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12 juin 2023

Cible mouvante chapitre 29

Cible Mouvante

(Moving Target)

Missy Good (Fryda – 2023)

Chapitre 29

***************************************

A la fin, elles décidèrent de ne pas aller chez Hooters. Dar suggéra un endroit plus tranquille pour qu’elles puissent juste s’asseoir et digérer tout ce qui s’était passé ; aussi elles atterrirent au petit resto thaï près du bureau, dans une alcôve à l’arrière qui leur permettait de ménager leur intimité.

Kerry s’appuya contre le dossier de la banquette et se détendit un peu dans l’air frais et la lumière diffuse. « Bon choix. » Elle se tourna à demi sur le côté et posa son coude sur la table, puis mit sa tête sur son poing. « Wow. » Elle lâcha un soupir. « Je suis essorée. »

Dar croisa les mains et posa son menton dessus. Kerry avait l’air fatigué, se rendit-elle compte, et ses yeux un peu rougis. « La semaine a été longue. »

« Je vote pour qu’on fasse la grasse matinée demain » Kerry prit son café glacé et sirota. « Comment va ton pied ? »

« Hé. » Dar remua une main.

« Mm. Ça couvre aussi ce que je ressens. » Kerry fit un sourire à leur serveuse qui posait une assiette de crevettes au curry devant elle. « Merci. »

La femme posa le plat de Dar et un bol de riz brun odorant, leur faisant des sourires chaleureux avant de repartir et de les laisser manger en paix. « Pour autant que j’apprécie Hooters », dit Kerry. « Je suis bien plus heureuse d’être ici. » Elle mit du riz sur son assiette et le mélangea avec de la sauce au curry.

« Moi aussi. » Dar se tourna et fit signe à la serveuse. « Pouvez-vous nous apporter deux verres de vin de prune ? » Demanda-t-elle. « Merci. »

Kerry regarda sa montre. « Il n’est pas un peu tôt pour ça ? » La taquina-t-elle doucement. « La dernière fois que j’ai pris de l’alcool avec toi aussi tôt, c’est quand on t’a dit que tout allait bien à cet institut du cœur. »

« On peut gérer. » Dar sourit, se souvenant de cette matinée avec une grande acuité. « On est allées travailler après ça. »

« Oh oui. Je me souviens que j’ai fait des tours avec mon fauteuil pendant un moment en comptant les mouettes quand on est revenues. « J’étais aussi utile qu’un cochon avec un téléphone. »

« Moi aussi, mais ça n’avait rien à voir avec ce maudit champagne. » Dar prit un morceau de poulet et le mangea. « J’étais là, à réfléchir… ‘hé, qu’est-ce que je peux faire pour qu’elle me prenne à nouveau dans ses bras’ ? »

« C’est pas vrai ! »

La serveuse posa deux verres de vin de prune. Dar leva le sien et fit un toast à Kerry. « Oh si bon sang. C’est une bonne chose que je n’ai pas eu de problème cardiaque à la fin, parce que mon cœur faisait des bonds comme un poisson sur la plage, toute la journée. »

Kerry prit son verre et toucha celui de sa compagne. « Et bien, je ne sais pas ce que faisait le mien, parce que tu l’avais déjà volé et l’avais mis quelque part dans le tiroir de ton bureau, je pense. » Elle prit une gorgée du vin froid, savourant sa douceur sur sa langue et sa chaleur quand il descendit dans son estomac. « On fait une paire de sentimentales sans espoir, tu sais ça ? »

« Oui, je le sais. » Dar se remit à son déjeuner. « Mais je pense que j’aime ça comme ça. »

« Tu penses ? »

« Mmhm. »

Elles mangèrent dans un silence commun pendant un petit moment, ayant appris à travers leur expérience que manger pendant que c’était chaud, dépassait le plaisir de se parler pendant qu’elles le faisaient. Kerry surtout, avait l’habitude d’aller dans des détours verbaux et vu que son éducation ne lui avait pas permis de mâcher en parlant, elle finissait souvent avec une assiette pleine d’ingrédients froids à la fin du repas.

En plus, ça leur donnait une occasion de réfléchir et Kerry l’utilisa pour penser à l’ingénieur du navire. Il était évident pour elle qu’elle allait appeler la police, mais elle savait que la question non dite entre Dar et elle était, quand allait-elle le faire ?

Maintenant ? S’ils sortaient l’homme du navire, le risque était qu’elles ne pourraient jamais tester leur solution et, par défaut, elles allaient perdre l’appel d’offres.

Kerry savait qu’il était plus important d’amener l’homme devant la justice que de gagner l’appel d’offres. Mais son altruisme flamboyant avait été assez secoué pour savoir qu’un jour de liberté en plus n’allait pas faire de différence matérielle pour personne et elle n’avait aucun désir de se tirer une balle dans le pied, ni celui de Dar ni de la compagnie en le dénonçant avant qu’il ait rétabli le courant.

Elle prit une autre gorgée de vin, le laissant la détendre et elle continua à s’occuper de son assiette, inconsciente des yeux bleus qui la scrutaient de l’autre côté de la table.

Dar avait raison. La semaine avait été très longue et maintenant, à sa fin, elle ressentait vraiment la tension. Le stress habituel de son travail combiné avec celui de régler les détails pratiques, mêlé à la surcharge émotionnelle de gérer tout le bazar, lui avait laissé l’impression qu’un des poids lourds qui livrait les navires, lui avait roulé dessus.

Elle voulait juste rentrer à la maison.

« Ker ? »

Ah bon. Kerry leva les yeux pour voir Dar qui la fixait, le menton sur un poing. « Ouuii ? »

« Ecoute. » Dar s’éclaircit légèrement la voix. « Mon pied me tue et j’ai une migraine qui pourrait assommer Godzilla. Ça t’ennuie si on rentre juste chez nous et qu’on attende qu’on nous appelle quand le courant sera rétabli ? »

Kerry cligna de surprise. « Heu… qu… euh, bien sûr », bafouilla-t-elle. « Oui, bien sûr. C’est évident. Pas de raison qu’on reste autour du quai, pas vrai ? On risque d’être le sujet de plus de vidéos mal intentionnées. »

« Ouaip. » Dar vida son verre.

« Bonne idée, Dar. » Kerry ressentit du soulagement. « Surtout si tu ne te sens pas bien », ajouta-t-elle. « Il faut qu’on s’occupe de toi. La dernière chose dont tu as besoin, c’est une mauvaise infection. »

« Mm. Oui. » Dar s’affaira à vider son assiette. « Peut-être qu’on peut juste traîner dans le spa un petit moment. Ça aiderait bien. »

Ooh. La pensée d’eau chaude et d’un ice tea, et de Dar près d’elle, allait considérablement à Kerry. Cela fit aussi des trucs agréables pour son mental, et elle finit son riz avec une touche d’impatience. « Ça me semble génial. » Elle s’essuya les lèvres. « Tu vas dire à Mark de nous appeler ? »

Dar avait déjà fait signe pour l’addition. « Bien sûr », acquiesça-t-elle aimablement. « Je parie que Chino sera contente de nous voir. »

« Chinette. » Kerry sourit en réaction. « Oui, tu penses bien qu’elle sera contente. » Elle se sentit avoir hâte de franchir leur seuil et de sortir de la chaleur étouffante de la journée pour aller dans la fraîcheur placide de leur condo. Elle sortit vivement de table et suivit Dar jusqu’à la caisse, s’appuyant contre l’épaule de la grande femme tandis qu’elle payait l’addition.

Elle avait dépassé le ressentiment qu’elle avait sur ce sujet. Maintenant elles prenaient leur tour généralement, vu que leur revenu commun était déposé, de manière appropriée, sur un compte commun. Ça n’avait pas d’importance alors, n’est-ce pas ?

Elles sortirent dans une explosion de lumière, mirent leurs lunettes de soleil et se dirigèrent rapidement vers leur voiture.

*********************************

Kerry jeta le courrier sur la table tandis qu’elles traversaient le séjour, étouffant un bâillement ce faisant. « On a pas mal de courrier indésirable », nota-t-elle. « Hé Chinette, ma chérie… viens par ici. » Elle s’assit dans l’un des fauteuils de la salle à manger et accueillit leur chienne, qui dansait d’une patte sur l’autre d’excitation. « Viens par ici, ma douce… je t’aime. Oui. »

Dar s’arrêta à la porte de la chambre à coucher puis elle entra pour se débarrasser de ses bottes de randonnée et de leur sac de voyage, les envoyant tous dans le dressing avec un désintérêt moyen. Elle remua ses orteils sur le sol froid puis déboutonna son jean et le plia posément pour en faire un tas à laver en y ajoutant sa chemise un instant plus tard.

« Dar ? »

« Oui ? » Répondit Dar. « Je me déshabille. »

Une tête blonde apparut à la porte une microseconde plus tard. « Oooh… je peux regarder ? »

Dar se tourna et mit les mains sur ses hanches, lançant un regard amusé à sa compagne. « Yankee hédoniste, va. »

« Dixie intello. » Kerry se glissa à l’intérieur et la rejoignit dans le dressing, passant sa chemise par-dessus sa tête et la pliant pour qu’elle aille avec celle de Dar dans le sac à linge sale. Elle était sur le point de déboucler sa ceinture quand les mains de Dar glissèrent autour d’elle pour l’attirer plus près, et elle abandonna son déshabillage pour un contact peau sur peau.

« Umpf. » Un petit son lui échappa lorsque les doigts de Dar voyagèrent tendrement le long de sa colonne, massant les nœuds qu’elle pouvait sentir tout le long. Elle ferma les yeux et enlaça Dar, humant sa senteur et se laissant aller dans la chaleur de son corps qui contrastait avec l’air frais de la climatisation. « Tu marches merveilleusement bien. »

Dar mit les bras autour de Kerry et la souleva un peu, se penchant en arrière jusqu’à ce qu’elle sente le dos de Kerry se détendre. Puis elle la reposa et l’enlaça, lui ébouriffant les cheveux sur sa nuque tandis qu’elle déposait un baiser sur sa tête.

