Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Guerrière et Amazone
Publicité
Guerrière et Amazone
  • Vous trouverez ici des Fans Fictions francophones et des traductions tournant autour de la série Xena la Guerrière. Consultez la rubrique "Marche à suivre" sur la gauche pour mieux utiliser le site :O) Bonne lecture !!
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Guerrière et Amazone
Derniers commentaires
22 juin 2013

Indiscrétions, saison 3, épisode cinq

 

INDISCRETIONS

La Troisième saison

Créée par Fanatic et TNovan

Traduction : Fryda

 

Episode Cinq : Mer houleuse

Je me réveille tôt. En général je me lève vers cette heure-là pour aller promener Kam. Bien sûr, Kam est à quelques centaines de miles nautiques mais je suis quand même debout. J’embrasse affectueusement Kelsey et je sors sur le pont. Je peux aussi bien courir puisque je suis debout.

Je pars sur un petit trot pour m’échauffer lentement les muscles. C’est sympa le matin sur l’océan. L’air salé pique un peu sur mes lèvres et la brise fraîche caresse ma peau. Nous avons de la chance d’avoir du beau temps pour notre croisière. Jusqu’ici l’été à New York a été nul. Cette croisière le rattrape bien.

Tandis que j’aborde le tournant, je reconnais la silhouette de mon frère qui fait son jogging devant moi. J’accélère et je viens près de lui. « Bonjour, Luc. »

Il me jette un coup d’œil et essuie la sueur sur son front. « Salut, Harper. »

« Tu te souviens quand on était gosses ? Et que tu ne m’as jamais battue à la course à pied ? »Je le taquine. Je me sens bien ce matin.

Il ricane. « Je pense que tu as une mémoire sélective, Harper Lee. »

« Le dernier arrivé au buffet du petit déjeuner paye son coup. » Sur ces mots, je décolle.

Nous courons ensemble le long du pont, en sautant par-dessus les chaises longues et en évitant les promeneurs occasionnels sur notre chemin. En atteignant un escalier, nous nous regardons et glissons sur les rampes.

Si Kelsey me voyait là, elle me tuerait. Je ne porte même pas mon attelle. Je ferais mieux de ne pas glisser et me blesser là maintenant. Mon inquiétude pour mon bras me fait perdre de la distance sur Luc. Ça ne peut pas arriver. Je sprinte et je le rattrape et ensemble nous courons vers le bar du petit déjeuner.

Coincés.

Hmpff. Nous nous regardons et éclatons de rire. Je pense que nous sommes secrètement soulagés de ne pas informer l’une ou nos deux épouses que nous nous sommes blessés en ayant été stupides.

La stupidité déclenche l’appétit en fait. « Tu veux manger quelque chose ? » Je demande.

« J’en ai besoin après ça. » Nous passons le buffet en revue et empilons des œufs, du bacon, des pommes de terre, des fruits, des toasts et du jus de fruits. On pourrait penser qu’on n’a rien mangé depuis une semaine en regardant nos assiettes.

« Est-ce que tout va bien entre toi et Kels ? » Demande Luc de manière plutôt inattendue tandis que nous nous installons pour manger.

Ma fourchette s’arrête à mi-chemin. « De quoi tu parles ? » On n’a pas l’air d’avoir des problèmes, non ?

Il hausse les épaules. « Vous êtes sur cette croisière… »

Je l’interromps. « C’est un travail, Luc. »

« Je sais, mais est-ce que c’est un travail pour une certaine raison ? » Il prend nerveusement une gorgée de jus. « Vous n’agissez pas normalement, tu sais ? »

« Comment ça ? » Il m’intrigue.

« Vous semblez distantes, formelles. » Il met un peu plus de beurre sur son toast. « Crois-moi, je sais ce que c’est que d’être distant et formel. »

Ah, là j’ai compris. « Lucien, nous sommes un couple homosexuel. Notre famille est remarquablement ouverte d’esprit sur ces choses-là, mais la majorité de la population ne l’est pas. Crois-moi, c’est extrêmement difficile pour moi de ne pas lui prendre la main pendant ces discours ou de me pencher pour l’embrasser, ou de mettre mon oreille sur son ventre pour écouter mes enfants. Quand Connery m’a posé la question pour mon alliance, j’ai dû éluder le sujet. Et l’écouter dire combien le mari de Kels doit être excité pour les jumeaux. Tu me connais, Luc, j’ai envie de me rengorger et de dire ‘c’est nous qui avons fait ça. Ce sont mes bébés et oui, je suis excitée. Merci de poser la question’. Mais je ne peux pas le faire. »

« Pourquoi ne pas lui dire simplement ? »

Je pose ma fourchette. « Luc, ça ne marche pas comme ça. Tout d’abord, nous avons une clause morale. Nous pouvons faire ce que nous voulons en privé, mais en public nous ne sommes que des collègues. Ensuite, des gens comme nous se font botter les fesses ou pire, se font tuer. Tu penses que je pourrais vraiment mettre Kels et nos enfants en danger ? »

« Je ne voudrais pas qu’il arrive quelque chose à Kels, Harper. C’est la meilleure chose qui te soit arrivée. »

Je me détends, à court d’adrénaline. « Pour ça oui, Luc. Un peu comme Rachel pour toi. »

Il étudie ses œufs, les faisant tourner sur son assiette. « Elle pense que je ne l’aime plus. Elle dit que tout ce truc sur les simples colocataires, ça s’applique à nous. Nous avons parlé des heures hier soir et nous n’avons même pas réussi à faire avancer les choses. »

« Au moins vous vous reparlez, Luc. C’est un début. »

« Comment je peux dépasser sa colère ? Elle est tellement furieuse contre moi. »

Je lève mon bras droit. « Tu as remarqué qu’il manque quelque chose là ? » Il répond par l’affirmative et je continue. « Je l’ai coupé hier dans la salle de bains. » Lucien éclate de rire à l’absurdité de la situation et je ne peux pas m’empêcher de me joindre à lui.  Dieu seul sait ce qui m’est passé par la tête hier. Ça doit être la chaleur qui m’a grillé le cerveau. « Oui, et bien, Kels était tout sauf amusée. Je pensais que j’allais devoir dormir dans la pauvre cabine qu’on m’avait assignée plutôt que dans sa suite royale. Tous les couples se disputent, Luc. Tous les couples se mettent en colère. La clé c’est d’en parler. Et un énorme profil bas. »

« Oui, c’est ce que je pense. »

« Il est temps que tu admettes avoir eu tort, Lucien. Sois un homme et ravale ta fierté. Arrête de faire en sorte que ta femme prenne le blâme pour tout. » Il commence à protester mais s’arrête aussi rapidement. « Et va lui faire l’amour avec passion et ferveur.  Comme la première fois. » Je lui pousse l’épaule. « La première fois, ça a été bon, pas vrai ? »

« J’te veux », grogne-t-il.

