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Guerrière et Amazone
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  • Vous trouverez ici des Fans Fictions francophones et des traductions tournant autour de la série Xena la Guerrière. Consultez la rubrique "Marche à suivre" sur la gauche pour mieux utiliser le site :O) Bonne lecture !!
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30 décembre 2016

Chose promise, chose due, 7ème partie

Voir les avertissements en partie 1


Chose promise… chose due

7ème partie

Par Melissa Good (mai 1998)

(traduction Fryda – 2016)

La pluie de la veille semblait avoir éclairci l’air et Gabrielle dut lever la main pour se protéger les yeux du soleil intense tandis qu’ils sortaient du château. Elle songea que c’était un groupe mixte, consistant en Silvi, ses cousins, trois gardes, deux dames de compagnie et une barde.

Avec un bâton et un loup. Le bâton parce qu’elle savait ce que dirait Xena si elle allait se promener sans être, comme le disait la guerrière, préparée au pire et le loup parce qu’Arès avait simplement refusé de la quitter. Gabrielle se demanda brièvement si Xena avait passé quelques heures… ok, jours… dans les bois à entraîner l’animal pour qu’il reste collé à elle comme une puce sur un chien et elle finit par décider que la guerrière n’en avait pas eu le temps.

Il semblait qu’Arès avait décidé d’être l’assistant de sa maman. « Tu commences même à lui ressembler », fit remarquer la barde tandis que le loup aboyait sur une Elanora qui se plaignait en parlant du nez. « C’est très méchant, Arès. »

Il cligna des yeux et remua la queue puis il colla son museau à son genou et la suivit tandis qu’ils avançaient sur le large chemin pavé qui menait au marché.

L’air était frais et Gabrielle inspira une bouffée avec plaisir, s’étirant et savourant le soleil chaud sur ses bras nus. La longue route en pente surplombait le marché, où elle pouvait voir la brise faire claquer les bannières en tissu coloré des étals et cela lui apportait un kaléidoscope d’odeurs, un mélange de viande rôtie, d’épices, une touche de cire d’abeille odorante, et des parfums capiteux. Elle enroula ses doigts experts autour de son bâton et rattrapa Silvi, qui avançait aisément, s’assurant que sa jupe ne touche pas les pierres.

La barde jeta un coup d’œil à sa propre tenue, ayant décidé de porter à nouveau son habit amazone et elle était contente de ne pas avoir les mêmes soucis. L’air chaud et le soleil étaient agréables sur son corps presque nu et elle se rendit compte qu’elle s’était vraiment habituée à la liberté que lui apportait le vêtement ouvert, et ça faisait longtemps qu’elle ne se sentait plus embarrassée de le porter.

Elle recourba les lèvres en se souvenant avoir laissé derrière elle son habit de villageoise pour la première fois, après les Amazones… échangeant sa longue jupe plissée et sa blouse de paysanne pour le haut couleur ambre artisanalement tissé, la courte jupe et les bottes de sa Nation d’adoption. Elle avait eu une impression… vraiment étrange, comme si bien plus que son vêtement avait changé, et maintenant, quand elle regardait la longue courbe de son histoire personnelle, elle savait que ça l’avait assurément fait.

« Tu aimes bien cette couleur ? » Avait interrogé Gabrielle, tirant avec hésitation sur la jupe couleur rouille et sa nouvelle chemise taillée.

Le sujet de cette interrogation avait cligné des yeux et eu l’air momentanément perplexe, assise contre une bûche à réparer une pièce de l’équipement d’Argo. « Hum. » Le regard de Xena avait lentement voyagé de ses bottes épaisses au top court et une lueur légère et presque espiègle était apparue. « C’est… très différent de l’autre chose », avait répondu la guerrière d’un ton spéculatif. « Heu… c’est… pas mal. »

« Tu le penses vraiment ? » Elle avait prié pour être rassurée. « Je me sens si… heu… » Ses doigts avaient effleuré son estomac dénudé. « Hum. »

Un haussement de sourcil noir. « Tu es très bien. Détends-toi. » Xena avait soupiré. « C’est plus pratique aussi… tu ne vas pas glisser là-dessus. »

Gabrielle avait baissé les yeux, touchant le bord de la jupe, qui lui arrivait à mi-cuisses, exposant ses jambes qui avaient commencé ces derniers temps à prendre une tonalité musclée sous la peau douce. « Hum… non », avait-elle soupiré puis elle s’était assise sur la bûche près de Xena, ramenant ses pieds bottés sous elle et entourant ses genoux de ses bras. Ses doigts tiraient nerveusement sur la jupe et finalement la guerrière l’avait regardée à nouveau.

« Qu’est-ce qui ne va pas ? »

« R… rien. » Gabrielle s’était levée et avait à nouveau ajusté sa nouvelle tenue, faisant les cent pas tout en s’entourant de ses bras. « C’est… c’est juste que… je me sens bizarre. » Elle avait fait une pause. « Différente. » Son regard était allé vers le long bâton mal taillé posé tranquillement contre ses affaires. « Je me sens différente. »

Xena avait posé le morceau de selle et l’avait étudiée avec un léger froncement de sourcils. Finalement elle s’était levée et avait marché vers Gabrielle, lui avait mis les mains sur les épaules et l’avait fait tourner pour lui faire face. En silence, elle avait ajusté les nouveaux vêtements de la barde, arrangeant les demi-manches avant de tirer un peu sur la ceinture. Puis elle s’était penchée en arrière et avait eu un bref hochement de tête. « Tu es bien. » Une pause. « J’aime bien. »

Une légère rougeur avait coloré le visage de Gabrielle, mais elle avait souri. « Vraiment ? » Elle avait baissé les yeux, se trouvant bizarrement plus heureuse de sa nouvelle tenue. Elle avait regardé à nouveau ces yeux bleus étincelants avec gratitude. « Merci », avait-elle dit à Xena et elle l’avait pensé.

Xena s’était contentée de hocher la tête et avait tiré une dernière fois sur la chemise, laissant sa main tomber en effleurant accidentellement les côtes dénudées de la barde du bout des doigts.

Gabrielle avait éclaté de rire et s’était reculée, les bras contre ses côtes. « Hé ! » Elle avait levé les yeux pour voir les sourcils de Xena haussés de surprise et une expression légèrement intriguée sur son visage. « Ça chatouille », avait-elle expliqué un peu penaude.

Très lentement, un sourire sexy et diabolique s’était frayé un chemin sur le visage de Xena. « Ah oui ? Je ne savais pas que tu étais chatouilleuse. » Elle recula d’un pas.

« Heu… et bien, je ne le savais pas non plus… vraiment… je veux dire… ce n’est pas comme si j’allais… Xena ? Qu’est-ce que tu fais ? » Une pause. « Comme je l’ai dit, ce n’est pas  comme si j’avais l’habitude de me promener pratiquement à moitié nue, je… j… qu… Ouaouh! »

De longs doigts avaient chatouillé ses côtes et elle avait reculé, trébuchant presque dans sa hâte de s’en éloigner. « Xena ! » Elle avait couiné en attrapant une des couvertures d’Argo pour s’en envelopper. « Hé… ce n’est pas juste ! » S’était-elle plainte. « Tu as tout ce cuir sur toi… je ne peux pas te rendre la pareille ! »

Un haussement d’épaules. « Je ne suis pas chatouilleuse… alors ne t’embête pas à essayer », avait déclaré Xena d’un ton neutre tout en se rasseyant sur le sol avant de reprendre sa tâche de réparation, un minuscule sourire toujours sur ses lèvres. « Mais cette tenue ouvre définitivement des possibilités. »

Avec prudence, Gabrielle s’était assise près d’elle, regardant le jeu de lumière sur le visage de son amie. Les doux chatouillis de son toucher se chassaient toujours le long de son épine dorsale et elle avait décidé à ce moment-là que…

Elle aimait ses nouveaux habits. Beaucoup. Elle avait plié la couverture, s’était étirée sur le côté, croisant les jambes au niveau de ses nouvelles bottes et elle avait savouré la plaisante brise contre sa peau nue, levant de temps en temps les yeux pour regarder les yeux bleus tournés vers elle.

Oui.

Des possibilités.

Gabrielle sourit pour elle-même tout en bougeant son bâton et la brise effleura à nouveau sa peau. Ça avait fini par être une sacrée possibilité, oui.

« Gabrielle, est-ce que tu penses qu’un couteau sculpté serait bien ? » Dit Silvi en se tournant vers elle après avoir parlé avec Elanora. « Avec des cœurs… »

La barde tressaillit intérieurement. « Ah… tu sais, j’ai fini par penser qu’il ne fallait pas acheter ce genre de choses à des guerriers… ils savent habituellement ce qu’ils veulent, et ils sont très, très pointilleux au sujet des armes et tout ça. » Elle se souvint affectueusement de l’incident de la dague de poitrine, comme une exception, bien qu’elle ne l’ait pas prévue pour Xena. Mais elle en fait très certainement un meilleur usage.

« Oh. » La princesse fit tourner cette idée. « Et bien, peut-être… qu’est-ce que tu recommandes alors ? » Elle regarda la barde ardemment. « Quel genre de choses tu as achetées pour ton amoureux ? »

Hmm. « Des choses différentes… je présume… » Répondit-elle lentement. « Les bourses de ceinture, c’est toujours bien… ils n’en ont jamais trop… ces petits morceaux d’armure, et des fils, et les trucs qu’ils trimballent… c’est pratique. » Elle réfréna un bâillement. « On peut en faire graver un avec des initiales… ce genre de choses. » La bourse que Xena portait et qui contenait des choses personnelles était un cadeau de la barde, pour s’amuser, après qu’elle ait été blaguée trop de fois sur les choses qu’elle transportait dans son sac d’épaule. Elle avait trouvé une fois que la guerrière y gardait un tas de minuscules dents, dont elle n’avait pas réussi à avoir d’explication jusqu’à aujourd’hui.

Les yeux de Silvi brillèrent. « Oh… quelle idée formidable ! »

Gabrielle hocha la tête, son regard attiré par un étal proche. « Ici… regarde. » Elle s’avança et prit un joli morceau de cuir. « Une ceinture… c’est toujours pratique… » Expliqua-t-elle puis elle souleva un autre morceau. « On peut en faire faire une bourse de la même couleur… pour les assortir… hum… est-ce que tu as une couleur… préférée ? »

« Le rose », dit Silvi rayonnante.

« Hmm… peut-être pas… les guerriers ne sont pas vraiment… hum… le genre… rose… et pourquoi pas… et bien, là… pourpre ? » La barde leva un échantillon de cuir teinté. « Ils aiment le cuir. »

La princesse lui prit des doigts et l’examina d’un air douteux. « C’est vrai ? »

Gabrielle porta le morceau qu’elle tenait à son nez et inspira. « Oh oui. » Elle rit doucement. « Moi aussi, vraiment », confessa-t-elle d’une voix un peu embarrassée. « Ce n’était pas le cas avant… mais je présume que c’est venu comme ça avec le temps. » Il lui avait fallu une éternité pour s’habituer à l’odeur terreuse quand elles avaient commencé à voyager ensemble, vu qu’elle était pas mal entourée de celle-ci. Xena, bien sûr, portait peu autre chose et l’équipement d’Argo était fait de couches et de couches du matériau.

Mais graduellement… elle avait commencé à aimer l’odeur et même le contact, sans doute confortée par les nombreuses heures à se tenir à Xena quand elles chevauchaient sur le dos puissant d’Argo. Bien entendu, Xena prenait bien soin de son équipement et de celui de la jument, et elle ne les laissait jamais se salir, ce qui ajoutait probablement à l’attrait alors que la barde avait senti du cuir mal soigné et n’avait aucun souhait de renouveler l’expérience.

Elanora regarda par-dessus son épaule. « Tu ne peux pas simplement lui acheter une écharpe ? » dit Elanora en reniflant.

Silvi jeta un coup d’œil inquisiteur à Gabrielle, qui secoua négativement et solennellement la tête. « Gabrielle… quelle est la chose la plus romantique que tu aies donnée à ton chéri ? » Demanda-t-elle en repoussant Elanora avant de reprendre le morceau de peau sous les yeux attentifs du tanneur.

La barde s’appuya sur ses coudes. « Hmm… romantique ? » Mon cœur… mon âme… tout ce que je suis… oh, elle veut dire des choses matérielles. Bien. « Et bien… c’est une sorte de… j’ai appris à faire des nœuds un soir, quand nous voyagions et j’ai fait ce… genre de bracelet tissé… je pense. » Elle se rendit vaguement compte qu’elles avaient perdu Vasi en route et elle regarda autour d’elle pour le trouver, puis elle se dit qu’il en avait sûrement eu assez des achats et s’était éclipsé. Je le comprends.

La princesse soupira. « Fait de tes propres mains ? C’est romantique… est-ce que ton amoureux le garde ? »

Un sourire. « Oh oui… toujours. » Elle leva les yeux. « Parfois… ce sont des petites choses comme ça qui signifient le plus… pas… l’or et l’argent. »

Elanora ricana. « Je préfère passer sur la romance et avoir l’or. » Elle secoua la tête et alla vers un étal odorant avec l’une des dames de compagnie et un garde sur les talons.