Kerry se sentit submergée par l’affection. C’était un sentiment très agréable et elle sourit de manière vertigineuse dans la peau sous la clavicule de Dar. « Bon sang, que c’est bon », dit-elle. « Contente d’être à la maison. »

Dar la mena hors du dressing et l’attira près du lit à vagues. Elle relâcha la main de Kerry et se laissa tomber sur le lit, roulant sur le dos tout en observant sa compagne avec les paupières mi-closes. « Je suis contente aussi. »

Kerry déboucla sa ceinture et retira son pantalon. Elle commença à le plier, puis elle sentit qu’il lui était arraché des mains et jeté vers le mur du fond. « Hé. »

Dar plia un doigt vers elle. « Viens par ici. »

Seigneur. Même après tout ce temps, ses genoux flanchaient. Elle grimpa sur le lit pour s’empêcher de s’affaisser et prit une place près de Dar dans le creux que son corps faisait à la surface. « D’accord. Je suis là. »

« Tu sais à quoi je pensais ? » Dar roula à demi sur son côté et traça une ligne taquine le long du ventre de Kerry.

Penser était probablement tout en bas de sa liste de choses à faire à ce moment. Kerry tendit la main et passa ses doigts dans les cheveux de Dar, l’attirant doucement pour l’embrasser.

« Ah. Tu lis dans mon esprit », dit Dar en riant. « C’est exactement ce à quoi je pensais. »

C’était étonnamment bon d’être juste là où elle était. Les draps étaient propres et sentaient bon le soleil et l’air de la mer. La pièce était fraîche et sombre et les lèvres de Dar mordillaient le bord de sa mâchoire tandis que ses mains  caressaient sa peau.

Mais quelque chose lui vint à l’esprit. « Hé », murmura-t-elle. « Et ton pied ? On ne devrait pas s’en occuper ? »

« Il va bien », grogna Dar doucement dans son oreille.

Oooh. « Oh. » Kerry mit la main sur la joue de Dar. « Est-ce qu’il n’allait vraiment pas tout à l’heure ? »

« Non. »

« Tu voulais juste venir ici ? »

« Je voulais juste te ramener à la maison. » Dar l’embrassa sur les lèvres. « Et prendre soin de toi. »

« De moi ? »

« De toi. » Dar l’enlaça.

Oh. Kerry sourit vertigineusement pour une raison complètement différente. « Merci. » Elle roula sur le côté et se blottit contre Dar, corps contre corps. « Je ne suis pas sûre de savoir ce qui a amené ça, mais je ne me plains pas. »

Dar écarta la pensée de l’appel d’offres, l’assignant à la catégorie de problèmes sur lesquels elle n’avait pas de contrôle. Quoi qu’il se soit passé, c’était passé et elle n’allait pas perdre du temps à s’en inquiéter quand elle avait quelque chose de plus concret pour laquelle s’inquiéter, blottie dans ses bras juste là.

Ça, ça avait de l’importance.

Elle glissa les mains sous les bretelles du soutien-gorge de Kerry et le dégrafa, lâchant un petit rire tandis que celle-ci lui rendait la pareille en la chatouillant.

Kerry toucha sa hanche, ses doigts glissant sous le tissu de son sous-vêtement pour le retirer. Puis ses mains s’arrêtèrent et Dar entendit un léger reniflement.

Elle se recula un peu, prenant la joue de Kerry dans sa main et y trouvant la légère humidité de larmes qui luisaient dans ses cils. « Tu vas bien ? »

Kerry planta ses yeux verts fatigués dans les siens. « Parfaitement. »

« Ah oui ? »

« Oui. » Kerry tourna la tête et embrassa la paume de Dar puis elle laissa son toucher descendre, livrant son corps à la passion montante.

Tout le reste pouvait attendre.

*********************************

Elles finirent par annuler le spa. Kerry était allongée sur le canapé, son journal sur un genou tandis qu’elle y écrivait lorsque Dar revint de la cuisine, fermant son mobile. « Encore rien ? » Demanda la jeune femme blonde tandis qu’elle tendait la main pour gratter les oreilles de Chino.

« Encore rien », confirma sa compagne. « Et je viens de parler à Alastair. »

Kerry mordilla le bout de son crayon. « Ah oui ? »

Dar se laissa tomber sur le canapé près du pied de Kerry. « Oui. Je lui ai dit ce qui se passait. » Elle fit une pause. « Et bien, je lui ai dit un petit peu de ce qui se passait. Il sait que nous avons terminé notre partie du contrat et qu’on a eu une tonne de défis. »

« Qu’est-ce qu’il en pense ? »

Dar s’affala et mit les pieds sur la table de salon. « Il ne comprend pas pourquoi ce cas est si difficile. »

Kerry reposa son journal sur sa poitrine et fixa Dar.

« Je t’ai dit que je ne suis pas entrée dans le détail. » Dar tira nonchalamment sur la chaussette de Kerry. « Mais je pensais lui devoir un état des lieux. »

Kerry étudia l’expression de sa compagne, qui semblait plutôt détendue, presque adoucie. « Est-ce que ça l’inquiète ? »

« Hé. » Dar grogna. « Je lui ai donné un indice que ce ne serait pas vraiment une bonne idée de mettre trop d’énergie sur ce contrat. Il a dit qu’il n’était pas inquiet sur Quest. »

« Les autres gars ? »

« Mm. »

« Et bien. » Kerry pressa son pied sur la cuisse de Dar, la poussant doucement. « Nous n’avons qu’à faire de notre mieux, Dar. Et je pense qu’on l’a fait. »

« Tu le penses ? »

« Oui. » Kerry semblait plutôt convaincue. « A part peut-être que je n’ai pas accepté une invitation à dîner par-ci par-là, je ne pense pas qu’il y a quoi que ce soit que j’aurais changé en matière de décisions professionnelles. Et toi ? »

Dar regarda au loin, fixant pensivement le mur du fond avec ses tableaux bien encadrés. « A part flanquer une beigne à Quest quand je l’ai vu pour la première fois, probablement pas », admit-elle. « Tu as raison, Ker. On a fait du bon boulot. »

« Oui », acquiesça Kerry. « On a répondu aux spécifications de l’appel d’offres, on les a implémentées et on a atteint nos objectifs dans les délais, malgré qu’on ait dû pratiquement aller en enfer et revenir pour le faire. Je dis que c’est fichtrement bien, Dar. »

Dar entoura la jambe de Kerry de son bras et lui tapota le genou. « Tu sais quoi ? »

« Quoi ? » Demanda Kerry avec un sourire indulgent.

« Tu as fait un sacré boulot ces dernières semaines », répondit Dar sérieusement. « T’occuper de cette panne de courant, mettre tout en place au quai, travailler avec les gars pour tout installer. Très bien fait. »

Kerry sourit encore plus. « Merci, cheffe. »

Dar lui rendit son sourire. « Je te regarde faire ton travail et ça me rend foutument fière. »

La jeune femme blonde écarta un peu les narines et elle bougea, visiblement un peu surprise. « Ouah, chérie », murmura-t-elle. « Ce n’était pas aussi spectaculaire, tu sais. »

Le mobile sonna. Dar le regarda, débattant avec elle-même de l’envoyer bouler dans la pièce. Puis elle soupira et l’ouvrit, vérifiant qui appelait pour y voir le nom de Mark. « Bon sang. »

« Oo ? » Risqua Mark.

L’enfant intérieur de Dar gémit, ne voulant pas retourner travailler. « Oui, salut. » Elle soupira. « Des progrès ? »

« Heu… non, écoute, Dar… je pense qu’on a… une sorte de gros problème ici. »

Un autre ? « Et ce serait quoi ? » Dar lança un regard d’avertissement à Kerry.

« Ce type, l’ingénieur, celui qui parlait fort ? Il a filé », dit Mark. « Ils ne peuvent pas le trouver et rien n’est fait ici. »

Oh merde. « C’est arrivé quand ? » Dar couvrit le micro de son téléphone de ses doigts. « Ton fugitif nous fait faux bond. »

Kerry s’assit brusquement, posant le journal. « Quoi ? »

Mark semblait à demi dégoûté et à demi embarrassé. « Aucune idée… j’ai juste entendu des gens qui sont venus ici en hurlant il y a environ dix minutes. Je présume qu’ils pensaient qu’il allait chercher des pièces de rechange. Ils sont plutôt furieux… ce type, le capitaine, il est descendu du navire et cherchait partout. »

Dar prit une inspiration, la retint brièvement, puis la laissa sortir lentement. « D’accord », finit-elle par dire d’un ton tranchant. « On arrive. On verra ce qu’on peut faire. »

Kerry balança ses jambes hors du canapé et se leva, récitant quelques jurons posément prononcés qui auraient sûrement surpris sa famille du Middle West tout en se dirigeant vers la chambre pour trouver des vêtements présentables.

« Merci… à plus. » Mark eut la grâce de sembler se faire excuser. « Je sais que ça craint, cheffe. »

« Oui, c’est sûr. » Dar se leva et examina son reflet, puis elle haussa les épaules et se rassit, attrapant une basket qui avait migré à demi sous le canapé. « Mais c’est la limite. A plus tard, Mark. » Elle ferma le téléphone et le posa sur la table, puis elle se concentra pour mettre ses chaussures. « Non, Chino… tu ne peux pas m’aider. Merci quand même. » Elle poussa le Labrador hors du chemin et reçut  un baiser mouillé sur le nez en retour.

« Tu va porter quoi ? » Demanda Kerry depuis la porte.

