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  • Vous trouverez ici des Fans Fictions francophones et des traductions tournant autour de la série Xena la Guerrière. Consultez la rubrique "Marche à suivre" sur la gauche pour mieux utiliser le site :O) Bonne lecture !!
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13 décembre 2009

Le poids du futur et du passé, P1, chapitres 5-6-7

 

Chapitre 5 :

 

- Chouette soirée, hein ? fit une voix de basse derrière elle.

Tia sourit à l’ironie perceptible, puis se recomposa un visage neutre avant de lui faire face. Elle leva les yeux sur la montagne qu’était son tuteur et le toisa aussi dédaigneusement que possible.

- C’était ton idée, alors pas de plainte.

Il sourit et fit un geste vague qui aurait put passer pour bien des choses. Puis paume tournée vers le ciel, il présenta de la main la femme qui l’accompagnait. Tia la détailla. C’était une femme d’une cinquantaine d’années, à la peau fine et ridée. Sa chevelure argentée lui arrivait aux épaules et allait merveilleusement avec ses traits fins et ses yeux, d’un brun velouté, respiraient la chaleur.

Elle était beaucoup plus petite que Frédéric, plus petite qu’elle-même. Une telle différence de taille… elle se demandait… soudain une image saugrenue et très crue traversa son esprit la faisant rougir. Elle baissa les yeux le temps de reprendre contenance puis les releva et hocha la tête.

- Voici Anne Dérestin. Une de nos voisines.

- Et ta charmante amie, poursuivit Tia avec un sourire en coin.

Ce fut au tour de Frédéric de détourner le regard, gêné. Un petit rire amusé ramena vite leur attention.

- Nous avons été démasqués chéri, fit Anne en lui touchant le bras.

Il acquiesça et se tourna vers sa première enfant.

- Promis-juré, fit celle-ci en levant la main droite, je dirais rien ! Même sous la plus extrême des tortures !

Il rit.

- Depuis combien de temps ?

- A toi de le dire, miss je sais tout, répondit doucement son tuteur.

- Mmmm, fit Tia pensive, je dirais deux mois et demi environ.

Il écarquilla de grands yeux et elle se moqua.

- Tu croyais que je m’étais rouillée à ce point ? Tu croirais pas aussi au Père Noël ? Au lapin de Pâques ? Je suis au regret de te dire que Nemo n’existe pas. Pas plus que Shreck. Je sais, c’est dur, dit-elle faussement compatissante, mais il va falloir te faire une raison.

Elle releva la tête et croisa son regard amusé. Puis elle se tourna vers sa compagne.

- Enchantée Madame Dérestin. Je m’appelle Tia, se présenta-elle en lui tendant la main.

- Je sais. Frédéric parle de vous sans arrêt.

- Attendez, répliqua la mercenaire vivement avec une expression incrédule, vous êtes en train de me dire que Frédéric… parle ?!

Frédéric secoua la tête alors qu’Anne se mettait à rire.

- Et bien je te trouve de très bonne humeur pour une personne que la perspective de cette réunion enervait.

- Je me suis fait une raison, rétorqua-t-elle sans perdre son sourire en coin.

- Tu as présenté ton amie aux jumeaux ?

- Oh non ! répondit l’armoire à glace avec un air très proche de la panique. Pas aujourd’hui ! Tu ne vas rien leur dire n’est ce pas ? s’enquit-il soudain inquiet.

Tia le laissa mariner un petit moment puis secoua la tête.

- Pas de souci, Fred. Je serais une tombe.

- Fred ? Un peu de respect jeune fille, fit-il en retrouvant son aplomb.

- Dixit l’homme qui tremblait comme un lapin, y’a à peine deux secondes.

- Je ne tremblais pas comme un lapin, grommela le grand homme dans sa barbe.

Il la fusilla du regard puis se tourna vers sa compagne.

- Chérie, ça t’ennuierait de nous laisser seuls quelques minutes ?

- Pas du tout, répondit la petite femme avec une petite tape sur son torse. Je vais aller me chercher un rafraîchissement. Veux-tu que je te rapporte une entrecôte ?

- Oh que oui.

- Très bien.

Elle lui fit une petite bise sur la joue et Tia se retint de rire en le voyant vérifier les environs. Puis elle s’éclipsa et la mercenaire se mit un doigt dans la bouche en mimant une envie de vomir puissante.

- Vous êtes si guimauves que ça me donne des nausées.

- Tu t’es déjà regardée avec Lex avant de critiquer ? rétorqua-t-il sans se vexer.

- Non et heureusement, je suis sûre que je me dégoûterais, répondit-elle avec aplomb.

Il secoua à nouveau la tête. Décidément, elle était de bonne humeur.

- Alors ? le relança-t-elle. De quoi voulais-tu m’entretenir ?

- Je voulais savoir si tu avais appris quelque chose sur notre mystérieux traqueur.

- Pas encore non. Il cache bien ses traces. Et toi ?

- Rien non plus. Comme tu dis il cache bien ses traces, ce qui est plutôt étonnant. Tout ce qu’on sait de lui, c’est qu’il pose des questions sur moi. Ca m’intrigue. Comment s’y prend-t-il pour ne rien dévoiler de lui-même ?

- On s’y prend peut-être mal ? suggéra la grande femme. Je vais m’adresser à d’autres personnes, plus… directes.

- Je vois ce que tu veux dire, ok, je vais faire pareil.

Tia hocha la tête et tout deux regardèrent Anne revenir. En chemin, elle se fit alpaguer par Len à qui le manège de son tuteur n’avait pas échappé. Frédéric fila comme une flèche, porter secours à sa dulcinée en espérant pouvoir limiter les dégâts dans les questions et les réponses de part et d’autre.

Tia secoua la tête en riant et croisa le regard de Rhapsody puis celui de Lex, qui étaient en grande discussion. Elle ressentit un mélange parfait de bien-être puissant et de malaise intense. « Allons bon, qu’est-ce que ça signifie encore ? » songea la grande femme en les rejoignant.

 

********************************

 

Le lendemain matin, comme à son habitude, Tia se réveilla la première et, comme d’habitude, Lex était à l’autre bout du lit et lui tournait le dos. Mais cette fois, elle ne s’attarda pas à la regarder en se demandant quoi faire. Cela ne changerait rien, alors elle préféra se lever et tenter de faire comme si cela ne l’affectait pas.

Elle se doucha rapidement et s’habilla, puis attrapa son ordinateur portable et passant dans la cuisine, elle s’attabla devant une fournée de pancakes, reste du quatre heures de la veille, qu’elle arrosa copieusement de nutella.

Tout en dégustant son met, elle alluma son ordinateur et consulta ses mails professionnels. Elle avait bien envie de bouger un peu. Sa bizarre rencontre avec la voisine et ses relations étranges avec Lex, lui donnaient fortement envie de faire quelque chose de routinier, de rassurant.

Elle en dédaigna plusieurs et en lut quelque autres prometteurs. Puis flasha sur l’un deux. Littéralement. Il s’agissait d’une mission en Australie, la terre des kangourous et des koalas. Elle sourit à l’idée de revoir la petite bouille toute mimi des koalas et étudia attentivement les détails de la mission.

C’était un truc tout simple qui lui permettrait de profiter du voyage pour visiter un peu. Elle devait récupérer un dossier chez un particulier, le garder quelques jours puis le convoyer jusqu’au tribunal fédéral de la magistrature de Sydney.

Très simple. Elle se doutait bien qu’il devait s’agir d’un dossier avec des infos brûlantes, mais elle savait aussi que si le gouvernement Australien faisait appel à elle s’était pour décourager les personnes qui voulaient prendre ces infos. Elle devrait donc être peu importunée.

Rien d’excitant donc, mais c’était exactement ce dont elle avait besoin. Elle pourrait se changer les idées et se détendre un peu. Elle envoya un mail de confirmation à son nouveau client et lui demanda des renseignements complémentaires. Elle passa ensuite sur son mail personnel et découvrit des alertes sur ses sites de téléchargement préférés. Apparemment, de nouveaux épisodes de L Word et de Grey’s Anatomy étaient sortis.

Elle s’empressa de cliquer dessus et de chercher le nom des épisodes. Elle lança ensuite une recherche avec sur son propre programme de téléchargement. Il était inrepérable, on ne pourrait donc pas la taxer de téléchargement illégal.

Elle finit ses pancakes et se rendit dans le salon où elle s’installa confortablement sur le canapé. Elle posa son ordi sur ses genoux et laissant le programme tourner, lança des recherches sur les personnes qui l’avaient contacté.

Elle passa l’heure suivante à étudier attentivement le profil des personnes impliquées et du terrain à occuper. Elle avait une planque toute prête pour mettre en sécurité les infos dès qu’elle les aurait.

Maintenant tout ce qu’il lui fallait c’était des infos sur ceux intéressés par ces infos. Elle envoya un nouveau mail à ses clients en précisant la nature des renseignements dont elle avait besoin. Puis vérifia l'avancement de ses téléchargements et décida d’aller chercher ses DVD Walt Disney. Elle avait besoin de sa dose de magie et de happy end.

Elle se rendit sur la pointe des pieds dans la bibliothèque devenue, grâce à elle, vidéothèque. Elle se situait entres les chambres des ses enfants qui, fatigués par la fête de la veille, dormaient encore. Elle farfouilla quelques minutes et se décida pour Mulan, Lilo et Stich et Shreck.

Elle retourna dans le salon et mit le premier DVD. Elle attrapa un coussin qu’elle posa sur son estomac et entoura de ses bras. Elle remonta ses genoux et fixa l’écran comme si c’était la première fois qu’elle voyait le film.

C’est dans cette position qu’Alexia la trouva lorsqu’elle se réveilla aux environ de midi. Elle s’appuya au chambranle de la porte et observa celle qui malgré les années passées, faisait toujours battre son cœur.

Elle était concentrée sur l’action qui se déroulait sur l’écran. Alexia pencha la tête pour voir ce qu’elle visionnait et vit que c’était Lilo et Stich. Elle revint à sa compagne et la vit poser une main sur sa bouche en réprimant un gloussement. Lex ne put s’empêcher de sourire devant les grimaces de sa compagne.

Tia était si mignonne quand elle regardait la télé. Que se soit un film pour enfant ou non, elle s’émerveillait toujours comme si elle en était une. Elle lui avait avoué au début de leur relation, qu’elle était devenue accro à la télévision pendant sa grossesse. Frédéric lui avait fait découvrir les Walt Disney et les séries Tv parce qu’elle était apathique et qu’il ne savait pas quoi faire pour la sortir de son état dépressif.

