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13 septembre 2015

Indiscrétions, saison 4 épisode 8

 

INDISCRETIONS

La Quatrième Saison

Créée, produite, réalisée et écrite par : Fanatic et TNovan

 

Traduite par Fryda (2015)

 

Episode Huit : Heureuses Ensemble (Happy Together)

Renée soupire et s’enfonce dans son fauteuil. Kelly est endormie dans son landau près d’elle, après avoir pleuré à s’en épuiser. Elle était très fatiguée et ne pouvait plus gérer la vie. Harper et moi en avons eu l’expérience plus que notre compte avec nos deux bébés. Heureusement, les cousins de Kelly se sont comportés admirablement pendant sa période de détresse. Collin s’est occupé avec un anneau multicolore en plastique sur les genoux de sa tante Elaine, et Brennan a suçoté l’oreille de son nounours en peluche sur mes genoux. « Dieu merci, c’est fini. »

Mama tend la main et écarte une mèche de cheveux du visage de Renée. « Tu es une maman formidable pour mes petits-enfants. Est-ce que je dois parler à mon plus jeune fils pour qu’il s’occupe mieux de toi ? »

Oh, c’est la plus grande menace qui peut être prononcée à cette table. Nous attendons toutes la réponse de Renée. « Mama », elle sourit, « vous savez bien que vous l’avez bien éduqué. Il est génial ; nous sommes juste tous les deux fatigués. »

« Peut-être que Christian et Clark aimeraient passer le reste du weekend avec leur Grandmère et leur Grandpère ? » Le regard de Mama prend une teinte sentimentale. « J’ai un peu d’expérience pour m’occuper des petits garçons agités. »

Alors que ces mots s’échappent de ses lèvres, nous entendons un fort bruit en provenance du séjour. Il a plu sans arrêt aujourd’hui, et les garçons, Harper et les gamins sont piégés à l’intérieur. Nous avons entendu des bruits de pas qui montaient et descendaient, des portes qui claquaient, des grands et des petits corps qui cognaient plein de choses tout l’après-midi.  Ça a commencé à augmenter lorsque nous avons fini de diner il y a quelques temps. On n’aurait jamais dû leur donner du carburant, on dirait.

« Je me demande ce qu’ils font en ce moment », soupire Katherine, sachant que son mari a tendance à être l’un des fauteurs de trouble les plus actifs. Leur fils aîné, Joseph, est dans les pas de son père.

Rachel a l’air perplexe. « La dernière fois que j’ai apporté des biscuits, ils s’étaient tous installés pour regarder un film. »

« Oh oh », Elaine grimace. « Ça présage des problèmes en général. »

Je ne peux que l’imaginer. « Qu’est-ce qui s’est passé les autres fois ? »

« Il y a eu cette fois où ils regardaient les Monty Python… »

Elaine commence à raconter mais Kate se dépêche de prendre la suite. « Oh, oui. Je m’en souviens ! ‘Reviens et bats-toi comme un homme, espèce de lâche !’ Ils ont fait faire aux enfants comme s’ils perdaient leurs bras et leurs jambes et qu’ils se battaient à l’épée. Ils ont cassé un des vases de Mama, il me semble. »

Mama fait un signe de croix et murmure une prière en français. « Il n’y a pas ce genre de films dans cette maison. »

« Je me demande ce que ça peut être alors », murmure Ren, sachant très bien que son mari pourrait causer des soucis avec ‘Belle et le Clochard’. Sans compter tout ce qui implique des combats à l’épée et au pistolet.

Je suis sur le point de la taquiner quand je réalise que mon Harper pourrait facilement être, et qu’elle est assurément, la cause du bruit actuel. Elle est comme nos jumeaux, agitée et pleine d’énergie. Pas étonnant que je sois folle d’elle. « On devrait aller voir ? »

« Je suis sûre qu’on sera vite fixées », dit Mama d’un ton prophétique alors que Danielle entre dans la cuisine.

« Tante Renée ? » Elle s’avance et regarde Kelly endormie. « Je peux emprunter Kelly un instant ? »

« Euh, non, pas maintenant, ma chérie. Je viens juste de réussir à la faire taire. Pourquoi as-tu besoin d’elle ? »

Une autre salve de bruits nous arrive, et les rires sont les plus dominants. Danielle jette un coup d’œil par-dessus son épaule frêle tandis que sa sœur ainée, Laurent, entre. » Oncle Robie m’a demandé de venir la chercher. » Kelly n’ayant pas été confiée à Danielle, j’attends la question suivante. « Je peux prendre Brennan, Tante Kels ? »

Je souris et j’acquiesce de la tête. « Fais attention avec elle. »

Danielle produit un énorme sourire et prend sa cousine. J’aide Brennan à s’installer dans les bras de sa cousine et je les regarde retourner au séjour. Nous tournons toutes des regards interrogateurs vers Laurent. « Je peux avoir Collin ? »

Je hoche la tête et Elaine fait le transfert.

Kate fait claquer ses doigts. « Ils ont besoin d’un Claude et d’un Brutus ! »

« Oh non ! » Grognent toutes mes sœurs.

Je suis intriguée. « Claude et Brutus ? Ils refont des pièces en toge romaine ou quoi ? »

Mama se lève et reprend du café. « C’est pire ma petite. Et c’est de ma faute, j’en ai bien peur. Quand ils étaient jeunes, on jouait à un jeu les jours de pluie. On chantait et on jouait les comédies musicales que j’aimais tant. Souvent, c’était mon seul moyen de leur faire faire quelque chose à cinq. »

« Je ne comprends toujours pas. »

« Une des comédies préférées des garçons était ‘Les Sept Femmes de Barberousse.’ »

Elaine se met à rire. « Elle a les paroles les plus outrancières. C’est positivement médiéval quand on parle d’égalité entre les sexes. »

« Et je parie qu’ils chantent leur chanson préférée à cet instant. » Renée me met debout et nous allons vers le séjour. « Il faut que tu vois ça. »

Oh Seigneur.