Silvi claqua de la langue de dégoût puis elle regarda le tanneur. « J’aimerais que tu fasses une bourse de ceci. » Elle le tendit avec un grand geste hautain. « Avec mes initiales en argent sur l’avant. »

L’artisan prit la peau et tâta son épaisseur puis il eut un signe d’approbation vers Gabrielle. « Ça va faire un beau sac léger, Vot’Majesté. »

« Je le voudrais pour aujourd’hui, s’il vous plaît », déclara Silvi. « C’est pour faire un cadeau. » Elle produisit une grande pièce et la lui tendit. « Je pense que ça suffira. »

Il cligna des yeux et accepta l’argent, lui faisant une courbette. « Oui, m’dame, ça va suffire. » Il leva la peau. « Je vais m’y mettre tout d’suite… j’l’apporte au château quand elle est prête. » Il se tourna alors. « J’te d’mande pardon… s’rais pas Gabrielle la barde ? »

Elle se redressa et lui fit un hochement de tête amical. « Oui, c’est moi. » Je me demande ce qui lui fait dire ça ?

Il laissa tomber la peau et lui prit les mains en lui souriant. « Mon père était à bord du bateau de Cécrops. » Son visage exultait. « J’peux pas te dire ce qu’on a ressenti quand il a passé la porte. »

Gabrielle eut un large sourire. « Ouaouh… c’est génial… je suis vraiment contente qu’il en soit sorti… ça avait été rude. »

« Belaris… y s’appelait, et moi c’est Eler… » L’homme lui secoua les mains. « Il a dit qu’il avait jamais vu quelqu’un comme Xena sauter sur ce navire… et comment elle avait trouvé un moyen de les faire sortir. »

« Je me souviens de lui », dit tranquillement Gabrielle. « Il tenait le gouvernail… c’est un des hommes qui nous a empêchés d’être attirés dans le tourbillon. »

Les yeux brun miel d’Eler brillaient d’une fierté inattendue. « Oui. » Il soupira. « Merci, jeune fille… d’nous l’avoir rendu. » Il lui pressa les mains. « Il t’a décrite comme une jeunette… il a dit qu’t’avais des yeux de la couleur de la mer un jour ensoleillé et le plus beau sourire qu’il avait jamais vu. »

Gabrielle eut un petit rire embarrassé. « Merci… je suis contente qu’il se souvienne de moi », répondit la barde, un sourire plissant son visage. « Je n’ai rien fait… mais je suis contente que ça ait marché. »

Il leva la main. « Ah… jeune fille… c’est pas comme ça qu’il a raconté… Si t’avais pas été attirée à bord, ils s’raient toujours là-bas », protesta-t-il.

Ça, approuva Gabrielle silencieusement, c’était vrai. « Et bien, je suis contente que ça ait marché », répéta-t-elle en lui faisant un autre sourire. « Dis à ton père que je le salue. » Elle se retourna pour voir Silvi, Elanora et les dames de compagnie, ainsi que les deux gardes qui la regardaient avec des grands yeux. « Euh… salut ? »

« Cécrops ! » Couina Silvi. « Le Marin Perdu, le capitaine du Bateau de la Malédiction… tu le connais ? » Elle frappa dans ses mains. « Oh… »

Gabrielle eut un faible sourire pour le tanneur et prit doucement le coude de la princesse, la poussant pour s’éloigner. « Ooooouiiiii… on peut dire ça », dit-elle dans un souffle. « Je te raconterai l’histoire en marchant. »

Elle n’en eut pas l’occasion, tandis qu’elles tournaient le premier coin et que tout ce qu’elle put voir fut des corps volants et des mains qui s’agrippaient. Un pur instinct, et trois années passées auprès de la plus grande guerrière de Grèce, lui fit pointer son bâton vers le haut à temps pour parer un grand gourdin qui venait sur sa droite et puis elle tournoya et esquiva, cognant le bout du bâton dans un genou pour faire une trouée dans la masse des attaquants.

Elle relâcha un cri qui les surprit, puis elle cloua un grand type, juste devant elle, qui essayait de passer un sac par-dessus la tête de la princesse. Silvi hurlait de terreur et Elanora faisait de même ; les gardes étaient enfouis sous de grands hommes grimaçants. Arès plongea sur sa droite, grondant et grognant, tandis que ses dents déchiraient du tissu et exposait la plus grande partie du derrière de l’un des combattants.

« Je ne pense pas ! » Aboya Gabrielle en s’appuyant sur son bâton avant de frapper un type sur le côté avec un puissant coup de pied. Il hurla et tomba, se tenant les côtes, et elle saisit l’opportunité de s’engager dans l’ouverture qu’il laissait et elle tournoya, sentant le craquement sonore tandis que son arme frappait le crâne de l’homme qui essayait de passer le sac au-dessus de Silvi. « Lâche-la, espèce d’abruti ! »

Elle se laissa tomber sur un genou et exécuta son coup favori, le balayage inversé, qui frappa les jambes de deux hommes et les fit tomber rudement sur le sol. Puis elle se releva et attaqua le plus proche de Silvi avec un uppercut vicieux. Son bâton frappa la mâchoire de l’homme et elle vit voler du sang tandis qu’il s’écroulait, se tenant le visage. Elle vint devant la princesse et leur tint tête, fouettant de son bâton tout en les avertissant. « Fichez le camp d’ici, espèces de petites canailles ! »

Dans sa tête, elle entendit le rire de Xena. « Il faut que tu travailles plus tes jurons, mon amour. »

Cela faillit la faire sourire, mais elle ne le fit pas, elle était trop occupée à reprendre son souffle et regardait avec incrédulité les hommes qui partaient en trébuchant, et ils se retrouvèrent seuls dans le petit cul-de-sac encombré. Lentement, elle se redressa et baissa le bout de son bâton, enroulant une main autour de sa rondeur familière, et elle s’appuya tout contre. « Pfiou. »

« Oh… Gabrielle… » Sanglota Silvi en la regardant de ses yeux gris écarquillés. « Tu étais magnifique… oh… tu es une vraie héroïne ! » Elle lutta pour se mettre debout serrant le bras de la barde surprise et embarrassée. « Tu m’as sauvée ! »

« Heu… » La barde lui tapota la main. « Oui… et bien… à ton service… mais… qui étaient ces types ? » Demanda-t-elle. « Et pourquoi voulaient-ils te kidnapper ? »

Silvi la fixa, les yeux exorbités. « K… k… kkk… id… » Le mot traîna tandis qu’elle s’évanouissait, heureusement attrapée par un des gardes tremblants qui avait réussi à se mettre péniblement debout et venait en boitant. Il brassa de l’air faiblement d’une main devant le visage de la princesse.

Gabrielle les étudia puis elle leva les yeux vers Elanora qui se tenait tranquillement debout, ajustant ses vêtements. La jeune fille aux cheveux noirs leva les yeux et fixa avec cran la barde pendant un long moment, puis elle alla près de sa cousine et commença à lui tapoter la joue.

Ce n’est qu’à ce moment qu’elle eut conscience du fait qu’elle avait mal au côté et qu’une longue estafilade rougissait sa jambe, et qu’elle s’était tordu le genou. Et elle soupira. Son âme sœur n’allait pas être ravie. « Allons… nous ferions bien de retourner au château », déclara-t-elle tranquillement, utilisant son bâton pour enlever une partie du poids sur son genou. Les environs étaient devenus étrangement calmes et, sauf leur présence, désertés. Elle vit des regards furtifs qui les épiaient de derrière des rideaux, mais ils disparurent dès qu’elle concentra son attention sur eux.

Qu’est-ce qui se passe donc ici ? Se demanda Gabrielle tandis que les gardes soulevaient avec soin la princesse évanouie et qu’ils se préparaient à bouger. De quel côté étaient-ils vraiment ?


Xena s’appuya contre la table, étudiant les cartes des environs avec des yeux tranquilles, mais attentifs, vérifiant les angles et trouvant la meilleure route pour une approche. « Ici… » Elle bougea son poids sur une main et traça une route, tandis que deux des soldats seniors regardaient par-dessus son épaule. « Il va probablement apporter une petite troupe par ici, et laisser le reste de son armée… » Le doigt bougea. « Ici, derrière cette colline parce que nous ne pouvons pas le voir depuis la cité. »

Le plus petit des deux soldats grogna. « Tu penses qu’il est correct ? »

La guerrière haussa les épaules. « Je ne l’ai jamais rencontré, alors je ne sais pas, mais… si j’avais une force bien plus importante que celle que je vais rencontrer… je ne le serais pas. » Elle s’interrompit. « Je me fiche de qui les dirige. »

« Eh », grogna le plus vieux. « Mais tu t’attaques pas à toi-même, hein ? »

Xena lui lança un regard puis laissa échapper un rire. « Je pense qu’on se moque de moi ici », commenta-t-elle ironiquement tandis qu’elle retournait son attention à la carte. Elle garda un visage neutre, mais une petite partie à moitié oubliée d’elle-même s’enroula autour du compliment, lui donnant un sentiment coupable de joie. Puis elle déglutit soudainement quand une vague inattendue de nausée la frappa. Ouaouh. Elle se concentra sur la table, qui semblait balancer doucement et elle prit plusieurs inspirations profondes puis tendit la main et attrapa le point de pression sur son poignet, sentant le chatouillis quand elle le frappa.

Après un long moment de vacillement où elle n’était pas sûre de pouvoir contrôler son corps, le sentiment diminua lentement. Dieux. Elle se mâchouilla la lèvre et prit une inspiration précautionneuse.  Et bien, je n’ai pas eu de nausée de cette force depuis des années… je ne vais pas commencer maintenant.

« Gén’ral ? »

Elle tourna la tête pour voir Bennu qui se tenait là avec un morceau de parchemin à la main. « Oui ? » Elle ravala plusieurs fois pour être sûre d’elle et se redressa. « Est-ce que c’est le déploiement des troupes ? »

Il cligna des yeux, le front légèrement plissé. « Oui… » Il lui tendit le document. « Ah… vous voulez un verre d’eau ou aut’chose ? »

Xena relâcha un souffle prudent. Génial. Je dois être aussi verte qu’un petit pois…  « Non… merci. »  Elle étudia le papier. « D’accord… les nouvelles positions de la garde sont en place ici et ici ? » Elle lui lança un regard acéré, un peu contrariée par sa faiblesse momentanée. « Et pour les préparatifs que j’ai demandés ? Est-ce que ces groupes sont revenus ? »

Bennu hocha la tête, rassuré. « Les nouveaux sont là, oui… et les provisions et tout ça sont en place… » Un sourire plissa son visage. « Ils ont du bon cheddar… le vendeur avait un mar… gén’ral ? »

Xena mordit fort l’intérieur de sa lèvre tandis que la simple suggestion du fromage à l’odeur forte faisait des ravages dans ses tripes. « Oui ? » Elle croisa les bras sur sa poitrine et repoussa le sentiment. « Du cheddar, hein ? »

Il hocha la tête. « Z’en voulez ? Je pourrais aller… »

La guerrière déglutit. « Non… non… merci… je viens juste de déjeuner », l’assura-t-elle. « En fait, je vais aller chercher des… hum… papiers que j’ai laissés en haut. Je reviens tout de suite. »

Elle traversa l’armurerie et se glissa dehors où le vent frais lui apporta un soulagement bienvenu. « Dieux. » Xena lança un regard aux nuages blancs cotonneux. « Attention à ce que tu demandes, Xena… parfois tu l’obtiens. » Elle massa son estomac rebelle et tressaillit, puis elle alla vers la cour.

Alors qu’elle arrivait à la porte principale du château, une silhouette élancée aux cheveux noirs sortit de l’ombre et leva la main pour l’arrêter. « Un moment », dit le garçon.

Xena s’arrêta et se concentra sur lui. Elle évalua sa tenue et son attitude et en conclut que c’était probablement le cousin de la princesse. « Oui ? » Demanda-t-elle d’un ton laconique.

Il prit une inspiration nerveuse. « Je peux te parler en privé ? Je pense que j’ai peut-être… des informations qui pourraient t’intéresser… peut-être qu’on… pourrait s’utiliser l’un l’autre. »

Oh bon sang. Xena soupira intérieurement. Je ne suis vraiment pas d’humeur pour ça. Cependant le garçon pourrait avoir quelque chose qui serait utile, alors… « Très bien… allons chez moi. » Elle se retourna et lui fit signe de la suivre. « Et ne perds pas de temps. »

Elle poussa la porte principale et entra à grands pas, remontant les marches d’un mouvement égal et puissant. Son corps l’avait surprise, vraiment… après la journée complète de combats ardus hier, et le mélange d’herbes qu’elle avait avalé la veille au soir, elle était sûre qu’elle le paierait très fort ce matin, mais… Elle sentit l’élasticité de ses mouvements et sourit un peu. A part son estomac rebelle, tout semblait être en parfait ordre de marche.