Elle avait fini par voir les images qui défilaient sur l’écran en face d’elle et entendre les dialogues. Elle en avait été instantanément fascinée. Ca n’avait jamais calmé sa rage mais ça lui avait permis d’apprendre certaines choses et surtout ça lui donnait une bouffée d’ailleurs, un moment où elle n’avait plus à penser, juste à vivre par procuration. Et ça elle en avait parfois, cruellement besoin.

Même si Tia lui avait raconté les cauchemars de son enfance, ils n’étaient pas partis pour autant. Ils revenaient parfois la hanter et la laissaient dans un état de nerfs explosif. Au début, Alexia croyait que ça passerait avec le temps, maintenant elle savait qu’il n’en serait jamais rien. Ces cauchemars faisaient partis d’elle et de ce qu’elle était. Tout ce qu’elle pouvait faire c’était d’être là lorsqu’ils revenaient la hanter.

Cela lui fit penser que Tia ne lui avait encore jamais raconté pourquoi elle était dépressive pendant sa grossesse. Elle avait d’abord pensé que c’était la découverte de sa grossesse justement, mais en lisant entre les lignes elle avait compris que ce n’était pas la raison principale. Elle l’avait interrogée là-dessus une fois, mais Tia s’était refermée comme une huître. Elle avait passé le reste de la journée dans un état mélancolique qui lui avait fait craindre quelque chose de plus sérieux. Depuis elle avait soigneusement évité le sujet.

Si savoir que Tia ne lui avait pas tout dit était un peu douloureux, elle comprenait que sa compagne avait des blessures profondes, qui ne guérissaient vraiment pas vite et qu’en rouvrir d’autres avant que celles-ci n’aient commencé à cicatriser pouvait être dangereux pour sa santé mentale, alors elle patientait.

Mais depuis la découverte de ses résultats elle savait qu’elle n’avait pas toute la vie pour l’aider. Pourtant elle continuait de patienter. Elle ne voyait pas quoi faire d’autre de toute façon. Cependant elle avait dû redéfinir ce qu’elle accomplirait pendant son existence. Elle y avait réfléchi un bon moment et en voyant sa compagne glousser comme une enfant, elle sut que c’était la bonne décision.

Elle voulait la délivrer de ses démons. Cela prendrait du temps, demanderait de la patience et beaucoup de tolérance, Tia étant une personne qui n’aimait réellement pas se confier et qui réagissait mal après l’avoir fait.

Elle avait 10 à 12 ans de bonne santé devant elle, elle allait donc faire en sorte que cela suffise.

Elle resta à l’observer pendant presque tout le film et pas une seule fois, elle ne sembla se rendre compte de sa présence. C’était toujours comme ça quand elle regardait la télé. Elle était complètement immergée dans la fiction, comme hypnotisée par l’écran.

Ca l’avait toujours fasciné et… amusé aussi. C’était si… opposé à Tia. Elle signala sa présence pendant le générique par un petit raclement de gorge et la mercenaire releva la tête surprise. Une petite rougeur apparue comme à chaque fois qu’on la surprenait à regarder des dessins animés puis elle la reconnut et elle sourit.

Tia aimait beaucoup voir Lex au réveil. Elle était si échevelée qu’elle donnait l’impression d’avoir dormi au milieu d’un typhon, mais c’était dû en fait, aux multiples passages de ses mains dans ses cheveux pendant qu’elle réveillait son corps.

Souvent la mercenaire la réveillait, juste pour la voir lever les mains et les passer dans ses cheveux. C’était marrant de la voir se décoiffer, les yeux fermés sans avoir aucune conscience de ce qu’elle faisait. Après elle attendait de la voir se rendre dans la salle de bains et comptait les secondes jusqu’au cri qui retentissait immanquablement lorsque Lex se rendait compte de ce qu’était devenue sa chevelure.

Elle fixait alors la porte de la salle de bains et attendait de la voir sortir en courant et de se planter devant elle, les mains sur les hanches, pour l’accuser de s’amuser à faire des nœuds dans ses cheveux. Elle la traitait de gamine et lui disait qu’elle pourrait trouver un jeu moins ennuyeux.

A ce moment de la diatribe, Tia éclatait de rire. Elle n’avait pas encore trouvé l’occasion de lui dire qu’elle était la seule coupable. Surtout parce qu’elle devinait que Lex ne voudrait pas la croire. Et puis c’était si amusant de la voir aussi vexée et outragée.

Elle gloussa devant l’improbable coiffure de sa compagne et dit en pointant un doigt vers le sommet de sa tête :

- Tu projettes de laisser une famille de rapace s’installer ?

Lex fronça les sourcils et porta la main à ses cheveux. Elle se pencha un peu et regarda son reflet dans la fenêtre. Poussa un petit cri et se tourna vers elle avec un regard furieux.

- Ca t’amuse toujours autant à ce que je vois. Bon sang Ti, tu peux pas te trouver un autre jeu ?! gronda-t-elle. Tu sais combien de temps je mets chaque matin à défaire les nœuds ?

Pour toute réponse Tia gloussa à nouveau et ses jumeaux se joignirent à elle en pénétrant dans le salon quelques secondes plus tard et en la découvrant. Lex tourna les talons vexée et partit d’un pas énergique tenter de retrouver forme humaine dans la salle de bains.

- Faudra que tu lui dises quand même que c’est pas toi, déclara Lara entre deux hoquets.

- Tu rigoles ?! Si je le lui dis, elle va faire gaffe en se levant et filer direct à la salle de bains avant de se montrer. J’ai aucune envie de manquer un tel spectacle !

- C’est vrai ça serait dommage ! convint son fils. J’aime bien ce genre de réveil, moi.

On entendit un cri de frustration en provenance de la salle de bains puis :

- Tia !

Les rires repartirent de plus belle.

 

**********************************

 

Cela faisait deux jours qu’elles étaient en Australie. Tia avait récupéré les documents avec Lex puis s’étaient séparées. Elle était partie les mettre en sûreté, pendant que Lex leur préparait un petit programme touristique. Elles avaient 7 jours à attendre avant de remettre les docs au greffe du tribunal.

Apparemment, les infos concernaient une bande mafieuse qui sévissait depuis une dizaine d’années et qui avait récemment participé à des essais médicaux illégaux. Ils avaient fournis, sous couverture d’enlèvements, divers échantillons représentatif de la population. Si on lui avait confié les preuves, c’était parce que le chef de la police de Sydney ne se faisait pas d’illusion. Il savait que sa police était gangrenée et qu’il y avait des taupes dans son service.

Il avait donc fait appel, avec l’accord du procureur et du maire, à divers mercenaires pour assurer la protection des preuves. A elle on avait fournis les indices et preuves matériels. A d’autres on avait demandé la protection de témoins.

Pour des raisons évidentes, on ne lui avait rien dit d’autre. La présence de plusieurs mercenaires, surtout aussi réputés qu’elle, pour assurer la protection des preuves, avait eu l’effet escompté. La mafia ne savait pas où donner de la tête, ni même qui ou quoi chercher.

Si Tia et Lex jouaient donc tranquillement les touristes sous leurs véritables identités, elles n’auraient aucun ennui et les preuves seraient acheminées en temps, sans souci. Une mission très facile et reposante en somme.

Lex leur avait dégoté un circuit safari, très en vogue en ce moment. C’était une couverture idéale et cela convenait parfaitement à la mercenaire qui voulait à toute force revoir kangourous, koalas et compagnie. Ses réactions d’enfant étaient merveilleuses à voir, c’était pourquoi elle avait choisi ce lieu.

Elles étaient dans un des 4x4 de la compagnie qui gérait le parc et elles allaient entrer dans la zone réservée aux félins. Une pause était prévue près du lac vers lequel tous s’abreuvaient. Elles avancèrent en profitant du paysage et Tia marmonna à l’oreille de Lex que la structure du domaine avait été bien pensée. L’espace était suffisamment grand pour que plusieurs clans de félins différents puissent y vivre.

Le groupe dont elles faisaient parties sortit des véhicules qui surplombaient le point d’eau avec joie. Ce surplomb était un endroit inaccessible aux animaux et donnait un excellent point de vue sur le point d’eau en dessous où tous les animaux venaient s’abreuver. Cela faisait une heure qu’ils se promenaient et cette pause était la bienvenue. Tia sortit en s’étirant comme un chat. Lex vit plusieurs hommes la regarder faire d’un air intéressé.

«  Pas de bol les gars, elle est déjà prise. » Lorsqu’elles sortaient en société, Lex était toujours partagée entre la fierté d’être d'être celle à qui appartenait le coeur de Tia et la gêne d’être vue en compagnie d’une femme aussi fascinante soit-elle. C’était difficile. Surtout parce que les réactions des personnes qui les entouraient étaient toujours imprévisibles.

Lorsqu’elle n’y lisait pas du dégoût, elle y voyait du choc. Au mieux, elle pouvait espérer de la curiosité. Il était très rare d’y voir de l’indulgence ou de l’amusement comme c’aurait été le cas pour un couple hétéro. La plupart du temps, les gens détournaient le regard et Lex faisait comme si tout ceci ne la dérangeait pas.

Bien sûr, Tia n’était pas dupe et en public elles faisaient comme si elles étaient de simples amies. Lex devait s’avouer que c’était moins dur, mais elle n’aimait pas être obligée de se comporter autrement que comme un couple. Elle aurait aimé pouvoir se blottir dans ses bras et l’embrasser quand ça lui chantait.

Et marquer aussi sa propriété. Tia était avec elle. A elle. Et elle voulait que tous les mecs qui la regardait comme en cet instant le sachent et arrêtent leurs singeries ridicules, consistant à essayer de l’impressionner et à tenter leur chance.

Elle savait que ça ennuyait Tia, mais Tia ne savait pas à quel point ça l’ennuyait, elle. Elle avait fait de sérieux progrès concernant ses réactions, mais la morsure provoquée par la jalousie était, elle, toujours aussi présente et toujours aussi forte.

« Si seulement le monde pouvait évoluer un peu plus vite »… songea-t-elle. C’était facile de dire de se ficher des autres et de faire comme elle en avait envie, mais les regards, s’ils n’étaient réellement pas importants, le malaise qu’ils généraient était bien réel lui.

«  Le pouvoir d’un regard… » songea-t-elle nostalgique. A ce moment là, Tia croisa son regard et ce qu’elle y lut la fit frissonner des pieds à la tête. « Le pouvoir d’un regard… » songea-t-elle à nouveau beaucoup plus guillerette.