« Oui oui. »

« Dar ? »

« Quoi ? » Dar mit l’autre basket et serra avec prudence les lacets autour de son pied toujours sensible. « Il n’y a pas de trous dedans, n’est-ce pas ? » Elle regarda son short usé et fripé.

« Huckleberry Roberts. » Kerry s’assit sur la bergère et tira sur une bottine, ses jambes dans un jean neutre. « Mets un pantalon, tu veux bien ? »

« Mais j’ai déjà mes chaussures. » Dar fronça les sourcils. « Allez. Je m’en fous complètement. C’est un foutu chantier naval. »

Kerry lui lança un regard plaintif mais se contenta de secouer la tête et continua à lacer sa chaussure. Ce n’est pas que Dar avait mauvaise allure, au contraire, le short délavé lui allait étonnamment bien, aux yeux de Kerry.

C’est juste qu’elles allaient travailler après tout. Elle lança un autre regard à sa compagne, qui était de nouveau affalée sur le canapé. Oh bon. Si quelqu’un pouvait personnifier une directrice outrée en short, ce serait Dar. « D’accord, allons-y. » Elle se leva et se passa les doigts dans ses cheveux. « Tu penses qu’il est vraiment parti ? » Demanda-t-elle soudain, en regardant Dar droit dans les yeux.

Dar pinça brièvement les lèvres, puis elle mit la main sur l’épaule de Kerry et se tourna vers la porte. « Allons voir ça », suggéra-t-elle. « Il aurait pu s’en aller bien avant, Ker. »

« Mais il ne l’a pas fait. » Kerry soupira en atteignant la poignée. « Bon sang, je ne veux pas avoir ça sur la conscience pour le reste de ma vie. » Elle descendit les marches et se dirigea vers la voiture. « Je conduis. »

« D’accord. » Dar lança un regard de sympathie à une Chino affligée tout en fermant la porte. « Sois gentille, Chi… on revient vite. Promis. »

« Gémissement. »

Je sais exactement ce que tu veux dire. Dar verrouilla la porte et suivit Kerry à la Lexus, se mit dans le siège du passager de la voiture déjà démarrée. Elle mit ses lunettes de soleil et ferma les yeux tandis qu’elle commençait le process familier de réfléchir à leurs options.

Si, bien entendu, il y en avait encore.

********************************

Le terminal était en plein chaos. Maintenant qu’une bonne partie des gens de l’informatique étaient partis, l’équipage était venu se mettre à l’abri de la canicule dans l’air conditionné et avait pris place dans la grande salle près de l’arrière. La plupart étaient assis au sol avec le dos aux murs, certains avaient sorti des cartes et d’autres se contentaient de dormir, inconscients du bruit autour d’eux.

Mark était derrière le bureau sur l’estrade et il leva les yeux quand la porte s’ouvrit pour la énième fois, révélant les silhouettes qu’il attendait.

Il se mit à contourner l’estrade puis s’arrêta, fixant avec perplexité la tenue plus que nonchalante de Dar. « Salut cheffe. » Il parla malgré tout. « Content que tu sois là. »

« Pas moi », lui dit Dar. « Tu as renvoyé tout le monde à la maison ? »

« Bien sûr », dit Mark. » Pas de raison de les garder ici.

« Très bien. » Dar regarda la pièce avec un petit signe de la tête. « Allons trouver notre ami le capitaine et voir ce qu’il fait pour ce rassemblement. » Elle se dirigea vers la porte arrière, s’attendant visiblement à ce qu’ils la suivent.

Ce qu’ils firent. « Hé », murmura Mark. « Elle porte ça juste pour les titiller ? »

« Ne va pas par là. » Kerry leva la main.

« D’accord. » Il s’éclaircit la voix. « Vous nous avez manqué au déjeuner. »

Kerry regarda une forme endormie et affalée d’humains et se rendit compte qu’il y avait trois têtes dans un entremêlement varié de bâches. « Euh… on a mangé thaï », murmura-t-elle, un sourcil dressé. « Et on est rentrées à la maison. »

« Ah », murmura Mark.

« J’aimerais qu’on y soit encore. »

Mark la regarda avec surprise.

Dar atteignit la porte arrière et entra avec force, tournant sur le béton blanchi vers la passerelle à côté du navire. Il y avait un peu d’activité autour de l’entrée, pas comme les jours précédents. En fait, seuls quelques ouvriers étaient assis sur le sol près de la rampe, la plupart lui lançant des regards en coin puis un temps d’arrêt alors qu’ils approchaient.

D’accord. Alors porter un short aussi court était une idée stupide. Dar grimpa la rampe en métal pour entrer dans le navire, mettant cette pensée fermement derrière elle. La chaleur dans le navire justifia cependant son choix et elle entendit les grognements de déplaisir de ses compagnons tandis qu’ils montaient les marches.

Il faisait sombre, ça puait et elle s’en fichait.

Elle s’en fichait, se fichait du projet, du navire, de son équipage, de la chaleur, de Quest et elle était sur le point de tout lâcher. Finis juste, avait dit Alastair ?

Et bien, d’accord donc. Elle le ferait.

********************************

Ils n’eurent pas à aller bien loin cette fois. Ils pouvaient entendre les cris dans l’atrium tandis qu’ils montaient l’escalier menant au septième pont. Dar se dirigea vers le son, ses baskets donnant à sa démarche un peu de rebondissement plus que d’habitude tandis qu’elle marchait à grands pas sous l’arcade et contournait la colonne centrale.

Kerry était sur ses talons, se sentant déjà un peu essoufflée à cause de la canicule oppressante et de la montée rapide. Elle espéra que quoique Dar avait en tête, elle le fasse rapidement, pour qu’ils puissent sortir de ce foutu navire et ressortir là où il y avait tout de même un peu de brise.

« Etes-vous en train de me dire que vous n’avez pas même une personne sur ce fichu navire qui peut le faire fonctionner !!! » Peter Quest faisait face au capitaine, ses bras se balançant en rythme avec ses paroles. « C’est quoi ce bordel ! »

Pour une fois, Kerry se sentit en total accointance avec cet homme.

« Allons, M. Quest. » Le capitaine restait calme cependant. « Vous saviez quand vous avez acheté ces vaisseaux qu’ils étaient vieux et que leur technologie datait. Ce n’était un secret pour personne, sinon pourquoi les auriez vous acquis à bas prix ? »

Brusquement, Kerry se sentit changer de côté et elle agréait ce que disait le capitaine de tout cœur aussi !

« Ce n’est pas le point ! » Discuta Quest. « Vous êtes responsable de faire fonctionner ces maudits trucs ! C’était le marché que j’ai passé avec vos propriétaires antérieurs. »

Le capitaine haussa les épaules. « Vous avez passé le marché avec eux. Pas avec moi. Ni avec mon équipage. Ce ne sont pas des esclaves dévoués, M. Quest. S’ils décident de partir, ils partent. »

Dar s’était installée près de l’escalier en colimaçon et elle se tenait là à simplement écouter. Kerry fut contente de la rejoindre, posant une main sur le cuivre relativement frais de la rampe et posant un pied sur la première marche. Elle était un peu surprise que sa compagne ait refoulé toute cette énergie coléreuse, mais elle comprenait que la conversation qu’elles écoutaient dicterait probablement le mouvement suivant de Dar.

« Vous devez faire fonctionner ce navire », déclara Quest. « Allez chercher un ingénieur sur un des autres navires. »

Ah. Bonne idée. Kerry le complimenta silencieusement.

« Oui, nous avons tenté ça », acquiesça le capitaine. « Mais ils sont aussi occupés et dans tous les cas, notre système électrique diffère des autres. »

Je me disais aussi. Kerry soupira.

« Bordel de merde ! » Aboya Quest.

« Quelque chose comme ça. » Le capitaine semblait imperturbable, malgré le fait qu’il portait son uniforme et qu’il était horriblement taché de transpiration. « Ma compagnie précédente a acheté le système électrique pour ce vaisseau à un chantier de construction navale antique en Roumanie et ils étaient… comment dire… faits comme avec un fer à chaussure.

Les yeux de Quest semblaient sur le point de lui sortir de la tête. Dar saisit l’occasion pour se rapprocher et s’inviter dans la conversation. « Vous voulez dire un chausse-pied », dit-elle.

« Oui. »

« Ms Roberts. » Quest semblait presque content de sa présence. « Peut-être pouvez-vous proposer quelques bonnes suggestions pour résoudre ceci. »

« Moi ? » Dar haussa les sourcils. « Je suis une directrice informatique, M. Quest. Qu’est-ce qui vous fait penser que j’ai des suggestions, bonnes ou autres, sur comment faire fonctionner des vieux convertisseurs de turbine électrique au diesel ? »

« Parce que votre réputation en dépend », répondit Quest. « Si vous ne me montrez pas les résultats, ça revient à ne pas en avoir du tout. » Il leva une main. « Ne vous ennuyez pas à pleurer sur combien c’est injuste. J’ai déjà entendu tout ça auparavant. »

Kerry posa son menton sur la rampe et se contenta d’écouter.

Dar mit les mains sur ses hanches mais son expression était plus pensive que rageuse. « Vous savez à quoi je pense ? » Demanda-t-elle.

Les deux hommes la regardèrent en questionnement.

« Je pense que vous êtes une belle paire de culs de chevaux », dit Dar. « Et que vous ne valez pas le temps que je passe ici à transpirer. Je me fous complètement si vous arrivez à faire fonctionner ce morceau d’ordure flottant ou pas. » Elle soupira. « Je vais envoyer une facture pour mon temps, mon équipement et les coûts de retrait à votre siège lundi matin. Jusque là, M. Quest, vous pouvez me baiser les fesses cordialement. »

Sur ces mots, elle se retourna et commença à repartir vers l’escalier, tendant une main à Kerry sur le chemin. « Viens Kerrison. »

Kerry savait que ses yeux devaient avoir la taille de balles de tennis vu l’expression de Dar. Elle se redressa et commença à avancer vers elle, les oreilles tintant toujours de ce qu’elle réalisait être la fin du projet et possiblement, la fin de leurs fonctions à ILS.