La télé passe une vieille comédie musicale avec le vieux type de ‘Dallas’ tout jeune. Il semble conseiller ce qu’on devine être ses frères, dans une écurie quelconque. A côté de l’écran, se trouve Gerrard qui joue la scène avec une précision incroyable.

(NdlT : ce qui suit est une traduction libre – à l’exception des premiers vers trouvés sur internet - d’une chanson de la comédie musicale ‘Les Sept Femmes de Barberousse’, intitulée ‘Sobbin’ Women’, qui parle de l’enlèvement des Sabines, donc jeu de mot. Le texte original est sur internet)

« Dans les temps anciens

«  Les ‘Sabinettes’

«  Leurs maris partis

« Faisaient trempette.

« Les Romains

« Les voyant ainsi trempées

« Les emmenèrent

« Pour les faire sécher

«  Plutarque l’a raconté. »

Je secoue la tête. Ceci explique beaucoup de choses.

Tous les gamins commencent à chanter avec le chœur.

« Oh oui !

« Ces femmes pleuraient, pleuraient, pleuraient,

« Attachées, en colère et agitées dans leurs liens,

« Chaque muscle douloureux, douloureux,

« De cette chevauchée infernale,

« Et elles pleurèrent et embrassèrent et embrassèrent et pleurèrent,

« Tout le long du paysage romain,

« Alors n’oubliez pas ça quand vous emportez une fiancée,

« Qui pleure en colère et agitée dans ses liens,

« De cette chevauchée infernale. »

Jake, assis sur les genoux de son père, est coaché pour dire, « et ensuite, qu’est-ce qui s’est passé ? »

Harper répond à la question en se mettant à chanter. Je note qu’elle est assise près de Danielle et Laurent, qui tiennent chacune un de nos enfants.

« Ils n’ont jamais rendu le résultat de leur pillage.

« Le vainqueur garde toute la prise.

« Ils les ont amenées chez eux, avec le tonnerre,

« Vers des rotondes petites mais jolies.

« Et on n’avait jamais vu, d’après ce qu’on me dit,

« De telles domestiques,

« Avec un bébé romain sur chaque cuisse,

« Nommés Claude et Brutus. »

La petite Brennan joue le rôle de Claude et Collin, pauvre chéri, est choisi pour interpréter Brutus. C’est plutôt comique. Tandis que les gamins entament le deuxième refrain, nos époux nous remarquent enfin près de la porte. Robie se lève et vient vers Renée en balançant les hanches. Il glisse les bras autour d’elle et la positionne devant et au centre.

« Et quand les hommes vinrent les chercher,

« Ces femmes ne se laissèrent pas faire.

« On dirait que lorsque les Romains les saisirent,

« Leurs amies en furent saisies.

« Maintenant cela est vraiment

« Une leçon pour les gens comme vous,

« Attrapez-les comme firent les Romains,

« Ou alors elles penseront que vous êtes susceptibles. »

Soudain il la soulève et la fait tourner dans la pièce, manquant de près le chandelier, les lampes Tiffany et les petites têtes sculptées qui vont avec. Les gamins continuent à chanter joyeusement, peu inquiets du danger qui guette les vies, les membres ou les objets. Evitant son frère, mon épouse vient vers moi.

« Oh elles étaient en colère et agacées,

« Mais secrètement, elles étaient pleines de joie,

« Vous pourriez vous souvenir de ça quand vous rassemblerez votre bétail.

« Oh, oh, oh, les pauvrettes. »

Je vais ignorer le commentaire sur ‘le bétail’ et simplement me concentrer sur Harper qui me tient maintenant. Je suppose que la chanson a raison. L’amour couvre de nombreux péchés. Ou de la stupidité si c’est le cas.

Je pose la tête sur la poitrine d’Harper et je la serre fort, sans me préoccuper des autres. J’ai eu besoin de sa présence tout l’après-midi. J’aime fortement mes sœurs mais j’ai besoin de ça. Besoin d’Harper.

Sa prise passe de joyeuse à tendre. Elle se détend contre moi et fredonne doucement, en faisant des cercles sur mon dos. Tout le reste disparait en arrière-plan. Je suis en sécurité.

Je ne me rends même pas compte que je pleure jusqu’à ce que les doigts d’Harper essuie les larmes sur mes joues. « Tout va bien, Petit Gourou ? » Demande-t-elle doucement, sa voix rauque d’inquiétude.

« On peut rentrer ? » Je me déteste de demander ça mais j’ai besoin de ne pas la partager, ou nos enfants, plus longtemps aujourd’hui.

« Bien sûr. » Sa main recouvre ma joue et je m’y laisse aller. « Je vais prendre nos affaires et on y va. »

J’embrasse sa paume et sa chaleur me manque immédiatement quand elle se détache pour aller nous préparer à partir. Je reste seule jusqu’à ce qu’un bras mince glisse autour de ma taille. Mama m’embrasse sur la joue. « Ma petite, tout va aller bien. »

 

* * *

 

Je regarde Kels avec attention alors que nous posons les jumeaux pour qu’ils jouent sur le sol. Un de nos plus beaux cadeaux de naissance a été cette épaisse couverture qui est parfaite pour que des bébés qui grandissent se cognent la tête. Elle se lave bien, produit un molleton génial et a des couleurs vives. Nous mettons toute la collection de Fisher Price autour d’eux et nous nous appuyons sur le canapé pour les regarder.