 

******************************

 

Les 4X4 s’étaient séparés une demi-heure auparavant, pour suivre chacun un circuit différent. Alors excepté leur chauffeur et guide, Tia et Lex étaient seules. En tête à tête. Lex observa une fois de plus sa compagne s’émerveiller devant un troupeau de gazelles se faisant chasser par un groupe de guépards.

Leur véhicule se trouvait à une bonne distance et elles observaient l’attaque à travers les jumelles gracieusement fournies par leur guide, lequel s’était absenté pour satisfaire à son besoin de nicotine.

Tia descendit de la voiture sans lâcher les jumelles et poussa un petit cri. Elle se retourna et lui sourit joyeusement. Suivant son impulsion, Lex descendit et la rejoignit. Elle passa ses bras autour de sa taille et s’appuya contre elle.

Un rugissement soudain associé au bruit du métal rencontrant des griffes, les fit se retourner vivement. Elles dévisagèrent bouche bée, une lionne qui faisait deux fois leur taille et qui se trouvait sur le capot du véhicule. Elle les regardait et Tia y vit l’instinct de la chasse.

- Elle nous prend pour son dîner, murmura-t-elle à sa compagne en la poussant doucement derrière elle.

- Ils sont pas sensés éviter les humains ?

- Si.

- Ok.

Lex prit une grande inspiration et tenta de calmer les battements de son cœur. Elle avait fait face à pire. N’est-ce pas ?

- Et on fait quoi maintenant ?

- Aucune idée.

- Que… quoi ?

- J’en sais rien.

- Comment ça tu sais pas ? Tia c’est… t’es une spécialiste ! Une mercenaire !

- Au cas où ça t’aurait échappé, je ne m’occupe que des humains.

- Mais… mais…

- Il nous faut notre guide. Et vite.

- Tia je crois pas qu’elle va attendre qu’on le trouve, fit Lex en sentant la panique monter.

La lionne s’était ramassée sur lui-même et semblait sur le point de leur sauter dessus.

- Je crois aussi, répondit calmement la mercenaire. Ecoutes, à mon signal tu dégages en hurlant. Tu trouves le guide et tu lui dis d’appeler les vétos en urgence.

- Attends, j’ai comme l’impression que ce plan ne t’inclut pas là, et je….

- On n’a pas le temps de discuter mon amour, alors soit sympa et fais ce que je te dis.

- Tia…, protesta la jeune femme avec appréhension.

- Maintenant ! cria la grande femme en la poussant de toutes ses forces d’un côté alors qu’elle-même se jetait de l’autre.

La lionne, qui avait bondi, atterrit entre elles deux et pour qu’elle ne se trompe pas de cible, Tia se releva et la harangua d’une voix dangereuse, basse, menaçante comme si elle ne la craignait pas.

Comme prévu, la lionne sentit en elle, la présence d’un autre prédateur et suivant son instinct, elle voulut la soumettre. Elle se tourna vers elle et découvrit ses crocs.

Alexia se releva et vit la lionne menacer sa compagne avec horreur.

- Qu’est-ce que tu attends ? cria Tia. Bouge de là, va chercher le guide !

Lex sursauta puis hésita. Elle ne voulait pas laisser son amie ici, seule avec ce monstre. Elle risquait de se faire déchiqueter. La même idée sembla la traverser parce qu’elle cria alors :

- Je ne vais tenir jusqu'à la saint glinglin Lex, alors bouge tes fesses !

Enfin, avec réticence et une angoisse de plus en plus palpable, Alexia se mit en marche. Elle suivit le même chemin que le guide et se mit à courir en priant pour que Tia s’en sorte.

Tout le temps où Tia avait incité Lex à partir, elle n’avait pas quitté la lionne des yeux. Tout deux prenaient la mesure l’un de l’autre se tournant autour dans un lent mouvement parfaitement contrôlé.

Elle sentit, plus qu’elle ne vit, lorsque la lionne décida qu’il était prêt à passer à l’attaque. Tia se ramassa sur elle-même, prête à bondir hors de sa portée dès qu’elle le verrait dans les airs. D’un mouvement si vif qu’elle le perçut à peine, la lionne bondit.

Tia se jeta sur le côté et roula hors de sa portée. Elle se redressait lorsqu’elle comprit qu’elle n’avait pas été assez rapide. La lionne avait atterri où elle se trouvait deux secondes auparavant et sans perdre une seconde avait rebondi pour la suivre.

Elle tenta un écart de dernière minute en se repoussant avec les pieds vers l’arrière mais ce ne fut pas suffisant. Une douleur fulgurante, celle de griffes accrochant la chair et la déchirant, traversa son abdomen. Elle tomba sur le dos alors que la lionne se tournait vers elle et, avant qu’elle n’est pu faire un mouvement, bondit sur elle, la clouant au sol de tout son poids.

Les pattes avant sur ses épaules et une des pattes arrières sur sa jambe gauche, elle pouvait à peine bouger. Les griffes s’enfonçaient dans sa chair alors même qu’elle sentait le sang couler de son ventre pour se répandre sur le sol, attisant encore plus la soif de sang de son adversaire.

Tia vit ses yeux se dilater encore plus et le vit approcher sa gueule de son cou. Elle leva les bras dans une tentative désespérée de l’empêcher d’avancer. Les griffes s’enfoncèrent un peu plus profondément lui tirant un gémissement qu’elle réprima très vite.

Il ouvrit la gueule Tia vit sa mort, toute proche. Elle empoigna son cou, bien décidée à ne pas abandonner aussi facilement. Lex allait la tirer de là, il fallait juste lui en laisser le temps. « Bon sang que les lions sont lourds ! » songea-t-elle la sueur dégoulinant le long de son front.

Inexorablement, et alors qu’elle bandait tous ses muscles pour le stopper, sa tête se rapprochait de son cou. Comme s’il avait senti le danger, le cri sombre qui l’accompagnait depuis la mort de Sassem, retentit soudain.

Il pénétra en Tia et pour une fois, elle ne le repoussa pas, l’acceptant, l’appelant même de toute son âme. Il entra en elle, se répandit dans tout son corps et la galvanisa. Une énergie sombre se répandit en elle au rythme des pulsations de son cœur.

Un instinct plus vieux que le big bang lui même, l’habitait. Création-destruction. C’était le chaos. Lorsque l’énergie en elle menaça de la rendre folle, Tia la libéra. Dans un hurlement salvateur et plein d’une force brute et farouche, Tia crispa ses mains sur le cou de l’animal et d’une torsion violente, elle lui brisa la nuque.

L’animal s’affaissa contre elle et Tia le repoussa. Elle se releva, le corps brûlant d’une envie profonde et violente de se défouler. Mais elle vit Alexia revenir en courant, le guide derrière elle, et demandant du secours par radio. C’était étrange, il était bien à

20 mètres

de là, mais elle l’entendait aussi clairement que s’il avait été à ses côtés. Elle le voyait se mouvoir comme au ralenti.

Elle revint à Alexia et vit qu’elle était devant elle en train d’examiner son corps couvert de sang. Sa vision et son ouïe redevinrent normales et elle l’entendit lui poser des questions, sans plus entendre le guide. De même tout recommença à bouger normalement.

- Tu vas bien ? Tia, tu vas bien ? demandait fébrilement Lex en vérifiant par elle-même sans attendre sa réponse. Oh bon sang, il faut t’amener à l’hôpital.

- Je vais bien Lex, répondit enfin la grande femme en posant une main sur son épaule pour l’obliger à se calmer. Lex, répéta-t-elle quand elle ne la vit pas réagir, je vais bien. Ce ne sont que des égratignures.

- Avec toi, c’est jamais rien d’autre, grommela-t-elle en retrouvant son calme par à coup. Même avec un trou béant, tu trouverais encore le moyen de dire qu’un pansement suffirait.

Lex était en colère, mais Tia savait que ce n’était que l’expression de son inquiétude, alors elle ne formalisa pas. Au lieu de ça elle répliqua :

- Ouais, mais comme j’ai une bonne fée, je suis sûre que mon pansement sera magique et que la vilaine et dérangeante égratignure disparaîtra en un claquement de doigts.

Lex ne répondit pas tout de suite.

- Ta bonne fée, elle n’est pas en forme en ce moment, fit-elle un peu moins en colère, alors tu vas gentiment te laisser conduire à l’hôpital.

- Si ça peut te faire plaisir, accepta la mercenaire en effleurant sa joue de ses doigts.

Un des vétérinaires qui venait d’arriver vit le lion mort et la fixa avec de grands yeux écarquillés, pendant qu’un autre écartait les pans de sa chemise et plaquait plusieurs compresses stériles sur ses plaies en grimaçant.

- Comment vous avez fait ça ? Demanda le troisième homme. Il faisait au moins 200 kilos !

 

Chapitre 6 :

 

Elles apprirent plus tard que la lionne n’appartenait pas à la réserve et que des marques de mauvais traitements récents faisaient penser à un réseau que les autorités essayaient de coincer depuis plusieurs mois. Des animaux sauvages étaient capturés dans leur milieu naturel puis conditionner pour attaquer les humains. Ils servaient littéralement d’armes.

On leur demanda donc si elles avaient une idée de qui pouvait bien leur en vouloir et elles jouèrent les idiotes. Pas question de griller leur couverture sans être certaines que c’étaient bien elles qui étaient visées.

Néanmoins, Tia contacta son client et lui demanda si il voyait qui aurait pu utiliser ce genre de moyen pour lui nuire.

- Ce n’est pas le genre du cartel du coin. Je veux dire, bien sûr si vous les gênez et qu’ils veulent se débarrasser de vous sans être inquiétés ils pourraient utiliser un moyen comme celui-ci, mais là, ils ont besoin de ces documents. Si ils savaient qui vous étiez, ils essaieraient de vous contacter pour trouver un arrangement, pas de vous tuer.

- C’est aussi ce que je pense. Pourriez-vous me rendre un service ?

- Dites toujours.

- J’aimerais que vous enquêtiez sur la façon dont cette lionne est arrivé dans la réserve sans que personne ne le remarque. Il doit bien y avoir des traces et je ne peux malheureusement pas m’en occuper moi-même, puisque j’ai votre mission sur les bras.

Le chef de la police garda un instant le silence.

- Seriez-vous en train de me faire du chantage ?