Peu importe ce qu’elles diraient, Alastair ne pourrait pas les appuyer cette fois. Même elle s’en rendait compte.

« Ms Roberts ! » Finit par balbutier Quest. « C’est une blague ! »

Dar tourna la tête, son expression toujours neutre. « Non. » Elle serra l’épaule de Kerry d’une main. « J’en ai assez. Assez de vos jeux, assez de la pression, assez des conneries, assez des agissements louches autour de ce port. Assez. J’ai fait ce que vous avez demandé. Ce n’est pas mon problème si vous ne pouvez pas produire assez d’énergie pour en voir les résultats. C’est votre problème monsieur. »

« Mon problème ! » Dit Quest. « Bordel que non ! Vous devez prouver que vous avez fini ou vous ne suivez pas les termes du contrat, Roberts ! »

« Votre problème », confirma Dar en se tournant à demi. « C’est vous qui n’avez pas rempli les termes du contrat, Quest. Peut-être que vous devriez le lire. Vous avez accepté de fournir suffisamment d’équipement pour l’installation. » Dar fit un geste vers le navire. « Vous ne l’avez pas fait. »

« C’est lui ! » Quest pointa le capitaine. « Je n’ai rien à voir avec ça ! »

« Je n’ai pas signé de contrat avec le capitaine, M. Quest. » Kerry parla pour la première fois. « Je l’ai signé avec vous. » Un vide juridique. Est-ce que Dar en avait vraiment trouvé un ? « Dar a raison. Ce n’est pas à nous de nous assurer que le vaisseau fonctionne. C’est de votre responsabilité. »

Le capitaine gloussa.

Quest fit un pas en arrière, son expression presque stupéfaite.

« Alors », dit Dar. « Quand vous aurez retrouvé vos esprits, appelez-nous. Je doute sérieusement que vous le fassiez », ajouta-t-elle. « Et, Quest ? Vous serez peut-être capable de fanfaronner et de baratiner le reste de ces personnes sur ce que vous allez obtenir d’elles, mais j’ai un département juridique de la taille de l’Alaska avec lequel vous n’allez pas vous amuser. »

C’était un bon discours pour faire une sortie et Dar en saisit l’opportunité. Elle poussa Kerry vers la porte et la suivit, refusant d’attendre une quelconque réplique minable qu’elle était sûre que Quest trouverait.

« Vous aurez l’air d’une folle à la télévision », cria Quest. « Que pensez-vous de ça ? »

Plus minable qu’elle s’y était attendue. Dar se contenta de secouer la tête et passa la porte de l’escalier, poussant Kerry devant elle. « Connard. »

« Tu es stupéfiante », lui dit Kerry. « Je te l’ai déjà dit dernièrement ? »

« Ah oui ? » Dar essuya un soupçon de sueur de son front. « Ce ne sont que des conneries, Kerry. De la poudre aux yeux. Tout ce foutu truc n’a jamais été que de la poudre aux yeux depuis que ça a commencé. Je n’imagine même pas qui va foutrement y gagner quelque chose. »

« Quest ? » Suggéra Kerry. « Il obtient les systèmes pour ses navires. »

« Ouais, mais ce n’est que de la cosmétique, Ker. » Dar finit par mettre le doigt sur ce qui la taraudait. « Ils n’améliorent pas les moteurs ou la mécanique. Qu’est-ce qu’ils vont bien faire quand ils seront fichus ? Ils ne peuvent pas les garder en service. »

« Beuh. » Kerry descendit la dernière marche et se dirigea vers la cale, maintenant silencieuse et vide. « Mais… toute cette amélioration et tout… attends », murmura-t-elle. « Tu as raison… c’est de la peinture et des tapis, et nous et des éclairages. Pas de plomberie ou… »

« Oui. » Dar hocha la tête tandis qu’elles atteignaient la passerelle et elles sortirent, contentes de la brise modérément fraîche. « C’est quoi le point exactement ici ? »

Une explosion de lumière les saisit et Dar leva instinctivement le bras pour la bloquer. « Hé ! »

Kerry s’arrêta derrière elle, se protégeant les yeux tandis qu’elle fixait le groupe sur le ponton, qui entourait l’équipe de tournage qui les avait cloués sous deux spots tandis qu’elles descendaient du navire. « C’est quoi ce truc ? »

Dar continua à marcher lentement le long de la rampe, clignant sous les lampes puissantes tandis qu’elles atteignaient le béton du ponton. « C’est quoi tout ça ? » Demanda-t-elle, son regard trouvant Cruickshank dans la foule. « Vous n’avez rien de mieux à faire ? »

« Non, assurément non », lui dit Cruickshank joyeusement. « Ms Roberts, nous comprenons que vous avez fini votre installation, est-ce vrai ? »

Dar la regard d’un air méfiant. « Vrai. »

« Mais le navire n’a pas de courant, alors vous ne pouvez pas en faire la démonstration, pas vrai ? »

« C’est vrai. »

« Alors, nous y sommes enfin », dit la journaliste. « Tout ce qui s’est passé ces dernières semaines en vient à ça. Vous êtes les seules à avoir fini, il est près du crépuscule, tout le monde se tue à la tâche pour finir et maintenant vous devez trouver un moyen de surmonter ce dernier énorme obstacle et gagner le contrat. Pas vrai ? »

Dar pencha la tête. « Non. »

« Non ? » Dit Cruickshank. « Allons Ms Roberts. C’est là qu’on voit cette célèbre réputation de Ne jamais s’avouer vaincu, gagner à tout prix. Nous sommestous en attente de ça. Comment allez-vous résoudre ceci ? » Demanda-t-elle. « Cette histoire est devenue votre histoire. Comment vous avez été impliquée, comment vous avez combattu vos rivaux, comment vous avez surmonté tous les obstacles. Alors, c’est quoi le plan ? »

Dar prit lentement ses lunettes de soleil, qui pendaient à sa poche arrière avec une branche. Elle les mit sur son nez, bloquant la lumière crue en même temps que le soleil. Cela lui donna un moment pour réfléchir et un moment pour regretter de réfléchir à cause de ce que lui présentait son esprit.

« Un câble de rallonge de deux cents mètres et vingt-cinq kilos de cochons d’Inde », lança Kerry inopinément. « Alors si vous voulez bien nous excuser, nous avons des exercices de roue à mettre en place. Dar ? » Elle prit sa compagne par le coude. « Nous devons nous assurer que nos plans pour ça n’ont pas été anéantis eux aussi. »

Dar garda le silence, laissant Kerry l’emmener à travers la foule. Elle était consciente du bruit de la caméra qui se tournait pour les suivre, mais pour une fois, Cruickshank était bouche bée. Elles réussirent à atteindre le portail et le passèrent avant d’entendre des bruits de pas derrière elles, et Dar eut la présence d’esprit de refermer derrière elle, et de l’entendre se verrouiller. « Ker ? »

« Quarante kilos de cochons d’Inde ? Nous devrions vraiment surclasser un peu au cas où. Tant que notre chance résiste », marmonna Kerry. « Tu sais quoi ? Tu sais ce que je viens de réaliser Dar ? »

« On se fout de nous. »

Kerry tourna la tête et regarda Dar. « Tu savais ? »

« Je viens de le deviner », admit sa compagne. « Mais c’est la seule chose qui a du sens. De nous tous, Shari et Michelle incluses. C’est une fraude, Ker. »

« Je n’en suis pas sûre. » Kerry lui prit l’avant-bras et ralentit. « Je pense que… »

« Hé ! »

Elles se retournèrent pour voir Michelle qui venait vers elle au petit trot. D’une autre direction, le type de l’armée s’approchait d’elles. Et d’une troisième direction, Cruickshank et son équipe avaient réussi à contourner le portail et venaient vers elles.

Kerry soupira. « On peut les semer. »

« Bien sûr. Mais ça ne nous aidera pas », répondit Dar. « Nous allons devoir trouver un plan. »

« Pas de cochons d’Inde ? »

« Pas de cochons d’Inde. »

« Mais je pensais que tu avais dit à Quest que c’était son problème ? » Dit Kerry. « Pourquoi on ne peut pas juste dire ça ? »

Elles pouvaient, Dar le reconnut intérieurement. Mais il était évident que tout le monde ici s’attendait au contraire, ils s’attendaient à voir un miracle. Sa fameuse ingéniosité. Cette magie ILS. Alastair s’y attendait. Les journalistes aussi.

Bon sang, Michelle et Shari probablement aussi.

Alors qu’est-ce qu’elle allait donc faire, Bon Dieu ? Elle se sentait déséquilibrée d’avoir à réfléchir à trouver un plan qui réparerait quelque chose qui n’était pas de sa faute ou de sa responsabilité. Ce qui ferait le jeu de Quest d’un côté.

D’un autre côté…

« Dar ? » Kerry baissa la voix. « Tu penses que Papa connait quelqu’un qui pourrait réparer ça ? »

Ah. Encore une fois, il y avait une raison évidente pour que Kerry soit là où elle était. « Je vais te dire un truc », dit Dar. « Tu vas l’appeler et je m’occupe de ces gens, d’accord ? »

« Compris. » Kerry lui tapota le côté et s’enfuit, évitant la foule qui arrivait vers le terminal. Malgré les soupçons qui avaient jailli soudainement dans son esprit, elle se concentra sur ce nouveau plan. S’il finissait par devenir ce qu’elle pensait…

Et bien, elles s’en tireraient à tous prix.

********************************

Le bureau était vraiment un refuge. Kerry fit lentement tourner le mobile dans un cercle en attendant qu’Andrew la rappelle. La pièce était tranquille, elle avait fermé la porte pour un peu d’intimité et le seul son était le bourdonnement des ordinateurs et celui de la climatisation.