Bon sang que c’était bon. Ces derniers mois elle avait eu l’impression de lutter contre elle-même bec et ongles… tout lui était devenu difficile et elle avait été sujette à des douleurs et des maux comme jamais depuis des années. Mais maintenant… Elle prit une profonde et plaisante inspiration. Les choses semblaient remises sur la piste et elle n’était pas sûre de savoir si c’était le repos à la maison ou d’avoir résolu la tension entre son âme sœur et elle-même, ou bien une combinaison des deux.

Elle soupçonnait fortement que c’était le dernier cas. Ils atteignirent sa porte et elle souleva le loquet, poussa pour ouvrir et surprit Mestre qui finissait juste de tamponner les oreillers. La jeune fille sursauta et hoqueta puis elle lui lança un regard maussade tandis qu’elle retournait son attention au lit.

« Sors d’ici », ordonna le garçon en claquant des doigts puis il se tourna et se retrouva face à la cuirasse d'une princesse guerrière à l’air agacé. Surpris, il recula la tête et leva les yeux vers le regard bleu glacier qui semblait plonger tout au fond de lui.

« Je… » Xena s’avança le forçant à reculer. « Ne… » Un autre pas. « Supporte pas… » Il était maintenant contre la table. « Les petits garçons qui font claquer leurs doigts. » Elle lui lança un regard noir.

Il ouvrit la bouche puis la referma. Du coin de l’œil, Xena saisit l’expression sur le visage de Mestre, qui était passée lentement de la pâleur à une lueur temporaire de calme appréciation. La guerrière eut un bref souvenir de l’alter ego de son âme sœur, à une époque différente, et elle trouva un écho de cette expression. Elle tourna à nouveau son regard sombre vers le garçon. « Sois gentil ! »

« E… é… écoute… tu ne peux pas… » Il bafouilla.

Elle plissa les yeux. « Oh si je peux… » Sa voix tomba d’un ton. « Je peux faire tout ce que je veux. » Parfois, songea-t-elle, c’est bon d’être mauvais. Elle attendit que Mestre ait fini ce qu’elle faisait puis elle lui fit un signe de tête. « Merci. »

Le regard noir l’évalua. « A votre service », répondit la servante d’une voix douce. Puis elle prit ses affaires de nettoyage et sortit, se glissant par la porte avant de la refermer derrière elle.

Xena soupira puis se retourna et alla vers leurs sacoches, s’agenouilla près d’elles et sortit son kit de soin bien usé. « Parle », dit-elle par-dessus son épaule, tandis qu’elle sortait une combinaison d’herbes et en versait une bonne pincée dans une tasse. Elle se leva et alla jusqu’au bassin d’eau, testant la qualité d’un doigt prudent à ses lèvres avant d’utiliser la louche pour remplir la coupe.

« Et bien ? » Elle se retourna et s’appuya contre la table sur laquelle se trouvait le bassin, faisant doucement tourner la tasse tandis qu’elle laissait les herbes infuser. L’odeur âcre et propre monta vers elle et elle prit prudemment une gorgée, laissant le médicament couler le long de sa gorge. Je vais vraiment en avoir besoin de plus si ce truc continue. Elle sentit ses tripes grondeuses se calmer un peu.

Le garçon croisa les bras et alla vers la fenêtre ; il regarda le ciel, visiblement en train de se recomposer. Il finit par se retourner et lui faire face. « On te tend un piège. »

Xena croisa les chevilles et prit une longue gorgée de son infusion. « Ah oui ? » Demanda-t-elle d’un ton nonchalant. « Et comment ça ? » Elle sentit les herbes commencer à faire leur effet et elle soupira un peu de soulagement.

Il l’étudia. « Le seigneur de guerre qui vient ce soir a prévu un plan… pour empoisonner ton armée et prendre le contrôle de la cité. »

Elle se permit de hausser un sourcil, un seul. « Vraiment », murmura-t-elle en se repoussant du mur pour aller vers le fauteuil capitonné. « Et de quel plan s’agit-il ? » Elle se laissa tomber dans le siège et passa négligemment une longue jambe par-dessus un accoudoir.

Avec précautions, il s’assit également, sur le divan qui lui faisait face. « Lui… la princesse et plusieurs vieux nobles qui la suivent. »

Elle l’observa de ses yeux intelligents. « Mais ne te suivent pas toi. »

« Non », répondit-il avec franchise.

« Pourquoi ? » Demanda Xena. « Ne me dis pas que tu aimes bien Garanimus. »

Le garçon secoua la tête et se releva, faisant les cent pas nerveusement. « Je le déteste… en fait… si tu n’étais pas venue, j’aurais suivi le plan moi-même. » Il se retourna et la regarda. « Les choses sont différentes maintenant… j’étais près des baraquements, on pouvait à peine penser que c’était le même groupe d’hommes. »

« Ça n’explique toujours pas pourquoi », dit Xena. « Il me semble à moi que tu as une bonne chance de te débarrasser d’eux tous… quel est le problème ? »

Il soupira. « Ce… Framna… la princesse est obnubilée par lui. Elle a l’intention d’en faire son consort. » Il se retourna. « Il n’est pas fait pour ça et elle… c’est à peine une enfant et elle n’est pas prête à régner. »

« Oui oui », dit la guerrière d’un air songeur, en prenant une longue gorgée. « Et tu penses qu’elle et lui ne doivent pas diriger cet endroit, hein ? » Elle hocha un peu la tête. « Très bien… je peux voir ça. »

Il se redressa. « Ah oui ? Je veux dire… bien sûr que oui. » Il se frottait les mains nerveusement tout en revenant s’asseoir. « Je dois faire ce qui est le mieux pour la cité… Tu comprends ? »

Un lent sourire languide passa sur les lèvres de Xena. « Oh…. Je comprends », l’assura-t-elle d’une voix soyeuse. « Alors… quel est ton plan ? » Une pause. « Et comment je m’insère là-dedans ? » Tch. Un petit orbe mental roula. Séduire les petits garçons… dieux, Xena… comme tu peux être tombée bien bas. « Hmm ? » Son regard passa sur lui d’un air appréciateur et elle laissa son sourire s’agrandir un peu.

Il lui souriait maintenant en retour, plus à l’aise et flatté de son intérêt. « Je vais faire en sorte qu’il te serve… vraiment… ce sera simple. Simplement éviter l’empoisonnement et renverser ce Framna… Il sera discrédité et la princesse aussi… son jugement se montrera gravement erroné. » Il fit une pause. « Je m’assurerai que les gens sachent qu’il avait eu l’intention de prendre le contrôle de la cité et que… nous… nous l’avons empêché. »

L’autre sourcil eut sa chance. « A six contre un… ce n’est pas bon », objecta-t-elle tranquillement.

Il se pencha en avant et la regarda. « Je ne souhaite pas faire un compliment, mais j’ai entendu des histoires particulièrement incroyables sur toi ces derniers jours… je crois que ces chances contre nous ne te déconcertent absolument pas. » Il hésita puis ajouta délicatement. « Mais… peut-être que je me trompe. »

Oooh…  Xena faillit se mettre à rire. On joue sur ma fierté, petit ? Malin. Tu as un point pour ça. « Et j’en retire quoi ? » Elle eut un sourire prédateur. « En présumant qu’on te met à la tête… ce que je crois être ton but. » Elle s’interrompit, très délibérément. « Mais… peut-être que je me trompe. »

Il faillit, faillit seulement, sourire. « Nous nous comprenons », confirma-t-il d’un ton narquois. « Nous aurons besoin d’une armée… et celle que tu as maintenant est de bonne taille… pas trop grande, pas trop petite… » Son regard était posé avec attention sur son visage. « Bien sûr… la cité a besoin d’un chef militaire dans ce cas… un commandant royal de la garde, pour ainsi dire. » Il leva la main et fit un geste. « De plus grands quartiers que ceci, bien entendu… et tous les serviteurs que tu… » Il pinça les lèvres. « Désires. »

Des yeux bleus brillèrent. « Qu’est-ce qui arrivera à Garanimus ? »

« Qu’est-ce que tu veux qu’il arrive à Garanimus ? » Fut sa réponse. « Ce sera totalement à toi de décider… j’ai entendu dire que vous deux aviez… une histoire. »

Xena le regarda en silence pendant un long moment, tout en réfléchissant. Il était nerveux, attendait sa décision. Ça se voyait dans sa respiration, courte et faible et la sueur sur son front. « Très bien », finit-elle par dire très calmement. « Parle-moi de ce plan avec le poison. »

Une cruauté furtive passa sur son jeune visage de manière inattendue. « Demande à ta petite amie. » Sa bouche forma un sourire narquois. « Demande-lui au sujet du porto qu’elle va apporter ce soir… rempli d’assez de drogues pour assommer un centaure. » Il regarda son visage avec avidité pour guetter une réaction, déçu quand il n’en vit pas. « Tu ne me crois pas ? »

« Oh », souffla Xena doucement. « Si… je te crois. »

Il haussa les sourcils. « Tu n’es pas surprise », dit-il doucement. « Elle pense que tu lui fais confiance. » Il sourit lentement. « Mais tu es plus maligne que ça, pas vrai ? »

La guerrière le regarda directement tout en vidant sa tasse. « Ne fais jamais confiance à personne, gamin. » Elle posa la tasse. « Tu vivras plus longtemps comme ça. » Elle se leva et s’étira. « J’ai des plans à mener. »

Il se leva également mettant les épaules en arrière dans un soulagement évident. « Je sais que je fais ce qui est juste pour mon peuple », déclara vertueusement le garçon. « Et tu ne le regretteras pas non plus, Xena… je te le promets. »

Xena lui fit face et eut l’impression d’avoir dix ans de plus en voyant son visage juvénile. Elle leva la main. « Garde la tête baissée ce soir… ça va chauffer. »

Il lui attrapa la main avec prudence, enroulant ses doigts autour de son avant-bras, sentant les muscles puissants sous la peau douce. « Ne t’inquiète pas… je le ferai. »

Xena soupira et leva la main pour se gratter la tête et se passer les doigts dans les cheveux. « C’est plutôt compliqué comme affaire… même pour quelque chose dans lequel Gabrielle est impliquée », murmura-t-elle à la pièce vide, ramassant ses papiers puis laissant son regard passer sur le dessus du bureau.

Le journal de Gabrielle s’y trouvait, retenant par le coin un parchemin sur lequel se trouvait un grand X.

« Hmm. » Xena passa le doigt sur le matériau. « X marque un endroit ou bien X signifie moi… quelles sont les chances pour l’un ou l’autre ? » Elle tira sur le parchemin et le déplia, surprise quand plusieurs petits objets noirs en tombèrent. Elle regarda de plus près et sourit. Des pépins de pomme.

Le morceau comportait des écrits, bien entendu, et elle le prit avec elle dehors, dans la lumière, où elle s’appuya contre le balcon et l’étudia.

Salut.

Je savais que tu ouvrirais ceci. Ça aurait pu être une carte au trésor, tu sais… avec ce grand X marqué à l’endroit du trésor et peut-être que je voulais que ce soit un secret.

Oui, en effet.

Merci pour la pomme. Elle était délicieuse et c’était agréable d’avoir quelque chose de sûr et de goûtu à manger ce matin avant que j’aille rendre visite à la Princesse Minaude.

Sois prudente… je sais que tu t’amuses beaucoup avec les garçons, mais ces épées sont acérées et je m’inquiète pour toi parfois. Ce qui est plutôt idiot, je sais, mais je ne peux pas m’en empêcher. J’espère que ça ne te rend pas trop furieuse.

Je voulais juste t’avertir… je vais faire des achats avec la princesse. J’ai promis de ne pas revenir avec des petites fanfreluches roses pour attacher ton fourreau, mais à part ça… C’est bon.

Je pense à toi.

G.

Xena se pencha en arrière et laissa la douceur des mots la submerger, sentant un pincement poignant quand elle se souvint de combien ces petites notes lui avaient manqué pendant leur éloignement. Une chose tellement minuscule… mais elle se souvenait en avoir trouvé une vieille au fond de l’une de ses sacoches de cheval, en chemin vers la Chine.

Ça lui avait fait tellement de mal de l’ouvrir. Elle avait juste refermé la main autour et avait fixé l’obscurité d’une nuit nuageuse sur une mer démontée, et elle avait ressenti la perte. Elle avait tenté de la jeter par-dessus bord, vraiment tenté, mais quelque part, ce maudit petit paquet refusait de quitter sa main. Au lieu de ça, elle l’avait remise, fermée, à l’endroit où elle l’avait trouvée.

Elle plissa le front et rentra, avec l’intention de récupérer ses papiers et de retourner à l’armurerie. Mais… comment avait-elle fini par fouiller dans ce sac ? Avant qu’elle ne le sache, ses doigts tenaient l’objet sale et abîmé devant ses yeux.

Non. Sa main commença à descendre pour le ranger. Abandonne ces souvenirs, espèce de folle.

Elle ne comprit jamais comment le parchemin se retrouva ouvert et comment elle-même se retrouva à le tenir sous la lumière du soleil qui entrait dans la pièce, ses yeux irrésistiblement attirés par les lettres effacées.

Xena.

Nous sommes toutes les deux dans un endroit obscur. Et… je sais que tu seras seule quand tu liras ceci, parce que tu seras sur le bateau.