- Pas du tout. Je vous informe juste que je dois savoir qui sont ceux qui veulent ma peau et qu’il se pourrait que je sois obligée d’abandonner ma couverture pour cela, auquel cas cela pourrait porter préjudice à mon travail. Et pour que ça n’arrive pas, je vous donne l’occasion de me donner un coup de main.

Un autre silence.

- Comme c’est aimable de votre part, ironisa finalement le chef. Très bien, soupira-t-il, je vais voir ce que je peux faire.

- Bien. Tenez-moi au courant.

- Ouais, ouais.

Il soupira encore une fois puis raccrocha. Tia sourit et se retourna vers sa compagne.

- Il avait l’air fatigué le pauvre homme, fit-elle avec un grand sourire.

- Et ça à l’air de t’affliger.

- Je l’aime bien, rétorqua-t-elle.

- Ah bah, ouais, ta compassion saute aux yeux.

- C’est les médicaments, rigola doucement la mercenaire.

Alexia l’observa et ne put retenir un sourire devant son expression enfantine. Elle était allongée sur un lit d’hôpital à roulette, la chemise ouverte et le ventre couvert de gaze ensanglantée. Son jean était déchiré à l’endroit où la lionne avait enfoncé ses griffes. Cela faisait 5 minutes qu’elles étaient arrivées et l’infirmière qui avait fait une piqûre d’antalgique à Tia en apprenant ce qui lui était arrivé, venait de partir chercher le médecin.

Avant de partir, elle avait prévenu sa patiente qu’il faudrait sûrement découper son jean, ce qui avait fortement déplu à la mercenaire. Alexia était parvenue à la convaincre de laisser faire le médecin en arguant qu’il était déjà fichu à cause de la lionne. Mais elle avait eu du mal. Surtout parce qu’elle ne voulait pas se retrouver cul nu, dixit Tia, après avoir été soignée. Elle avait dû lui promettre de demander à l’infirmière le droit d’emprunter un de leur pantalon chirurgical, fusse-t-il le payer.

En cet instant, Tia était gentiment allongée sur le dos et la regardait avec un air d’enfant trop mignon. Il y avait une adoration si évidente dans ses yeux, que Lex sentit son cœur fondre. Elle se pencha doucement sur sa compagne et l’embrassa, effleurant ses lèvres dans un baiser léger comme l’air. Elle frotta ensuite son nez au sien et murmura :

- Je t’aime.

L’air de profonde joie que cela créa, fit monter un sentiment intense de chaleur en elle. Elle rit un peu puis frotta de nouveau son nez au sien avant de se redresser.

C’était fou, après 3 ans de vie commune, la première année ne comptait pas elles n’étaient pas encore ensemble, enfin pas vraiment, qu’un « je t’aime », entendu si souvent, puisse avoir encore autant de force.

A chaque fois que Lex le disait à Tia, on aurait dit que c’était la première fois. Et c’était pareil lorsque Tia le lui disait. Oui, c’était véritablement fou et cela en disait long sur leur relation.

Le médecin entra enfin dans la pièce et s’assit près de Tia. Il retira les pansements et examina attentivement les plaies. Puis il releva la tête et déclara :

- Eh bien ma foi, vous avez eu de la chance.

Puis se tournant vers Lex.

- Il va falloir lui faire plusieurs points de suture. Et lui donner une bonne dose d’antibiotique.

Alexia hocha la tête et s’assit près de la tête de Tia qui fronçait les sourcils, pas du tout satisfaite du diagnostic. Tout au long du processus de soin, Alexia lui parla doucement de ce qu’elles allaient faire le reste de la semaine et qui incluait un repos forcé pour Tia et du chouchoutage pour elle.

Si la première partie du programme ne plut pas à la mercenaire, la seconde en revanche amena un sourire coquin sur ses lèvres.

- Promis ?

Alexia sourit en secouant la tête, pas du tout gênée par la présence du médecin.

- Promis.

Lorsqu’il eut terminé le médecin lui donna ses dernières instructions.

- Il faut lui passer cette pommade désinfectante tous les jours, matin et soir, pendant une semaine. Revenez la semaine prochaine pour lui retirez ses points et surtout faites la se reposer pendant au moins 24h.

- Je le ferais. Par contre, la semaine prochaine on sera rentrées en Amérique, donc les points on les fera retirer là-bas.

- Très bien. N’oubliez pas, fit-il en retirant ses gants. Laissez-la se reposer. Et si elle a mal, ce qui ne m’étonnerait pas, donnez-lui ceci, fit-il en lui tendant une ordonnance.

Elle la prit et le remercia. Il sortit au moment où l’infirmière rentrait, le pyjama bleu des chirurgiens dans les mains. Elle le posa à côté de Tia et entreprit de lui retirer ses vêtements. Alexia la regarda faire, légèrement choquée. Pourtant elle n’aurait pas dû l’être, c’était son métier après tout, mais elle ne pouvait s’en empêcher. Il n’y avait qu’elle qui avait le droit de toucher Tia.

Elle s’approcha de l’infirmière alors que celle-ci tirait sur les lambeaux de jean et que la mercenaire l’aidait de son mieux en gloussant. Son rire, loin d’ennuyer la femme, la faisait sourire et lorsqu’elle eut enfin retiré le vêtement, elle ne put s’empêcher de lâcher un sifflement en voyant les jambes longues, musclées et bronzées.

Son air ouvertement admiratif n’échappa ni à la brune qui gloussa à nouveau, ni à la blonde qui posa une main sur le bras de la femme. Le regard noir qu’elle lui offrit, la fit reculer et elle comprit que sa tâche était terminée. Elle lui fit un petit salut et un petit signe à sa patiente en sortant. Tia le lui retourna en chantonnant :

- Au revoir, belle infirmière, mon infirmière…

Puis elle tourna son regard vers sa compagne qui la dévisageait d’un air contrarié et elle gloussa de nouveau, une main devant sa bouche.

- Si tu ne fais pas attention, tu vas te transformer en dinde à ce rythme, lui lança-t-elle contrariée.

Elle la fit asseoir et lui enfila son haut, puis les jambes du pyjama. Elle la fit se mettre debout et ajusta le pantalon sur ses hanches qu’elle serra grâce au lacet. Puis stabilisa son amie qui tanguait dangereusement.

- Bon sang, comment on va rentrer ? grommela-t-elle.

Elle savait que Tia avait raison quand elle lui avait dit que refuser l’antalgique serait pour le moins dangereux pour leur couverture, mais elle n’avait jamais vu Tia aussi… ailleurs. Même bourrée, elle n’était pas aussi… partie. C’était amusant et adorable, mais en la circonstance, particulièrement dangereux et vraiment pas pratique.

Elle soupira et la fit asseoir. Elle appela un taxi puis partit en quête d’une chaise roulante non sans s’être assurée auparavant que Tia ne bougerait pas.

 

*****************************

 

Une semaine plus tard, elles se trouvaient tranquillement installées sur des chaises longues en Ontario, en train de siroter une citronnade. Tia avait l’air parfaitement remise. On lui avait retiré ses points la veille et de fines cicatrices roses marquaient ses épaules, son ventre et une de ses jambes.

Alexia l’observa. Elle avait les yeux fermés et l’air parfaitement détendue. Elle se souvint de sa terreur lorsqu’elle était revenue en courant vers elle avec leur guide pour la trouver allongée sous le lion. Et son angoisse lorsque se relevant, elle l’avait vue couverte de sang et une énergie sombre parcourir son corps et se refléter dans ses yeux aux iris extrêmement dilatés.

Elle avait réussi à se calmer suffisamment pour l’emmener aux urgences, mais même l’assurance du médecin et le calme de l’infirmière n’étaient pas parvenus à la rassurer. Ce n’était pas temps dû à ses blessures qu’à cette énergie vibrante qui transformait son aimée en une boule de nerfs dangereuse.

Mais en la voyant, allongée, là, calme comme un bébé venant de naître, elle était soulagée. Elles étaient à la maison, en sécurité et Tia allait bien.

Peu avant de partir d’Australie, Tia avait reçu un coup de fil du chef de la police. Il lui avait dit qu’un camion avait été volé pour le transport la lionne et d’après les rumeurs qui circulaient, l’animal lui-même avait été dérobé. Autrement dit, quelqu’un en voulait personnellement à Tia, mais il n’avait aucune idée de comment cette personne avait fait pour s’introduire subrepticement dans la réserve et se balader aussi tranquillement.

Tia en avait parlé avec Frédéric à leur retour. Ils avaient fait le rapprochement avec le mystérieux homme qui posait des questions sur Frédéric et en avaient conclu que c’était bien Tia qui était visée comme ils le soupçonnaient depuis le début.

Dès lors, elle avait fait une liste des divers ennemis qu’elle avait et les avait classés selon les préjudices causés, les moyens à disposition et la motivation ou la rancune, nécessaires pour imaginer tout ceci.

Quelques noms étaient ressortit plus que d’autres, dont celui du Dõn qu’elle avait empêché de tuer Lizzie, qui elle, avait tué son fils. Il y avait Waco aussi, qui avait promis de se venger. Et quelques autres personnes, comme ce magnat du pétrole en Islande, M. Gorsjv à qui elle avait vendu ses services, puis à son concurrent pour réparer les tords qu’elle lui avait causé. Ca l’avait rendu assez furax, ce qu’elle pouvait comprendre. Elle l’avait un peu arnaqué.

Ils avaient convenu de se focaliser sur ces noms dans leurs recherches et avaient lancé leurs noms et d’autres petites infos, permettant de les identifier, sur leur réseau. Depuis ils attendaient les retours.

Alexia avait été surprise que Tia ne lui en parle pas avant et ça l’avait agacée mais elle n’en avait rien dit.

- Lex ?

- Oui ?

- Mmmm, ça va ?

- Euh… oui, bien sûr. Pourquoi ?

Alexia était un peu déconcertée. Le ton hésitant de son amie et sa question étaient étranges.

- Tu es plutôt de bonne humeur, alors ?

- Ouiiiii, répondit-elle lentement, de plus en plus perplexe.

- Ok, je sais que c’est bizarre comme question, mais j’avais besoin de m’assurer de ton humeur.

- Pourquoi ?

- Hum, eh bien… euh…

Tia s’interrompit et se leva. Elle se mit à faire les cent pas devant sa compagne en tentant de trouver le courage et les mots qui pourraient la convaincre.