« Nan, c’est pas possible, mais je vais aller suivre mon propre conseil. »

« Est-ce que la première fois a été bonne pour toi ? »

Je m’arrête et je repense à Thanksgiving. C’était la première fois que j’ai vraiment fait l’amour à quelqu’un, plutôt que de baiser simplement. « Luc, ça a été comme de rentrer à la maison pour la première fois. »

 

* * *

 

Kels est réveillée quand je reviens à la cabine. C’est bien. J’entre, je ferme la porte tout en prenant soin d’accrocher une pancarte ‘ne pas déranger’ sur la poignée extérieure et je souris à ma nana. « Bonjour. »

Elle me regarde depuis le canapé et par-dessus le troisième livre qu’elle a dévoré depuis que nous sommes à bord, tout en reconnaissant la note aigüe dans ma voix. « Bonjour. Tu as bien couru ? »

Je retire mon haut couvert de sueur et je le jette quelque part dans le séjour. Je ne remarque pas spécialement où il atterrit. Il peut passer par-dessus bord pour ce que j’en pense à l’instant. « Bien sûr. »

« Tu as chaud, mon cœur ? »

« On peut dire ça. » Je descends mon short de course de mes hanches et je lui donne un coup de pied qui le balance, avec mes chaussures, dans la direction opposée à mon tee-shirt.

Ma nana se met à rire. « Je viens juste de prendre une douche sympa. Je pense que tu pourrais bien apprécier d’en prendre une, Putois. »

Je m’arrête, je lève le bras et je renifle. « Nan. C’est bon comme ça. » Dans tous les sens du terme, bébé. « En plus, tu peux reprendre une douche. »

« C’est toujours bon pour toi », me taquine-t-elle, le menton posé sur la paume de sa main. « Alors, c’est bon pour où là maintenant ? Ici ? La chambre à coucher ? Sur le balcon ? Peut-être que tu veux essayer un canot de sauvetage ? »

Oh, elle est drôle, c’est sûr. Je reprends mes avances et je me laisse tomber à genoux  en me plaçant entre ses jambes. « Oh chér, tu me la joues vicieuse ? Un canot de sauvetage ? Le balcon ? Ouh la la. Tu veux effrayer les mouettes ? » Je me penche et je l’embrasse pour qu’elle sache exactement quelles sont mes intentions ce matin. Mes mains voyagent le long de ses bras. L’une va jusqu’à sa nuque, l’autre continue jusqu’à sa joue ; je la caresse paresseusement du dos de ma main. J’entends un gémissement et un cri réjoui avant de me rendre compte que c’est moi.

Nous nous séparons pour respirer et les yeux de Kels brillent. « Tu penses être aussi bonne. »

« Penser ? Chérie, je le sais. » Je capture à nouveau ses lèvres et je fouille dans sa bouche, jouant avec elle. Eh bé, elle sait embrasser. Nos langues se rencontrent, se pourchassent, se goûtent, s’explorent, marquent un territoire déjà conquis. Elle a si bon goût.

Je me recule légèrement et je prends une inspiration profonde, inspirant son parfum. C’est un mélange entêtant de Kels, son parfum préféré, Arpege, et la brume de l’océan qui passe par le hublot ouvert. J’enfonce mon nez derrière son oreille et je l’entoure de mes bras, soulevant doucement le bord de sa chemise pour être en contact avec sa peau chaude. Nos jumeaux me pressent l’estomac tandis que je me penche contre elle. Je sens l’un d’eux qui me donne un coup de pied comme pour dire ‘bas les pattes’.

J’ignore l’enfant.

Je roule la chemise de Kels vers le haut, chemise qui est en fait un de mes maillots de football, pour exposer plus de peau à mes caresses, puis je défais son soutien-gorge. Elle fait rouler ses épaules pour relâcher la chemise autour d’elle et me donner plus d’accès. J’aime ça quand elle se livre à mes attentions. Elle me fait confiance. C’est son second grand cadeau après son amour.

Je retire ses vêtements avec révérence, couvrant la peau maintenant exposée de petits baisers. Je trace la rondeur de ses seins et de son ventre. Je ne comprends pas pourquoi certains ne trouvent pas les femmes enceintes attirantes. Je fais de mon mieux pour m’empêcher de poser les mains sur Kels. Elle est lumineuse, irradiant de cette essence que je ne peux définir mais qui m’attire vers elle comme un papillon de nuit à une flamme.

Mes lèvres couvrent son sein gauche. Je fais tourner ma langue avec langueur autour de son téton, savourant le goût de sa peau. Je suçote doucement, goûtant le fluide piquant que son corps produit déjà. Un petit gémissement qui est plus de douleur que de plaisir me rappelle rapidement que je dois être tendre avec elle. Ces derniers temps, elle m’a dit que ses seins étaient sensibles, engorgés du liquide qui va nourrir nos enfants dans les premiers mois de leur vie. Le Seigneur m’est témoin qu’ils nourrissent ma vie à moi.

Je me penche pour un autre baiser paresseux. Kels passe les doigts dans mes cheveux, grattant doucement mon cuir chevelu. Elle sait que cela augmente ma libido dix fois plus. Je gémis à nouveau. Autant pour ma capacité de séduction. « Je t’aime tellement », je grogne. J’aide Kels à se débarrasser de son short et de ses sous-vêtements. Elle a été tellement gênée ces derniers temps. Et il n’y a absolument aucune raison. « Tu me coupes le souffle », murmuré-je en me penchant sur mes talons pour passer son corps en revue. Elle commence à protester mais je mets mon doigt sur ses lèvres. « Reste ici. »

Je me lève en forçant mes jambes à être stables et je vais dans notre chambre à coucher. Je me débarrasse vite de mon soutien-gorge et de mon slip tout en cherchant notre jouet préféré. Je le trouve et je l’adapte à mon corps avec un grognement.

Je retrouve Kels à sa place sur le lit comme je lui ai demandé. Elle me regarde et une légère rougeur colore ses joues. C’est vraiment drôle. Ma nana a sûrement joué avec ce genre de choses auparavant et nous nous amusons avec mais elle a toujours cet air intimidé quand nous le faisons.

Cela me rend encore plus consciente de la nécessité d’être douce avec elle maintenant. Je la rejoins et je m’appuie sur l’accoudoir du canapé. Je l’aide à se rehausser le long de mon corps tandis que je m’étire sous elle. Elle s’assied sur mon estomac tout d’abord, sa chaleur pressée contre ma peau. Je m’arque et je l’embrasse à nouveau.

Kels se stabilise en posant les mains sur mes épaules tandis qu’elle se repositionne. Nous grognons toutes les deux au changement de sensations. Je ferme les yeux et je savoure un long moment. J’adore la prendre de cette façon, lui donner ce plaisir. Avant sa grossesse, j’adorais ça parce que ça me permettait d’être avec elle, de la regarder tandis que je lui faisais l’amour, la tenant serrée tandis qu’elle s’abandonne. Maintenant j’adore la connexion que nous avons malgré son ventre proéminent. Mes mains vont sur ses hanches. Sa peau est incoyablement douce. « Tu vas bien, ma chérie ? » Dis-je pantelante.