Elle se demandait comment Dar s’en sortait avec la presse et leurs adversaires. Dar pouvait facilement gérer quoi que ceux-là lui balançaient mais Kerry s’inquiétait avec un sentiment taraudant que toutes les deux rataient une pièce principale dans tout ce cirque fou.

Un léger tintement attira son attention et elle tournoya pour regarder l’écran du pc près d’elle. Sa boite mail était ouverte et un nouveau message clignotait placidement tout en haut. Kerry cliqua dessus et vit le nom de leur chef de la sécurité dans la colonne expéditeur.

Dedans, elle trouva un récapitulatif strict de l’incursion de l’autre soir, qui avait permis à la femme de l’armée d’accéder à leurs systèmes. Kerry le passa en revue et décida qu’il n’y avait rien de neuf là-dedans qu’elle ne connaissait pas, puis elle cliqua sur la pièce jointe.

Une autre procédure standard, des vérifications du passé de l’équipe de nettoyage, de son superviseur et enfin et pas le moindre, de celui de leur petite copine invasive.

Curieuse, Kerry ouvrit la dernière et la lut. Après un moment, elle se pencha en avant et fixa l’écran, son front plissé jusqu’à ses sourcils clairs. « Que… » Elle relut la première section et vérifia que le nom sur le rapport était correct.

Elle s’était attendue à ce que le rapport fasse état du passé militaire de la femme bien entendu. Ils ne trouveraient aucune entrée autre que celles du gouvernement, mais ça s’y trouverait en même temps qu’une activité étonnante de la police.

Mais ce rapport ne montrait rien de tout ça. Il n’y avait aucune mention de l’armée du tout. Kerry s’assit. « Et bien, je sais qu’elle est dans un service plutôt spécial… mais zut ! » Elle regarda le rapport avec perplexité. Si on se fiait à ce qu’elle regardait, la femme n’était pas plus officier dans l’armée que Kerry.

En fait il était dur de dire ce qu’elle était, à part le fait qu’elle avait fait du théâtre dramatique au lycée.

Du théâtre dramatique ?

Kerry fit descendre le rapport jusqu’aux clubs fréquentés et aux affiliations. Thespians et Kiwanis (NdlT : Thespians = club de théâtre et Kiwanis = association d’aide aux enfants malades et/ou handicapés). Est-ce que le département de la sécurité pouvait s’être trompé ? Elle remonta et regarda la photo tirée du permis de conduire de la femme et la compara à celle qu’ils avaient prise ce soir-là.

Et, nonobstant la mauvaise qualité habituelle des photos du gouvernement, c’était la même femme. Ainsi sa carrière militaire était-elle juste complètement oblitérée par sa nature secrète, ou bien…

Ou bien était-ce beaucoup plus simple. Kerry cliqua sur le mail et le transféra, tapant une adresse et une requête courte mais polie. Elle l’envoya et ferma la pièce jointe. « Voyons où ça nous mène », décida-t-elle, puis sur une lubie, elle ouvrit un nouveau message, cette fois pour le chef de la sécurité. « Et, pendant qu’on y est, vérifions son patron. »

Elle envoya également la requête et se carra dans son siège, modérément satisfaite. « Quelque chose pue là-dedans comme un maquereau mort depuis trois jours et ce sera bien le diable si je ne découvre pas ce que c’est. »

********************************

Dar et Michelle étaient assises sur les marches du terminal tandis que l’équipe de tournage attendait à l’ombre tout près. « Alors. » Dar examina son genou. « Qu’est-ce que je peux faire pour vous ? »

« Vous avez décidé d’être civile pour changer ? » Demanda Michelle.

Dar rit doucereusement. « Vous venez me demander quelque chose et commencez par m’insulter. Vous n’avez jamais pensé que c’est la raison pour laquelle vous n’arrivez jamais à rien ? »

Michelle soupira. « Vous faites ressortir la garce en moi, Dar. Qu’est-ce que je peux dire ? » Dit-elle. « Vous faites ressortir la garce en tout le monde. »

« Pas tout le monde. »

« Ah, c’est vrai. » Michelle bougea et tendit ses jambes courtes, les croisant aux chevilles. Elle avait fini par abandonner les tailleurs et portait des pantalons en flanelle noirs bien repassés tristement couverts de poussière et de saleté du ponton. « Votre petite madame. Comment ai-je pu oublier ? Vous savez que tout le monde pense qu’elle est juste une jolie décoration sur vous ? »

Dar se rendit compte que Michelle tentait de l’agacer. Elle n’était pas vraiment sûre de pourquoi mais elle était déterminée à ne pas la laisser réussir. Mais ce n’était pas facile. « Ouais, la plupart des gens le pensent », acquiesça-t-elle. « Jusqu’à ce qu’elle les cogne à fond ou qu’elle leur sauve les fesses. »

« Mmmpf. » La femme aux cheveux roux grogna.

Dar attendit un moment encore puis elle arracha une brindille d’entre les fissures du béton et elle fit tourner ses feuilles avec contentement. « Alors, je vous le redemande. Qu’est-ce que vous voulez ? »

« Je veux conclure un marché. »

« Appelez Monty Hall. Peut-être qu’il vous laissera venir sans que vous ayez à mettre une chandelle où je pense », suggéra Dar. (NdlT : référence culturelle américaine dure à expliquer, je vous conseille d’aller sur internet chercher Monty Hall problem) « Michelle, pas de marché. Nous sommes arrivées au dernier jour de cette foutue énigme… alors laissons-la se dérouler. »

Michelle sembla y réfléchir. Elle entoura ses genoux des deux bras et regarda le parking poussiéreux. « Je ne peux pas juste la laisser se dérouler. Je ne vais pas pouvoir terminer ce truc sans aide. Votre aide. »

« Mon aide ? » La voix de Dar monta d’incrédulité.

Michelle soupira. « C’est galère d’être aussi foutument merveilleuse, non ? »

« Et pourquoi vous avez besoin de mon aide, merde ? »

La femme rousse se tourna à demi, son expression reconnaissant l’ironie de la situation. « On n’arrive pas à faire fonctionner ce foutu satellite. Les idiots qui l’ont installé ont été dessus pendant quatre jours et ils sont hors d’idée. Leurs chefs sont hors d’idée. Les gens de l’autre côté du satellite aussi. Ça ne veut juste pas marcher. »

Dar haussa les sourcils sur son front pour les loger quelque part près de sa frange. « Et vous pensez que je le peux ? » Demanda-t-elle avec un léger rire.

« Ouaip. Je le pense », confirma Michelle. « Le votre fonctionne. Personne n’est allé aussi loin encore. »

« Personne ? » Dar regarda le port, vers les navires solidement perchés tout autour. « Vous vous fichez de moi ? »

« Nan. Nous avons eu une grande réunion hier soir. Ne me demandez pas pourquoi quelqu’un a pensé que ce serait une bonne idée de mettre quarante personnes, qui se détestent vraiment, et qui sont restées assises sous le soleil brûlant toute la journée, dans une pièce sans hoqueter, mais on l’a fait », rapporta Michelle. « Avec les caméras. Ça aurait pu être plus photogénique si vous aviez été là, croyez-moi. »

Dar se gratta l’oreille, momentanément perdue. « D’accord. » Elle posa sa main sur son genou. « Alors, vous voulez que je vienne réparer votre satellite, alors vous pourrez… »

« Finir. Vous battre. Partir. Ficher le camp de ce foutu sac à merde. Oui. » Michelle hocha la tête. « Ne vous inquiétez pas. Vous aurez tout le crédit pour les gens de la télévision. Le rôle principal, ils vous filmeront et vous sauveront les fesses. Grandiose. »

Dar se leva et se frotta les jambes. Elle était consciente de l’attention voisine des gens de la télévision et elle soupçonnait qu’elle était filmée par le caméraman occupé.

« Allons, Dar. Je sais qu’il y a un sentiment profond de justice là quelque part. » Michelle se leva aussi. « Vous savez, ça a été le pire du pire. Vous savez que vous ne pouvez pas battre nos coûts parce que quoi qu’il faille pour obtenir ce contrat, je le ferai. Vous pouvez faire une offre moins chère pour me contrer, mais tout le monde saura que vous l’avez fait, parce que nous savons tous combien ça vous a coûté de sortir cette petite cascade hier, et tout le reste de cette merde de taureau toute la semaine. Au moins vous vous en sortirez avec une très bonne presse en tant qu’héroïne. Qu’est-ce que vous en dites ? »

« Ce que j’en dis ? » Répéta Dar. Un mouvement capta son attention et elle leva les yeux pour voir Kerry sortir du terminal, s’arrêter, la repérer et se mettre au petit trot dans leur direction. Quelque chose dans son expression fit attendre Dar, et tandis que Kerry se rapprochait, elle put voir ses yeux verts cligner d’indignation. « Oh oh. »

« Oh oh ? » Michelle la regarda, intriguée, puis elle se rendit compte de ce que fixait Dar. Elle se leva juste quand Kerry les atteignait. « Ah. »

« Ces foutus fils de merde », déclara Kerry lorsqu’elle s’arrêta.

Dar cilla. « Hum… »

Kerry se tourna et pointa l’équipe de tournage. « Tout ça est une imposture, Dar. »

« Quoi ? » Dar et Michelle parlèrent en même temps.