Et pas moi. Je voulais juste que tu saches combien c’était difficile pour moi. Je pensais que… ce serait facile de tourner le dos. Après tout, nous ne sommes plus vraiment… amies, pas vrai ?

Mais ce n’est pas facile. Ça me ronge tellement à l’intérieur que je ne peux pas dormir. Je ne peux pas réfléchir clairement.

Je ne peux pas te tourner le dos, peu importe combien je tente de me convaincre que c’est la bonne chose à faire pour nous deux. Alors… ce que je voulais que tu saches, même si tu ne veux pas l’entendre, c’est que quand ce maudit bateau reviendra au port ici, je serai là à t’attendre.

C’est stupide parce que nous ne nous parlons presque plus.

Mais je ne peux pas abandonner. Tu signifies trop de choses pour moi, Xena. Et n’ose même pas ne pas revenir.

Peut-être qu’après que tu seras partie un moment, quand nous nous reverrons, tu souriras. Et je sourirai et tout ira bien et tu sais quoi, je me suis rendu compte hier, quand je regardais par-dessus le feu, que la raison pour laquelle ça me fait si mal c’est que je t’aime encore.

S’il te plaît… sois prudente. Prends soin de toi.

Reviens à la maison.

Gabrielle

Xena se laissa lentement tomber dans le fauteuil et mit la tête entre ses mains posées sur ses genoux. Un flot d’émotions diverses la submergea et elle les laissa suivre leur cours avant de lever la tête et de la secouer doucement, fixant le parchemin. J’aurais dû l’ouvrir. Dieux. Elle pensait probablement que je l’avais fait et que je l’ignorais.

Est-ce que cela aurait fait une différence ? La guerrière fixa platement la pièce. Qu’aurait-elle fait si elle avait lu cela, à mi-chemin de la Chine ?

Nagé pour revenir. Lui indiqua son esprit ironique.

Avec un soupir, elle se leva et mit très précautionneusement le parchemin sous sa cuirasse, regardant la petite pierre autour de laquelle il avait été enroulé. Elle reconnut le caillou comme l’un de ceux qu’on trouvait à Amphipolis et elle jongla avec, puis elle le rangea, bien trop loin. Il fallait qu’elle en parle à Gabrielle plus tard… la barde devait savoir que sa douce supplique ne s’était pas écrasée contre un mur d’indifférence.

En fait… elle s’assit à nouveau devant le journal de la barde et l’ouvrit avec hésitation à une page blanche, celle qui venait après sa dernière entrée. Elle prit la plume et mordit le bout pour l’humidifier puis elle la trempa dans la petite bouteille d’encre en céramique que Gabrielle avait laissée ouverte.

Elle se concentra et commença à écrire, ce qu’elle fit pendant presque un quart de chandelle avant de s’arrêter et de relire ses mots. Et bien, il n’y avait aucun doute sur qui était la poétesse dans cette relation, elle tressaillit, mais… Gabrielle disait toujours que c’était l’intention qui comptait.

Elle relut à nouveau la page et espéra que c’était le cas. Les mots n’étaient certainement pas sa spécialité. Avec un soupir, elle data l’entrée et ensuite, en bas, elle la signa avec un grand geste avant de mettre du sable sur l’encre et de souffler pour la sécher.

Satisfaite, elle prit ses parchemins et se dirigea vers la porte, s’arrêtant dans l’entrée pour regarder en arrière le journal silencieux et elle rit. « Je n’ai pas fini d’en entendre parler. » Elle secoua la tête d’un air ironique, mais sourit alors qu’elle se glissait dehors et descendait l’escalier.


La princesse revint à elle, peu de temps après, alors qu’ils l’arrosaient d’eau. Elle hoqueta et cligna des yeux, fixant le garde inquiet ; puis son regard alla vers Gabrielle. « Qu’est-ce qui s’est passé ? »

La barde s’appuya sur son bâton, ôtant le poids de son genou. « Tu t’es évanouie », lui dit-elle. « Quand je t’ai demandé qui voudrait te kidnapper. »

Elle roula de nouveau les yeux, mais la barde la tapota rapidement sur le bras. « Hé… allez maintenant… ce n’est pas si mal. Tu sais combien de fois j’ai été kidnappée ? »

Distraite, Silvi la regarda. « Vraiment ? »

Gabrielle hocha la tête avec un air ironique. « Oh oui… ça arrive tout le temps », l’assura-t-elle. « La question c’est, qui voudrait te faire ça à toi ? »

La princesse cligna des yeux. « Et qui voudrait te le faire à toi ? »

Ils regardèrent tous Gabrielle, curieux. « Oui… » Murmura Elanora. « Je me le demande aussi. » Son regard étudiait la barde.

Ah. Gabrielle mâchouilla sa lèvre. « Et bien… je… voyage avec Xena… vous vous souvenez ? » Leur dit-elle, lentement. « Les gens pensent que… qu’ils peuvent l’atteindre en… hum… je présume en me menaçant. » Elle vit l’expression incertaine qu’elle recevait. « Tu sais… pour qu’elle fasse des choses, ce genre de trucs. »

« Vraiment », répondit Elanora. « Et ça marche ? » Son visage ne montrait que peu d’intérêt.

« Euh… non… non… pas vraiment », mentit Gabrielle. « Je veux dire que… qui je suis, pas vrai ? Ils… présument des choses. » Elle haussa les épaules. « N’importe… ça finit toujours bien… je veux dire que vous l’avez vu… je peux vraiment m’occuper de moi-même. » Elle baissa les yeux sur le chemin. « On devrait y aller… quelqu’un devrait savoir ce qui se passe… que quelque chose s’est passé. »

« Oh oui », acquiesça Silvi en laissant la barde l’aider à se relever. « Tu as été merveilleuse », dit-elle avec enthousiasme. « Je pouvais à peine le croire… ces hommes n’avaient pas une chance. »

Gabrielle soupira. « Oui… c’est utile parfois. » Mais elle était consciente du regard froid qu’elle recevait de la cousine de la princesse et elle se fit une note mentale de parler à Xena aussitôt qu’elle serait rentrée.

Avant que la jeune fille ne puisse avoir une autre idée brillante.

Ils marchèrent lentement pour rentrer en traversant le marché et Silvi insista pour continuer ses achats sur le chemin, déclarant qu’elle ne devait pas être vue ayant peur. Elle s’arrêta à un étal d’eau et elles achetèrent toutes des gobelets d’eau parfumée au citron et elles se mirent en cercle, savourant la brise et la boisson fraîche. « Gabrielle… » Silvi se retourna soudain. « Parle-nous de Cécrops ! »

La barde examinait des petites boucles d’oreilles, débattant sur le fait qu’elle pourrait convaincre son âme sœur de les porter. Elles étaient jolies, juste la bonne taille et avec une minuscule pierre bleu clair sertie… et elle décida qu’elle pourrait probablement les avoir. Elle leva la main pour repousser Silvi et se tourna vers le joaillier. « Combien ? »

L’homme la regarda avec sagacité. « Dix dinars. »

Gabrielle les reposa. « Je ne pense pas », dit-elle en ricanant doucement.

« Sont horriblement jolies, jeune fille », rit l’homme. « Je vais te dire, cinq dinars. »

Le regard vert se cloua sur lui. « Trois. » Gabrielle croisa les bras sur sa poitrine et attendit, sans regarder les babioles exprès.

Il secoua la tête. « Le travail me coûte plus que ça. »

Elle attendit.

« Quatre », finit-il par dire en lui jetant un regard.

Elle sourit. « Très bien. » Elle fouilla dans sa bourse et lui tendit les dinars et il enveloppa les boucles pour les mettre dans un tout petit sac en coton avant de les lui tendre. « Merci. » Arès renifla le sac et lui lécha la main tandis qu’elle écartait l’objet. « Arrête ça », réprimanda-t-elle le loup.

L’homme hocha la tête puis se tourna vers la princesse. « Vous voulez quelque chose aujourd’hui, Votre Majesté ? »

« Pas aujourd’hui », dit Silvi en lui souriant. Elle tira Gabrielle sur le chemin et attendit qu’elles soient hors de portée d’oreille. « Qu’est-ce que tu viens de faire ? » Demanda-t-elle en regardant par-dessus son épaule.

Gabrielle lui jeta un coup d’œil, désorientée. « Heu… j’ai acheté quelque chose ? » Hasarda-t-elle.

« Il t’a dit le prix et tu as refusé ! » Objecta la princesse. « Comment as-tu fait ça ? »

« Et bien… » La barde était contente qu’elles se soient éloignées de l’histoire de Cécrops. « Il voulait les vendre… le prix qu’il demande c’est juste ce qu’il veut pour ça… pas ce qu’il va prendre pour ça », expliqua-t-elle en remontant le long chemin en pente qui menait au château. « Tu ne le fais pas ? »

« Bien sûr que non. » La princesse avait l’air choquée. « Je leur donne juste de l’argent et ils me donnent ce que je veux en retour… je n’imagine pas discuter là-dessus. »

Elanora les rattrapa. « Je suis sûre que c’est plutôt différent pour elle, Majesté… » Commenta-t-elle en lançant un regard condescendant à la barde. « Tu n’as pas à être regardante sur les dinars. » Elle agita légèrement son éventail. « Ça doit être très déprimant. »

La barde sentit ses poils se hérisser et une sensation intéressante qui laissa passer une douce brise fraîche toucher sa nuque. « Je n’ai jamais pensé à ça comme ça, en fait », répondit-elle d’un ton cassant. « Je pense juste qu’on doit obtenir le plus pour ce que l’on a… et je sais ce que valent les choses. » Elle regarda la brunette d’un air froid. « Les gens ne tirent pas avantage de moi comme ça. »

« Oh. » Silvi lui tapota le bras. « Je n’ai pas à m’inquiéter de ça… personne ne voudrait prendre avantage de moi. »

Gabrielle mit un point d’honneur à laisser son regard vert brume traîner longtemps sur Elanora, avant de le tourner vers la princesse. « Bien sûr que non », acquiesça-t-elle ironiquement tandis qu’elles atteignaient le bord de la cour intérieure. « Et bien, ça a été génial, mais je dois aller chercher des choses… »

Silvi lui tint le bras. « Oh non… non non… Gabrielle, tu dois venir avec moi dans mes quartiers… le guérisseur doit jeter un œil à tes blessures. » Elle commença à marcher, tirant la barde derrière elle. « Tu le dois… je n’entendrai pas de refus… et je veux que tout le monde sache quelle héroïne tu es. »

« Hum… » Gabrielle essaya d’arrêter de marcher, mais son genou lâcha et elle trébucha vers l’avant. « Non… vraiment… je vais bien… » Protesta-t-elle. « Il faut juste que je m’asseye un moment, vraiment… j’ai un bandage dans mes affaires à l’écurie, je peux juste… »

« Absolument pas. » Silvi secoua la tête continuant à tirer la barde impuissante vers l’avant. « Ecoute… tu peux à peine marcher. » Elle se tourna vers Elenora. « Va chercher Jiles… il faut qu’il vienne voir Gabrielle tout de suite. »

La jeune fille tourna les talons et partit, suivie par une des dames qui papillonnaient derrière elle.

« Silvi… » Gabrielle tressaillit en posant rudement la jambe. « Ecoute… vraiment, je dois…»

« Non non non », la réprimanda la jeune fille. « Tu viens avec moi. » Elles tournèrent le coin et s’arrêtèrent brusquement, confrontées à six pieds d’une guerrière grande, sombre et dangereuse vêtue de cuir. « Par Zeus ! »

« A peine. » Xena laissa son regard passer sur elles, s’arrêtant momentanément sur le visage de Gabrielle avant de tourner son attention sur la princesse. « Il y a un problème ? » Demanda-t-elle en bloquant proprement leur chemin.

Silvi se redressa poussant Gabrielle derrière elle. « Hors de mon chemin », commanda-t-elle. « Ce ne sont pas tes affaires. »

La guerrière haussa les sourcils. « Ça se discute », répliqua-t-elle froidement. « Il faut que je parle à Gabrielle. »

« Elle doit voir le guérisseur. Tu peux attendre », déclara Silvi, mais sa voix tremblait.

La guerrière écarta les narines. « Je vais m’en occuper. Sa voix était neutre et froide.

« Certainement pas », répliqua bravement la princesse.

« Silvi. » Gabrielle mit doucement la main sur son épaule. « Tout va bien, vraiment. Xena est aussi guérisseuse. » Elle contourna la jeune fille, essayant de ne pas boiter trop fort. La secousse perceptible qui traversa son âme sœur lui donna acte qu’elle se retenait d’attraper la barde par pure volonté et Gabrielle savait qu’elles étaient dangereusement près de faire éclater leur couverture. « Je… viendrai te voir après qu’on aura examiné ça… c’est bon… vraiment. »

La princesse eut fortement l’air d’en douter, mais elle finit par avancer à contrecœur vers l’escalier, suivie par sa cour, les regardant par-dessus son épaule jusqu’à ce qu’elle disparaisse au tournant.

