirée se déroula dans la bonne humeur autour d’un bon repas chaud, ce qui fut, après avoir passé des jours à ne manger que du poisson cru ou séché, fort apprécié. Même la farouche guerrière semblait à son aise, puisqu’elle daigna participer au jeu proposé par la belle blonde que tous appelaient désormais du nom que lui avait donné la Puissante.

 

Ce jeu de mîme, inventé selon la légende par le dieu nain Bès, arracha l’hilarité générale, en particulier lorsque la Destructrice du monde imita le dieu Seth hors de lui après sa défaite cuisante contre Horus.  Tant d’humour dans un cœur si noir, ça semblait vraiment incompréhensible. « Que t’est-il arrivé, princesse guerrière ? » songea bien décidée à le découvrir la Grande Epouse Royale.

 

« Je n’ai pas envie de dormir, amusons-nous encore un peu, tu es trop drôle lorsque tu imites les dieux. » « Drôle ! » voilà bien un attribut que personne ne lui avait donné. « Je sais, mais surtout ne le dis à personne », dit-elle d’un clin d’œil à Ankhty, ce qui n’échappa pas à la Régente qui en fut une nouvelle fois bouleversée intérieurement. « Ecoutez-moi tous, il va falloir reprendre la mer bien avant que Ra renaisse au jour, alors reposez-vous ! » « Nous serons prêts au combat, tu peux comptez sur nous », affirmèrent les hommes en chœur. «  Qui vous parle de combattre…,  nous allons à la pêche ! »  

 

*******

 

Chapitre 14

 

Arborant les couleurs de Nekhen, leur navire se joignit aux autres pêcheurs lorsque la lueur de l’astre d’Isis pâlit devant les rayons de Ra surgissant à l’horizon. Les filets jetés, alors qu’ils avaient quitté la crique, grouillaient maintenant de poissons de toutes sortes. « Aidez-moi à les hisser sur le pont ! » cria toute excitée la grande femme dont la pêche semblait être la plus grande passion.

 

C’était incroyable, il y avait là de quoi nourrir des dizaines de familles pour une semaine au moins. La Régente se laissa prendre par l’euphorie du moment en se joignant de gaîté de cœur à l’effort fourni par les marins pour hisser la lourde cargaison à bord. « Attention, les filets sont en train de rompre ! » hurla Kary. Déjà les plus grandes perches, tirant sur les mailles, arrivèrent à se libérer. Bientôt il n’y aurait plus grand-chose de très comestible.

 

Rapidement, la farouche guerrière se dévêtit et plongea nue comme un nouveau né dans ces flots primaires qui permettaient à l’Egypte d’exister. Une fois encore, elle allait accomplir un miracle en plongeant vers l’abime, maintenant fermement les filets depuis sous les eaux, afin de ne rien en perdre. « C’est ça », s’enthousiasma le Lotus d’Egypte, les joues plus roses que d’habitude, « un dernier effort, et on y est ! »

 

Au moment, où la guerrière voulut fournir une dernière poussée vers le haut, un curieux poisson, sur le point de se libérer, effleura sa main. Jamais la guerrière n’avait ressenti pareille douleur. Un frisson lancinant remonta vif comme l’éclair le long de son épine dorsale et son corps se contracta sans qu’elle ne puisse rien faire contre, en de violents spasmes. Sa main avait automatiquement agrippé l’étrange prédateur et malgré toute sa volonté, sa main ne lui obéissait plus. Une nouvelle décharge faillit lui faire perdre connaissance, alors que le molosse[3] de la moitié de sa taille l’entraîna vers le fond.

 

C’était une véritable pêche miraculeuse qui se déroulait devant leur yeux, des dizaines d’espèces, certaines communes, d’autres moins répandues, qui leur rapporteraient leur pesant d’or au marché de Nekhen, dont la perspective de s’y rendre ne semblait plus du tout les effrayer. « Tu es vraiment bénie des dieux altesse », lui glissa discrètement Kary, un sourire jusqu’aux oreilles.

 

Mais la Régente n’y réagit pas, elle scruta inquiète les flots, alors que gentiment les autres bateaux de pêche regagnèrent la rive, laissant les eaux à nouveau à la domination du redoutable dieu crocodile. « Par tous les dieux, dépêche-toi de sortir de là ! »

 

Alors que la Régente tenta de maîtriser la panique qui s’emparait petit à petit d’elle, la farouche guerrière s’agrippa de toutes les forces qui lui restaient à l’étrange prédateur. Malgré les spasmes musculaires qui la firent trembler et avaler les eaux de Seth, elle parvint à le tuer.

 

Dans un saut incroyable, elle se défit de l’étreinte des flots, alors qu’un crocodile fonça sur elle, pour atterrir fière d’elle-même sur le pont. « Pas aujourd’hui mon vieux, pas aujourd’hui ! » lui lança-t-elle en grimaçant, mais bien décidé de ne rien dire à propos de sa mésaventure, alors que tous les regards se portèrent sur son corps sublime, formé dans le même moule que les dieux.