« Nous sommes dans une foutue farce de la caméra cachée », dit Kerry. « Tous les gens de la télévision. Ils sont derrière tout ça. Ils payent largement Quest et ce type de l’armée ? C’est un acteur ! »

« Quoi ? »

« C’est un acteur, Dar. Et cette femme cinglée que j’ai trouvée dans ton bureau », dit Kerry. « Je viens de recevoir une note de Gerry Easton… il les a pistés pour moi. Ils ne sont pas plus de l’armée que Chino. »

Dar mit une main sur l’épaule de Kerry. Elle pouvait sentir tout le corps de sa compagne trembler d’outrage. « Tu dis que tout ce foutu truc a été orchestré ? »

« Oui », dit Kerry. « C’est exactement ce que je dis. Ces gens ont été engagés pour entrer dans ton bureau par effraction et faire une scène, Dar. C’est pour ça qu’ils ne savaient pas vraiment ce qui se passait là-bas et ils ne pouvaient pas expliquer ce qu’ils cherchaient. »

Dar sembla pensive. « Bon. »

Michelle se prit la tête à deux mains. « Attendez, attendez, attendez. C’est de la folie », dit-elle. « L’appel d’offres est réel, ces foutus navires sont réels… allons Kerry. »

Quelque chose se déclencha. « Non. » Dar mit les mains sur ses hanches. « Ce n’est pas de la folie. Ça explique beaucoup de choses. »

Michelle se tenait toujours la tête. « Et bien, maestro, alors expliquez-moi, parce que je ne saisis rien de tout ça. »

Dar prit une décision. Elle tapota Michelle sur l’épaule. « Venez », dit-elle. « Retournons dans notre bureau pour avoir une discussion. En privé. » Elle se tourna et se dirigea vers le terminal, une Kerry toujours frissonnante à son côté.

Après un moment, Michelle les suivit, les rattrapant sur les marches sans même jeter un coup d’œil aux caméras derrière elles.

***********************************

« D’accord, montre-moi. » Dar contourna le fauteuil de Kerry et s’assit sur le bord du bureau lui-même. « Je me suis évertuée à essayer de comprendre pourquoi rien ne collait. »

Michelle s’assit au bureau d’à côté et la regarda attentivement.

« Ici. » Kerry cliqua sur son mail puis elle se leva et laissa le champ libre à Dar tandis que celle-ci s’installait dans le fauteuil qui couina légèrement. Elle échangea sa place, s’installant sur le bureau tandis que sa compagne faisait glisser la souris avec impatience, déroulant les messages longs et plutôt détaillés. « Satanés petits fouteurs de gueule. »

Michelle ricana doucement. « Espèce de réprimée du Midwest. »

« J’ai dépassé ça », répliqua Kerry en croisant les bras sur sa poitrine. « Je ne peux pas croire à toute cette merde. Vous autres n’avez pas repéré toute cette farce gluante, vous avez couché des semaines avec ces gens de la télévision. »

« Bon sang. » Dar secoua la tête.

« Et bien. » Michelle croisa les jambes. « Vous savez, Dar. Je ne m’attendais pas à découvrir que c’est vous la gentille de votre petit couple. »

« J’l’avais dit », marmonna Dar.

« Dit quoi ? » Demanda Kerry. « Ecoutez, je suis désolée. Le mois a été minable et la semaine aussi et la journée aussi. Tomber sur ça à la fin ça craint. »

Dar tendit la main et tapota la cuisse de Kerry. « Doucement, Ker. »

« D’accord, alors voilà ce que je pense. » Michelle changea de direction. « Vous me dites que vous pensez que tout ce truc est un mélodrame mis en place pour la télévision ? » Elle semblait incrédule. « Vous vous rendez compte de combien c’est fou, pas vrai ? »

Dar envoya le mail à l’imprimante. « Ouais. » Elle se tourna et s’enfonça dans le fauteuil. « Le problème, c’est que Kerry a raison. Ce capitaine de l’armée qui était avec vous toute cette matinée est un leurre. On a son dossier de sécurité ici. »

« Qu’est-ce qu’il faisait ici ce matin ? » Demanda soudain Kerry.

Michelle tapota l’accoudoir, les ongles cliquetant doucement sur le cuir. « Il a dit qu’il évaluait la technologie que nous employions tous, à la demande du gouvernement », admit-elle. « Ça ressemblait à un truc que l’armée pourrait faire. Après tout, nous utilisons de la haute technologie. »

Dar ricana.

Michelle se leva et regarda par-dessus son épaule. « Excusez-moi si je suis indiscrète. »

Dar lui tendit la feuille sortie de l’imprimante. « Ne vous abîmez pas les yeux. Tenez. »

« J’ai mal au crâne », dit Kerry en soupirant. « Dar, je vais me chercher un soda. Tu en veux ? »

« Oui, merci. »

Kerry se glissa entre les fauteuils et se dirigea vers la porte, sortant des pièces de sa poche avant en partant. Dar farfouilla dans sa boite mail quelques minutes, laissant Michelle lire le rapport. Elle lut la réponse de Gerry, entendant la voie ronchonne de son vieil ami clairement dans les mots et se souvint que Gerry l’avait acceptée comme elle était bien mieux  qu’elle ne l’avait anticipé.

Il avait paru un peu déçu mais, elle s’en était rendue compte, ce n’était pas tant d’elle que du fait qu’elle et le fils de Gerry ne se marieraient jamais. Cela touchait Dar, parce que Gerry l’avait toujours traitée comme une fille adoptive et quand ils étaient sur la base de la Marine, elle l’avait vraiment ressenti.

Encore plus qu’avec Chuckie.

Ah bon. « Alors ? »

« Alors. » Michelle plissa le nez. « Et bien, franchement, ça craint vraiment, Dar. Votre Kerrison avait raison. Ce type nous a bien leurrés. » Elle jeta le rapport sur le bureau. « Mais je ne comprends pas. Vous saviez pour lui avant tout ça… qu’est-ce que ça change ? »

« Vous ne pensiez pas que c’était un peu étrange qu’il débarque ? »

Michelle haussa les épaules et fit une grimace. « Etant donné ce que nous avions ici la semaine dernière, avec l’Environnement, et la douane, la police, l’immigration, les gardes-côtes… non, franchement. Je ne pensais pas que c’était étrange du tout, ou du moins, pas plus étrange que ce qui se passe ici. »

Michelle marquait un point, Dar dut le concéder. « Il s’est montré à ce foutu show à Orlando. » Elle fit une pause, réfléchissant à ses mots. « Je pensais qu’il venait pour ce séminaire de sécurité que j’avais monté. »

Michelle ricana un peu amusée.

Dar se leva et contourna le petit bureau, espérant que Kerry revienne. « Il voulait acheter une nouvelle technologie sur laquelle je travaillais. »

« Quelle surprise. »

Dar se tourna. « Il a fini par envoyer quelqu’un fouiller notre bureau, qui a prétendu être de l’équipe du nettoyage. »

La femme rousse se mit à rire, se couvrant les yeux. « Vous blaguez, pas vrai ? »

« Non. » Dar alla jusqu’au rack et étudia la machinerie qui s’y trouvait. « Il a essayé de mettre de la pression sur nous avec ça, disant que ça manquait de sécurité pour le gouvernement. »

« C’est le cas ? »

« Et bien, pas s’il n’y a aucun trafic du gouvernement qui passe par le bureau de Miami, non », fit remarquer Dar sèchement tandis qu’elle se tournait et croisait les bras. « Apparemment il a oublié de faire ses devoirs à la maison. Bref…. Je l’ai fait reculer mais tout ce truc n’avait pas de sens.

« Il n’en a toujours pas. » Michelle se leva et partit derrière Dar. « Je ne peux pas croire que tout ce truc est un piège. C’est juste impossible. »

Dar s’appuya contre le bureau et compta les points sur ses doigts. « Vous avez quatre navires », dit-elle. « Tous sont des épaves. »

« Oui, mais, on est en train de les réparer », objecta Michelle.

« Seulement en surface. » Dar se pencha un peu en avant. « Pensez-y. Nouveaux tapis, nouvelle peinture, nouveaux papiers peints… mêmes vieux moteurs, même vieille machinerie, même vieille plomberie. »

« J’ai entendu dire que vous aviez un problème avec ça. » Michelle sourit narquoisement.

Dar la regarda.

« D’accord. » Michelle leva la main. « Je vois votre point… alors, il n’y a que des changements cosmétiques. Et alors ? »

« Alors ? » La voix de Dar monta d’incrédulité. « Qu’est-ce que vous pensez, bon sang, qu’ils vont faire avec ces foutus trucs quand ils en auront fini avec les fanfreluches ? Ils ne peuvent pas les faire naviguer aux USA. Ils ne suivent pas le code maritime, encore moins celui de la santé publique ! Ils ont des théières dans la cuisine plus vieilles que moi ! »

Michelle sembla intriguée. Elle croisa les bras à son tour. « Et vous êtes sûre de vous ? »

Dar leva les yeux au ciel.

« Oh oui, j’oubliais. Vous êtes une gamine de la Navy », dit l’autre femme. « D’accord, bon, peut-être que Quest allait s’occuper de ça ensuite… peut-être qu’il a eu des financements pour le cosmétique d’abord. »

La porte s’ouvrit et Kerry revint, portant plusieurs bouteilles. Elle en tendit une à Dar. « Cruickshank est dehors, elle voulait savoir où vous étiez toutes les deux. Je l’ai virée du bâtiment. »

Dar examina ce qu’elle lui avait donné avec intérêt. « Un Yoohoo au double caramel ? »

« Quoi ? » Michelle s’avança. « Hé, vous ne devriez pas agacer cette femme… vous savez qu’elle a tout sur vous d’enregistré et elle peut… qu’est-ce qui ne va pas avec vous Stuart, bon sang ? Vous avez perdu l’esprit ou les vestiges de votre bon sens légendaire ? »

« Les deux sont intacts, merci, mais bon, je présume que comme nous n’avons pas été payées, j’ai moins à perdre en étant méchante », répondit Kerry d’un ton égal.

Michelle s’arrêta sur le chemin de la porte et la regarda. « Qui vous a dit ça ? » Demanda-t-elle.

Kerry se contenta de sourire et sirota son soda.