La barde soupira et se tourna pour faire face à sa compagne tandis que des mains chaudes lui attrapaient les épaules. « Qu’est-ce qui s’est passé ? Tu vas bien ? » Demanda Xena avec anxiété. La soudaine métamorphose du seigneur de guerre en amoureuse inquiète était presque drôle et la barde dût un peu se mordre la lèvre pour s’empêcher de rire.

« Comment t’es-tu blessée ? Qu’est-ce qui s’est passé ? » Répéta la guerrière en l’étudiant. « Est-ce que c’est une coupure ? Qu’est-ce que tu as fait à ton genou ? »

« Xena. » Gabrielle essaya d’interrompre ce flot de paroles.

« Est-ce qu’on t’a attaquée ? » Continua la guerrière. « Gabrielle, pour l’amour des dieux… que… »

« Xena, chut… » La barde mit affectueusement la main sur sa bouche. « On peut monter ? Ma jambe me tue… je te dirai ce qui s’est passé en montant. »

Silencieusement, la guerrière entoura la taille de la barde de son bras et la soutint tandis qu’elle montait en boitant. La chaleur coula en elle et elle se retrouva à s’appuyer de plus en plus sur sa compagne, qui prit volontiers son poids sur elle. « Merci. » Elle leva les yeux vers le visage tranquille. « Je ne voulais pas te dire de te taire comme ça… mais la matinée a été frénétique. »

« C’est bon », répondit Xena en regardant autour d’elle. « Par Hadès… ça prend trop de temps. » Elle souleva la barde et remonta les dernières marches en bondissant, donnant un coup de coude à la porte de leurs quartiers pour l’ouvrir et entrer. Après que la porte se fut refermée, elle se tint un long moment sans bouger, à se contenter de regarder une Gabrielle qui se reposait paisiblement. « C’est confortable ? »

La barde remua les orteils. « Très. » Elle soupira alors que Xena la déposait doucement sur le lit. « Ils ont essayé de kidnapper la princesse… Xena, je ne sais vraiment pas ce qui se passe ici. » Elle sourit lorsqu’Arès bondit sur le lit et se blottit contre elle, le museau posé sur sa cuisse.

La guerrière s’agenouilla près du lit et la mit à plat pour examiner l’éraflure sur ses côtes. « Moi si », répondit-elle d’un air absent en avançant pour tâter le genou de la barde, maintenant légèrement gonflé et bleui. « On a la princesse, qui veut une chose, on a ses nobles, qui en veulent une autre, et on a Garanimus, qui n’a aucune idée de ce qui se passe et qui ne sait pas ce qu’il veut. » Elle soupira et se leva. « Petite entorse… ça va faire mal un moment. »

Gabrielle croisa les mains sur son estomac et soupira. « J’espérais que ce ne soit pas ça. » Elle tourna la tête et regarda sa compagne qui ramassait les affaires de son kit. « Six types nous sont tombés dessus au marché… j’ai été un peu trop enthousiaste avec un coup de pied… et j’ai oublié de prendre une assise comme tu me l’avais enseigné, avant de tendre la jambe. » Elle bougea la jambe et tressaillit. « Je me sens vraiment idiote. »

« Mmpf. » Xena revint et se remit à nouveau sur un genou, déroulant un bandage doux. « Ça arrive… j’ai fait ça des tonnes de fois », la rassura-t-elle la jeune femme, en lui donnant une petite tape sur la jambe. « Mais tu dois faire attention… tu ne veux pas en faire trop avec ton corps, mon amour. »

« Ah. » Gabrielle la regarda ironiquement. “Alors… je devrais cogner des bandits infects plus doucement, plus affectueusement ? » Fit-elle remarquer. « C’est ça que tu me dis ? »

La guerrière lui lança un regard. « Très drôle », grogna-t-elle. « Non, ce n’est pas ce que je dis. » Elle s’affaira avec ses provisions. « Je… il faut que tu… sois plus prudente, c’est tout. »

« Mmhmm. » La barde la regarda. « Et ceci dit par la femme qui m’a raconté qu’elle a continué à se battre pratiquement jusqu’à son accouchement. »

Les yeux bleu clair lui lancèrent un regard sombre. « C’était différent », marmonna Xena. « Je n’avais pas le choix. »

Gabrielle tendit la main et lui caressa les cheveux. « Je sais… mais… Xena, je ne vais pas laisser ça m’empêcher de faire ce que je dois faire… ses gardes étaient inutiles », répondit-elle. « Et qu’est-ce que j’étais supposée faire… reculer et laisser ces types la prendre ? »

« Hmpf », grogna la guerrière.

La barde se mit à rire. « Grognonne. » Elle pinça affectueusement l’oreille de sa compagne. « Je t’aime vraiment, tu sais… et je sais que tu t’inquiètes juste pour moi. »

Xena arrêta ce qu’elle faisait et leva des yeux qui s’adoucissaient. «Je suis trop mère poule, hein ? »

Cela lui valut un sourire espiègle. « Oui… mais je pense que c’est mignon. »

La guerrière plissa les yeux. « Mignon, hein ? » Elle fit appel à son meilleur regard intimidant. « Je suis supposée être une machine à tuer sans cœur, Gabrielle. Tu ruines ma réputation. »

« Ooh… » La barde roucoula. « J’adore cette expression. » Elle gloussa en prenant la joue de Xena dans ses mains. « Tu es teeellement méchante. »

Elles se regardèrent longuement puis se mirent à rire ensemble. « Très bien… très bien… » Xena secoua la tête et soupira. « Je vais essayer de garder mon instinct hyperprotecteur sous contrôle », finit-elle par répondre. « Oh oui… à propos, un des membres de la famille de ta princesse m’a fait une offre… apparemment ils n’apprécient pas l’idée d’un roturier qui deviendrait leur dirigeant. »

Gabrielle haussa un sourcil blond. « Vraiment ? » Dit-elle d’un ton songeur. « Et bien… ça a du sens… ils sont probablement derrière les types qui ont essayé de nous kidnapper aujourd’hui. »

« Peut-être. » Xena passa de l’onguent sur la partie bleuie puis elle la banda avec dextérité. « M’a proposé un boulot… un appartement douillet… mon choix pour des esclaves sexuels… » Elle finit et se leva, utilisant un petit morceau de tissu humide pour nettoyer l’éraflure sur la poitrine de la barde. « Tout ce que j’ai à faire c’est battre Framna… » Elle leva les yeux. « Alors… qu’est-ce que tu penses de lui ? »

Gabrielle emmêla ses doigts dans l’armure de la guerrière et tira fort. « Viens par ici. »

Xena hésita puis se laissa tomber dans le lit près d’elle, s’étirant avant de mettre la tête sur une main.

« Il est… » Gabrielle roula sur elle-même et se blottit contre elle, ignorant la morsure froide de l’armure contre sa peau. « Il est bien, je trouve… il semble vraiment attaché à elle… il est beaucoup plus vieux. » Elle regarda la guerrière. « Pas que ça importe… mais elle est vraiment très jeune. »

Xena réfléchit. « Tu penses qu’elle est capable de diriger cet endroit. »

Un hochement de tête négatif. « Non », répondit Gabrielle promptement. « Absolument pas… il a l’air bien, je veux dire que, il est gentil et tout ça… pas comme je m’attendais à le voir. » Elle fit une pause. « Il a un respect très sain pour toi. »

Cela amena un léger sourire aux lèvres de Xena. « Mais pas la princesse. » Elle passa les doigts dans les cheveux clairs de la barde quand elle la sentit se rapprocher. « Mais je n’aime pas les cousins et Garanimus va mettre le bazar ici, alors… » Elle laissa sa tête reposer brièvement sur l’oreiller et inspira la senteur chaude de son âme sœur. « Je présume que je vais aller conclure un marché avec le petit ami de la princesse. »

« C’est compliqué », se plaignit Gabrielle avec ironie en lui lançant un regard. « Et je te défie de dire que c’est parce que je suis impliquée », l’avertit-elle d’un ton joueur.

« Moi ? » Xena écarquilla les yeux d’un air innocent en pointant sa poitrine. « Je ferais ça ? »

«Oui. » La barde lui tapota le ventre. « Tu le ferais assurément. »

La guerrière rit et roula sur le dos, entrelaçant les mains sur son estomac et croisant les chevilles. « Tu me connais trop bien, ma barde », dit-elle au dais de lit, regardant ses fanfreluches blanches avec dégoût. « La princesse semble t’aimer beaucoup. »

Gabrielle, affairée avec la boucle qui maintenait l’armure de Xena, s’arrêta dans son effort et leva les yeux. « Elle pense que je suis une sorte de… je ne sais pas… peut-être que c’est parce que je suis tellement différente d’elle… » Elle réfléchit brièvement. « Elle n’est pas mauvaise, juste vraiment… heu… protégée, tu sais ? »

Un œil bleu roula pour la regarder affectueusement. « Et tu es une femme expérimentée… bien sûr… je peux voir la fascination. »

La barde éclata de rire à cette description. « Je ne pense pas que ce soit ça », objecta-t-elle.

« Ah… je pense que c’est exactement ça », désapprouva Xena en remuant un doigt. « Ecoute… elle n’a probablement jamais quitté la cité… et tu arrives, tu as voyagé partout, tu es une barde célèbre… »

« Xena ! » Gabrielle la tapa doucement. « Ce n’est pas vrai. » Arès pointa les oreilles au son brusque, mais il resta immobile, se contentant de jeter un regard vers sa grande maîtresse.

« Bien sûr que si ! » Répondit la guerrière. « Une Reine Amazone… tu es probablement la chose la plus excitante qui lui est arrivée depuis qu’on l’a laissé porter cette petite couronne. » Elle croisa les bras, visiblement bien amusée. « Alors… qu’est-ce que ça fait d’être une célébrité ? »

« Xena. » Gabrielle lui lança un faux regard noir. « Je vais commencer à te chatouiller si tu n’arrêtes pas. Je ne suis pas une célébrité. »

Un éclair de dents blanches. « Bien sûr que si… et ensuite tu t’en vas cogner les types qui essayent de la kidnapper ? Je sens… un grand paquet d’idolâtrie de héros flotter par ici. » Elle tendit la main et chatouilla le menton de la barde. « Et tu le mérites amplement. »

Gabrielle mâchouilla sa lèvre, reconnaissant à contrecœur que son âme sœur avait probablement raison. Beuh. Elle plissa le visage.  C’est pire que ces Amazonettes. « Elle est juste impressionnable », finit-elle par marmonner. « Ça va lui passer. » Puis elle fit une pause et réfléchit un moment. « Mais tu sais… en y repensant… » Maintenant son regard allait vers le profil détendu pose sur l’oreiller près d’elle. « Moi, ça ne m’a jamais passé. »

Xena fronça les sourcils.

Gabrielle sourit affectueusement. « Je t’ai eue. » Elle finit de détacher l’armure de la guerrière et la fit passer par-dessus sa tête, pour la poser sur la surface moelleuse du lit. « Parlons d’idolâtrie de héros. » Elle se glissa plus près et ses yeux brillèrent en voyant le regard noir de sa compagne. « Je pense que je peux discuter de ça comme une autorité en la matière, pas vrai ? »

« Gabrielle… » La guerrière sentit une rougeur monter à son cou.

« Tu vois, la différence c’est que j’ai une vraie héroïne honnête qui vit et qui respire avec laquelle je passe la plus grande partie de la journée. » Répliqua la barde doucement. « Tout le monde a l’air tellement ordinaire en comparaison. » Elle traça du doigt une ligne sur la peau de son âme sœur. « J’adore quand tu rougis… tu es si mignonne. »

Xena pianota sur son estomac couvert de cuir. « Tu gagnes », concéda-t-elle avec grâce dans leur petite guerre de taquineries.

La barde sourit. « Je sais. » Elle se pencha et l’embrassa sur le nez. « Je vais arrêter de t’embarrasser maintenant. » Elle se blottit un peu plus et mit la tête sur l’épaule de Xena. « Alors… comment s’est passée ta journée ? »

La guerrière étouffa un bâillement et haussa légèrement les épaules. « Pas mal… on a mis en place les tours de garde et tout le reste… » Répondit-elle. « J’ai fait travailler les troupes… on s’est un peu entraînés… » Son regard alla vers sa compagne. « J’ai fini par avoir des nausées la moitié de la journée… tu sais, comme d’habitude. »

Gabrielle la regarda et se mordit la lèvre. « Oups… » Elle cligna des yeux. « Désolée. » Elle tapota le ventre de la guerrière. « J’espère que ça ne va pas durer. »

Xena rit ironiquement. « Nan… c’est tout bon… ça me rend un peu… » Elle fit une pause puis continua. « Ça me fait faire partie de ça. » Elle resserra sa prise sur la jeune femme. « Ça ne me gêne pas… c’est quand même toi qui as tout à faire. »

Gabrielle soupira de contentement. « Mais pas avant un moment. » Elle bâilla. « Est-ce que tu vas m’en vouloir si je t’utilise comme oreiller pendant un petit moment ? » Demanda-t-elle d’un ton d’excuse.