« Je vais bien », dit-elle dans un souffle. Sur cet aveu, elle commence à bouger lentement contre moi.

Je l’aide à trouver un rythme soutenu mais sans vouloir qu’elle jouisse trop tôt. D’une main, je la caresse du mollet à la cuisse, de la taille à la nuque, m’arrêtant à chaque point intéressant entre les deux extrêmes. « Tu es la plus belle femme que j’ai jamais vue », je la rassure. Je me déroule vers le haut et je dépose un baiser sur son ventre. « Tu deviens encore plus belle avec les jours qui passent. »

Je dois avoir dit quelque chose de juste parce que Kels prend ma main et l’amène à sa bouche. Elle la couvre de doux baisers. Quand elle se met à mordiller l’intérieur de mon poignet, je commence à bouger les hanches un peu plus vite. Kels me sourit. Elle l’avait prévu.

On peut être deux à ce petit jeu, ma chérie. Je bouge avec précautions et je m’adosse à nouveau sur le canapé, pour avoir un meilleur soutien de mon dos. Kels grogne au changement de position. Un bon grognement. « Tu aimes ça, pas vrai ? » Oh que oui, j’aime ça. La pression de son poids et la vitesse de ses mouvements sont tout simplement… les bons.

Je reçois un mouvement de tête enthousiaste en retour. Les mots sont superflus de toutes les façons. Je suis maintenant dans une meilleure position pour apprécier les divers attributs que j’aime chez ma femme. Je laisse mes mains sur ses hanches, je la guide, je l’aide, je fourre mon nez entre ses seins. Je colle des baisers entre eux, sous eux, autour d’eux, mais j’évite ses tétons avec soin. Je les regarde se serrer et pointer, roses contre la peau couleur crème.

Elle enfonce les doigts dans mes épaules, me faisant savoir que je dois rester où je suis. Je l’embrasse sous la mâchoire et j’augmente légèrement le rythme, amenant mes genoux derrière elle pour faire levier. J’adore regarder le mouvement de ses seins quand son corps se tord de plaisir.

C’est moi qui lui fais ça. C’est moi qui lui apporte ça.

A la poussée suivante, je la tiens tout contre moi. Je veux qu’elle sente notre connexion au plus profond. Je fais tourner mes hanches et je regarde sa réaction.

Je ne vois pas grand-chose parce que Kels m’englobe totalement dans ses bras, se pressant complètement contre moi. Nos corps sont mêlés, l’humidité de notre effort rend notre peau collante. J’écoute sa respiration rauque, sachant qu’elle est tout près de la jouissance. Elle me mord le lobe de l’oreille et grogne.

Une autre poussée, un autre mouvement tournant.

D’accord, je viens juste de sentir un ou les deux gamins qui bougeaient contre moi. Arrachée un instant du moment présent, je retourne mon attention sur ma femme. C’est son plaisir qui importe pour l’instant. Je veux seulement qu’elle se sente complètement aimée de moi.

Kels relâche une longue inspiration. Elle commence à bouger plus vite. Je suis son mouvement et je glisse une main entre nos corps.

« Kels ? » Je murmure en m’arrêtant pour la taquiner.

Elle me mord le cou, n’appréciant pas beaucoup l’humour à cet instant. Oooh, j’ai été marquée. Ça sera drôle de l’expliquer au diner.

« Je t’aime », je dis finalement tout en la faisant jouir.

Elle crie dans son orgasme, son corps secoué. Elle écarte sa bouche de mon cou. Son dos s’arque et ses seins remuent. Elle n’est jamais plus belle pour moi que qu’au moment de sa reddition. Je regarde les diverses expressions qui se succèdent sur ses traits.

Elle finit par venir se reposer sur moi. Sa respiration est erratique. Je caresse son dos couvert de sueur pour la calmer. Je murmure des mots d’amour et de dévotion, lui promettant tout ce que je suis.

Quelques longs instants plus tard, Kels m’embrasse avec abandon. « Je t’aime aussi, Etalon. »

Je ne peux pas m’empêcher de rire. Si seulement Brian pouvait me voir à l’instant.

 

* * *

 

Je ne fais que sourire tandis qu’Harper et moi nous frayons un chemin vers la table du dîner, à la rencontre de Rachel et Luc. Harper est très fière d’elle à cet instant et ça apparait clairement dans sa façon de se tenir dans la pièce.

Je m’arrête un instant pour laisser le temps à Brennan et Collin de manœuvrer pour savoir où ils veulent être ce soir. J’ai découvert ces derniers jours que de temps en temps, je dois m’arrêter pour qu’ils se placent au mieux. Si je le fais, mon dos et mes hanches tendent à moins me faire mal. Je m’appuie contre une chaise vide et je prends une profonde inspiration en attendant qu’ils s’installent.

« Tout va bien, mon cœur ? »

« Je vais bien. Tes enfants sont encore une fois agités. » J’inspire une nouvelle fois et je continue vers la table où Rachel et Luc nous attendent.

« Mes enfants ? Je vois comment ça va être pour les dix-huit prochaines années. » Je l’entends marmonner et elle me rejoint à la table. Je ne peux pas m’empêcher de rire un peu en même temps que nous saluons notre famille.

« Qu’est-ce qui est drôle ? » Demande Rachel quand nous nous asseyons.

« Tabloïde ici présente, semble penser que nous n’allons être parents que pour les dix-huit années à venir. »

« Mama et Papa ne seraient pas d’accord avec toi, Harper Lee », lui dit Luc avant de prendre une gorgée d’eau.

Elle nous dévisage à tour de rôle, Luc et moi. « Je suis désolée, Kels, on dirait bien que je vais avoir une vie entière de tromperie aussi. »

« Ce n’est pas de la tromperie, mon cœur. C’est un simple fait. Quand ils sont gentils, ils sont à moi. Quand ils sont méchants, ils sont à toi. » Je la taquine tout en lui tapotant doucement la main pour qu’elle se sente mieux. « C’est la première leçon de Mama dans la cuisine. Pas vrai, Rach ? »

J’éclate de rire quand elle se met les doigts dans les oreilles et grogne. « Je ne suis pas autorisée à entendre ce qui se passe dans la cuisine. »

Luc ne s’en sort pas aussi bien et attrape sa serviette pour éponger l’eau qu’il vient pratiquement de nous recracher sur la table.

Rachel me regarde en secouant la tête. « Tu es une femme très courageuse, Kelsey. »

« Je ne suis pas sure que ce soit vraiment de la bravoure. Je pense, à un certain point, que j’ai peut-être fait l’expérience de la mort de plusieurs cellules nerveuses à cause du manque d’oxygène. » Voyons si elle a entendu ça.