Alexia était extrêmement surprise, mais pas assez pour ne pas lorgner les magnifiques jambes qui faisaient des allées et venues sous son nez. Le désir familier mais jamais rassasié s’alluma dans le creux de son estomac. Tia était pieds nus et ses cheveux noirs étaient attachés en queue de cheval. Elle était vêtue d’un t-shirt large et multicolore que ses enfants avaient confectionné pour la dernière fête des mères et qui, excepté le choix des couleurs, était assez horrible. Avec ceci, elle portait un bermuda kaki, qui n’allait absolument pas avec son haut. Pourtant, pour Alexia elle était absolument magnifique.

Mais bon, Tia pouvait porter à peu près tout ce qu’elle souhaitait et restait à tomber. Même un sac poubelle. La couleur mettrait sûrement son teint en valeur.

Lex sourit à cette image au moment où Tia arrêtait de s’agiter. Elle se campa fermement en face d’elle et chercha son regard. Prit une profonde inspiration et se lança.

- Je… j’aimerais que l’on parle du mariage.

Comme un mauvais réflexe son cœur fit un bond et elle-même fit la grimace. Elle vit la réaction que cela provoqua dans les yeux de Tia et se sentit coupable mais ne s’excusa pas.

- Je préfèrerais que l’on n’en parle pas.

- Je sais que tu n’en as pas envie, mais je ne comprends pas pourquoi. Bon sang, Lex si tu ne veux pas mettre de date parce que tu penses que ça va trop vite, je peux le comprendre, mais ne pas me laisser l’annoncer aux enfants, ça je ne comprends pas. Expliques-moi au moins, s’écria-t-elle frustrée, en passant une main dans ses cheveux, défaisant quelque peu sa queue.

« Et toi tu peux m’expliquer pourquoi après trois ans à en parler, tu te décides à me le demander le jour où on apprend que je suis condamnée ?! pensa-t-elle avec colère. C’est quoi : de la pitié ?! Tu te sens obligée ?! Je dois me sentir flattée peut-être ?! » Elle se retint de justesse de lui hurler ses questions à la figure et se demanda agacée d’où pouvait bien sortir cette soudaine insécurité. Décidément sa maladie la chamboulait complètement !

- Je n’ai pas à te l’expliquer, rétorqua-t-elle en sachant parfaitement qu’elle était de mauvaise foi.

- Tu n’as pas à me l’expliquer ?! Putain, Lex ! Bien sûr, que tu me dois une explication ! Merde, je suis quoi, moi ?! Un putain de pantin ?!

- Je n’ai jamais dit ça, mais…

- Mais quoi ?! La coupa brutalement Tia en s’approchant d’elle.

Ainsi dominée par Tia, Lex se sentait vulnérable, elle se leva donc, l’obligeant à reculer.

- Ca ne te regarde pas, fit-elle sèchement.

Ce n’était pas du tout ce qu’elle avait prévu de dire. A chaque fois, elle voulait apaiser les choses mais c’était une autre phrase qui sortait de sa bouche, une phrase qui mettait sa compagne en boule, et comment le lui reprocher ?

- Ca ne me regarde pas ? Souffla-t-elle incrédule. Ca ne me regarde pas ?! Répéta-t-elle plus fort, la colère embrasant ses prunelles azur. TU TE FOUS DE MOI ?!!!! hurla-t-elle à deux centimètres de son visage, la faisant sursauter.

Tia s’approcha encore un peu plus d’elle, son nez se collant au sien. Une lueur dangereuse dans les yeux, elle siffla :

- Si tu ne veux plus de moi, cesses de jouer, parce que c’est le genre de chose qui me fait péter les plombs. Si tu regrettes nos fiançailles, dis-le. Si tu veux me quitter, fais-le, mais ne me dit pas, dit-elle en détachant bien chaque mot, que ce qui concerne notre relation ou ta petite personne ne me regarde pas.

Alexia était médusée. Autant par sa propre incompétence à rassurer Tia que par l’explosion auquelle elle venait d’assister. De toute évidence son rejet travaillait Tia bien plus que ce qu’elle s’était imaginée. Elle avait sous-estimé la blessure qu’elle lui avait infligée.

Elle leva une main vers elle, mais Tia l’intercepta. La clouant de son regard glacial, celui qu’elle réservait habituellement à leur ennemi sur le terrain, elle lui dit :

- Réfléchis bien, Lex. Parce que j’en ai marre de ne pas savoir où on en est. Je vais prendre quelques jours. Les bédouins du village de Sael-Man, m’ont appelé. Ils veulent que je vienne. Je pars demain, je ne sais pas quand je reviens, je vous téléphonerais quand j’en saurais plus. Profites de ce temps là pour réfléchir sérieusement à ce que tu attends de moi.

Tia lâcha sa main et lui tourna le dos. Lex la regarda entrer dans le ranch, sûrement pour préparer ses bagages, sans parvenir à comprendre comment la discussion avait pu lui échapper à ce point.

Le départ de Tia, la soulageait et l’effrayait. Elle craignait une rupture entre elles, pas de leur relation, non, mais… plutôt comme un fossé, qu’elle risquait de ne plus pouvoir combler. En même temps, elle ne savait pas quoi lui dire qui justifie son refus, alors la solitude était la bienvenue, elle avait besoin de réfléchir à ce qu’elle devait lui dire.

« Bon sang, pourquoi ça ne pouvait pas être simple ?! »

 

******************************

 

Tia faisait les cent pas. Ses bagages étaient prêts. Elle avait réservé son billet d’avion et une voiture de location pour son arrivée. Elle avait prévenu Frédéric et les jumeaux et ne savait pas quoi faire pour évacuer la tension rageuse qui l’habitait.

Soudain, elle leva la tête et regarda au dehors. Elle pouvait courir. Sans se soucier ni de son apparence, ni de ses pieds nus, elle partit en grandes enjambées vers la dénivellation qui menait au lac.

Elle la descendit et se dirigea vers le lac, qu’elle longea un long moment avant de bifurquer vers le Sud et de suivre son parcours habituel. Elle courut longtemps sans se soucier du temps qui passait ou du paysage qui changeait, elle était concentrée sur sa course et les efforts que cela demandait à son corps.

Elle voulait évacuer son énervement autant qu’oublier la stupide décision qu’elle avait prise de s’éloigner de Lex. Elle ne le voulait pas du tout et d’ailleurs si Lex ne voulait pas se marier ce n’était pas grave. Du moment qu’elle ne la quittait pas. Elle secoua la tête. Lex avait besoin de cette distance, mais bon dieu que c’était difficile.

Et bordel, pourquoi Lex ne lui expliquait-elle pas ?! Soit elle voulait, soit elle ne voulait pas, ça n’avait rien de sorcier ! Frustrée par ses pensées, elle les chassa de son esprit et força son corps à accélérer dans l’espoir que ses muscles douloureux chasseraient l’image de Lex de son esprit.

Elle poussa encore. L’air commença à brûler ses poumons, ses muscles à protester mais elle accélérait encore. Elle avisa la rivière et sauta sur les rochers qui la bordaient et la traversaient comme un slalom mit là exprès pour elle. Elle passa de l’un à l’autre avec une agilité due à la pratique et accéléra encore.

« Mauvaise idée » songea-t-elle lorsque son pied nu glissa sur un des rochers couverts de mousse humide. Elle tenta de se rétablir en se jetant sur le rocher suivant, mais lui aussi était glissant et elle atterrit, tête la première, dans l’eau gelée de la rivière.

Elle s’affala de tout son long, son ventre heurtant un des rochers son genou en cognant un autre et elle réprima un cri de douleur. Un arc électrique remonta le long de sa cuisse et elle gronda, furieuse contre elle-même de sa maladresse. Elle ne s’attarda pas dans l’eau, pas plus qu’elle ne vérifia son ventre. Elle se releva et poursuivit sa course, déterminée à dissoudre son énervement dans l’effort physique.

Elle éclaboussa les berges et continua son chemin, s’élançant aussi vite et aussi fort que son corps le pouvait. L’air sifflait dans ses oreilles et brûlait si fort ses poumons qu’elle n’était pas sûre de ne pas avoir de séquelles, elle repoussa la douleur et la sensation glaçante de la nuit tombante sur son corps trempé.

Elle filait comme le vent et dans ce lieu désertique et ce silence si complet, elle avait l’impression galvanisante d’être le dernier être humain sur terre. En cet instant, elle aurait voulu que se soit vrai.

Finalement, la vie reprit ses droits et une habitation se profila au loin. Tia hésita mais ne ralentit pas sa course et en reconnaissant la vieille ferme des Olsen, elle se rappela que c’était là que vivait Rhapsody. La perspective de la revoir, calma étrangement la colère qui la secouait encore.

Elle commença à ralentir en la voyant sur son cheval, en train de faire rentrer ses chevaux dans leur pâturage. Arrivée près de la barrière qui délimitait son terrain, Tia se mit au trot puis au pas. Elle s’accouda ensuite à la clôture et observa sa voisine en reprenant sa respiration.

Rhapsody ferma la barrière du corral et la vit. Elle la reconnut immédiatement malgré son accoutrement hétéroclite et s’approcha. Elle se laissa glisser du dos de son cheval et lui sourit. Elle nota sa tenue négligée et trempée, ses pieds nus et son air un peu perdu.

- Intéressant comme choix vestimentaire, fit-elle en souriant d’un air moqueur.

Tia baissa les yeux sur son t-shirt et rit.

- Un cadeau de fête des mères.

- Et les pieds nus ? C’est la nouvelle tendance ou tu as perdu tes chaussures dans la rivière ?

Tia rougit et détourna les yeux une seconde avant de décider de prendre cela à la rigolade.

- Je n’ai pas fait attention, fit-elle en désignant ses pieds, quant à la rivière… j’ai glissé, dit-elle haussant les épaules d’un air nonchalant.

- Tu n’as pas fait attention ? s’exclama Rhapsody incrédule. Comment fait-on pour ne pas s’apercevoir que l’on ne porte pas de chaussure ?

- Quand on a passé la moitié de sa vie à ne pas en porter, j’imagine.

- Oh. Tu as été si pauvre que ça ?

«  Aucun tact, songea la mercenaire avec un sourire. » C’était rafraîchissant.

- Pas vraiment non. C’est juste… un droit que je n’aie pas gagné facilement.

Une des premières choses que firent ses geôliers dans son premier camp pour la casser avait été de lui prendre ses chaussures et tout ce qui faisait d’elle un être humain. Elle ne portait qu’un t-shirt les premiers temps. Comme elle leur avait été utile, elle avait fini par gagner le droit de mettre un short, mais elle était si têtue qu’elle n’avait pas réussi à gagner ses chaussures avant sa « presque » sortie du camp d’entraînement de Sassem.