Je prends la main de ma nana et je la lève doucement. J’étudie le plâtre et je lis quelques-unes des inscriptions que ma chère famille a écrites. « A La Gagnante et Toujours Championne. » « Attention, Harper, tu pourrais être la suivante. » « La Femme Inquiétante en short. » « Un Round, Cinq Dents. » « Faites ce que je dis, PAS ce que je fais. » « Un Bracelet de Cinquante Mille Dollars. » « La Championne Poids Plume Internationale. » « La Vainqueure du Challenge de Boxe des Pisseuses. »

Je montre l’avertissement qui me concerne. « Est-ce que je dois m’inquiéter ? »

« Non, mon cœur. Ce n’est que le sens de l’humour décalé de Renée. Je l’aurai quand elle s’y attendra le moins. »

Ma nana lâche un rire bas et diabolique. J’attrape un stylo sur la table à côté. J’enlève le capuchon avec mes dents et je commence à écrire sans hésitation. « Ma défenseure. Je t’aime. »

« Oh, que tu es gentille. » Elle me donne un baiser. « Je n’aurais jamais dû laisser les choses aller si loin, mais il fallait que je laisse passer une partie de ma colère. Son visage me semblait être un aussi bon endroit qu’un autre. »

Je ris, avec le regret de ne pas avoir été là. « Qu’est-ce que ton docteur a dit de ça ? » Je lui tapote doucement le front pour montrer de quel docteur je parle.

« Il a dit que j’ai tenu plus longtemps qu’il ne l’aurait fait », elle me fait un sourire triomphant, « que c’était une réaction plutôt normale et que je ne devrais pas m’en vouloir pour ça. »

« Sans blaguer hein ? »Je la rejoins dans la blague. « Peut-être que je peux te trouver un gentil pacifiste pour la suite ? »

« Non, je l’aime bien. Il est bon. Il me fait voir les choses que je dois voir sans me faire ressentir qu’il me force à ça. »

J’espère que nous pourrons aller au cœur du sujet ce soir. Je déteste ne pas pouvoir l’aider, comme je le veux tellement. « De quoi as-tu besoin pour faire face, chér ? Qu’est-ce que tu as besoin de voir ? » J’espère qu’elle va répondre.

Elle soupire profondément. « Harper, il s’est passé tellement de choses. J’avais l’impression de partir en morceaux. J’avais l’impression de perdre prise. J’avais peur. » Elle prend une autre inspiration profonde. « Et je présume que je te dois une excuse pour t’avoir vraiment mise mal à l’aise. J’aurais dû te dire que je voulais rentrer, mais au moment où je m’en suis rendu compte, je devais juste venir ici. J’ai un peu mis le bazar et j’en suis désolée. »

Un poids énorme descend de mes épaules. « Merci de me le dire, et je n’étais pas en colère. Pas après y avoir repensé », j’admets cela avec un sourire désabusé. « En fait, j’étais contente que lorsque tu as pensé fuir, tu sois venue ici. J’aurais pu avoir à te suivre dans un endroit hideux. » Je caresse sa joue avec mes doigts. « Je suis contente que tu sois venue à la maison. »

« C’était l’endroit où je devais venir. C’est la maison. Tu m’as donné ceci. Ma maison, ma famille. Un endroit auquel j’appartiens. Un endroit où ça va de ne pas être sûre de tout, et de savoir que nous avons du soutien. »

« Je ne t’ai rien donné de tout ça », je réponds, la voix pleine d’émotion. « Tu me l’as donné, toi. » J’essaie d’organiser mes pensées pour pouvoir communiquer tout ce qui est en moi. « Seigneur, Kels, je ne serais pas ici sans toi. Et, pour ce qui est de t’avoir donné ma famille, je dois admettre qu’ils étaient tout aussi pressés de te voir. Tu t’intègrerais avec ou sans moi. » Je lui embrasse le bout des doigts. « Maintenant, de quoi n’es-tu pas sûre ? »

« C’est dur à expliquer. On a traversé tant de choses et j’ai eu des doutes sur la façon dont j’ai géré les choses. Parfois je m’inquiète de ne pas faire les choses comme il faut pour toi, ou de ne pas être une bonne mère. » Je commence à objecter mais elle place deux doigts sur mes lèvres. « Je sais, c’est idiot mais je ne peux pas m’empêcher de m’inquiéter. Je veux dire, allez, il y a un an et demi, mon plus gros souci aurait été d’avoir un plus gros contrat. Ensuite cette locomotive aux yeux bleus m’a prise de plein fouet », j’aime bien cette description et je souris à mon tour, « et je voulais tellement plus que ça. Ensuite j’ai eu à la fois le contrat et la fille. A la fin je me suis rendu compte que tous comptes fait, ce que je voulais c’était une famille. »

Je hoche la tête. « C’est un bon choix. » Je laisse mon regard planer sur nos petits qui sont blottis l’un contre l’autre et heureux. « On a fait de belles choses ensemble et tu ne devrais jamais en douter. Tu as bien géré les choses aussi, ma chérie. Seigneur, je serais morte moi si j’avais traversé les mêmes choses que toi. » C’est vrai. Elle est plus forte que moi. Bon sang, elle a connu un accouchement.

« Non. Tu aurais été très bien. » Elle s’appuie un peu plus contre moi. « Tu as une famille merveilleuse qui t’aurait sortie des flammes de l’enfer, si besoin. C’est bien de savoir que j’ai ça aussi. »

« Tu es dans les flammes de l’enfer, Kels ? » J’ai le cœur brisé de penser que c’est ce qu’elle ressent. Je ne le prends pas personnellement mais je souhaiterais avoir une baguette magique pour tout arranger pour elle.