« Ce n’est pas un pot-de-vin », lui dit Michelle d’un ton rude. « C’est un droit d’accès. »

Dar se mit à rire, sur le point de cracher une goulée de sa délicieuse boisson au chocolat.

« Ça l’est », insista Michelle. « Ils voulaient un accès vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et bien, ils l’ont. Mais le prix est élevé. »

Kerry tapota le dos de Dar. « Doucement, chérie. » Mais elle riait aussi. « Je présume que cela explique pourquoi nous sommes à la traîne dans toute cette combinaison… on a tout fait pour l’éloigner de nous depuis le premier jour. »

« Hé, c’est une subvention pour notre travail ! » Dit la femme rousse. « Cela va rendre *MON* offre plutôt imbattable, alors vous pouvez arrêter de rire maintenant, faiseuses de miracles. » Elle reprit son chemin vers la porte en secouant la tête.

Dar s’essuya les yeux. « Michelle, espèce d’âne. L’appel d’offres est une escroquerie. Qu’est-ce que ça fait, bon sang, comme différence à quelle place vous êtes ? Vous ne comprenez pas. Vous n’allez pas obtenir de contrat. Il n’y a pas de marché. Tout est fait pour la télévision ! »

Michelle s’arrêta, la main sur la poignée. « Vous ne le savez pas. »

« Si et vous le savez aussi. Vous n’êtes pas stupide », dit Kerry. « Allons, Michelle. Vous avez fait appel à mon sens commun… où est le vôtre ? »

Leur ex-adversaire se tint en silence pendant un instant, son regard passant de l’une à l’autre tandis qu’elle réfléchissait.

Dar et Kerry attendirent côte à côte, sirotant leurs boissons et visiblement installées dans la solidarité de leur partenariat. « C’est comment ? » Demanda Kerry en montrant la bouteille.

Dar lui en fournit une gorgée, penchant le breuvage sur ses lèvres.

« Mm. » Kerry réfléchit. « Résolument plus chocolaté que l’ordinaire. »

« J’aime bien. »

Michelle se tourna complètement et s’appuya contre la porte. « Vous savez quoi ? Vous êtes des sentimentales toxiques. »

« Allez vous faire voir », répondit Dar d’un ton plaisant. « Au moins on ne se comporte pas comme deux grincheuses à un combat de coqs. »

Même Kerry cilla. « Lapidaire, mon cœur. » Elle cogna son épaule contre celle de Dar. « Très lapidaire. »

Dar haussa les épaules « On en a fini avec les poses ? Vous voulez travailler avec nous sans que personne n’ait l’air d’un idiot ou vous voulez partir ? » demanda-t-elle à Michelle. « Choisissez. Mais vite. »

Michelle parut résolument tentée et très frustrée. Il y avait un mélange étrange sur son visage. « Et pourquoi je devrais vous faire confiance ? » Demanda-t-elle soudain. « Vous pouvez juste être en train de chercher à m’entuber. »

Ah. Bonne question. Dar prit une gorgée de son soda, la faisant rouler dans sa bouche un moment avant de l’avaler.

« Après tout, est-ce que ce ne serait pas avantageux pour vous que je me dédie soudain du marché ? » Demanda Michelle astucieusement. « Et si c’était vous qui étiez en train de me tromper cette fois et que vous m’avez balancé des conneries ? »

Kerry posa sa boisson et alla vers Michelle. « Bien, on pourrait faire ça », acquiesça-t-elle, s’arrêtant tout près de l’autre femme. « Je pourrais avoir fabriqué cet email et on pourrait mentir. » Elle mit les mains sur ses hanches. « Mais vous savez quoi, Michelle ? Ce n’est pas le cas. »

« C’est vous qui le dites. »

Kerry pencha la tête et la fixa, savourant l’expérience avec une bonne dose de plaisir coupable. « Réfléchissez-y. Si ce que nous disons est vrai alors la seule raison que Quest l’ai fait, c’est de nous faire passer tous pour des imbéciles. »

Il était visible que la notion était apparue à Michelle et son visage se tordit dans une grimace ironique. « C’est une interprétation de ce qui pourrait arriver », répondit-elle. « Cependant, de manière hypothétique, si cette folle histoire que vous avez décrite était vraie… qu’est-ce que vous avez l’intention de faire pour ça ? »

J’t’ai eue. Kerry lui sourit avec une touche de chaleur sincère.

« Et pourquoi voudriez-vous que je coopère ? » Ajouta calmement Michelle.

« Parce que ces gens de la télévision ont fait de nous l’histoire », intervint Dar depuis l’autre côté de la pièce. « Alors si on veut en sortir sans avoir l’air merdique, on doit le faire ensemble. »

Michelle lui lança un regard d’incrédulité patente.

« Faites nous confiance », dit Kerry en croisant son regard et le maintenant.

« Vous êtes en train de blaguer, là. »

« Faites-nous confiance », répéta la jeune femme blonde. « Ou on finira tous entubés et vous le savez. »

Michelle étudia les yeux vert clair pendant un long moment. Puis elle se retourna et ouvrit la porte. « Si je ne suis pas revenue dans dix minutes, si j’étais vous je commencerais à trouver un plan B. » Elle sortit et ferma la porte sans regarder derrière elle.

Kerry revint près de Dar et s’assit sur le bureau, balançant les pieds paresseusement. « On a un plan B ? »

Dar finit sa bouteille de Yoohoo. « Ker, on n’a même pas encore de plan A. »

« Ah. »

« Ça change fichtrement la donne. »

« Ouaip. »

« Bon sang. »

********************************

Elles sortirent, trouvant une place à l’ombre devant le terminal où un banc et une table en pierre se trouvaient. Dar s’assit sur le banc de guingois et posa les coudes sur ses genoux, fixant pensivement le navire tandis que Kerry la rejoignait.

Pendant un petit moment, elles se contentèrent de rester assises ensemble à regarder les gens qui passaient devant elles. Il y avait une légère brise, assez pour que la chaleur ne soit pas insupportable et le doux bruit de grillons tout proches était presque apaisant.

Kerry bougea un peu, pour que son épaule soit en contact avec celle de Dar. Elle posa le menton sur ses poings et balança d’avant en arrière, les faisant bouger toutes les deux.

Dar tourna la tête et se pencha en avant pour embrasser le haut de l’épaule de Kerry.

Celle-ci sourit et posa la tête contre celle de Dar.

« Tu as des nouvelles de Papa ? » Demanda Dar après quelques minutes de silence.

« Pas encore, non », répondit Kerry. « Mais c’était plutôt une requête bizarre alors peut-être qu’il ne trouve personne. »

« Peut-être », acquiesça Dar. « On ne devrait pas l’appeler pour lui dire d’arrêter de chercher ? »

Kerry garda le silence momentanément. « Et bien, je pense que oui », dit-elle. « Il n’y a plus vraiment de raison de faire ça. Non ? On ne peut pas juste… rentrer ? Qu’est-ce qu’on va faire, Dar ? »

Dar sortit sa lèvre inférieure puis elle plissa le visage dans une expression désabusée. « C’est ce que j’essaie de trouver assise ici. »

« Hm. Oui, moi aussi. »

« Je n’ai pas vraiment d’idée de comment retourner ça. Qu’est-ce qu’on va bien faire bon sang ? » Demanda Dar. « On appelle juste Quest et on lui dit d’oublier ? On appelle les médias ? On appelle la Marine ? Comment on s’en sort sans avoir l’air de parfaites idiotes ? »

Kerry regarda un petit escargot qui se frayait un chemin paresseusement sur le béton entre ses bottines. « Et bien, on pourrait aussi jouer le jeu. »

« Bah. »

« Oui, c’est aussi ce que je pense, mais tu as demandé », dit la jeune femme blonde. « Je veux dire que si nous jouons le jeu, et qu’on termine tout notre travail, ce serait quoi le pire qui pourrait arriver ? L’émission de télévision nous montrerait simplement en train de faire ce que nous faisons. »

« Mmpf », grogna Dar.

Kerry attendit, mais l’air de désapprobation entêtée ne quitta pas le visage de sa compagne. Elle soupira, comprenant l’émotion là-derrière. « D’accord, alors, qu’est-ce que les mettre à jour nous rapporterait ? »

« Une immense satisfaction personnelle », répliqua Dar d’un ton définitif.

Kerry soupira. « A part ça. »

Dar garda le silence un moment puis elle bougea. « Ça nous donne l’image qu’on maîtrise le jeu et on ne montre pas qu’ils nous ont complètement manipulés », dit-elle. « Réfléchis, Ker. Ils sont tous là à se foutre de nous dans notre dos. »

« Hm. »

« Alors, est-ce qu’on a plus intérêt à être celles qui mènent la partie plutôt que celles qui ont l’air d’abruties quand ils décideront de se dévoiler. » Demanda Dar. « Je me sentirais mieux sur ce qui va en ressortir, peu importe comment, si je peux sauver au moins un peu de ma dignité. »

Dar avait raison. Kerry pouvait le ressentir et elle hocha la tête pour acquiescer avant même que sa compagne s’arrête de parler. « D’accord, on commence où ? » Demanda-t-elle. « Je ne pense pas que nous devrions aller les voir comme ça pour leur dire qu’on est sur leurs fesses. Ou bien si ? »

D’un point de vue personnel, Dar aimait cette idée. Cela signifierait que cette épreuve serait effectivement terminée et qu’elles pourraient juste rentrer à la maison. Elle voulait vraiment que ça arrive parce que, franchement, le projet lui portait sérieusement sur les nerfs.

Malheureusement, Kerry avait raison, et elle ne pensait pas non plus que faire émerger tout ça était une idée stratégique. Et aussi, ça ne satisfaisait pas vraiment son besoin de vengeance contre Quest et son cirque personnel.