 

Soulagée, la Régente l’étreignit fortement, avant de se retirer plus que gênée à la poupe du navire. Surprise, Sekhmet en oublia sa nudité, mais Ankhty finit par lui tendre une serviette de lin, ainsi que des vêtements.

 

« Par la grande Isis, qu’est-ce qui t’a pris ? Tu ferais bien de prendre un bain à ton tour ! » se réprimanda la Régente en détournant les yeux.

 

« Tu rougis Gabity ?... Je n’aurais jamais cru pouvoir troubler la Reine d’Egypte ainsi, sinon je l’aurais fait bien plus tôt », la rejoignit la sirène aux yeux du Nil, un sourire espiègle sur les lèvres, alors que les hommes vidèrent les filets en chantant de vielles chansons de marins.

 

« Il est vraiment étrange ce surnom que tu m’as donné », finit par dire la jeune blonde toujours aussi troublée. « Tu n’aimes pas ? » questionna la Puissante à son tour gênée, ce qui n’échappa pas à la Reine.

 

L’aimait-elle ?... Il était évident que oui, sinon elle n’aurait jamais permis aux hommes de le reprendre, sans oublier que ça lui permettait de rester incognito parmi son insolite équipage. Mais si elle voulait être complètement honnête envers elle-même, elle devait reconnaître qu’elle l’aimait trop…, non…, elle l’adorait, et ceci l’inquiétait tout en l’excitant au plus haut point, car donné par la Destructrice du monde.

 

Devant le silence inconfortable de la Grande Epouse Royale, Sekhmet enchaîna : « Je suis désolée ma Reine, si j’avais su que cela t’ennuierait autant, je me serais tue, c’est juste que… » La grande lionne lui apparut soudain comme un chaton, toutes griffes dehors, mais un chaton quand même. Les joues de la Régente rosirent encore davantage et elle ressentit à nouveau le besoin de se retourner vers le large, où les premiers rayons de Ra déchirèrent le voile nuptiale de Nout.

 

« Que ? » insista-t-elle intriguée malgré tout. « Que tu as dit que l’abeille était le symbole suprême de la royauté et… » « Et ? » insista le Lotus d’Egypte soudainement amusée. « Que ton chant est aussi sublime que les charmes de Neith », faillit exprimer à voix haute la guerrière, réussissant tout juste à se mordre la lèvre avant de dire plus sobrement, « et que tu as une belle voix, altesse. » « Personne ne me l’avait jamais dit en ces termes, mais… ça me plaît bien,… l’abeille à la belle voix[4] alors… », sourit-elle en admirant l’aurore.

 

*******

 

Chapitre 15

 

La petite ville portuaire dépendant directement de la cité où le royaume d’Egypte fut engendré par l’assiduité du pharaon Narmer[5], qui s’était employé à pacifier la Haute et la Basse-Egypte, n’avait rien perdu de sa gloire d’antan, malgré la guerre qui faisait toujours rage autour d’elle.

 

Les gardes du port ne s’étaient pas même retournés sur eux, alors qu’ils accostèrent au milieu des autres voiles pourpres. Toute la cité semblait agitée, certains visages craintifs, d’autres joyeux, cachant malgré tout une certaine appréhension, c’était plus que bizarre.

 

« Kary, occupez-vous de la marchandise pendant que je vais voir ce qui se passe ? » Le jeune homme fit signe qu’il gérait parfaitement la situation. Il avait déjà obtenu un emplacement à l’étal, grâce au glaive de Sekhmet laissé en gage, le temps de payer en céréales et en objets de valeurs la maison du trésor[6]. Son père lui avait appris la valeur de chaque espèce, tout en le mettant en garde des arnaques habituelles pratiquées par les commerçants de poissons, avec qui il marchandait pour obtenir toutes sortes de denrées indispensable pour un voyage en mer, alors que le reste de l’équipage finissait de décharger leur incroyable cargaison.

 

« Et là, pas si vite, où tu vas, je vais, compris ! » la rattrapa la Régente d’un pas décidé. C’était étrange, bien des guerriers lui avait dit cela auparavant, mais dans la bouche de la Reine, ces paroles prirent une tout autre signification pour Sekhmet. Ou se faisait-elle juste des idées ?! Décidemment, tout autour de la blonde aux yeux émeraude touchait au mystère, et à chaque fois que la guerrière avait l’impression d’en avoir percé une part, elle fut surprise de plus belle. « Bien », fut sa seule réponse lorsque la jeune femme mesurant une tête de moins qu’elle, arriva à sa hauteur.

 

Elles accostèrent un groupe de femmes venues puiser de l’eau au puits : « Alors, qu’elles sont les nouvelles aujourd’hui ? » « Ne me dites pas que vous n’êtes pas au courant ? » s’offusqua l’une d’elle. « Ben disons que les nouvelles changent tellement en ce moment », répondit diplomatiquement la Régente, qu’évidemment personne ne reconnut. « Notre Seigneur a enfin réussi à se défaire de tous ces roitelets », répondit une autre qui avait visiblement abusé du henné.