« Ça a peut-être été le cas, mais ça ne l’est plus. Je suis à la maison. Je suis en sécurité. Avec toi et la famille à mes côtés, je peux tout traverser et je le ferai. » Elle sort de son ton pessimiste et me fait un sourire espiègle. « Et, attention, parce qu’un de ces jours, la Nouvelle Orléans pourrait regretter que Kelsey Kingsley l’ait adoptée. »

« Ouh la la », je la serre. « Tu penses à peindre la ville en rouge, hein ? » Je lui embrasse la tempe. « Ça t’ennuie si je viens avec toi ? Pour essayer de t’empêcher de cogner quelqu’un d’autre ? »

Elle rit, une douce musique à mes oreilles. « Tu peux essayer. » Elle me pousse d’un air joueur. « Puisque tu es sans emploi en ce moment, j’ai une question pour toi. »

Je hoche la tête d’un air solennel. « Oui, je veux bien être ton esclave sexuelle pour les vingt prochaines années ou plus. »

« Je le savais. » Elle rit plus fort. « Ça va sans dire. »

« Mais je veux toujours bien que tu m’interroges. » Je me penche et je mets le nez dans son cou parfait, mordillant en me reculant. « Mais quelle est ta question ? »

« Une question ? J’avais une question ? »

Je touche son nez mignon du bout de mon doigt, savourant l’étincelle d’excitation que je vois dans ses yeux. J’espère que je lui ferai toujours cet effet. « Oui, chér. Surtout vu que nos enfant sont allongés à moins d’un mètre de nous à cet instant. » Bien sûr, Collin dort et Brennan mâchouille l’oreille de son nounours.

« Bien. » Elle se calme et déglutit. « Est-ce que tu aimerais », elle roule les yeux, « et je ne peux pas croire que je te tends une telle perche, « je ricane déjà, « une nouvelle position ? »

Je ris avec délice. « Ma douce, tu sais bien que je suis toujours prête à essayer de nouvelles positions. » Je trace son sein enflé. « C’est le sel de la vie etc. »

« Je te parle d’un boulot, Tabloïde », elle me réprimande sans une once de sincérité. « La paye est nulle et c’est assurément un pas en arrière pour toi, mais les récompenses pourraient être très bonnes. »

Si c’est ce que j’imagine, je ne pourrais pas être plus d’accord avec ça. « Un boulot ? On a été des femmes de plaisir, des dames qui déjeunent, pendant quelques jours. Qu’est-ce que tu as au four ? »

« Je pense à démarrer une société indépendante de production. J’ai besoin d’un producteur exécutif que je pourrais botter… euh… avec qui je pourrais bosser. »

« Hé, Championne, je pensais que traînasser était plus dans ton style. » Kels me pointe d’un air taquin le message d’alerte me concernant sur son plâtre. « Et qu’est-ce qu’elle produirait cette société indépendante de production ? »

« Oh tu sais, les merveilleuses petites choses qu’ils passent sur le Canal d’Apprentissage et ce genre de choses. Je passerais une semaine dans une prison pour femmes par exemple. Je suis plutôt habituée à ça. »

« Dis juste non. Tu penses qu’on pourrait récupérer le chasseur de crocodiles ? Il est taré. J’aimerais bien aller trainer avec lui quelque part. » Je sais que ça va plaire à Kels. « Peut-être que Brennan pourrait faire un stage avec lui quand elle sera plus grande. »

« On pourrait essayer », concède-t-elle. « Si tu veux faire l’appât pour alligator, vas-y, mais laisse ma fille hors du coup. »

« Ma fille », je corrige. « Elle te ressemble, elle agit comme moi. »

« Ouais, et bien, j’espère arranger ça un de ces jours. » elle se penche en avant et pose une couverture sur nos bébés. « Elle apprendra à apprécier le sage conseil de sa maman. Surtout quand je te montrerai du doigt et que je murmurerai dans son oreille, ‘Tu la vois ? C’est le genre de femme que ta maman t’avertit d’éviter. »

Je ris. « Eh bé. Merci. »

« Ce n’est pas toi qui m’inquiètes. C’est la femme avec laquelle elle pourrait vouloir sortir qui m’effraie. »

Je fais le signe de la croix. « C’est si vrai. Et, ne parlons pas encore de leurs rendez-vous amoureux. Ça me fait peur. » Je fais semblant de frissonner. En fait, pas tant que ça. Retour aux affaires, « il y a quelqu’un d’autre d’associé avec cette société de production ? Et est-ce qu’elle a un nom ? »

« Non, pas encore. C’est plutôt moi et mon père qui veut injecter de l’argent pour nous. Comme nom, je pensais à B.C.H. Productions. » Elle a un sourire narquois.

Je ne peux pas m’en empêcher. Je me mets à rire. « Seigneur, Kels, tu te rends compre que les gens vont prononcer ça ‘Bitch’, n’est-ce pas ? » (NdlT : jeu de mot difficile à traduire, Bitch = garce, pétasse)

« Oui, je sais. Génial, pas vrai ? » Les yeux de Kels brillent d’espièglerie. C’est la meilleure chose au monde qu’elle puisse faire.

Je ne peux pas laisser passer. « C’est un problème. Mama va en mourir, mais j’aime le son. Où est le K, à propos ? »

« Non. Juste les initiales de mes trois personnes préférées. Pour la bonne fortune. »

Je jette un coup d’œil. Les bébés dorment. C’est quoi ça ? « Nous n’avons pas besoin de bonne fortune, ma chérie. Nous la faisons nous-mêmes. » Je me penche et je l’embrasse avec force, lentement et profondément. Ma main passe sur sa poitrine, traçant sa clavicule à travers sa fine chemise, le long de son cou et je fais des cercles autour de son oreille.

Lorsque nous nous arrêtons pour reprendre notre souffle, elle met le nez contre mon oreille. « C’est l’un des avantages dont je parlais. » Je grogne et je m’appuie contre elle, la guidant vers le sol. « Alors, je comprends que tu es intéressée par », elle s’interrompt tandis que je commence à déboutonner son corsage, « la position ? »

Je hoche la tête. « Oui, la position et bien bien plus. »

 

* * *

 

Je roule sur le côté et je regarde Harper dormir. C’est une femme très heureuse à cet instant. Bien qu’elle ne fût pas très heureuse quand je l’ai fait s’arrêter assez longtemps pour mettre les bébés au lit et transférer nos plans dans la chambre à coucher. La dernière chose dont nous avions besoin, c’était que Brian nous tombe dessus. Il ne nous aurait plus jamais laissé tranquilles avec ça.