Lorsque Sassem l’avait si bien brisée qu’elle était devenue un gentil et obéissant petit soldat. Elle n’avait pas considéré cette récupération de son ancien elle, comme une victoire, non. Les chaussures étaient devenues pour elle, le symbole de ce qu’elle avait perdu ce jour là.

Aujourd’hui encore, si elle pouvait éviter d’en mettre, elle le faisait.

- Un droit que… ? Laisse tomber, fit-elle en levant la main. Là, je deviens vraiment indiscrète.

- Ca va, répondit la mercenaire avec un sourire.

- Si... si tu souhaite un jour en parler… fit-elle en lui jetant un regard hésitant.

Surprise, Tia hocha la tête, étrangement touchée. Rhapsody hocha aussi la tête et cela sembla lui rendre son aplomb. Elle lui fit signe de la suivre et l’entraîna chez elle. Une fois entrée dans le couloir, elle se retourna brusquement et se rapprocha de Tia. Elle l’évalua calmement et hocha de nouveau la tête.

- Attend-moi là, fit-elle en lui désignant une porte.

Tia acquiesça, amusée par ses manières autoritaires. Elle entra dans la pièce et découvrit qu’il s’agissait du salon. Il était moins spacieux que le ranch, mais était loin d’être petit. Une cheminée dans le fond, prenait presque tout le mur. Le manteau de la cheminée était couvert de photos de Rhapsody, de ses enfants et de leur père avec eux.

Tia tourna sur elle-même et découvrit de superbes tableaux accrochés à chacun des murs. Les couleurs en étaient criardes mais harmonieuse. Leur flashy était renforcé par la blancheur immaculée des murs.

Tia posa les yeux sur le canapé qui faisait face à la cheminée, il était en cuir noir et elle sourit. Elle adorait le cuir. Elle s’y rendait lorsque Rhapsody entra dans la pièce, une pile de vêtements dans les bras.

- Suis-moi, fit-elle.

Elle l’entraîna à travers un dédale de couloirs qui lui fit se demander si elle était bien dans une ferme ou dans un labyrinthe conçu pour perdre les visiteurs. Elle s’arrêta devant une porte couleur rouille et se tourna vers elle.

- C’est la salle de bains. Prend une douche et met ça. Je suis un peu plus petite que toi, mais j’ai pris ceux qui étaient trop grands pour moi. Quand tu auras fini je t’attends à la cuisine avec un café chaud.

- Un chocolat.

- Un chocolat chaud, accepta la jeune femme en souriant. La cuisine se trouve juste après ce couloir là, fit-elle en montrant sa droite. Ca ira ?

- Oui. Merci.

- De rien. Allez, va vite te réchauffer tu dois être transie.

Tia se doucha avec délice, l’eau chaude chassant le froid et le raidissement de ses muscles qu’elle n’avait ni pris le temps d’échauffer, ni d’étirer. Puis elle s’habilla et sourit devant son reflet. Elle portait un pantalon cargo ocre et un t-shirt extra large qui lui arrivait à mi-cuisse. Une paire de tongs noires complétait l’ensemble.

Elle rejoignit Rhapsody à la cuisine et la trouva en train de surveiller les travaux de ses enfants à travers la fenêtre.

- Merci pour la douche.

- C’est rien, fit-elle en lui tendant sa tasse brûlante.

Toute deux s’assirent et le silence s’installa. Ce n’était pas un silence désagréable mais la curiosité prit le dessus et Rhapsody l’interrogea.

- Alors qu’est-ce qui s’est passé ?

Tia envisagea un instant de nier, mais y renonça très vite.

- Je me suis disputée avec Lex.

- Ca devait être une sacrée dispute pour te mettre dans un état pareil.

Tia hocha la tête.

- Quel en était le sujet ?

La bouche de Tia prit un pli amer.

- Ca fait parti de la dispute.

- Tu ne peux pas en parler ? comprit la jeune femme.

- Non, elle ne veut pas en parler. Et je lui ai promis de ne pas le faire.

- Pourtant ça à l’air de te miner. Si je te promets de n’en parler à personne, tu crois que tu peux m’en toucher un mot quand même ?

Tia sourit franchement mais secoua la tête.

- Non, j’ai promis.

- Et une promesse et une promesse, poursuivit Rhapsody en comprenant.

- Et les poules auront des dents le jour ou je trahirais Lex. Mais merci, ajouta-t-elle. C’était gentil.

- Oui. Je m’étonne moi-même d’ailleurs, répondit la femme avec un sourire sarcastique. Tu fais ressortir ce côté-là de moi. C’est bizarre.

- Je vois ce que tu veux dire.

- Vraiment ?

 Tia hocha la tête et elles restèrent les yeux dans les yeux quelques minutes. Puis aussi naturellement que si elles se connaissaient depuis toujours, Rhapsody l’interrogea sur sa vie, ses passions et Tia fit de même. Elles discutèrent un bon moment et Tia ne prit conscience du temps qui s’était écoulé que lorsque les enfants débarquèrent dans la cuisine pour réclamer leur dîner.

- Mince, je n’avais pas vu l’heure. Il faut que je rentre, déclara-t-elle en sautant sur ses pieds.

- Je vais te raccompagner, proposa Rhapsody.

- Pas la peine, je te remercie.

- Fais ta dure à cuire Tia. Il est 9h du soir, il fait nuit et tu es à

11 kilomètres

de chez toi. Si tu rentres toute seule, je vais m’inquiéter, alors sois sympa et laisses-moi te raccompagner. Ca ira plus vite.

Tia ouvrit la bouche pour refuser, mais le bon sens lui fit accepter. Elle grimpa dans son pick-up et elles firent le trajet dans un silence complice. Tia, perdue dans ses pensées, se demandait si Lex avait fini de réfléchir ou si elle devait maintenir son départ. Elle soupira, elle connaissait déjà la réponse.

Chapitre 7 :

 

Comme elle s’en souvenait, le paysage était incroyable. Ce qu’elle préférait dans ce lieu, c’était l’incroyable palette de couleurs. Cela allait de l’or à l’orangé, de l’ocre au rouge brûlé. C’était si beau, que chaque fois était comme une première. Elle ferait un détour par le désert blanc au retour. Là, elle n’avait pas vraiment le temps.

Le chef du village ne lui avait pas dit en quoi ils avaient besoin d’elle et elle ne les avait pas rappelés. Elle devait s’éloigner de toute façon.

Elle observa encore le paysage, qui contrairement à ce que la majorité des gens pensait du désert, était incopiable. C’était si grandiose, si changeant qu’on ne pouvait s’en lasser. L’absence de végétation conférait une impression de liberté comme nulle part a ailleurs car elle était tempérée par la beauté de l’environnement et sa majesté.

Tout cela donnait l’impression d’évoluer au milieu d’un endroit sacré. Terre des pharaons où leurs esprits vivaient encore et vous autorisaient, si vous étiez respectueux, à fouler leur sol. Mais aussi d’un lieu irréel, comme peint par un artiste à l’âme chaleureuse.

On ne se sentait jamais seul dans le désert, non.

Bien trop de gens y avaient vécu. Bien trop de choses y vivaient encore. Et tellement de sentiments naissaient en vous lorsque vous vous y trouviez.

De la sérénité, dut à des siècles d’une histoire difficile mais au combien exotique. Un esprit d’aventure, comme seul les endroits désertiques mais encore plein de vie vous en donnaient. Un sentiment de liberté comme seul, l’esprit des anciens pouvait vous le faire ressentir. Et les couleurs… elles ne pouvaient que vous stupéfier, vous bouleverser et vous faire comprendre que même dans un lieu de mort comme le désert pouvait l’être, pour les imprudents ou les idiots, ce qui faisait la beauté de la vie était présente.

Comme quoi vie et mort sont toujours invariablement liés.

Tia vit le village au loin et constata que les années passant, et comme partout ailleurs, il s’était agrandi. Après la mort de Sassem et le démantèlement de son organisation, le chef du village l’avait appelé pour la remercier.

Depuis ils avaient gardé le contact et il lui donnait régulièrement des nouvelles. Ainsi, elle avait appris que sur les 6 jeunes qu’elle avait sauvés de l’armée de Sassem, deux étaient partis après un an à vivre ainsi. Cette vie de fermier n’était pas pour eux avaient-ils dit. Le chef avait accepté leur départ.

Il n’y avait pas d’hostilité, les jeunes avaient fait leur part du marché, ils leurs avaient appris tout ce qu’ils savaient sur les armes et le combat. Un autre était mort des suites d’une fièvre fulgurante. Les trois derniers étaient restés. L’un s’était marié avec une des filles du village. Un autre s’était fait adopter par une famille qui avait perdu leur fils peu de temps auparavant et le troisième était devenu l’apprenti du médecin du village.

Tia avait envoyé l’argent nécessaire, deux ans auparavant pour que le guérisseur aille à la grande ville et suive une formation auprès d’un vrai médecin. Finalement, le guérisseur avait demandé à suivre les études de vétérinaire, ce qu’elle avait accepté à condition qu’il trouve quelqu’un pour le remplacer.

C’était donc un étranger au village qui s’occupait de soigner les corps et les âmes. Cela aurait pu mal se passer, mais il venait à la demande de Tia et tous respectaient Tia. De plus, il était arrivé avec sa femme et ses deux filles, facilitant son intégration. Sa femme était une paire de mains supplémentaire bienvenue. Ses filles, l’une d’elle du moins pouvait s’occuper des petits la journée, lorsque tout le monde était soit en train de s’occuper de la culture près de l’oasis, soit en train de s’occuper de leur élevage, à la place de la vieille Jmabo qui se faisait trop âgée pour cela.

Tia déboula au milieu du village et vit que la plupart des cabanes avait acquis des toits plus solides que le torchis qu’ils utilisaient auparavant. De même, les murs semblaient renforcés. Elle évita habilement les poules et les chèvres qui couraient en toute liberté et parvint sans dommage jusqu’au centre du village.

Elle gara son 4x4 devant la maison du chef et descendit.

Elle observa un peu les alentours et à mesure que les habitants la reconnaissaient, ils envahirent la place et l’entourèrent en criant, manifestant ainsi leur enthousiasme. Plusieurs vinrent taper sur son épaule avec de grands sourires.

« Difficile dans ses conditions de rester maussade », songea la jeune femme en leur rendant leur sourire.