Ah bon. « Non, je ne pense pas qu’on devrait sortir leur petite histoire », dit Dar. « Réfléchissons un moment… quel est le but de tout ça ? Avoir un bon moment de télévision, pas vrai ? »

Kerry haussa les épaules. « Je suppose. Bien qu’une émission sur un groupe de technos qui font du câblage en vitesse… Je me demande quelle est leur cible de spectateurs, chérie. »

« Eh. » Dar regarda autour d’elle. « Miami, le soleil, la rigolade, des marins torses nus, des lesbiennes… ça ferait probablement un tabac », fit-elle remarquer d’un ton drolatique. « Mais le truc c’est qu’ils espèrent avoir un combat à la fin, pas vrai ? Que tous nous nous démenions jusqu’à minuit, peut-être quelques crêpages de chignon »

« Probablement. »

« Alors et si on coopérait et on travaillait ensemble à la place ? Qu’on s’aide les uns les autres à finir, pour que tout le monde termine dans un mouchoir ? »

Kerry la regarda. « Chérie, tu sais que je t’aime de tout mon cœur, mais tu penses que tu peux faire en sorte que tous ces gens le fassent ? »

Dar haussa les épaules. » Je ne sais pas. Je n’ai pas encore essayé. »

« Ouuuui. » Kerry reposa la tête sur l’épaule de Dar. « Et bien, je présume qu’on peut essayer… mais si Michelle nous envoie balader, ça sera genre sérieux, pas vrai ? »

« Vrai. Quand même. » Dar la poussa légèrement.

Kerry leva les yeux et vit Michelle et Shari qui venaient dans leur direction. « Tu penses qu’elles vont coopérer avec  nous ? »

Dar étudia les femmes qui arrivaient. « Possible. » Elle se leva et se passa les mains dans ses cheveux, puis elle les mit sur ses hanches tandis qu’elle attendait que leurs adversaires arrivent.

Kerry se leva et vint près d’elle, mais son mobile sonna à ce moment-là. Elle l’ouvrit et regarda le numéro qui s’affichait. « C’est Papa », murmura-t-elle avant de répondre. « Salut, Papa. »

« Salut p’tit mousse », répondit Andrew. « Vous allez bien toutes les deux ? »

Kerry regarda le diabolique duo lesbos qui arrivait. » Oh oui, Papa… et toi ? Tu as trouvé quelque chose ? »

« J’crois ben qu’oui. » Andrew semblait content de lui. « J’me suis trouvé un mec qui trainait avec moi dans les sous-marins et il veut bien j’ter un œil à tout ce foutu truc. »

« Génial », dit Kerry. « Tu viens nous rejoindre ? »

« Ouais, on arrive. Vous êtes dans votre boite de conserve en béton ? »

Kerry se mit à rire. « Oui on est là. A tout de suite. » Elle referma le téléphone rapidement et s’éclaircit la voix, se demandant ce qu’il resterait des mesures envisagées quand il arriverait, si on pouvait en juger par l’air sur le visage de Shari tandis qu’elle se dirigeait vers Dar.

Ce qu’il en resterait de Shari, bien entendu.

« Et bien ? » Demanda Dar tandis que Michelle et Shari s’arrêtaient devant elles. Elle nota l’expression sceptique de Shari mais se rendit compte que hormis ça, la vue de son ancienne amante ne comportait plus aucune charge émotionnelle pour elle.

C’était une révélation intéressante, étant données les circonstances. Dar vivait rarement un moment de poussée personnelle quand il arrivait, mais elle était en fait contente d’en avoir eu l’occasion cette fois.

« Michelle est convaincue que votre connerie d’histoire est vraie », dit Shari, d’un ton morne. « Je pense qu’elle est cinglée et je pense que tu es une foutue menteuse. » Comme Michelle, elle avait laissé l’accoutrement formel et avait opté pour un ensemble en toile coloré qui montrait moins la poussière.

« Et tu es ici parce que ? » Demanda Dar.

« Si tu penses que je vais te laisser nous voler cet appel d’offres, tu es mortellement dans l’erreur, Dar », l’avertit Shari. « Je ne sais pas quel jeu tu joues cette fois-ci, mais je vais vous torpiller, peu importe de quoi il s’agit. » Elle s’avança et pointa un doigt vers la poitrine de Dar. « Tu ne vas pas me baratiner ou l’intimider elle. Compris ! »

Dar attendit que l’éclat diminue. Elle pencha la tête d’un côté. « Et tu es ici parce que ? » Répéta-t-elle d’un ton égal, s’autorisant un soupçon de sourire sur les lèvres.

Kerry croisa les bras pour empêcher la tentation de cogner Shari pour qu’elle réponde.

« Tu ne m’écoutes pas. » Shari fit un pas en avant et cette fois, elle tapota la poitrine de Dar de son doigt pointé.

« Tu ne dis rien d’intelligible », répliqua Dar. « Mais si tu ne veux pas finir au Tartare, retire ce doigt. »

Michelle soupira.

« Tu ne me fais pas peur », railla Shari, laissant sa main où elle était.

« C’est ton problème. » Dar entoura le poignet de Shari de ses doigts. « Je devrais te faire peur. » Elle resserra sa poigne soudainement, les tendons sur son bras sursautant.

« Bon Dieu. » Michelle s’avança, mais Kerry posa sa main pour l’arrêter.

Shari essaya de retirer sa main mais elle ne voulait pas bouger. La peau commençait à rougir et tandis que la poigne de Dar s’accentuait, les veines ressortirent.

« Lâche-moi bordel. » Shari tira sur son bras. Ce qui ne servit à rien sauf à lui faire perdre l’équilibre. Dar ne frémit même pas, son bras à demi étendu aussi immobile que l’acier, la courbe de son biceps très visible sous sa peau bronzée.

Là, Dar se rapprocha et la cloua de ses yeux glacés. » Maintenant tu m’écoutes », gronda-t-elle doucement. « Tu veux en finir avec ces conneries ? Bien. Finissons-en, Shari. Soi tu veux coopérer avec moi, soit tu ne veux pas. Si c’est le cas, fiche le camp d’ici. Si tu le veux, alors ferme-la et commence à devenir une partie de la solution plutôt que le moulin à paroles que tu es. » Elle relâcha le bras de Shari et recula, puis elle attendit. « Choisis. Maintenant. »

Kerry laissa retomber sa main et la remit sur sa poitrine tandis qu’elle attendait également. Elle ne pouvait rien ajouter à la situation, aucun mot de sagesse n’aiderait, ou en fait, tout mot qui pourrait être productif, bien qu’elle pouvait en trouver qui dégraderait la confrontation et amènerait une bagarre.

Etonnamment, elle voulait vraiment amener une bagarre. Elle voulait vraiment frapper Shari et effacer cet air toxique sur son visage. Ça la choqua, un peu.

Shari regarda sa main qui était toujours rouge vif avec des marques fortes là où les doigts de Dar s’étaient trouvés. Elle regarda Dar de nouveau, immobile et attentive et aussi sérieuse qu’une crise cardiaque.

« Réfléchissez juste. » Kerry se mit à parler tout de même. « Si ce que nous disons est vrai et que vous coopérez avec nous, nous allons tous y gagner. Sinon… » Elle haussa un peu les épaules. « Nous gagnerons de toutes les façons. »

Shari semblait être en train de sucer un citron. « Et si vous mentez ? » Elle s’adressait à Kerry et ne regardait plus du tout Dar. « Comment je peux être foutument sûre que vous ne nous menez pas en bateau ? »

Kerry lui sourit. « Vous ne pouvez pas. Vous devez soit nous faire confiance, soit non. Mais si vous regardez les faits, je pense que vous verrez la vérité. Vous n’êtes pas stupide. »

Michelle plissa le nez et se frotta le visage d’une main

Shari plia la main puis la laissa retomber. « Très bien », finit-elle par dire d’un ton calme. « Vous avez raison. Je ne suis pas stupide et ça fait un moment que je dis que quelque chose pue par ici. Je pensais juste que c’était vous. » Elle regarda Dar froidement. « Mais ces derniers jours, j’ai commencé à penser que quelque chose pue encore plus que vous, et si je dois m’accommoder de vous pour trouver ce que c’est et leur botter le cul, alors je le ferai.

Un silence de glace tomba. Kerry le brisa en se penchant en avant pour renifler le cou de Dar délicatement. « Chacun sa vision des choses, je présume. J’adore ton odeur », dit-elle.

Dar souffla dans la frange de Kerry. « Merci. » Elle prit une inspiration, laissant ses nerfs à vif se calmer un peu. « Maintenant qu’on en a fini avec ces conneries, je suggère que nous allions dans un endroit moins public qu’un parking et qu’on démarre de là. »

« Bonne idée », finit par dire Michelle. « Rien au sud de Mason Dixon n’est neutre, alors pourquoi on ne chercherait pas une gargote avec assez d’espace pour y faire une réunion. » Elle fit face à Dar. « Je demanderais bien à votre moitié de choisir un endroit mais depuis la dernière fois ça craint.

Kerry eut la grâce de paraître un peu suffoquée. Elle mit les mains dans son dos et regarda le soleil.

Dar garda le silence un moment. « Ce ne serait pas malin d’aller loin », dit-elle. « Je connais un endroit à dix minutes d’ici. C’est tranquille et il y a de l’espace pour travailler. »

Shari eut l’air soupçonneux, mais Michelle hocha la tête. « Ça me parait bien », acquiesça-t-elle. « C’est où ? »

« Suivez-nous. » Dar mit la main sur le dos de Kerry. « C’est chez nous. »

« Ah », murmura Michelle. « Est-ce que ce n’est pas une friandise de la vie ? » Elle prit le bras de Shari tandis qu’elles les suivaient. « Et dans quels pièges on se dirige, hm ? »

Shari ricana mais garda le silence.

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A suivre chapitre 30

 

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