Elle semble très heureuse. Je pense vraiment qu’elle aime être à la maison. Je tends la main et je repousse une mèche de cheveux derrière son oreille, ce qui la fait s’agiter dans son sommeil. Elle couine et s’enfonce un peu plus dans l’oreiller. C’est sûrement de là que vient le fait que Brennan déteste avoir son sommeil interrompu. Je l’admets, je n’aime pas beaucoup me lever le matin, mais Harper déteste vraiment qu’on l’empêche de dormir.

Je tends la main et je masse son dos nu. Elle soupire et se colle à ma main. Ça elle aime bien. Je pense qu’elle a été un animal domestique dans une vie antérieure. Probablement un chat. Elle apprécie ce genre de chose un peu trop.

On dirait que les choses finissent par s’emboîter et s’intégrer. Je n’ai pas l’impression d’être tiraillée dans mille directions. J’ai finalement la main sur tout ce qui mérite mes soins. Ma famille, ma maison, moi-même et ensuite ma carrière, si je choisis de faire comme ça.

 

Je peux tout gérer. Je détestais simplement le sentiment de perdre le contrôle et d’être piégée. Maintenant que tout est sous contrôle et que je suis concentrée, j’ai une bien meilleure chance que ça le reste.

« Kels ? » Marmonne-t-elle, son visage toujours enfoui dans l’oreiller.

« Oui, L’Etalon, qu’est-ce que je peux faire pour toi ? »

« Soit être sérieuse avec ce massage, soit garder tes mains pour toi. »

« Ronchonne », je la taquine et je me blottis, mettant plus de sérieux dans le massage. « C’est mieux ? »

« Ah oui. C’est », elle s’interrompt brièvement et déglutit, ensuite elle se met à hocher la tête tandis qu’un sourire grandit sur ses lèvres. Je remarque qu’elle n’ouvre pas les yeux. Elle se contente de rouler sur le ventre pour apprécier. « C’est bon. »

Ouais. Elle a été un chat.

 

* * *

 

Je me réveille avec des coups portés à la porte. Ça ferait bien de ne pas être Robie encore une fois. Je vais à la fenêtre et je m’appuie. C’est Papa. J’espère que tout le monde va bien.

Je me dépêche de descendre l’escalier et j’ouvre brusquement la porte. Dieu merci, je me suis souvenue de mettre un boxer et un tee-shirt avant de quitter la chambre. « Papa ! »

Il sourit de toutes ses dents, bien trop réveillé pour cette heure de la matinée. Les criquets chantent encore. « Harper, allons-y. »

J’ai dû rater quelque chose.

Papa plisse les sourcils. « Harper Lee, c’est le début de la haute saison des langoustes. Robie, Clark et Christian sont dans la voiture. Collin et toi devez venir aussi. »

Oh, ça va être sympa. « D’accord. Je peux avoir cinq minutes pour prendre du lait et des couches ? »

Mon père regarde sa montre et note l’heure. « Très bien. Je vais faire du café pendant qu’on attend. »

 

* * *

 

Harper et Robie ont emmené ‘les garçons’ pêcher et Brian et Mama ont emmené ‘les filles’ faire du shopping. Du coup, Renée et moi sommes sans enfants à la Nouvelle Orléans. Nous savourons cela immensément en ce moment alors que nous sommes assises sur le porche à l’arrière à nous détendre. Kam est allongé sous le soleil, sur le dos avec les pattes en l’air. Il a l’air totalement idiot mais c’est un chien heureux, avec sa langue qui pendouille d’un côté de sa gueule.

« Est-ce que je devrais être stressée qu’Harper ait emmené Collin ? On imagine que pêcher la langouste n’est pas facile avec un bambin de quatre mois. »

« Non. Ne t’inquiète pas, Kels. Ils ne les utilisent comme des appâts que quand ils ont six mois. » Elle ricane et cache son sourire derrière son verre.

« Très drôle. »

« Ma chérie, si tu dois rester à la Nouvelle Orléans pour un bon moment, il va falloir que tu apprennes à te détendre quand il s’agit des Kingsley et leurs enfants. Seigneur, ils vont embarquer ces bébés pour faire des choses que tu préfèrerais te couper un bras plutôt que de les laisser faire, mais ils reviennent toujours entiers. » Elle soupire et sirote à nouveau son thé. « Je m’inquiétais quand je me suis rendu compte que Mama et Papa ont élevé cinq enfants sans en perdre un seul. Et entre tous les enfants et les époux, nous avons réussi à produire seize petits-enfants. Ça veut dire qu’on doit bien faire les choses. »

« C’est vrai. »

« En plus, j’ai confiance en Papa pour les empêcher de faire quelque chose de vraiment idiot ou dangereux. »

« Renée, c’est le même homme à qui Mama n’aime pas faire confiance avec des rallonges électriques. Elle dit que ce sont des ennuis. Pourquoi est-ce qu’on lui fait confiance avec nos bébés ? »

« Hmm, Kels, pas nos bébés », elle me pousse doucement. « Les petits-enfants de Cécile. Il sait bien qu’il vaut mieux que rien n’arrive à l’un d’eux. »

Je hoche la tête et je ris. C’est vrai. Ce serait l’enfer pour un adulte qui mettrait consciemment en danger un des petits-enfants de Mama. Elle serait possédée et il n’y aurait pas d’endroit où se cacher.

« Je voudrais te faire une proposition, Ren. »

« D’accord, mais on ne peut pas le dire à Harper ou à Robie. » Elle sourit.