Soudain trois jeunes hommes, typés latin, émergèrent de la foule. Ils avancèrent vers elle et l’observèrent, un peu hésitants. Elle les examina à son tour et reconnut 3 des 6 jeunes qui bossaient pour Sassem et qu’elle avait épargné. Elle leur fit un signe de tête et comme si c’était un signal, ils se détendirent complètement et s’approchèrent d’elle en souriant.

Chacun à leur tour, ils lui tendirent la main en s’inclinant. Le plus âgé des trois prit ensuite la parole, dans un anglais hésitant mais respectueux.

- Bonjour. Vous… vous souvenez de nous ? demanda-t-il avec une grimace d’excuse pour son accent déplorable.

Elle lui sourit et répondit en espagnol, ce qui le détendit sensiblement et lui fit plaisir. Sa langue natale lui manquait apparemment.

- Je me souviens. Comment allez-vous ? La vie vous plaît ici ?

- Oh oui, s’empressa-t-il de répondre avec un sourire heureux. La vie est paisible ici, c’est… ça a été un peu dur au début, on… on avait plus l’habitude, mais les villageois ont été très patients et… On est très heureux, conclut-il en renonçant aux explications difficiles.

Un des deux autres jeunes en retrait, s’avança à son tour.

- Nous voulions vous remercier, fit-il avec un sourire communicatif. Grâce à vous on a pu retrouver une vie normale. Avoir le choix. Ne plus tuer.

A ces mots, son regard franc s’assombrit un peu, mais il redevint vite aussi lumineux que le soleil lui même.

- Nous vous devons tout et nous le savons.

- Nous tenions à vous remercier, fit le dernier des trois garçons en s’inclinant devant elle.

Aussitôt les deux autres l’imitèrent.

- Si vous tenez vraiment à remercier quelqu’un, alors remerciez Alexia. Sans elle et son obstination coutumière je ne serais pas restée ici. Et je n’aurais aidé personne.

Les garçons se redressèrent et la dévisagèrent avant d’acquiescer mais elle vit à leur regard que rien n’avait changé. Ils avaient juste une seconde personne à adorer.

- Nous la remercierons, fit le premier garçon.

Puis la foule s’écarta à nouveau et le chef du village fit son apparition. Tia lui sourit. Il n’avait pas changé. Quelques années de plus, mais les mêmes rides, la même force tranquille se dégageait de lui, la même détermination. La même bonté aussi qui lui avait fait plaider la cause de ceux-là même qui étaient venus les tuer.

Il lui serra la main et lui dit sa joie de la revoir.

Elle lui rendit son salut et le suivit à l’intérieur de sa maison lorsqu’il l’invita à le suivre. Il lui proposa un thé qu’elle accepta. Elle le regarda préparer l’infusion avec des gestes précis mais précautionneux. Dans le désert le thé n’était pas seulement la boisson traditionnelle, c’était aussi une boisson sacrée, préparée selon un rituel bien précis.

« Un peu comme au Japon » songea la mercenaire. Bien sûr, là-bas c’était un peu différent. Il fallait prendre des cours pour devenir un maître de cérémonie, car le thé, le vrai se prépare en suivant une cérémonie particulière.

Il déposa une tasse brûlante devant elle et s’installa en face d’elle. Elle prit sa tasse et souffla dessus pour la refroidir.

- Je suis heureux de voir que vous êtes en pleine forme, dit-il en lui souriant.

- Je le suis. Vous me semblez aller bien vous aussi et le village se portebien à ce que j’ai pu constater.

- Grâce à vous.

Tia fit un geste vague.

- Alors, pourquoi m’avez-vous demandé de venir ?

- Nous avons un problème avec un village voisin qui commerce avec une caravane de bédouins. Ils sont plutôt hostiles et ne veulent pas négocier un accord. Ils nous demandent de nous retirer du commerce ou de leur donner 60% de nos bénéfices. Nous ne le pouvons pas. Nous avons besoin de ce que nous apporte ce commerce.

- Je sais. Que voulez-vous que je fasse ?

- Nous aimerions que vous leur parliez ? Et… que vous fassiez ce qu’il faut pour les convaincre. Bien sûr nous connaissons vos tarifs et vous paierons comme il se doit.

Elle leva la main.

- Inutile. J’aime venir ici, alors disons... que vous m’accueillerez ainsi que mon amie Alexia et mes enfants, à chacune de nos visite et vous nous apporterez votre aide si nous vous la demandons.

- Mais… fit le chef stupéfait, ce n’est pas assez. Nous vous accueillerions de toute façon, il n’y a pas besoin…

Tia le coupa doucement.

- Chef, comme je vous l’ai dit j’aime venir ici, et rendre service à des amis, à mon sens, ne devrait pas être payant. Alors… qu’est-ce que vous en dites ?

- J’en dis, que je suis très fier de pouvoir vous compter parmi mes amis.

Il tendit la main respectueusement et elle la serra.

 

*************************************

 

Tia rentra deux semaines plus tard. C’était la fin du mois de Mars. Aujourd’hui il faisait beau et chaud et le ciel était dégagé. Si le temps se maintenait, les touristes n’allaient pas tarder à rappliquer.

A l’aéroport, contre toute attente, elle avait décidé de louer une moto. Elle avait acheté une veste en cuir et avait enfourché la moto. Sur le chemin du retour, elle avait décidé de faire un détour. Elle voulait pousser sa machine au maximum et éprouver la liberté et la puissance folle que procurait la vitesse.

Après des jours et des jours à vivre au ralenti, elle trouvait un peu décadent de se laisser aller ainsi. Mais cela rendait la chose encore plus jouissive. Elle accéléra et la machine fit un bond en avant. Elle prit les petites routes et sentit le vent fouetter son visage, elle poussa encore plus la machine et se mit à rire. C’était si bon d’être libre…

Elle roula plusieurs heures durant, partagée entre son envie de rentrer et sa peur de ce qui l’attendait. Elle voulait désespérément revoir Lex, elle lui avait tant manqué. Mais elle avait si peur de ce qu’elle allait lui dire. Lorsque le soleil commença à disparaître, elle dut se faire violence pour faire demi-tour. Elle avait prévenu de son retour et ils risquaient de s’inquiéter si elle tardait encore.

Elle rentra donc et l’angoisse augmenta à mesure qu’elle se rapprochait. Enfin, elle vit le ranch apparaître au loin et elle ralentit. Alors qu’elle était encore trop loin pour qu’on la remarque, elle s’arrêta et mis un pied à terre. Elle observa le ranch, et les silhouettes qui y vivaient, un long moment.

Puis elle soupira et prit son courage à deux mains. Elle relança la machine et parvint bientôt devant ce bâtiment qui était devenu sa maison. Elle gara sa moto près de la grange et s’étira. Elle regarda autour d’elle et ne voyant rien venir, supposa qu’ils étaient encore tous en train de terminer leur tâche avant le dîner.

Elle marcha en direction du ranch d’un pas plus léger, soulagée de repousser la confrontation. Alors qu’elle posait un pied sur le porche, Alexia apparut. Et elle se figea.

Comme dans ses rêves, Lex était belle. Ses cheveux blonds lâchés sur ses épaules. Elle était vêtue d’un pantalon à multiples poches kaki et d’un t-shirt à manches courtes en coton blanc, qui moulait son corps à la perfection et laissait entrevoir un morceau de peau de son ventre lorsqu’elle bougeait. Ses yeux verts reflétaient toute la tension intérieure qui l’habitait. Surement le reflet de celle qui agitait Tia depuis des heures.

- Tu t’habilles à la garçonne maintenant ? lança-t-elle d’une voix mal assurée.

Alexia ne répondit pas et la fixa un long moment. Tia était de plus en plus mal à l’aise. Elle avait si peur de ce que Lex allait dire.

- Et toi, dit-elle finalement, tu as adopté le look motard ?

Tia s’examina et hocha la tête avec un petit sourire contraint.

- Temporairement.

Puis le silence se réinstalla. Tia déglutit et soudain tout changea. Un appel, un cri, un son qu’elle seule pouvait entendre, retentit.

Alexia regarda avec fascination le changement qui s’opérait en elle. En voyant ses yeux s’assombrir, le bleu électrique devenant deux lacs d’eau en furie, Lex comprit qu’elle l’entendait encore. Tia sembla se redresser, devenir plus grande, l’énergie que lui procurait cet appel parcourant son corps comme une vague sur la plage. Et comme à chaque fois que cela arrivait, Lex eut peur.

Peur de ne pas pouvoir la retenir. Et aujourd’hui plus que jamais, Tia pourrait vouloir partir. Elle n’avait jamais vraiment su si cet appel comme le nommait Tia en était réellement un ou si c’était un symptôme de sa dépression, mais ça importait peu. Il pouvait l’emmener, c’était tout ce qui comptait. Et elle ne le voulait pas. Elle devait parler. Maintenant.

Elle ouvrit la bouche mais n’eut pas le temps de dire quoi que se soit. Un claquement sec retentit dans toute la vallée. Un cri s’éleva sur sa droite et elle se tourna en même temps que Tia. Ce qu’elle vit la laissa interdite. Jason gisait couché sur le flan, une flaque de sang rouge sombre grandissant sous son corps. Elle le vit s’agiter en soubresauts alors que Len arrivait en galopant. Il sauta à bas de son cheval et se jeta sur Jason. Il le retourna et ouvrit la bouche complètement désemparé.

Il releva la tête et croisa le regard de sa mère.

- Maman, gémit-il, je… il est…

Après un instant de flottement, Tia reconnut le bruit qui venait de claquer et elle hurla en courant vers son fils :

- A terre ! Tout le monde à terre !

Dans un réflexe inconscient, Alexia se jeta sur le sol mais Len abasourdi, perdu, ne réagit pas. En deux enjambées, Tia se retrouva à côté de son fils, se jetant sur lui, le repoussant sur le sol brut lorsque le deuxième coup de feu claqua.

Une douleur brûlante transperça son épaule gauche alors qu’elle protégeait son fils de son corps. Elle roula, l’entraînant sans difficulté puis se redressa derrière un des poteaux du corral qui les protégeraient partiellement. Elle tenta de distinguer d’où provenait les tirs mais ne vit rien. Elle regard en direction du porche et vit qu’Alexia était à terre. Elle croisa son regard.

- Rentre dans la maison, lui cria-t-elle. Et ramène les armes.

«  Bon sang, si on lui avait dit, qu’ici elle en aurait besoin… » Elle s’était décidément relâchée. La mort de Sassem n’était pas une raison suffisante pour perdre toute prudence. Surtout lorsque l’on sait que quelqu’un vous cherche.