« C’est parce que tu ne peux pas t’empêcher de m’embrasser. » Elle me reluque et fait un clin d’œil.

Oh, pour ça, elle a bien entendu. « C’est peut-être vrai, Tabloïde, mais ça ne change pas les faits… »

« Non, » Rach ricane un peu avant que je puisse finir, « mais il est clair qu’elle a raison. Joli suçon, Harper. »

Bien qu’elle soit bien droite sur sa chaise, elle rougit quand même un peu. « Eh bé, merci. J’ai gagné chaque vaisseau sanguin détruit. Je dirais bien à Kels de te montrer le sien, mais… »

Tout en donnant un coup de coude à Harper pour la faire taire, je remarque que Luc bouge légèrement dans sa chaise et rougit aussi. Il faut que je regarde mon beau-frère de plus près. « Eh bé, Rach, des marques de dents. Jolie technique. » Je ris en montrant Luc. Le regard d’Harper tombe immédiatement sur son frère.

Elle éclate de rire tandis qu’il met le visage dans ses mains et grogne. « Nous avons épousé des femmes perverses, Harper. »

« Dieu soit loué », approuve-t-elle en pressant ma main. « Alors je devine que vous trouvez cette croisière, » elle s’éclaircit un peu la voix en souriant à Rachel, « bénéfique ? »

C’est maintenant le tour de Rachel de rougir un peu. « Oui, c’est, ah, » elle lance un regard très doux à son mari, « bien. »

« Pourquoi est-ce qu’on parle de ça ? » Luc secoue la tête. Je pense qu’il essaie de débarrasser son visage de la rougeur, un peu comme un enfant qui efface un Télécran.

« Parce que le serveur n’est pas encore venu prendre notre commande. Et parce que c’est drôle, Luc », propose Harper.

« Je peux arranger ça », dit Luc en levant le bras pour attirer l’attention du serveur. « Et maintenant arrête de t’amuser autant, Harper Lee. »

« C’est impossible. Je suis avec ma nana et ma famille. »

Nous prenons un instant pour passer nos commandes au serveur. Je suis curieuse de savoir comment se passe le groupe de conseil. « Alors, est-ce que vous trouvez que ces sessions apportent de l’aide ? » Je ne peux pas m’en empêcher. C’est le reporter en moi.

« Oui. » Rachel prend la main de Luc. « Ça a été génial. Nous parlons et… »

« Vous faites plus que parler ces temps-ci. » Harper rit. Cela lui vaut un coup de pied sous la table de notre part à tous trois. « Peut-être que je vais rester ici et me tenir tranquille », grogne-t-elle en se massant la jambe.

« Il y a peu de chance », commente Luc.

Elle fait un geste pour se zipper les lèvres et elle pose sa joue sur son poing, avec un air vraiment puni. Et absolumment adorable.

« Je pense que la session d’hier soir sur l’intimité était bonne. » Rach rougit encore une fois.

« Ah, voilà une session dont je pourrais bien me passer », dit Harper, la fermeture-éclair pas vraiment efficace. « Je n’ai pas besoin de leçons. J’ai été intime avec un tas de gens. » Harper rit en mettant de la crème dans son café.

Je ne sais pas pourquoi mais ce commentaire-là me coupe en deux comme un couteau très émoussé, touchant chaque nerf qu’il peut trouver. Mon estomac fait des nœuds et j’ai l’impression que je vais être malade. « Excusez-moi. » C’est tout ce que je peux dire avant de bondir.

* * *

 

Oh merde.

Je regarde Kels qui part en courant et je jure que mon cœur explose dans ma poitrine. Qu’est-ce que j’ai dit exactement ? Et pourquoi bon sang j’ai dit ça ? Très drôle, Harper. Avec toi on rit à chaque minute.

Je regarde Luc et Rachel qui observent dans un silence choqué.

« Excusez-moi », je murmure en posant ma serviette sur la nappe.

Je peux à peine m’empêcher de courir à travers la salle du diner pour la trouver. Je sors du hall et j’essaie de voir où mon aimée a pu aller. Je doute franchement qu’elle soit repartie à notre suite. Et certainement pas au casino ou à la boite disco ou au bar. Je parie sur le pont.

Le soleil finit de se coucher sur l’Atlantique. Ce serait une scène magnifique si ma femme n’était pas en train d’essayer de se fondre dans un coin. Et elle pleure. Je n’ai aucune idée si elle veut me voir ou que je la touche mais je ne peux pas supporter le fait qu’elle souffre. C’est même pire de savoir que c’est par ma faute.

« Je suis tellement désolée, mon cœur », je murmure en me rapprochant, mais sans envahir complètement son espace personnel. « Je suis une vraie et totale connasse. »

Ma femme ne répond pas. Elle essuie les larmes sur ses joues en essayant de reprendre le contrôle.

« Si je pouvais revenir en arrière et effacer ce que j’ai dit, je le ferais », je continue. C’est vrai. Seigneur, ce que je voudrais que les dix dernières minutes disparaissent. « Mais, chér, tu es l’amour de ma vie. Pour être honnête, je n’ai jamais été intime avec personne d’autre que toi. Personne ne m’a jamais connue cœur et âme. » Je suis au bord des larmes moi aussi. « Je suis tellement désolée, ma chérie. »

Kels s’éclaircit la gorge, tentant de retrouver sa voix. « C’est bon. C’est juste que je… oh je ne sais pas… je veux dire que je savais que… je ne sais pas pourquoi ça me taraude autant. Je ne voulais pas surréagir. »

Je tends lentement la main pour prendre celle de Kels, lui donnant tout le temps nécessaire de me faire savoir si c’est une bonne idée. Je suis soulagée quand elle me laisse emmêler nos doigts. Le battement de mon cœur reprend à ce contact. « C’est entièrement de ma faute. Mais est-ce qu’autre chose te taraude ? Habituellement tu sembles mieux tolérer ma stupidité. »

« Tu veux dire outre le fait que je sois enceinte de six mois, de la corpulence de ce navire et que mes émotions pourraient faire honte à toutes les montagnes russes du monde ? Nan. Rien du tout. »

J’essuie doucement le reste des larmes sur les joues de Kels. « Je pense que je te dois une nouvelle excuse. »

« Non, pas du tout. C’est moi qui suis émotive et déraisonnable… »

« Chhut », je pose un doigt sur ses lèvres. « Si tu as des doutes sur ta beauté stupéfiante, comme tu es belle à mes yeux, comment tu rends la grossesse totalement magnifique, alors je te dois une excuse. Parce que, visiblement, je ne te l’ai pas assez dit. » Je me rapproche et je la prends dans mes bras. « Tu n’es pas grosse, tu portes deux vies en toi. Si tu étais minuscule comme d’habitude, je serais inquiète parce que nos enfants ont besoin que tu t’en occupes, là maintenant. Je suis si fière de toi, Kels. »