Je ferme les yeux et je grogne. Bon sang, j’ai mis les deux pieds dans celle-là. « Sois gentille. »

Elle manque sortir son thé par les narines. « Je suis désolée. De quoi il s’agit ? »

« Et bien, tu sais, je souhaite démarrer une société de production indépendante ? »

« Oui. »

« Il me faut un adjoint administratif. J’aimerais que tu réfléchisses à prendre le job. »

Elle s’enfonce dans son siège et réfléchit à mon offre. « Je suis flattée, Kelsey, mais je ne connais rien à l’industrie du spectacle ou de l’information. »

« Crois-moi, ce n’est pas si difficile. Ce dont j’ai besoin, c’est de quelqu’un à qui je peux faire confiance pour me garder sur les rails. »

« Ouaouh. Je suis honorée. Il faut d’abord que j’en parle à Robie, mais je suis vraiment intéressée. Tu peux me laisser deux jours ? »

« Prends tout le temps qu’il te faut. Je peaufine encore les détails. »

« Génial. Je te le dis vite. »

« Parfait. Entretemps, allons dépenser de l’argent quelque part. » Je lui tapote la jambe et je me lève, puis je m’étire. « Je ressens le besoin d’acheter. »

 

* * *

 

Je ne suis pas sûre de savoir comment j’ai réussi à sortir Collin de la maison. Kels devait être encore à moitié endormie et elle n’a pas vraiment compris ce que je demandais. Mais c’est sûr que je ne suis pas restée longtemps pour lui expliquer. Je caresse les cheveux de l’Ebouriffé et je resserre les bretelles de son sac de transport. Si ce gamin revient, ne serait-ce qu’avec une piqûre de moustique, je suis grillée.

« Tante Harper ? » Christian tire sur mon pantalon.

« Oui, Christian ? »

« Tu vas m’aider à attraper des langoustes ? »

Je hoche la tête. « Bien sûr. Ton papa n’a pas l’air d’en pêcher beaucoup à chaque fois. »

« J’ai entendu », crie Robie depuis l’arrière de la Suburban où il décharge notre équipement avec Papa.

Christian hoche la tête. « Merci. Tatie Kels n’est pas là pour m’aider comme elle fait avec les doub… doub… »

« Les doublons ? » Il hoche à nouveau la tête. Pas étonnant qu’il ait gagné deux années de suite. Oh, Kels, mon chou, tu es à moi maintenant. « Tu as tout compris, court sur pattes. » Je lui ébouriffe les cheveux d’un geste affectueux. « Va voir ce que fait ton frère, d’accord ? »

Il court vers la pile de trucs où Clark s’est installé. Papa, Robie et moi aimons prendre les langoustes de la façon la plus simple – on envoie une ligne avec un morceau de poisson pour appât, on la tire sur le fond et on l’amène lentement à la surface. Typiquement, il va y avoir une paire de langoustes qui va s’y accrocher, et on les attrape avec un grand filet. C’est-à-dire, c’est ce qu’on fait Papa et moi. Robie semble ne jamais rien attraper.

On apporte aussi des pièges avec des filets, pour nous assurer de notre plein succès. Les pièges sont cubiques avec un tunnel qui mène à l’intérieur. Nous mettons une tête de poisson en guise d’appât et les langoustes entrent mais ne peuvent pas ressortir. On utilise de la carpe comme appât. C’est un poisson huileux et il semble attirer les meilleurs, les petits. Après environ une heure, nous en avons plein pour le dîner. Bien sûr, nous restons bien plus longtemps à profiter de la brise.

Nous avons une glacière pour y déposer celles qu’on a attrapées. Elles peuvent vivre là-dedans pendant deux bonnes heures, assez pour que nous les rapportions à la maison pour notre râgout de langoustes. Ouh la la. J’adore la langouste de Mama. Il faut que je m’assure que Kels récupère sa recette.

Nous sommes à la ferme de Grandmaman. Nous avons roulé près d’une heure pour sortir de la ville, vers sa propriété, et aussi loin qu’on peut sans avoir à trainer un bateau à fond plat à l’arrière de la camionnette. Les cyprès sont énormes et pleins de mousse espagnole. Il y a des alligators par ici mais pour la plupart, ils restent dans leur coin et nous dans le nôtre. Pour s’assurer qu’aucun ne déboule, Papa a son fusil. Il ne l’a jamais utilisé mais il ne sort jamais sans. Il suffit d’une seule fois pour le regretter.

Clark crie joyeusement et montre quelque chose. « Oiseau ! Oiseau ! » L’aigrette regarde depuis son perchoir et fixe mon neveu. Elle semble décider qu’elle est assez loin pour être en sécurité.

« Très bien, fils », le félicite Robie en le soulevant. Il lui embrasse la joue et l’installe sur sa hanche. « Prêt pour la pêche ? » Bang, bang, Clarks cogne la poitrine de son père de ses deux mains. C’est un oui sous-entendu. De sa main libre, Robie prend une partie de l’équipement et commence à avancer un peu dans le marais. Je prends aussi une partie de l’équipement. Papa et Christian prennent le reste et nous suivent.

Nous avons un coin favori que nous avons rendu luxueux au fil du temps, en tous cas autant qu’un trou de pêche marécageux peut l’être. Il y a une plateforme en bois sur laquelle nous pouvons nous asseoir et un banc fait d’une bûche tombée et de rochers. Nous avons un coin pour notre équipement qui reste sec et à l’abri des bestioles, pour la plus grande partie. C’est génial.

Il y a une règle stricte dans nos sorties – pas de walkman, de gameboy, de BD ou tout ce qui sert à amuser nos petits ces jours-ci. Il s’agit d’être ensemble, de parler un peu, et de pêcher plus.

Je suis assise près de Christian et je sors mon couteau suisse de ma poche. Avec précautions, je découpe des morceaux de carpe et je les pose sur du papier journal à côté de nous. Une fois qu’on en a assez pour tenir un moment, je nettoie la lame et je la range. Christian tient la ligne et l’hameçon pour moi. « Très bien, voilà comment on l’attache », dis-je en faisant la démonstration.

« Je peux mettre l’appât dessus ? »

« Absolument. » Les petits garçons adorent les morceaux gluants, et surtout Christian. Je l’aide à bien placer ses doigts pour qu’il ne finisse pas lui-même en appât. « Très bien. Maintenant jette-le aussi loin que tu peux et laisse le couler au fond. » Il obéit. Et nous attendons.