La guerrière cligna des yeux et les ouvrit un peu coupable. « Heu… non… bien sûr que non. » Elle regarda vers la fenêtre. « On a un moment avant que je doive vérifier que tout va bien… hum… vas-y. » Elle regarda la barde fermer les yeux et sentit la chaleur de sa respiration tandis qu’elle soupirait, même à travers le cuir.

Silencieusement, elle regarda la tête claire posée contre la sienne, notant la légère lueur du soleil qui faisait ressortir les traits de sa compagne. Une des mains de la barde était enroulée sur sa cage thoracique, ses doigts pliés contre elle et elle la couvrit de sa propre main, souriant lorsque leur prise s’emmêla.

Être allongée là, avec Gabrielle, son dilemme semblait bien moins… important. Alors et si elle réussissait à faire que l’armée de Garanimus se rende ? Et si elle laissait tout le monde penser qu’ils l’avaient surpassée ? Ce qui était important c’était que personne ne soit blessé, pas vrai ?

Xena soupira. Tout ce qui serait blessé, ce serait sa fierté, vraiment. Travailler avec une armée aujourd’hui… elle avait commencé à calculer exactement comment elle allait défendre la cité contre une force bien plus grande… quelles techniques, comment elle pourrait installer des petits pièges… à un moment, elle s’était retrouvée à vraiment apprécier le plan tandis qu’elle faisait travailler des muscles mentaux qui étaient restés endormis pendant longtemps.

Ils pouvaient le faire avec elle à leur tête… elle le savait et tourner le dos à cette connaissance était… dur. Mais elle savait que continuer comme ça la mettait en danger, bien plus que le reste de l’armée, parce qu’elle était une cible tellement naturelle. Elle avait beaucoup de confiance dans ses propres compétences, mais…

Mais. On ne savait jamais ce qui pouvait arriver, pas dans une guerre. On pouvait se préparer, et avoir des compétences, et un plan… et un fichu salaud pouvait avoir de la chance et vous ficher une flèche dans le corps quand vous ne regardiez pas.

Elle n’allait pas imposer ça à Gabrielle. Pas maintenant. Il y avait des choses bien plus importantes dans la vie que gagner des guerres, et la fierté d’une combattante bornée, entêtée et à moitié folle.

Pas vrai ?

Bon sang, ça piquait. Xena regarda le dais. Sa nature compétitive faisait une crise.

Elle voulait battre les forces de Framna. Elle voulait être maligne et tactiquement brillante, et réussir malgré les chances, tellement qu’elle pouvait presque le sentir. L’immersion des derniers jours dans son ancienne vie l’avait hameçonnée… tirant sur des vieux réflexes et lui redonnant le goût de l’excitation de diriger une armée.

Ce n’était pas bon. Elle prit une profonde inspiration et sentit Gabrielle bouger, puis s’enrouler un peu plus autour d’elle, son genou bandé contre la cuisse de sa compagne. Elle pouvait sentir le léger mouvement de la respiration de la barde, et elle le laissa l’apaiser, la laissa lui rappeler qui elle était maintenant. Ou bien ce qui était important.

Elle ferait, elle le savait, ce qui était juste, et prudent… et sûr. Elle serra les muscles de sa mâchoire puis se détendit. Pour l’amour de Gabrielle.

Elle lui devait cela.


Mmmm. Gabrielles’autorisa le luxe de passer lentement du sommeil à l’éveil, savourant le chaud réconfort qu’elle sentait autour d’elle. Le soleil passait sur elle et lui offrait un sympathique contrepoint au cuir doux et odorant sur lequel elle reposait. Elle prit une profonde inspiration d’un air plein de l’odeur distincte de Xena et elle sourit, puis elle ouvrit lentement les yeux.

« Salut », dit Xena en la regardant. « Tu te sens mieux maintenant ? »

Gabrielle s’étira puis se détendit à nouveau. « Oui… sauf que j’ai vraiment faim. » Elle lança un regard penaud vers Xena. « On n’a pas déjeuné. »

La guerrière rit d’un air tolérant. « J’ai du pain, du fromage et de la viande séchée si tu es intéressée. » Elle s’interrompit alors que Gabrielle hochait la tête avec enthousiasme. « Et des fruits… »

« Où ça ? » La barde roula et passa les jambes par-dessus le bord du lit, délogeant Arès qui sauta en bas et lui lança un regard outré.

« J’y vais », proposa Xena en glissant au bout du lit avant de se relever. Repose ta jambe. » Elle alla jusqu’à son sac et en sortit les provisions qu’elle avait prises ce matin-là.

Gabrielle ignora sa suggestion et se leva avec précaution, testant son genou. « Je me sens beaucoup mieux », dit-elle en faisant quelques pas hésitants. « Vraiment. » Elle continua vers le petit bureau et s’y assit avant de poser les mains de chaque côté de son journal, ratant le regard furtif que lui lançait sa compagne, qui prenait une portion de nourriture pour un Arès affamé.

« Hum… » Xena se leva et se dirigea vers elle, lui tendant une tranche de pain largement couverte de viande et de fromage, ainsi que deux grandes prunes. « Que penses-tu de ça ? »

La barde repoussa doucement le journal et accepta les objets, posant le sandwich avant de mordre avec bonheur dans une prune. « Oooh… » Elle mâcha d’un air heureux. « Comment tu fais pour trouver les meilleurs fruits de la Grèce ? » Elle regarda le lent sourire apparaître sur les lèvres de Xena. « Laisse-moi deviner… c’est un de tes nombreux talents ? »

« L’entraînement », répondit Xena avec un sourire narquois. Puis son expression se figea. « Tu vas… euh… faire des trucs de barde ? »

Gabrielle s’arrêta au milieu d’une bouchée. « J’allais mettre mon journal à jour, si c’est ce que tu veux dire », répondit-elle en lançant un regard curieux à son âme sœur. « C’est bon ? »

« Oh… oui… bien sûr… j’étais… heu… je vais vérifier… la garde et les armes et ce genre de choses », répondit Xena en allant vers le lit pour prendre son armure. « Je serai… partie un moment… tu… prends ton temps. » Elle eut un sourire éclatant pour Gabrielle puis sortit en lui faisant un petit geste. « Au revoir. »

La porte se referma.

Gabrielle ferma sa mâchoire pendante et regarda Arès qui la regardait lui aussi. « Que… qu’est-ce que… ça veut dire ? ? ? ? »

« Roo. » Le loup regarda la porte puis trotta vers elle et s’allongea à ses pieds.

« Je pense que tout ce truc de la grossesse la perturbe, Arès. » La barde secoua la tête et finit sa prune avant de commencer le sandwich tout en ouvrant son journal. « Elle est perdue. »

L’écriture attira son regard. Tellement différente de la sienne, soignée… celle de Xena était hardie et distincte, légèrement penchée et avec des jambages caractéristiques. Elle aurait reconnu son auteur même si son regard n’avait pas été attiré par la signature et elle absorba le nom avant de lever les yeux et de commencer à lire.

Gabrielle,

Tu as ce livre entier dans lequel tu ranges tes pensées, et tes sentiments – j'ai pensé que sur une page, juste une, tu devrais avoir les miens par écrit.

Je ne suis pas très douée avec les mots – nous le savons toutes les deux. Il m’est difficile de décrire ce que je ressens, surtout quand mes sentiments sont aussi forts que parfois il est dur de seulement y penser.

Nous avons traversé beaucoup de choses. Je présume que tu sais que d’y avoir survécu individuellement est plutôt incroyable, et le fait que nous ayons survécu et soyons restées ensemble est au-delà de l’incroyable. Je sais que je ne méritais aucune de ces choses et aussi je présume que j’ai eu de la chance parce que toi tu les méritais.

Je regarde les choses terribles que j’ai faites dans ma vie et il y avait un temps où, dans les derniers mois, j’ai presque ajouté ce jour d'automne ou j'étais dans une clairière près de Potadeia à ma liste de regrets, parce que nous regarder détruire quelque chose que je chérissais dans mon cœur me tuait. Je ne comprenais pas ce qui arrivait, mais je pouvais sentir l’obscurité en moi me tirer encore et encore plus, et il y a eu des moments où je traversais la ligne, et la laissait presque me reprendre, parce que je ne pouvais pas voir de raison d’y résister, pas encore.

Je ne sais pas vraiment ce qui m’a arrêtée. Peut-être que c’était la promesse que je t’avais faite, à l’époque.

Je n’ai jamais voulu te faire du mal ou te voir blessée, mais j’ai fini par comprendre cela, pour le meilleur ou pour le pire, nous sommes ensemble, toi et moi. Nous pourrions être blessées de nouveau, mais c’est une chance que nous devons prendre, parce que je ne vais pas laisser tomber ce que nous avons. Je suis plutôt bonne pour avoir ce que je veux et c’est toi que je veux.

Je t’aime. C’est juste pour que tu le voies écrit, au cas où quelqu’un te poserait la question, d’accord ? Pour qu’il n’y ait aucun doute là-dessus. Essaye de ne pas renverser de l’eau sur la page quand tu liras ceci.

Tu as apporté beaucoup de choses dans ma vie auxquelles je ne m’étais pas attendue – j’avais l’habitude de voir les choses plutôt en noir et blanc, et maintenant j’ai toutes ces couleurs auxquelles tu m’as éveillée. Comme la beauté d’un oiseau qui chante le matin, ou combien c’est génial de regarder un coucher de soleil. Ecouter ta poésie et voir le monde à travers tes yeux me font me rendre compte des nombreuses choses que j’ai ratées, après Cortese.

C’est comme si ma vie recommençait. Je sais que je fais marche arrière parfois et que ça te fait peur, mais tu ferais bien de savoir que tu es l’une des raisons pour lesquelles je continue à avancer à nouveau. Si tu as jamais douté de combien tu es importante pour moi, ne le fais pas, d’accord ? Je serais vraiment perdue dans l’obscurité sans toi. Parfois, quand ma tête est pleine des mauvaises choses que j’ai faites, je peux te regarder et me souvenir de bêtises que j’ai faites qui t’ont fait sourire et c’est suffisant pour repousser ces choses pendant un moment.

Je suis contente que tu aies décidé de partager ma vie. Tu es ma compagne et ma meilleure amie, et l’une des plus merveilleuses personnes que j’ai jamais connues. Tu es la meilleure des choses qui me soit jamais arrivée.

Nous partageons quelque chose de très spécial, même moi je m’en rends compte. Je sais que c’est la raison pour laquelle nous avons traversé ces âges sombres et c’est ce qui nous a réunies à nouveau. Mais au fond de mon esprit, une petite partie de moi essaie de croire que même si nous n’avions pas partagé ça, si nous étions deux autres personnes ordinaires, peut-être que nous nous serions choisies quand même.

Un jour, ma barde – tu seras celle dont on se souviendra. Tes histoires et ta façon de vivre… c’est ce que les gens raconteront encore et encore… et je ne serai qu’une combattante qui te garde en sécurité quand tu voyages à travers le monde.

Ça me va.

Un jour, quand je serai trop vieille pour bouger, j’aimerais être assise sur notre porche et laisser nos petits-enfants me sauter dessus, pendant qu’ils t’écoutent raconter des histoires du bon vieux temps.

Le plus drôle, c’est que jusqu’à ce que je te rencontre, je n’ai jamais pensé que vieillir me concernerait. Tu vois comment tu changes les choses ?

Je présume que ça suffit maintenant, hein ? La dernière fois que j’ai autant écrit, c’était une exigence de reddition d’une grande cité près de Thèbes. Je pense que je préfère cette fois-ci.

Xena.

Elle relut trois fois avant de finalement lever les yeux et regarder la porte fermée. « Grande froussarde », accusa-t-elle la guerrière absente. « Tu as peur que je te trouve en flagrant délit d’être sentimentale, hein ? » Gabrielle suivit du doigt les lettres impétueuses avec plaisir, entendant la voix de sa compagne sans effort. Certaines parties la firent sourire. D’autres… de les lire faisait tout simplement mal. Mais c’était réel et honnête et c’était tout Xena, direct d’une façon dont peu de gens l’étaient.

« Je t’aurais choisie n’importe comment », murmura-t-elle, sentant une larme glisser sur son visage. « Et tu le méritais, Xena… je me fiche de ce que tu dis, ou de combien de fois tu me dis que tu ne le méritais pas. » Arès poussa sa main, la lécha en piaulant. « Arès… ta maman est sentimentale. »

« Agrrr. » Le loup lui mâchouilla légèrement les doigts.

« Oui, c’est vrai… et maintenant… je vais devoir la trouver et la sortir de la poubelle d'armures moisies où elle s’est cachée, et lui dire simplement combien je l’aime. Ça te va ?

Arès remua la queue et se leva, trottant vers la porte où il se retourna pour la regarder, interrogateur.

Gabrielle sourit et se leva, fermant le journal avant de contourner la table. « Ouille. » Elle tressaillit lorsque son poids se porta sur sa jambe blessée. « Allez Gabrielle… haut les cœurs… ce n’est qu’une petite entorse. » En grimaçant, elle plia le membre et fit quelques petits cercles jusqu’à ce que la douleur soit tolérable, puis elle attrapa son bâton et se dirigea vers la porte.