Et dire qu’elle n’avait toujours aucun renseignement sur celui-ci.

Elle vit Alexia ramper vers la porte et jeta un regard vers sa moto. Son sac avec ses armes était toujours accroché à l’arrière de la selle. Sa moto n’était pas très loin, peut-être que si elle était rapide…

Un frisson violent la secoua et elle baissa les yeux sur son fils qui tremblait comme une feuille entre ses bras.

- Ca va aller Len. Calme-toi. Len ? fit-elle en l’obligeant à lever la tête, regarde-moi ! Ca va aller. On va régler ça. Ce n’est pas une situation agréable, mais ça n’a rien de nouveau pour moi ou pour Lex, alors calme-toi, ok ?

Son fils posa son regard bleu, si semblable au sien, sur elle et chercha quelque chose. Il sembla le trouver puisqu’il se calma et hocha la tête, beaucoup plus confiant soudain.

- Qu’est… coassa-t-il

Il se racla la gorge et reprit.

- Qu’est-ce que je peux faire pour t’aider ?

Tia réfléchit un moment puis fronça les sourcils.

- Où est ta sœur ?

- Aux dernières nouvelles, elle était avec une des femmes de chambre. Une famille de touristes doit arriver dans une heure et elle l’a emmené préparer leur chalet.

« Les touristes, merde ! »

- Lequel ?

- Le numéro 3.

- Y’a des touristes sur la propriété ?

Len hocha la tête.

- Deux familles.

« Merde ! »

- Tu sais où ils sont actuellement ?

- En excursion avec Andrea. Dans le Canyon de Bel Monté.

Le soulagement envahit la mercenaire mais ce fut de courte durée.

- Et Frédéric ?

- Je sais pas.

- Ok.

Tia se mit à réfléchir. Le tireur avait cessé ses tirs. Soit il était parti. Soit il attendait qu’elle sorte de sa cachette. Elle inspira profondément et élabora son plan. Elle attendit qu’Alexia sorte puis expliqua à son fils ce qu’il devait faire. Ensuite, elle se tourna vers sa compagne et à l’aide des signes habituels, lui expliqua ce qu’elle devait faire.

Alexia hocha la tête et le cœur emplit d’appréhension face à ce que Tia allait faire se prépara. Elle ferma les yeux et attendit.

Au signal convenu, Tia propulsa son fils vers Alexia et celui-ci se mit à courir, courber comme le lui avait ordonné sa mère pendant que Tia faisait de même mais en direction de la dénivellation qui menait aux chalets. Lorsque le coup de feu claqua, Tia se jeta au sol, roula sur elle-même et se releva, sans cesser de courir, slalomant de droite à gauche et de gauche à droite, s’arrêtant parfois brusquement puis courant en ligne droite ou en diagonale.

Lorsque le coup de feu avait retenti, Alexia, grâce à l’entraînement deTia, avait repéré d’où provenait le coup de feu. Elle rouvrit brusquement les yeux et se redressant, tourna son fusil à lunette dans sa direction. Elle ne se préoccupa pas des tirs qui menaçaient sa compagne, se concentrant, cherchant dans sa lunette le tireur. Il était seul, c’était une certitude.

Après quelques minutes, elle le trouva et sourit.

- Je te tiens, fils de pute.

Elle ajusta son viseur. Un calme surnaturel s’empara d’elle. Lorsque le silence fut complet en elle, elle choisit le point à viser. Et entre deux respirations, deux battements de cœur, dans le prolongement de son expiration, elle tira.

Et toucha. Elle vit l’homme, car s’en était un sursauter et se tenir le bras. Cependant ça ne l’arrêta pas. Il ajusta son fusil dans sa direction et elle se leva. Attrapa Len et le projeta à travers la porte ouverte, où elle s’engouffra à son tour. Elle claqua la porte et se posta au ras du sol, près de la fenêtre située près de la porte.

Elle prit le silencieux qu’elle n’avait pas eut le temps de mettre et le posa sur le bout du fusil. Elle tira dans le mur à deux reprises. Elle colla son œil aux trous et fut satisfaite de ce qu’elle voyait. Elle posa le canon de son arme contre le premier trou et le second trou contre la lunette de son viseur.

Elle le bougea un peu et chercha le tireur du regard. Mais ne le trouva pas. Il avait bougé. Logique, sa position avait été repérée. Cependant, même si elle l’avait touché, elle ne pensait pas qu’il s’arrêterait en si bon chemin. Si c’était un bon, il avait sûrement prévu un second point de tir et devait s’y rendre en ce moment même.

Un craquement dans son dos, la fit se retourner avec brusquerie, l’arme pointée en avant. Elle reconnu Frédéric avant de tirer et soupira bruyamment. Elle repositionna son fusil et lui fit un topo. Elle jeta un regard en coin à Len et vit que bien qu’effrayé et pâle, il avait l’air résolu.

- Len, appela sèchement Lex. Va dans ta chambre et celle de ta sœur. Récupère des vêtements de rechange pour vous deux. Ensuite tu vas dans la nôtre et tu prends le sac qui se trouve sur le lit. Tu amènes tout ça ici et tu repars dans la cuisine. Tu prends un sac à dos de nourriture et d’eau et tu reviens. Tu fais tout ça en restant toujours courbé et aussi près du sol que possible. Tu ne prends que le strict minimum pour toi et ta sœur et tu ne remplis pas vos sacs à ras bord, ok ?

Il hocha la tête.

- Alors vas-y.

Il hocha de nouveau la tête et disparut.

- Vous voyez Tia ? s’enquit-elle.

- Non. Mais elle a dû prendre un autre chemin. L’absence de tirs a dû lui mettre la puce à l’oreille.

Elle acquiesça et continua de juguler peur et angoisse. En mission, sur le terrain, garder son calme était une question de survie. Elle attendit donc patiemment.

Un bruit léger, comme un grattement, se fit entendre à l’arrière de la maison. Alexia tourna la tête vers Frédéric qui hocha la tête et lentement, sans un bruit, se rendit près de la source. Il attendit que la porte du patio glisse doucement avant de tendre la main en avant et d’agripper la personne qui tentait d’entrer. Il la projeta brutalement au sol et lui colla le canon de son arme sur la tête.

Deux yeux verts écarquillés le dévisagèrent en même temps qu’une arme glacée touchait sa nuque. Puis le métal froid disparut et un grognement sourd se fit entendre.

- Tu perds la main, Silent.

Frédéric soupira et retira son arme du visage de Lara.

- Désolé mon ange.

Elle hocha la tête et accepta sa main pour se lever. Tia entra et referma la porte du patio avant de descendre les volets. Elle alluma une torche et jeta son arme improvisé, un simple tuyau en métal. La vue de l’objet tira un sourire à Frédéric. Il s’était fait avoir.

- Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? demanda Alexia que le soulagement avait envahie en voyant sa compagne et Lara saines et sauves.

Tia regarda Frédéric qui hocha la tête.

- On passe par la trappe, fit-elle platement.

- La trappe ?

- C’est la raison pour laquelle j’ai acheté ce ranch, expliqua Frédéric. Au XVIIIème, d’anciens esclaves en fuite, ayant fait fortune, on fait construire un tunnel qui partait d’ici. Pour le cas où leur ancien maître les retrouverait. Ils étaient un peu parano, mais moi aussi alors.

- Et tu étais au courant ? s’écria Lex en fixant Tia accusatrice.

La jeune femme haussa les épaules sans la regarder. Len revint et déposa les sacs à dos sur le canapé. Il vit sa mère et sa sœur et se jeta sur elles en riant. Tia grogna et se dégagea doucement. Len vit que le bras qui entourait sa mère était tâché de sang. Il leva un regard consterné sur elle et elle lui fit un petit signe de tête négatif.

Il comprit. Ce n’était pas le moment. Il hocha la tête et elle se tourna vers son ancien tuteur.

- Il faut déplacer cette bibliothèque.

- Je vais le faire avec Frédéric, s’empressa de dire son fils.

Tia le regarda surprise puis lui sourit.

Frédéric et lui durent d’abord enlever les livres des étagères. Pendant qu’ils s’activaient, Tia récupéra les sacs à dos, il y en avait 4. Elle en donna un à sa fille. Fit signe à son fils qu’elle posait le sien près du canapé, en mit un sur son dos et donna l’autre à Lex.

Celle-ci semblait furieuse contre elle. Ca n’annonçait rien de bon quand à leur relation. Elle ne savait toujours pas ce que Lex avait décidé mais ce n’était pas le moment d’y penser, alors elle chassa ses idées noires.

 Bientôt, la bibliothèque fut repoussée et la trappe émergea. Frédérique l’ouvrait lorsque le monde explosa dans une myriade de bruits et de débris. Des éclats de bois, de verres et de plâtre leurs tombèrent dessus. Frédérique attrapa Len et le jeta dans la trappe nouvellement ouverte.

Lex sentit une brûlure sur sa joue et se jeta au sol en entraînant Lara. Tia suivit le mouvement, après avoir reçu des bris de verre en plein visage. Le sang qui coulait dans ses yeux la gênait mais ce n’était pas le moment de s’en soucier. Elle s’essuya tant bien que mal et regarda autour d’elle pour évaluer la situation.

- Qu’est-ce que c’est ? cria Lara.

- Une mitrailleuse lourde, répondit sa mère. Va vers la trappe en rampant ! Allez, fit-elle en la poussant dans la bonne direction.

Elle incita Lex à la suivre et fit signe à Frédéric de rejoindre Len. Elle vit sa fille atteindre la trappe en grimaçant et vit qu’elle avait dû ramper sur des débris. Lex la suivit bientôt et Tia ferma la marche. Lorsqu’elle fut à l’intérieur du tunnel, elle lança sa torche à Frédéric et Lex récupéra les leurs dans son sac. Elle en tendit une à Tia et alluma la sienne.

Tia put alors fermer la trappe. La lumière du soleil disparut et les bruits des tirs et d’objets explosant sous l’impact s’effacèrent aussi.


Fin de la partie I

 

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Commentaires
K
J'ai déjà lu ces fics mais c'est un réel bohneur de les relire Honey. Je reste une grande fan!<br /> Les aventures de Tia et Alex on s'en lasse jamais!<br /> <br /> Merci Honey!!!! :-)
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H
Eh bien de rien lol ! C'est plutôt à moi de vous remerciez de me lire !<br /> <br /> Alors merci !^^
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G
C'est en effet un beau cadeau que d'avoir une nouvelle suite et de suivre encore les aventures de ce couple qui sort de l'ordinaire.
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