« Harper. Je sais tout ça. Du fond de mon cœur, je le sais. Et je sais que c’est pour ça que c’est si déraisonnable. Je me demande simplement si parfois, de temps en temps, tu ne veux pas de quelqu’un qui est… et bien, ce à quoi tu es habituée. Il y a beaucoup de femmes attirantes, Harper. Des femmes qui ne rient pas à un moment pour t’entrainer celui d’après loin du dîner avec ta famille à cause d’un commentaire idiot. »

« On peut encore manger avec notre famille », je la corrige en mettant l’emphase sur ‘notre’. « Et je ne veux personne d’autre que toi. Je t’aime, tes émotions et tout et tout. Je t’ai fait des promesses, Kels. Je compte bien les tenir toutes. »

« Ah, pour être honnête, Tabloïde, je ne pense pas être en condition pour retourner dîner. Pourquoi est-ce que tu ne retournes pas dîner avec Luc et Rach, et on se retrouve dans la cabine plus tard ? »

Mon cœur s’arrête à nouveau de battre. Apparemment je ne suis pas pardonnée. Je suis renvoyée. Je laisse mes bras tomber mollement le long de mon corps. « D’accord. Si c’est ce que tu veux. » Je jure que je pourrais me mettre à pleurer.

« Je t’aime, Tabloïde. Va savourer ton dîner. Tout va bien entre nous. Je suis juste trop embarrassée pour affronter Rach et Luc pour l’instant. D’accord ? »

Non, je ne suis pas d’accord. « Je veux être avec toi. » Je sais que j’ai l’air d’avoir quatre ans mais je m’en fiche.

« Harper, je ne veux vraiment pas les affronter pour l’instant. Et ce serait peu respectueux de leur faire faux-bond comme ça. Tout va bien, vraiment. »

Je suis renvoyée. Ravale ça, Harper. Elle a besoin d’espace. Tu peux aller t’asseoir avec Luc et Rachel pour un moment. Mais bon sang, tu ne seras pas capable d’avaler une bouchée. « A tout à l’heure alors. » Je me retourne et m’éloigne, en forçant mes jambes à avancer.

 

* * *

 

Un coup à la porte. Je traverse la pièce depuis le balcon et j’ouvre la porte. Ce n’est pas le service de chambre. C’est un mètre quatre-vingt cinq de productrice cachée derrière une douzaine de roses. Je ris et je l’attire dans la pièce. « Entre donc. »

Elle me tend les roses. « Je suis vraiment désolée. Est-ce que je dois aller sur la passerelle ce soir ? »

« Nan. Les roses te valent le canapé au moins », je la taquine et je prends les fleurs pour trouver un endroit où les mettre. « Tu as dîné ? »

Elle évite mon regard et marmonne quelque chose que je ne peux pas entendre. Avant que je puisse reposer ma question, on entend un autre coup à la porte. « Harper ? Tu peux aller voir ? C’est sûrement le service de chambre avec notre dîner. J’espère que tu es d’humeur pour un steak. » Je sais qu’elle n’a pas mangé. Je ne sais pas pourquoi elle doit être aussi entêtée.

Elle me fait un sourire et s’occupe de la porte pendant que je finis avec les roses. Elles sont magnifiques. Le temps que je termine, le serveur a fini d’installer notre table dans la salle à manger et Harper lui montre la porte. Je m’asseois à la table et j’attends qu’Harper me rejoigne.

Une fois qu’elle est installée en face de moi, je lui laisse un moment avant de lui demander, « Est-ce que je vais avoir droit au silence toute la soirée ? »

« Non. Je ne sais pas quoi dire, Kels, c’est tout. »

« Harper, je te l’ai dit. Tout va bien entre nous. J’ai surréagi. Je sais que tu as eu beaucoup d’amantes et je l’ai accepté quand je suis tombée amoureuse et que je t’ai épousée. Je suis tellement perturbée que ce commentaire en particulier m’a fait mal ce soir. A n’importe quel autre moment, je t’aurais simplement tapé sur la nuque pour avoir été imbécile et ça aurait été fini. »

Elle se verse une tasse de café et parle calmement. « Ce n’est pas ça. »

« C’est quoi alors ? »

« Rien. » Elle a l’air si triste et elle joue avec sa serviette.

« Qu’est-ce qui est arrivé à ces grandes lignes de communication ? Qu’est-ce qui est arrivé au fait de pouvoir parler de tout ? » Je demande en versant un verre de jus.

Elle rit doucement. « Normalement, je ne me sens pas blessée, je présume. »

C’est intéressant. Elle fait un commentaire insensible, je suis perturbée et elle se sent blessée. Très intéressant. Je dois avoir raté quelque chose. « Je ne voulais pas te blesser, Harper. J’étais perturbée et en colère contre moi-même. Je ne pouvais pas affronter Rach et Luc après ça. J’avais besoin de temps pour me calmer. »

« Je sais. Mais je voulais rester avec toi. »

« Luc et Rach réussissent enfin à s’entendre. Je me sentais complètement idiote à ruiner leur soirée. J’avais espéré que tu retournerais la fêter avec eux. »

« C’est ce que j’ai fait. » Elle fait une pause. « En quelque sorte. En plus, leur soirée n’était pas ruinée. »

« J’ai promis de m’excuser auprès d’eux demain. Je suis désolée d’avoir réagi comme je l’ai fait. »

« Oublions tout ça, d’accord ? » Elle met sa serviette sur ses cuisses et m’offre un sourire. « Alors, tu penses que ça va faire un bon sujet ? »

« Je pense que ça va être un sujet très intéressant. J’ai parlé à plusieurs couples qui ont donné leur accord pour faire des interviews quand tout sera terminé et ils disent qu’ils se sentent rajeunis après être venus ici. Ce groupe semble vraiment donner ce qu’il promettait, mais pour le prix, ils peuvent. »

« C’est vrai. »

Je lui lance un long regard. Quelque chose n’est pas encore à sa place. Il y a encore trop de steak sur cette assiette. « Crache. »

Elle s’éclaircit un peu la voix. « Quoi ? »

« Qu’est-ce qui ne va pas ? C’est plus que ce qui s’est passé ce soir. »

« C’est… J’ai ressenti que tu ne voulais plus de moi. Que j’étais renvoyée. »

J’oublie qu’elle n’a jamais été dans une vraie relation auparavant. Je lui prends la main. « Jamais. Tu es à moi, Etalon, et je te garde pour toujours. Je me sentais mal et j’avais besoin d’un peu d’espace. C’était un de ces moments-là. » Je lui presse fort la main. « Harper, j’ai eu quatre autres personnes dans ma vie et je ne me suis jamais inquiétée ni ne les ai aimées comme je t’aime toi. J’ai l’intention d’élever des enfants avec toi, de gâter des petits-enfants avec toi et de vieillir avec toi. »

« Bien. Moi aussi. Je peux te poser une question ? »

Je décide de laisser les choses venir. Je vois qu’elle a besoin d’une conversation sérieuse. « Tu sais bien que tu peux. »