A côté de nous, Robie et Clark ont installé leurs lignes. Papa revient dans l’eau de l’endroit où il a posé le piège à filet. Je pense que Papa adore la pêche à la langouste juste parce qu’il peut porter ses cuissardes. Mama les déteste et elle lui fait ranger dans le garage. Hors de sa vue.

« Harper, ce sera sympa de t’avoir pour Breaux Bridge cette année. »

Je hoche la tête avec enthousiasme. J’adore le festival de Breaux Bridge. C’est l’une des plus grandes célébrations de langoustes dans le coin, juste à l’extérieur de Lafayette. Un de mes moments favoris est la course de langoustes. Ça et la nourriture. En grandissant, je ne mangeais pas la veille comme ça je faisais plein de place.

« Papy papy ? »

Papa regarde par-dessus sa tasse de café. « Oui ? »

« Grandmere  a grandi ici, pas vrai ? »

Papa hoche la tête et montre le nord et l’ouest. « Par là-bas. Elle et sa Mama et son Papa et sept frères et sœurs. »

« Sept ? »

« Sept. Ambroise, Jean, Pierre, Anne, Madeline, Rémy, Jacques et ensuite votre Grandmere. Elle était le bébé de la fratrie. »

« Grandmere était un bébé ? »

Oh Seigneur, ne laissez jamais Mama entendre cette question. Robie et moi, on fait le signe de croix. Papa rit et tapote le genou de Christian. « Elle était tout à fait comme ta petite sœur, Kelly, en fait. Est-ce que je t’ai raconté ce que Rémy et Jack m’ont fait quand je courtisais ta Grandmere ? » Sur l’insistance de Christian, Papa continue avec son histoire. « J’étais invité chez Grandmaman pour le dîner un soir. Alors je suis arrivé, bien habillé dans mon costume, essayant de les impressionner. Grandmaman m’a regardé et a ensuite demandé à Rémy et Jack de m’emmener dehors chercher la nourriture. Je me disais qu’on allait juste à la salle de salaison mais on a continué à marcher. On est entrés dans un bouiboui au bord du marais, et ensuite sur un bateau. Rémy m’a regardé et m’a demandé si je savais utiliser un fusil. » 

« Tu savais ? »

Papa hoche la tête. « Bien sûr que oui. Alors j’ai dit oui et il m’en a tendu un. Ensuite Rémy a pris son harpon dans une main, et au bout il y avait une longue corde. Jack nous a emmenés avec le bateau dans le marais et nous avons observé et attendu. Bientôt, le plus gros alligatoir qu’on n’avait jamais vu a sorti les yeux de l’eau. »

« Grand comment Grandpère ? »

Papa écarte ses bras en grand. « Plus grand que ça. » Christian écarquille les yeux. « Et bien, avant que je ne réalise ce qui se passait, Rémy a pris son harpon et l’a piqué dans l’alligator, juste sur la nuque. »

« Ouille ! »

« Ouaip. C’est ce qu’a pensé l’alligator. Il s’est échappé aussi vite qu’il le pouvait, en entrainant Rémy avec lui par-dessus bord. Rémy se tenait à la corde de toutes ses forces. J’ai regardé Jack et il a juste haussé les épaules et a commencé à diriger le bateau vers l’endroit où Rémy et l’alligator se trouvaient. Il nous a fallu nous battre à trois pour emmener ce vieux là sur notre bateau et le rapporter à la maison de Grandmaman. »

« Vous l’avez mangé, Grandpère ? »

« Bien sûr. Mais pas ce soir-là. J’ai été invité quelques jours plus tard. »

« Tu étais beau quand tu es revenu ? »

« Non. Je pense que c’était la façon de Grandmaman de me dire de ne pas porter de costume. »

Robie secoue la tête. « Grandmaman aime bien faire comprendre son point de vue des plus étranges façons. »

« Etranges mais efficaces », je dis. J’embrasse la tête de Collin. Il commence à remuer un peu alors je sais qu’il est réveillé. Il va vouloir manger dans quelques minutes. Voyons d’abord si Christian et moi avons du succès. « Très bien, Christian, commence à tirer sur notre ligne vers toi très doucement. On ne veut pas faire peur aux langoustes. »

Il m’obéit bien, tirant à la bonne vitesse. Quand il la sort de l’eau, je tends le filet pour capturer les deux langoustes accrochées. « Ouais ! » S’exclame-t-il en faisant un mouvement de pompe, poing fermé. Bon sang que c’est mignon.

Je regarde les deux langoustes dans le filet. La plus commune des espèces dans le bayou est la red swamp. Les adultes font autour de quinze centimètres, tout le reste est trop jeune. « On dirait bien que tu as attrapé un bon et un autre qu’on va rendre à sa maman. » Je jette les deux à côté de nous dans une poële de Mama que Papa a piquée il y a un moment pour pouvoir justement évaluer les plus jeunes. Je jette celle qu’on va garder dans la glacière.

« Comment tu peux dire ça, Tante ? »

Je montre celui qui reste. « Et bien, il est petit pour commencer. Et tu vois comme il a plus de vert que de rouge ? » Christian hoche la tête. « Les adultes sont rouge foncé sur le côté et noires sur le dos. De quelle couleur est la queue de celle-là ? »

Christian regarde de plus près. « Elle est marron avec des rayures marron. »

« Ça veut dire que c’est un bébé. On le laisse rentrer à la maison. On viendra lui rendre visite plus tard. »

Christian prend la poële et rejette le petit dans l’eau. « Quand Collin sera assez grand pour pêcher ? »

Je souris. « Nan, un peu avant, petit homme. »

 

* * *

 

Je prends une autre inspiration profonde. Je m’éclaircis la voix, sachant que ce n’est pas moi qui sent comme ça, et que Brennan ne s’est pas roulée dans une mare de boue depuis qu’elle est rentrée avec Brian un petit peu plus tôt. En fait, la dernière fois que j’ai regardé, ils étaient hors service sur le sol du séjour. Apparemment, faire du shopping avec Grandmere Cécile est une expérience vraiment fatigante.