Qui s’ouvrit quand elle l’atteignit, laissant apparaître Silvi. « Oh Gabrielle… les dieux soient loués tu vas bien. J’étais terriblement inquiète. »

« Hum. » La barde soupira et se reprit. « Oui… je vais bien… vraiment. »

« Cette femme ne t’a pas… fait de mal… non ? » Le visage de la princesse était inquiet. « Tu sembles… bouleversée. »

« Non… non… » Gabrielle leva la main. « Elle… tout ce qu’elle a fait c’est me bander le genou… ça… va bien… vraiment… je heu… j’allais sortir. »

Silvi captura sa main levée et la retint, la tirant vers le canapé bas. « Gabrielle, il faut que je te parle. »

Soupirant intérieurement, la barde la suivit et s’assit, appuyant son bâton contre le bord de la table proche. « Oui ? » Elle tapota Arès qui était revenu vers elle et qui s’assit avec persistance à côté d’elle. Il lança un regard franchement grognon à la princesse.

« Elanora pense que… je ne sais pas vraiment comment demander cela. Mais… cette femme… »

« Xena », corrigea Gabrielle d’un ton neutre.

« Oui… elle ne t’a pas… fait des avances, n’est-ce pas ? » Demanda la princesse.

« Des avances ? »

« Des attentions non désirées ? » Essaya à nouveau Silvi.

« Des attentions non désirées ? » Répéta Gabrielle espérant qu’on ne lui demandait pas ce qu’elle pensait.

« Heu… » La princesse rougit délicatement. « T’avoir forcée ? »

« Oh ! » La barde mit un sourire faible sur ses lèvres. « Voyons voir… des avances… non… des attentions non désirées… absolument pas… forcées ? Non… pas que je sache. »  Et voilà, Gabrielle… dis la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Elle fit une pause dans ses pensées. Et bien, deux sur trois ce n’est pas si mal, comme dirait Xena. « Elle n’est en fait pas si mauvaise quand on apprend à la connaître. »

L’incrédulité se fraya un chemin sur le visage de Silvi. « Je pense qu’elle est horrible. »

Gabrielle la regarda. « Pourquoi ? »

« Elle a tué des milliers de gens, Gabrielle… et… et… les histoires… les meurtres… les saccages... les viols… les pillages… » bafouilla la jeune fille.

La barde pencha la tête d’un côté. « Et que crois-tu que fait Framna ? » Demanda-t-elle avec une logique dévastatrice. « C’est un seigneur de guerre, tout comme elle l’était. »

Un silence de mort s’installa tandis que la jeune fille la fixait.

« Ça dépend du regard qu’on jette sur les choses, hein ? » dit Gabrielle doucement. « Je pensais la même chose que toi… jusqu’à ce que je rencontre Xena et que j’apprenne à la connaître… et j’ai trouvé qu’elle était bien plus, et bien moins que toutes les histoires que j’ai entendues la moitié de ma vie. »

Silvi se leva et alla à la fenêtre, visiblement agitée. « On dirait que… que… tu l’aimes bien. »

« C’est le cas », répondit calmement la barde. « J’ai accepté de t’aider pas pour la blesser, mais pour faire en sorte que les gens ne soient pas tués dans un combat insensé. »

La princesse se retourna brusquement et lui fit face. « Tu n’es pas gardée contre ta volonté, n’est-ce pas ? »

Gabrielle secoua lentement la tête. « Non. » Elle fit une pause. « Je n’ai jamais dit que je l’étais. »

Un léger cliquetis attira son attention et elle tourna la tête pour voir un panneau s’ouvrir et la grande silhouette de Framna se glisser à l’intérieur. Oh oh. Des alarmes se déclenchèrent dans son esprit et elle tendit la main inconsciemment pour attraper son bâton. Près d’elle, Arès lâcha un grondement bas et sourd.

« J’ai entendu ce que j’avais besoin d’entendre, Votre Majesté », dit le grand homme sérieusement. « On dirait qu’Elanora avait raison… elle est un danger pour nous. »

Gabrielle se leva du canapé et recula, levant son bâton. « Je pense que vous faites une erreur. »

L’homme s’avança en la regardant attentivement. « Je suis sûre qu’elle a parlé de nos plans à Xena… » Murmura-t-il. « Mais… je crois que la détenir forcera cette démone à nous obéir dans tous les cas. »

La barde se redressa. « Vous faites vraiment, vraiment, une erreur », les avertit-elle. « Xena n’est pas ici pour se battre… elle veut suivre votre plan. » Elle fit une pause. « Mais si vous faites quelque chose comme ça, je ne peux rien garantir. »

Framna leva la main. « Pose le bâton et on ne te fera pas de mal. Ce n’est pas mon intention. »

La colère de Gabrielle monta. « Reste où tu es et c’est toi qui n’auras pas mal », répliqua-t-elle. « Tu essaies quoi que ce soit et je te ferai souhaiter ne pas l’avoir fait. « Ooh. Là… c’est mieux, hein Xena ? Arès se hérissa devant elle, son pelage se dressant tandis qu’il baissait la tête. « Tu as bien plus d’ennuis que je n’en aie, mon pote. »

Le seigneur de guerre la fixa puis il plongea en avant pour attraper son bâton.

« Idiot. » Gabrielle bougea le bâton hors de sa portée et le fit tourner, le frappant dans les genoux avant de le faire tomber. Ce qu’il fit avec un bruit sourd et il se redressa péniblement en tressaillant. « Et moi qui pensais que tu n’étais pas si mauvais. » Elle tira sur son bâton en arrière puis le poussa en avant, le cognant dans la poitrine avec le bout, le forçant à reculer.

Arès se lança en avant, grognant de façon hideuse, et accrocha sa mâchoire au bras rapidement levé de Framna, tournant violemment la tête ce qui fit perdre l’équilibre à ce dernier. Le loup modifia sa prise et fonça sur la gorge du seigneur de guerre, la manquant de près avant de plonger ses crocs dans son épaule.

« Arès ! » La voix coupa court aux grognements et aux cris de Framna et le loup obéit à la demande, relâchant sa victime avant d’aller vers la grande silhouette sombre qui se tenait dans l’encadrement de la porte. « Brave garçon. » Xena lui caressa la tête puis regarda vers son âme sœur. « Je ne peux pas te laisser seule une minute, pas vrai ? »

« Hé ! » Gabrielle s’appuya sur son bâton. « C’est moi qui gagnais. » Elle tourna son regard vers la princesse qui était blottie près du canapé, visiblement morte de peur. « Silvi, tu ferais mieux de t’asseoir. »

Xena ferma la porte derrière elle et avança à grands pas dans la pièce, lançant à peine un regard vers la jeune fille tandis qu’elle atteignait le seigneur de guerre plaintif pour le regarder à son tour. « Tu as de la chance que je sois de bonne humeur », dit-elle froidement. « Ou je l’aurais juste laissé te mâchouiller un peu plus longtemps. » Son regard glacial alla vers la barde. «Tu veux bien t’asseoir pour alléger ce genou ? »

La barde leva les yeux au ciel et boita pour contourner le bureau avant de s’installer dans le fauteuil avec un soupir audible, puis elle prit son sandwich à moitié mangé et le mâchouilla. « Oui, grand-mère », répliqua-t-elle la bouche pleine, recevant un clin d’œil en retour.

Xena attrapa la tunique du seigneur de guerre et le souleva, le poussant rudement sur le canapé. « Voyons ça », grogna-t-elle de dégoût, en lui prenant le poignet pour examiner les traces de crocs. « Tu as eu sacrément de la chance, mec », l’informa-t-elle. « Bon… je pense qu’il faut qu’on parle maintenant. »

Il la regarda en silence, tenant son bras de l’autre main tandis que le sang coulait. « Xena sourit, pas un de ses sourires gentils, et elle s’appuya contre le bureau. « Ou bien je peux te livrer à la MissTapdur, la Reine des Amazones ici présente. » Elle saisit Gabrielle en train de réfréner fortement un sourire à ces mots et elle mit une expression menaçante sur son visage. « Elle peut faire de toi de la purée en moins d’un quart de marque de chandelle, je te préviens. »

Son regard alla lentement d’elle à la barde puis à nouveau sur elle. « Qu’est-ce que tu veux ? » Demanda-t-il, la voix rauque.

Xena sourit. « C’est mieux. » Elle se laissa tomber dans le fauteuil. « Et si tu es un vrai bon garçon, je vais même m’occuper de tes blessures », l’informa-t-elle d’une voix soyeuse. « Maintenant, parlons affaires. »


Gabrielle mâcha son sandwich, contente de laisser sa compagne mener ces négociations. Elle avait rarement l’occasion de voir la guerrière utiliser la persuasion. Xena appliquait habituellement une méthode plus directe pour marchander et il était intéressant d’avoir un aperçu de son côté plus astucieux même dans la modification du langage de son corps tandis qu’elle s’apprêtait à conclure un marché avec le seigneur de guerre blessé.

Au lieu de se tenir droite, ce qui mettait en valeur sa taille intimidante, elle avait choisi de se poser sur le bord du bureau, un peu en arrière et les jambes croisées aux chevilles. Elle avait aussi croisé les mains posées sur une cuisse et penché la tête d’un côté, minimisant l’impact de son regard acéré.

Intéressant, songea Gabrielle en regardant le mouvement du corps de Xena sous sa combinaison de cuir et son armure, réussissant par sa seule volonté à s’empêcher de tendre les mains pour la toucher. Elle pouvait presque sentir la texture chaude et rugueuse du cuir sous ses doigts et ce qu’elle ressentait quand Xena bougeait en le portant. La guerrière prit une inspiration pour commencer à parler et le tissu se resserra, envoyant un minuscule couinement de plainte. Avec un effort, Gabrielle détourna son attention de ces détails fascinants et écouta la conversation.

« Alors. » Xena baissa le ton de sa voix. « Tu cherches à faire une conquête dans le sang, hein ? »

Framna la regarda  très inquiet. « Conquête ? » Murmura-t-il en lançant un regard à Silvi. « Non… je n’ai aucun intérêt à prendre une cité. C’est Silvi que je veux aider… Je veux libérer cet endroit de ce salaud. »

La guerrière l’étudia. « Et ensuite quoi ? » Demanda-t-elle tranquillement. « Voyons voir… ton plan fonctionne. L’armée de Garanimus va dormir, tu prends le pouvoir… et quoi ensuite? Qu’est-ce que tu fais d’eux ? » Elle croisa les bras sur sa poitrine et bougea un peu.

Il haussa une épaule large. « Ceux qui le voudraient… s’ils sont valables, ce dont je doute, pourraient rester avec mon armée… ceux qui ne le sont pas… seraient libres de partir. » Il avait le regard cloué sur son visage avec prudence, cherchant une réaction.

« Ça aurait marché à la perfection », dit Silvi, nerveusement. « C’était un très bon plan, jusqu’à ce que tu le ruines. » Ceci était dit pour Gabrielle qui la regarda solennellement. « Je ne peux pas croire que j’ai été trompée aussi vulgairement par toi. » Elle lança un regard blessé vers la barde.

Le regard bleu clair la cloua. « Gabrielle ne t’a pas trompée », lui dit sèchement Xena puis elle se leva et alla à la fenêtre, les forçant à se retourner pour la regarder. « Tu restes ici après ça ? » Demanda-t-elle en tenant paresseusement une main dans la lumière du soleil, la regardant danser sur sa paume. Une douce brise souffla, remuant ses cheveux noirs et apporta une touche de cuivre et de cuir vers Gabrielle. La barde la respira joyeusement, mais garda le silence, mâchant son déjeuner.

Il hésita puis regarda la princesse. « Si Silvi veut que je reste, oui. »

Xena se retourna et s’appuya sur les doubles portes qui menaient sur le balcon, laissant la lumière chaude mettre son visage dans l’ombre et accentuer les lueurs étincelantes de ses yeux. « Très bien… voici le marché. » Elle croisa les bras. « Je n’ai rien contre toi et tout ce que j’ai promis à Garanimus, c’était de prendre la direction de son armée… pas d’en faire quelque chose. »

Ils la regardèrent d’un air méfiant.

« Alors… je laisse faire votre plan à deux conditions », continua Xena en levant la main, un doigt dressé. « Un, que personne, et je dis bien personne, ne soit blessé. » Elle leva un second doigt. « Et deux, c’est moi qui décide de quand et où l’armée de Garanimus, l’incluant, sera dispersée. »

Framna se leva lentement et lui fit face, la toisant de toute sa hauteur. « Nous avons un facteur de six à un en notre faveur… pourquoi accepterais-je ces conditions. » Il la jaugea. Silvi se tourna de façon à faire aussi face à Xena, mais elle resta assise, presque accroupie derrière le dossier du canapé comme si cela la protégeait de la silhouette intimidante.

Xena sourit. « Pour deux raisons. » A nouveau un doigt levé. « Un, parce que tu ne perds rien ainsi. » Un second doigt maintenant pointé sur lui et là, la menace roulait d’elle comme une vague sombre. « Et deux, parce que je vais prendre cette petite armée de cent hommes et te battre si tu ne le fais pas. » Sa voix tomba sur les derniers mots, et prit une texture profonde et grondante tandis qu’elle plissait les yeux.