« Je sais que je ne suis pas en position de demander ça étant donnés mes antécédents, mais… qui a été ta quatrième amante ? Je veux dire que je connais Beth et Susan, et CJ. Mais… »

Je souris de la voir intimidée par ce sujet. « En fait pas ma quatrième, mais mon premier, Bennet McKinley. Lui et moi sortions pendant ma première année au collège. Ma mère pensait que nous étions faits pour nous marier. Et Bennett aussi, j’en ai bien peur. »

« Bennett ? » Je la vois concilier cette information dans son esprit tandis qu’elle prononce son nom du bout des lèvres. « Il t’a fait du mal ? »

« Du mal ? Non. J’ai vite découvert que Bennett, ou n’importe quel homme, n’allait jamais pouvoir me donner ce dont j’avais besoin. En réalité, je l’ai probablement heurté bien plus qu’il ne l’avait admis. »

« Bien. Et tu as découvert quand que tu étais gay ? »

« Bennett et moi étions ensemble », je sirote mon jus et je manque de m’étouffer dessus quand je repense à mes années de collège. « Il m’a présenté à Beth, maintenant que j’y pense. C’est avec elle que je me suis rendue compte que j’étais gay. » Je souris un peu.

« Ah oui ? Raconte-moi ça. » Elle sourit et coupe son steak.

Ça c’est la Harper que je connais et que j’aime. « Qu’est-ce que tu veux savoir au juste, Tabloïde, le premier endroit où j’ai fait l’amour à une femme ? » Je la taquine et je lui tends un peu des champignons qui sont sur son assiette. Bon sang, je deviens de plus en plus mère.

Elle s’étouffe un peu en avalant. « Ça dépend. Est-ce que c’était accrochée à la barre d’une douche ou un truc marrant ? »

« Un peu. C’était génial jusqu’à ce que le laboratoire de chimie explose. »

Elle me regarde un moment et se met à rire. « Tu blagues. »

« Non, je suis entièrement sérieuse. Nous avons détruit un laboratoire de chimie. Quelque chose comme deux fioles qui se sont cognées et quand leur contenu est venu en contact… »

« Tu blagues. Tu me prends pour une dingue. » Ma chérie ne me croit pas. Mais je jure que c’est la vérité. Elle change de sujet. « Et comment Bennett a-t-il pris la nouvelle ? Tu lui as dit pourquoi ? Ou tu t’es contentée de casser ? »

Je ne peux pas m’empêcher de rire à ce refus de me croire. « Harper, je te jure que je te dis la vérité. Tu vois cette petite cicatrice que j’ai sur la fesse ? Elle vient d’un morceau de verre de deux centimètres qu’il a fallu retirer aux urgences. Quant à Ben, et bien, j’ai cassé avec lui. Vu qu’il étudiait le droit et que lui et Beth avaient des cours ensemble, il ne lui a pas fallu longtemps pour comprendre. »

« C’est de là que vient la cicatrice ? Rappelle-moi de l’embrasser et de lui faire du bien ce soir. »

« C’est de là que ça vient. Et tu peux commencer par là. » Je lui fais un clin d’œil.

 

* * *

 

Je revois Lucien pour le petit déjeuner et je le bats une nouvelle fois à la course sur le pont. Cette fois nous ne glissons pas sur la rampe. Je me sens très adulte. Bien que je souhaiterais me sentir moins adulte. Cette croisière, sur laquelle je pensais que nous allions observer tous les autres en train d’œuvrer sur leur mariage, a fini par devenir un atelier pour notre mariage à Kels et moi.

Qu’est-ce que j’ai appris jusqu’ici ? Tout d’abord qu’il faut que je dise tous les jours à ma compagne qu’elle est magnifique. Je peux prévenir toute insécurité sur ce sujet-là. Ensuite, qu’il faut que je fasse fichtrement attention à ce que je dis quand je suis près d’une certaine femme enceinte, remuée par ses hormones et dont il se trouve que je suis amoureuse. Seigneur. Il n’y a rien qui batte le fait d’être une abrutie totalement ignorante, Harper. Enfin, j’ai la réponse à ma question longtemps retenue. Bennet McKinley. Est-ce que ce nom ne pouvait pas être plus BCBG ? Le Quesnoy, peut-être (NdlT : j’improvise J). Ma nana a besoin d’un peu d’ethnicité dans sa vie. Plus de personnes du genre vanillé dans sa vie. Je regarde mon frère. Non, c’est le type cajun enragé pour Kels maintenant.

« Comment ça va ce matin ? » Demande-t-il avec une nonchalance feinte.

« Tout va bien. » J’attends de voir s’il pose une autre question. Je n’aurai pas à attendre longtemps, je parie.

« Est-ce que tout allait bien avec Kelsey ? Je ne l’ai jamais vue aussi perturbée avant. »

J’acquiesce de la tête. Moi non plus. Du moins pas comme ça. Bien sûr, je ne suis pas une totale abrutie normalement. « Je n’ai pas été très sensible, Luc. »

« Ça doit arriver souvent », marmonne-t-il en prenant un morceau d’oeuf.

Hmm. Est-ce qu’on va les sortir pour les mesurer, Luc ? « En fait, non. J’ai été stupide hier soir, je n’ai pas réfléchi. Ça te dit quelque chose, non ? » On peut jouer à deux à ce petit jeu.

Il remue sa fourchette. « Touché .»

« En plus, j’ai simplement supplié Kels de me pardonner jusqu’à ce qu’elle cède. C’est le secret de la résolution de conflits : accepter d’avoir tort. Et souvent. Les roses, ça aide. »

« Tu as déjà remarqué comme Mama semblait toujours avoir des fleurs fraîches dans la maison ? »

Je repense à mon enfance. Notre maison était un véritable magasin de fleuriste. « Tu penses qu’elles venaient de Papa ? Et pas du jardin ? » Ça change complètement ma perspective sur Mama et Papa, c’est foutrement sûr.

« Est-ce que Mama faisait pousser des Oiseaux de Paradis ? » Non. « Ou des tournesols ? » Non. « Ou du lilas ? » Non. C’est bon Luc, tu peux t’arrêter maintenant.

« Je présume que j’ai plus appris de Papa que je ne m’en rendais compte. »

Nous rions ensemble et continuons à manger. Luc tourne son jaune d’œuf avec son toast et prend une grosse bouchée. Entre deux il dit, « mais je pense qu’il n’y a pas assez de fleurs dans le monde pour Rachel et moi. »

Ça me perturbe. « Je pensais que les choses se passaient mieux. Je montre la morsure toujours évidente sur son cou.

« En fait, ça fait partie du problème. »

« Le suçon fait partie du problème ? » Je répète pour être bien claire.

« Le sexe. »

Je ne veux absolumment pas discuter de sexe entre Rachel et Lucien. De l’avoir déjà vécu est fichtrement pas bon. Je ne veux sûrement pas lui donner de tuyaux.