 

« Roitelets ? » dit la guerrière en hochant un sourcil d’incompréhension. « Décidemment, vous les femmes de pêcheurs, jamais au courant de rien », insista une troisième d’une voix hautaine, usant la dernière part de patience de la grande femme aux yeux bleus, maintenant à deux doigts d’empoigner les citadines pour les faire parler de manière plus claire, mais la main de la Reine posée sur son avant-bras l’arrêta de justesse.

 

« Ca fait des semaines que les différents nomarques se disputent le trône[7], mais notre nouveau souverain Merenhor a enfin mis tout le monde d’accord » expliqua la première avant que les autres ne reprennent en chœur « avec lui la paix est assurée ».

 

« Merenhor[8], par tous les dieux, de quel droit ce fils d’Apopis se fait-il appeler ainsi... Que Seth découpe ce corps dont Ammout a déjà dévoré le cœur et qu’on le donne en offrande à Sobek... » tempêta la Reine hors d’elle sur le retour vers les étals.

 

Les regards commençaient à se tourner vers cette folle-furieuse qui avait visiblement perdu la raison pour oser parler ainsi du nouveau Maître des Deux Terres[9]. Elle se calma juste à temps, avant que Sekhmet se voie obligée de la faire taire par la force. « Désolée. » « Ouais, ben va falloir se dépêcher de filer d’ici maintenant, avant qu’une personne mal intentionnée n’en informe les gardiens du port. »

 

Pendant ce temps, Ankhty découvrit le plaisir insoupçonné de faire des achats. Son frère s’était déjà occupé de remplir le navire de diverses céréales, de bière et même d’un tonneau de vin importé directement d’un Royaume situé au-delà de la péninsule du Sinaï[10], et il l’avait chargé de fruits, de vêtements, d’ustensiles de poterie et même de la commande spéciale de la guerrière.   

 

« Avez-vous troqué tout ce que j’ai demandé ? » lança la Vengeresse encore contrariée. « Presque, j’ai envoyé Ankhty récupérer ton glaive », répondit le jeune pêcheur. « Dans ce cas, tout le monde à bord ! » ordonna la guerrière. « Mais nous avons encore beaucoup de poissons à vendre », reprirent les hommes. « Gardez-les pour vous et regagnez vos familles à Coptos, le nouveau monarque vous accordera un sauf-conduit » intervint la Régente de son autorité naturelle, qui ne laissa plus de doute sur sa véritable identité.

 

Bien qu’ils s’en doutaient depuis des jours, la réalité soudain dévoilée, les laissa sans voix, mais l’un d’eux finit tout de même par dire : « Nous ne suivrons qu’un seul maître.. : vous, Majesté. » Ses yeux verts, visiblement émus devant la dévotion que lui témoignaient les trois hommes, laissèrent échapper quelques larmes le long de ses joues. « Ne m’appelez pas majesté, car je n’ai point reçu l’onction d’Horus, je suis juste une ancienne Grande Epouse Royale arrachée à sa terre natale. Soyez heureux mes amis et puisse l’Egypte renaître de ses cendres. »  « Nous y veilleront en ton nom… », s’exprima le second, « pour le jour où tu reviendras » termina le troisième.

 

« Bien, il est vraiment temps d’embarquer, je sens que la garde du port est en train de s’agiter, et même si je ne recule jamais devant une bonne bagarre, celle-ci serait sans aucun doute de trop » clôtura la guerrière leurs adieux, leur arrachant bien malgré elle un dernier fou-rire.

 

« Personne ne nous croirait si on leur disait combien il est plaisant de voyager en compagnie de la Destructrice du monde. » « Non, personne ! » sourirent-ils une dernière fois, alors que le navire de pêche regagna le large.


[1] Ici le poisson-crocodile, espèce vivant en eaux salé et plus petit que celle vivant dans les eaux du Nil, mais tout aussi meurtrière.

[2] Appelé aussi pourpre ancien ou pourpre de Tyr, couleur rouge et non violacé comme celui du Moyen-âge.

[3] Poisson-électrique pouvant atteindre 120cm et 20kg

[4] Signifie littéralement « l’abeille qui chante ou siffle (au son de la flûte) »

[5] Les égyptologues le considèrent comme étant le premier pharaon.

[6] Le système monétaire n’arrivera en Egypte qu’au contact des grecs. Avant, tout ce faisait par troc, avec, comme étalon, fixé par le pharaon en personne, la botte de blé.

[7] Selon la légende de Manéthon, 70 souverains se seraient succédés en 70 jours.

[8] L’aimé d’Horus

[9] La Basse- et la Haute-Egypte

[10] En 3000 av. J.-C. les égyptiens connaissaient déjà le vin fabriqué en Palestine actuelle.

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Commentaires
C
merci pour cette histoire!!!<br /> A quand la suite pleaaaasseeee!!!!????<br /> j'aime comment cela est écrit!!! j'adore La mythologie égyptienne donc... MERCI!!!!
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