Gabrielle sentit un frisson familier le long de son dos tandis qu’elle regardait le côté sombre de sa compagne émerger, la peignant d’une qualité féline qui était tellement perceptible que même le grand seigneur de guerre recula d’un pas. Dieux… La barde réalisa que son regard était cloué sur la silhouette menaçante de Xena, regardant la respiration régulière tandis que la guerrière attendait la réponse de Framna.

« Tu… es plutôt prétentieuse si l’on considère que tu ne les as eus que quelques jours », temporisa-t-il, la voix légèrement hésitante.

Xena lui offrit un de ses sourires pleins, complètement détendue et confiante, et Gabrielle put voir les doutes de Framna se multiplier devant ses yeux. Elle sourit à son âme sœur derrière leur dos et leva un pouce, avant de cligner, ce pour quoi elle reçut un haussement de sourcil et une courbure spéciale de son sourire en réponse.

Framna prit une inspiration et regarda Silvi. « Je vais accepter… mais à une condition », finit-il par répondre. « Toi et cette armée, vous quittez cette cité et ne revenez plus jamais. »

La guerrière se mit à rire. « Je ne pense pas que ce sera un problème. » Elle se repoussa de la porte et alla vers lui, un bras tendu. « Marché conclu ? »

Il hésita. « Comment je sais que je peux te faire confiance ? »

Les yeux bleus luirent doucement. « Tu ne le peux pas. Tu dois juste faire un choix. Oui, ou non. » Elle tourna sa main. « Marché conclu, ou pas ? » Elle se tint là, stable et alerte, les muscles marqués dans ses épaules se tendant légèrement tandis qu’elle attendait.

Framna soupira puis il tendit la main à contrecœur et attrapa son avant-bras, serrant avec précautions, puis relâchant comme si elle était quelque chose de dangereux. « Conclu. » Il recula et Silvi se leva rapidement allant près de lui, une main tremblante sur son bras, une expression mêlée de peur et de dégoût sur le visage tandis qu’elle regardait Xena.

La guerrière croisa les bras. « Bien. » Elle eut un sourire tordu. « On se voit au dîner alors », ajouta-t-elle d’un ton neutre. « Reste tranquille et fais ce que je dis, d’accord ? »

Une expression de frustration et de colère passa sur son visage. « Pas de coup tordu. »

Xena se contenta de rire. « Pas de coup tordu », l’assura-t-elle.

Silvi se redressa. « Et tu peux laisser ta… » Son regard alla vers Gabrielle pendant un instant, ensuite revint vers la guerrière. « Ton esclave ici. Je ne la veux pas à ma table. »

Gabrielle fut debout avant que Xena put même ouvrir la bouche. « Attends une fichue seconde. » La barde mit les mains sur les hanches. « Xena, je veux savoir pourquoi tout le monde présume que je suis une sorte d’esclave personnelle à ton service. » Sa voix était sèche de colère.

« Je heu… » Xena pinça les lèvres et se frotta la mâchoire tandis qu’elle regardait son âme sœur d’un air penaud. « Parce qu’ils ne te connaissent pas ? »

« C’est à cause du cuir ? De l’épée, des bottes ? Quoi ? » Demanda la barde rhétoriquement. « Ou bien… laisse-moi deviner… c’est ta taille, pas vrai ? » Gabrielle fit face à Silvi, ses yeux vert brume pleins d’étincelles. « Ecoutez bien, je ne suis ni une esclave, ni une servante, ni rien d’autre, compris ? » Déclara-t-elle avec fermeté.

Silvi la regarda avec horreur puis elle détourna les yeux et se rapprocha de Framna.

« Oui », gronda Xena en plissant les yeux d’un air dangereux. « Réfléchissez un peu… si elle faisait ma taille, avec son attitude, vous seriez dans un monde d’ennui, n’est-ce pas ? Vous seriez probablement en train de plonger du balcon à cet instant. »

Gabrielle tourna un regard faussement agacé vers sa compagne, mais ne dit rien.

« Elle sera avec moi ce soir », continua froidement Xena en fixant Silvi. Ensuite son regard passa sur Framna. « Tu ferais bien de retourner à ton armée… pour pouvoir faire ta petite entrée. » Une pause. « Attention au ravin dehors… j’y ai vu des serpents. »

Il écarquilla les yeux en l’entendant dire où se trouvaient exactement ses troupes. « D’accord », marmonna-t-il en prenant le bras de Silvi pour aller vers la porte cachée. Xena les suivit avec Arès sur ses talons et qui grondait, pour fermer le panneau derrière eux et s’y appuyer.

« Alors… Votre Royale PetiteTaille… comment vont les choses dans les donjons ? » demanda la guerrière, les yeux brillants. « Quel couple de gamins. »

Gabrielle s’était assise et avait maintenant le menton sur une main et l’autre un doigt plié en direction de son âme sœur.

Xena regarda autour d’elle s’il n’y avait pas une autre cible puis pointa sa propre poitrine.

La barde sourit et hocha la tête, pliant à nouveau son doigt.

La guerrière traversa la pièce lentement, les mains derrière le dos jusqu’à ce qu’elle arrive au bureau. « Ouuuiii ? » Gronda-t-elle à voix basse, la tête penchée d’un côté, fixant Gabrielle.

La barde se leva puis sauta sur son fauteuil et mit les deux avant-bras sur les épaules de Xena. « Tu es… la plus grande, mais la plus mignonne, des poules mouillées couvertes de cuir de toute la Grèce. »

« Moi ? » Couina Xena. « Quoi… je n’étais pas assez intimidante ? Qu’est-ce que tu veux que je fasse… que je lui fiche une trouille à le transformer en une masse de gélatine tremblante ? » Elle rit. « Je l’ai menacé de toi deux fois, qu’est-ce que tu veux de plus ? »

« Ça. » Gabrielle mit le front contre celui de la guerrière. « Ce n’est pas ce dont je parle. » Elle lui embrassa le nez. « Et tu le sais bien. »

Le regard de Xena alla vers le bureau et son visage prit une expression presque timide. Elle jouait paresseusement avec une plume tombée, mettant les pennes en ordre nerveusement. « Oh », souffla-t-elle.

La barde inspira l’odeur propre de ses cheveux. « Sais-tu quel cadeau ça a été pour moi ? demanda-t-elle doucement. « Comprends-tu combien c’est important pour moi d’avoir ces mots écrits de ta main dans ce journal qui est tellement une partie de moi-même ? »

Un sourire troublé et soulagé recourba les lèvres de Xena. « Je présume que je le sais maintenant. » Elle leva les yeux et regarda la barde. « C’était bien, hein ? » Elle leva la main et la laissa retomber. « Je ne… suis pas sûre de savoir pourquoi j’ai fait ça… je sais que c’était un peu incohérent… c’est juste… sorti comme ça. »

Gabrielle lui prit le visage entre ses mains et fixa mélancoliquement ses yeux. « Ma chérie, tu peux être incohérente dans mon journal tant que tu veux, d’accord ? » Répondit-elle. « C’était la surprise la plus extraordinaire… et mon anniversaire n’arrive pas avant… » Elle s’arrêta pour compter.

« Huit jours, douze marques de chandelle », murmura Xena en concentrant son regard sur la poitrine de la barde, qui était au niveau de sa tête. Elle leva les yeux alors que le silence s’éternisait pour voir des larmes couler sur les joues de Gabrielle. « Hé… » Elle leva une main d’un air déconcerté pour essuyer doucement le liquide. « Tu savais que je m’en souviendrais. » Sa voix traîna. « Pas vrai ? ? » Les deux derniers mots sortirent de manière hésitante.

La barde entoura sa nuque de ses deux bras et la rapprocha. « Oui. » Elle prit une inspiration tremblante tout en cachant son visage contre l’épaule de Xena. « Je me souvenais en fait de ce que j’avais eu à mon dernier anniversaire. »

Intriguée, la guerrière la serra. « C’était quoi, mon amour ? »

« Nous. »

Le doux murmure parvint à son oreille et Xena serra fort la mâchoire à la vague d’émotion. Est-ce que ça faisait juste une année depuis qu’elles se tenaient sous la pluie, dans un village centaure et qu’elles avaient passé la ligne sur laquelle elles balançaient depuis longtemps déjà ? Bien sûr que oui. Elle le savait très bien.

« C’est aujourd’hui, pas vrai ? » dit Gabrielle dans un souffle.

Xena hocha la tête.

« On dit que… la première année est toujours la plus difficile. » Gabrielle mit sa joue contre le cou de la guerrière. « Ça devrait être une brise à partir de maintenant, non ? »

La guerrière sourit et lui frotta le dos. « Je vais faire de mon mieux pour m’en assurer. » Elle souleva Gabrielle de son fauteuil et la posa sur le sol, effleurant le dessus de son crâne d’un baiser. « Contente que tu aies aimé la note. »

« Oui vraiment beaucoup », approuva la barde en lui faisant une dernière étreinte avant de la relâcher tandis qu’elles se tournaient en entendant un coup à la porte. « Oh oh… quoi maintenant ? »

« Que je sois damnée si je le sais. » Xena soupira. « Entrez. »

La porte craqua en s’ouvrant et Mestre entra, portant un plateau avec des verres et un grand pichet. « On m’a dit de vous apporter ça », dit la jeune fille, en gardant les yeux cloués sur Xena, réussissant à communiquer une intense désapprobation dans sa posture rigide. « Attention, ma ‘am… c’est un peu gâché, je crois. » Son regard se porta délibérément sur Gabrielle et s’y maintint puis elle retourna d’un air de défi vers Xena.

La guerrière soupira intérieurement. J’ai le truc pour choisir les alliés les plus improbables. « Merci, Mestre », répondit-elle. « Je ferai attention. »

A contrecœur, la jeune fille hocha la tête puis sortit, mais pas sans jeter quelques coups d’œil derrière elle. Xena attendit que la porte se referme avant d’aller renifler le contenu. « Du porto ? » Elle lança un regard à Gabrielle. « Je déteste le porto. »

« Je sais. » La jeune femme hocha la tête. « Je voulais m’assurer qu’au cas improbable où je ne serais pas là quand on l’apporterait, tu ne boirais pas le tout d’une traite. »

Haussement des deux sourcils. « Moi, d’une traite ? » Xena ricana. « Ça ne risque pas, Gabrielle. »

La barde boita vers elle et lui tapota le côté. « Je blaguais. » Elle renifla le pichet et plissa le nez. « Je sais que tu en commandes dans les tavernes uniquement parce que tu es convaincue que c’est tellement mauvais que c’est sécurisé. »

Xena sourit et poussa le pichet. « Aucune maladie ne pourrait vivre là-dedans, pas vrai ? » Elle fit une grimace. « Alors… qu’est-ce qu’il y a là-dedans ? »

La barde haussa les épaules. « Quatre paquets de ce qu’ils veulent donner à tout le monde ce soir. »

« Quatre ? ? ! !” Cria Xena. “Bon sang, Gabrielle… est-ce que tu pensais que tu devais aussi assommer Argo?”

Gabrielle rit doucement et glissa un bras autour d’elle. « Hé… tu es une grande fille. » Elle pressa son côté. « En plus, avec toi on n’est jamais trop prudent, en tous cas j’aime à le penser. »

« Mmpf. » La guerrière grommela. « Moi et ma réputation… c’est une chose dangereuse. »

« Deux choses dangereuses », rectifia la barde d’un ton absent, s’appuyant contre le cuir, souriant un peu tandis que le bras de Xena tombait sur ses épaules. « Désolée, j’ai un peu fait sauter ma couverture. »

Xena haussa les épaules. « Nan… t’inquiète pas pour ça… ça n’allait plus durer très longtemps de toutes les façons. »

Un signe de tête. « Alors… tu vas laisser tout le monde prendre de ce truc et dormir, pas vrai ? »

« Nan. » Xena secoua la tête.

Gabrielle leva sa tête blond-roux et fixa sa grande compagne. « Hein ? »

Un demi-sourire apparut. « Ne fais jamais confiance à un plan qui n’est pas le tien, Gabrielle. »


A suivre 8ème partie

 

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Commentaires
S
Bonne année à vous aussi en retard désolé. vraiment un très grand merci pour ces traductions super travail, bravo à toi fryda en attendant de le suite avec impatience lol continuer vous êtes géniaux
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E
Waouw ! Merci Frida pour ce cadeau de fin/début d'années ! Un chapitre qui fait avancer la situation de l'intrigue, et des mots et paroles d'amour 😊
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F
Grand merci pour ce commentaire. Tous mes voeux pour cette nouvelle année 2017
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X
Quel plaisir de finir l'année en lisant cette 7ème partie.<br /> <br /> Toujours aussi fan de Melissa Good et de toi Frida pour cette traduction.<br /> <br /> Ta traduction me permet de l'apprécier pleinement car le traducteur Google c'est !!!!!!<br /> <br /> Merci encore et tous mes meilleux voeux de bonheur et de santé Frida<br /> <br /> Bises
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