Il doit ressentir mon hésitation alors il continue. « D’avoir des enfants. Rachel veut vraiment des enfants et, et bien, tu sais… »

« Que tu tires à blanc. Tu ne lui as toujours pas dit ? » Seigneur, ça fait combien de temps qu’on a parlé de ça, Luc ?

« Non. Alors tu vois pourquoi il n’y a pas assez de fleurs dans le monde pour nous ? Je lui dis maintenant et on se fait des séances de conseil conjugal pour le reste de notre vie. »

Je ne sais pas si ce serait si mal pour toi, frérot. « Un mariage qui tient sur un mensonge ne dure pas. « Tu ne lui dis pas, tu es damné. »

L’expression de Luc s’obscurcit tandis qu’il réfléchit à mes paroles. Il repousse son assiette et se cale dans sa chaise. Malgré sa posture détendue, son ton est plutôt agressif. « Depuis quand tu es devenue la Petite Madame Experte en Mariage ? Dans mon souvenir, tu te frayais un chemin dans le pays en baisant. Quelle a été ta relation la plus longue avant Kelsey ? Vingt-quatre heures ? Ou bien ça a duré jusqu’à ce que tu prennes une douche ? »

Ouille.

Mais vrai. « Tu as raison. Avant Kels, je n’y connaissais absolumment rien en relations. En dehors de ce que je voyais à la maison, je ne savais pas ce qu’un mariage décent était ou même ce qu’essayer d’en avoir un voulait dire. Heureusement, Kels semble en savoir plus et je suis ses conseils le plus souvent. Je peux n’avoir qu’une seule relation dans ma manche, Luc, mais je l’ai réussie contre tous et tout. »

« Surtout le mien, hein ? »

Je hausse les épaules. C’est lui qui l’a dit, pas moi. « Je ne veux pas vraiment t’affronter dans cette arène. Je préfère qu’on ait tous les deux épousé les femmes de nos rêves et qu’on soit heureux. Tous les deux, nous avons besoin d’aide pour réussir dans une relation. Je l’admets. Et toi ? »

« Elle va me haïr. »

« Il vaut mieux le savoir maintenant. C’est absolumment plus juste qu’elle sache maintenant plutôt que quand elle abordera la quarantaine et se demandera ce qui ne va pas chez elle, pourquoi elle ne peut pas avoir d’enfants. Je parle de ressentiment, Luc. » Je pense que j’en ai fini avec le petit déjeuner. « Ne gâche pas cette opportunité. On n’a pas tous une seconde chance. »

Je serai toujours reconnaissante d’avoir eu plus que ça.

 

* * *

Au cours d’une de nos escales, je réussis à convaincre Harper de venir faire du shopping avec moi. Bien entendu, ma liste de courses concerne les vêtements de bébé. Tabloïde semble vouloir le faire avec moi, avec une lueur presque diabolique dans les yeux quand nous entrons dans la boutique. Je peux sentir la carte de crédit brûler et faire un trou dans sa poche.

Je prends la petite brassière sur le portant et je la tiens en l’air. « Qu’est-ce que tu en penses, Tabloïde ? »

Elle regarde sur le côté. Ses sourcils bruns dansent un peu tandis qu’elle examine l’objet dans ma main. « Ça hurle ‘mes mamans sont parties en croisière et tout ce que j’ai eu, c’est ce bête tee-shirt’. »

Je ne sais pas pourquoi je trouve ça drôle, mais c’est le cas. Je cherche l’air tout en essayant de contrôler mes rires. « Quelqu’un t’a déjà dit que tu étais une grande dadaise ? »

« Ooh, Kels, je me sens blessée.Tu veux dire que je n’ai même pas droit à ‘dadaise absolue’ ou ‘dadaise royale ‘ ? Et est-ce que dadaise est un terme technique que vous les gens de l’industrie des médias utilisez ? Ou bien quelque chose que les femmes de la SSCC t’enseignent ? »

« C’est quoi la SSCC ? » je continue à rire. On dirait que je n’arrive pas à le maîtriser.

Elle met le doigt sur ses lèvres en me faisant signe de rester silencieuse. Elle regarde autour d’elle rapidement puis, en se penchant vers moi, elle murmure « la Société Secrète de la Conspiration de la Cuisine. » elle regarde à nouveau autour d’elle en me faisant signe de rester tranquille avant de passer derrière le portant.

Si elle ne s’arrête pas, les hommes en blanc vont venir me chercher. Je suis plutôt sûre que les autres clients de la boutique me croient cinglée.

Soudain, elle ressort avec un objet dans sa main. « Et ça ? »

Je m’éclaircis la voix avant de prendre une inspiration profonde. « Harper, c’est une veste en cuir. »

« Oui, elle est pas mignonne ? »

Je me gratte un peu le front en essayant de trouver une manière polie de dire ‘il n’y a fichtrement aucun risque que tu mettes mes enfants dans des vestes en cuir’. « Hummm… non. »

« Non ? Comment ça non ? »

« Mon cœur, tu peux leur acheter tous les habits de bébé que tu veux du moment qu’ils ne sont pas en cuir. »

« Oh, allez Kels, c’est vraiment mignon. Regarde, il y a même des petites franges. »

« Harper, ces enfants sont de futurs lycéens. Je préfèrerais qu’ils ne sortent pas d’un établissement d’éducation surveillée. »

« Une veste en cuir n’a jamais créé de criminels. J’en porte une. » 

« Tu n’as pas porté cette veste en cuir depuis que tu l’as envoyée à la Nouvelle Orléans avec la moto. »

« Je vais devoir la nettoyer avant que Robie et moi prenions la route. »

Je la regarde en souriant. « Tu vas le faire ? »

« Ouais. Aussitôt qu’on va à la maison, si tu en es d’accord. Robie et moi on se disait qu’on pourrait partir ce premier week-end. Tu seras encore à deux semaines de la date prévue. On pensait rouler jusqu’au chalet pour le week-end. »

Je prends un instant pour contourner le portant et la prendre dans mes bras. Je me fiche de savoir si chaque paire d’yeux et chaque caméra au monde sont posés sur nous à cet instant. « Je pense que c’est merveilleux. » Je m’écarte et la regarde droit dans les yeux. « Merci. »

« Pourquoi tu me remercies ? »

Je lui caresse la joue. « Je ne sais pas. Je ne peux pas l’expliquer mais j’ai l’impression qu’une fois que tu auras fait un tour sur cette moto, tous les démons s’en iront. »

Elle me prend la main et l’embrasse doucement. « A ton service alors. »

« Alors, » je bouge et recommence à regarder les vêtements. « Tu vas avoir un sidecar pour Robie ? »

« Nan, il va louer une moto. »

« Tu vas être gentille ? » Je la taquine un peu.

« Il faudra bien. Tu ne seras pas là pour que je sois vilaine. »

« Oh bonne réponse, Tabloïde. »

Elle a l’air très fière d’elle-même. « Merci. »

« Oh comme c’est mignon. » Je lève ma nouvelle découverte.