Je ferme lentement la porte du frigo et je trouve Harper et mon fils dans la cuisine. Collin fait des bonds dans son sac de transport et Harper se tient là avec un sourire idiot sur les lèvres. « Salut, mon chou, on est rentrés. »

Comme si je ne le sentais pas. « Et vous avez rapporté la moitié du marais et une grande partie de son odeur avec vous. »

« On voulait partager cette expérience avec toi. »

Elle tente de se pencher pour m’embrasser mais je mets un doigt en plein milieu de son front, l’arrêtant net. « Oh, non merci. J’ai eu assez d’expériences pour la durée de cette vie. Si je voulais aller batifoler dans le marais, j’y serais allée avec vous. »

Elle ricane. « Comme si. »

« Exactement », je la taquine en montrant la salle de bains toute proche. « Je préfère garder la saleté dans la salle de rédaction et dans la chambre à coucher, Tabloïde. Alors si tu comptes te rapprocher même un peu de moi bientôt, tu vas aller te laver en entier et t’assurer que tu frottes la petite chose que je tends à reconnaître comme mon fils, tant que tu y es. »

Elle prend un moment pour me faire faire un signe de main par Collin. « Salut, Maman ! Je suis là. Tu veux m’embrasser ? »

« Pas tant que tu pues comme ça, mon pote. Dis à ta Mama de te faire prendre une douche d’abord. »

« D’accord. Après tu m’embrasseras ? » Je ne peux pas m’empêcher de rire alors qu’il continue cette conversation.

« Absolument. Assure-toi qu’elle te lave derrière les oreilles. »

Elle cache le visage de Collin derrière ses petites mains. Il rit et machouille ses doigts. Harper dit, pour le compte de Collin, « Oooh, Mam. »

Ma première protestation ‘Oooh, Mam.’  « Allez. Sors avant que je ne t’envoie dormir avec Kam ce soir. Tu me fais couler les larmes. Le lait va cailler ensuite. »

Elle commence à se diriger vers la porte mais tourne sur elle-même et essaie de voler un rapide baiser. Mon doigt retrouve le chemin de son front. « Je vais te blesser si tu continues, l’Etalon. » Je lève le plâtre. « J’en ai le pouvoir. Va te laver. »

Harper rit et abandonne, se dirigeant à contrecoeur vers la douche.

 

* * *

 

Je ne peux pas croire qu’on ait fait ça. Est-ce que ça fait vraiment plus de quatre mois depuis que ces deux petits sont entrés dans nos vies ? J’ai l’impression de les avoir eus de tous temps, et aussi juste depuis un instant. Etre parent est une chose étrange dans ce sens.

Je tire sur le vêtement de Brennan. C’est une si belle petite fille. Vêtue d’une robe en satin vert foncé, avec un nœud, elle est la véritable image du sucré-épicé de la comptine. Ses cheveux poussent maintenant et lui donnent le même air angélique que sa maman. Rien qu’hier elle a commencé à essayer de nous répondre. Nous étions si excitées. Je doute qu’on pensera la même chose dans seize ans. Mais maintenant, chaque fois qu’on lui parle, elle commence à balbutier beaucoup. C’est spécifique et c’est assurément une conversation de sa part. J’aimerais avoir une machine à traduire.

Collin est très pimpant. Il porte un costume bleu foncé avec des bretelles en tissu. Donnez-lui une mallette et il est prêt à aller au cabinet d’avocats. Robie l’a désigné comme son associé, mais Gerrard a dit qu’il pourrait être un stagiaire en droit. Je présume que ça répond à la question de savoir si Gerrard a prévu de se présenter aux sénatoriales de l’an prochain. Je ne sais pas ce qui serait le plus corrompu en Louisiane, la politique ou la loi. C’est plutôt la même chose.

Kels finit de donner des instructions au photographe. Journaliste un jour… je la taquine avec ça mais je sais que quoi qu’elle ait dit au gars, c’est du béton. Elle connait la lumière et les angles parce qu’elle a vécu avec pendant des années. Je pourrais aussi faire les photos, mais je suis heureuse ici avec les enfants. En plus, ce gars est terrible. Il a fait des séances de photos privées pendant des années et a fait tous les portraits de la famille Kingsley. Une fois terminé chez nous, nous allons l’emmener ainsi que les enfants chez Mama et Papa pour en faire d’autres.

Je lève les yeux pour voir Kels s’avancer et je dois me rappeler que nous avons de la compagnie. Elle porte une robe vert foncé qui se pose à la perfection sur chaque courbe de son corps.

Elle est à moi.

J’ai gagné, j’ai gagné, j’ai gagné. Le vieux refrain me revient facilement.

Elle attrape Brennan et l’installe sur ses genoux. Gourou Rou porte bien son surnom. Aucun doute pour savoir à qui est cette enfant. Brennan se tient assise bien droite. Tant qu’elle a un peu de soutien, tout va bien. Je prends Collin et je le mets près de sa sœur. « Pouvez-vous faire une photo d’eux trois pour moi ? » Je demande au photographe.

« Mon cœur, viens par ici », objecte Kels.

« Je vais le faire. Mais celle-là je la veux. »

A les regarder tous les trois, je réalise qu’ils sont tout ce que j’ai toujours voulu.

 

<Fondu au noir>

A suivre épisode 9

 

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Commentaires
I
Pas faux !
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F
Ecrevisses ou langoustes, le but c est de bien manger non? ;-)<br /> <br /> Merci pour le commentaire
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I
Bonjour Fryda,<br /> <br /> Comme d'habitude, c'est un véritable plaisir de lire tes traductions.<br /> <br /> Par contre, dans le bayou de Louisiane, ne pêcherait-on pas des ecrivisses plutôt que des langoustes ?<br /> <br /> Bonne continuation, on attend la suite avec impatience...
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