« Kels, c’est un habit de lapin. Tu ne mettras jamais mes enfants dans un habit de lapin. »

Ou plutôt avec une traduction à peu près, ‘Il n’y a aucune putain de chance que tu mettes  mes enfants dans un habit de lapin’. Je parie qu’elle chantera une autre chanson autour de Pâques.

 

* * *

 

Ma compagne est belle ce soir et nous nous dirigeons vers le bar pour boire quelques verres avec Rach et Luc. Bon sang que j’aimerais la prendre dans mes bras et danser toute la nuit. Parfois la vie, ça craint.

Tandis que nous les rejo ignons, je ne peux pas croire que je les vois aussi heureux et détendus. Je suis véritablement choquée quand Luc se penche pour l’embrasser. Bon sang, Sam, je ne sais pas ce que tu leur as fait aujourd’hui, mais ça marche.

Kels me tire par le bras pour ralentir notre progression. « Peut-être qu’on devrait faire vite. Je pense qu’ils préfèreraient rester seuls. »

« Ils ont besoin d’une chambre », je dis en riant. Seigneur, Luc, donne un peu d’air à cette fille.

Je m’éclaircis la voix pour annoncer notre arrivée. Ils finissent par se séparer et nous font signe de les rejoindre à leur table. « Harper, Kels, venez par ici. » Qui est-ce et qu’avez-vous fait de mon frère ? Ce n’est pas le Luc Kingsley avec qui j’ai grandi.

Kels me donne sa main et je l’aide à s’installer dans une chaise près de la petite table de coin que Luc et Rachel ont choisie. « Vous me semblez particulièrement heureux ce soir. »

« Nous le sommes, soeurette. » Luc me sourit. « On a eu une très longue conversation aujourd’hui. Tout est clair. » Il met l’emphase sur le mot ‘tout’. « Et je suis arrivé à une certaine conclusion. »

« Qui est ? »

« Les Kingsley sont super bons dans le choix des femmes avec qui ils veulent passer leur vie. Elles semblent toujours nous aimer malgré nos erreurs et notre grande gueule. »

« Amen », disent ensemble Kels et Rach.

« Et maintenant qu’on a réglé ça, on va commencer à regarder quelles sont nos options. »

Dieu merci. Des progrès.

 

* * *

 

Je suis allongée dans le lit et je vois, à travers la baie vitrée de notre suite, la lune qui danse sur l’eau. C’est véritablement merveilleux. Maintenant je comprends pourquoi Kels aime ces choses. C’est presque comme si on n’avait pas d’autre choix que de se détendre.

Se détendre. Je ris doucement à cette pensée. Kels a fait de la relaxation une science. Je ne l’ai jamais vu aussi heureuse. A moins, bien entendu que je ne fasse quelque chose d’idiot. Là elle passe de heureuse à fâchée en moins de deux secondes. Je regarde mon atelle. Et bien, ça c’était une idiotie. Et il va falloir du temps avant que je n’arrive à faire oublier le commentaire vraiment stupide que j’ai fait au dîner.

Le fait que Kels soit en train de devenir la Maman du Millénaire, n’aide pas beaucoup mon cas non plus. Bon sang, elle va être aussi embêtante que Mama avant que ce ne soit fini. C’est bon pour nos bébés. Ça pourrait bien ne pas être aussi bon pour moi. J’ai vu Papa se baisser pour éviter une cuillère en bois ou deux dans ses meilleurs jours.

Je roule sur moi-même et je la regarde dormir. Elle bouge légèrement, révélant le côté de son ventre en dessous des couvertures. Je tends le bout des doigts et je peux sentir les bébés. En regardant avec soin, je peux les voir bouger sous sa peau.

Oh Seigneur. Comment ça se peut ? J’attrape mes lunettes sur la table de chevet et je les pose sur mon nez, tout en m’approchant assez de Kels sans la réveiller. Je peux voir les contours d’un petit poing ou d’un pied ou quelque chose de pressé contre son côté.

Je tends la main et je pousse un peu. Ça me repousse à son tour. Wow.

Je me penche et je donne un baiser à la petite extrémité et je prends un coup dans la bouche. « Pas sympa, Brennan Grace », marmonné-je puis je l’embrasse à nouveau. Attends quand tu seras là.

« Harper… »

Oh bon sang. Je vais encore avoir des ennuis. Je passe d’un mauvais coup à un autre avec elle ces jours-ci. « Oui. » Je réponds tranquillement.

« C’est déjà assez embêtant comme ça », continue Kels, d’une voix rugueuse et endormie et sans ouvrir les yeux, « qu’ils me donnent des coups toute la nuit. Est-ce que tu dois aussi le faire ? »

« J’ai vu un petit pied ou quelque chose comme ça… »

« Oui oui. » Elle se tourne pour me faire face. « Je sens quatre petits pieds et quatre petites mains, deux petites têtes et deux petits dos en constante agitation ces jours-ci. »

Je passe la main sous la couverture et la pose à l’endroit où je sais que se trouve Collin. Je peux les sentir bouger encore. « Est-ce que tu sais combien je suis en admiration devant toi, et tout ce truc ? Je veux dire que tu fais la chose la plus stupéfiante de l’univers en ce moment. Rien ne peut y être comparé. »

« Je ne guéris pas le cancer, Tabloïde. Je suis enceinte. Beaucoup de femmes le sont. »

« Oui mais, » je tire la couverture et j’embrasse Collin aussi, « elles ne portent pas mes bébés. Pas vrai, petit homme ? Nan. Et elles ne vont pas être la meilleure maman au monde. Et qui sait, Kels ? Tu ne guéris peut-être pas le cancer, mais peut-être que notre fils va devenir le médecin qui le fera. Je suis plutôt sûre que Brennan a aussi en tête ce truc de la première femme présidente. »

Kels m’attire contre elle et se blottit en riant un peu. « Tu es folle, Tabloïde. »

Je la serre plus fort. Un des jumeaux me donne un coup de pied. Je suis peut-être folle mais je suis la cinglée la plus chanceuse du monde.

< fondu au noir>

 

Publicité
Publicité
Commentaires
F
Comme toujours, merci pour le commentaire chaleureux Isis :-)
Répondre
I
Que puis-je ajouter à ma gratitude éternelle à Fryda(et Sygui)pour ce partage d'une histoire haute en couleur!<br /> <br /> Merci à vous!<br /> <br /> <br /> <br /> Isis.
Répondre
F
Et merci a sygui, toujours prête a relire :-)
Répondre
F
Ça fait chaud au coeur en cette saison :-)<br /> <br /> Merci a vous aussi
Répondre
J
Merci à vous de nous permettre de retrouver régulièrement des personnages que l'on aime et que l'on prend plaisir à suivre :-) Et mes sincères félicitations pour le travail fourni ! Bravo !!!
Répondre
Publicité