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Guerrière et Amazone
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  • Vous trouverez ici des Fans Fictions francophones et des traductions tournant autour de la série Xena la Guerrière. Consultez la rubrique "Marche à suivre" sur la gauche pour mieux utiliser le site :O) Bonne lecture !!
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Guerrière et Amazone
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20 août 2023

La noirceur du matin chapitre 17

La noirceur du matin – Tome 14  – Melissa Good

 

Xena et Gabrielle se sont installées à Amphipolis et profitent de leur nouvelle fille, Doriana.

Mais est-ce bien le cas ? La vie est, comme Gabrielle le sait bien, une série de compromis. Pour obtenir une chose, il faut souvent renoncer à une autre.

 

Chapitre 17

Xena traversa la salle principale, se faufilant rapidement entre les Amazones et les soldats. Son passage lui valut quelques regards en coin et des sourires hésitants.

Ouais, ouais. Le pouvoir mystique du guerrier, grommela Xena intérieurement. Je me sentirais bien plus intimidante si j’avais pris le temps de me changer... Je peux presque sentir mon armure rouiller quand je marche. Elle passa la tête dans les quartiers des Amazones, puis elle se dirigea vers l'hospice où l'odeur forte du désinfectant qu'elle avait trouvé était à lui seul une indication suffisante pour trouver son chemin.

Cait était sur la dernière couchette, tentant avec détermination de se mettre en position assise alors que la vierge d’Hestia qui s'occupait d'elle essayait tout aussi résolument de la faire se recoucher. Paladia était accroupie non loin, ses longs bras enroulés autour de ses genoux, un air de dégoût ennuyé sur son visage.

"Maintenant, ça suffit." disait la jeune Amazone. "J'ai beaucoup de choses à faire... Je ne peux pas rester allongée toute la journée."

"Si tu peux, mon enfant... la guérisseuse a dit que tu devais rester allongée, donc allongée tu resteras." L'Hestianne, une grande femme à l’air calme et doux, la gronda joyeusement. "Veux-tu que je t’apporte un jouet ?"

Cait lui lança un regard particulièrement meurtrier. "Oui, je veux bien." Grogna-t-elle à travers des dents serrées. "C'est sur ma paillasse... tu veux bien aller me la chercher ?"

"C'est une poupée ?" Lui demanda la femme en souriant gentiment.

"C'est une dague." Répondit sa patiente récalcitrante. "Une belle dague bien aiguisée, parfaite pour poignarder entre les côtes."

L'Hestianne se mit à rire. "Oh... quelle blague amusante !" Elle tapota le bras de Cait puis la repoussa vers le bas. "Maintenant, allonge-toi, mon enfant."

Les yeux gris s'étrécirent, surtout lorsque Paladia se mit à ricaner. "Je sens que ma colère va devenir incontrôlable si …"

"Cait." Xena arriva au chevet du lit avant que l'effusion de sang ne commence, puis elle s'agenouilla et posa une main sur l'épaule de l'Amazone soudainement docile. "Détends-toi."

"Très bien." Accepta alors Cait sans broncher. "Maintenant que tu es de retour et que tu peux à nouveau prendre les choses en main."

"Excuse-moi." Les interrompit l'infirmière Hestianne. "Tu ne devrais pas au moins te laver avant de venir ici ?"

Xena releva lentement la tête et fixa la femme d'un regard glacial caractéristique des Princesses Guerrières. "J'aimerais un peu d'intimité."

"Alors pourquoi ne pars-tu pas ? Il n'y a pas grand-chose ici pour toi de toute façon." répondit l'Hestianne avec suffisance.

"Très bien." Xena glissa ses deux bras sous le corps de Cait et se releva en maintenant la jeune Amazone contre elle. "Viens." Dit-elle en faisant un signe de tête à Paladia, puis elle commença à marcher vers les quartiers des Amazones. Paladia se mit debout et les rattrapa, jetant un coup d'œil derrière elle, vers l’Hestianne, l'air perplexe.

"C’est quoi son problème ?"

"Elle est vierge." déclara Xena. "Je pense que ça perturbe le flux de sang vers le cerveau".

Paladia ricana, amusée, et jeta un regard furtif à Xena.

"Et bien..." Commenta Cait, semblant parfaitement satisfaite d'être dans les bras de la guerrière. "Je ne pense pas que ça ait un rapport. Je suis vierge et je n'agis pas comme ça."

Xena gloussa. "Gabrielle non plus... c'est peut-être à cause de toutes ces offrandes fermentées préparées pour Hestia." Elle s'introduit dans les quartiers des Amazones et se dirigea vers la palette de Cait, placée sur un côté du mur, près du fond. "Désolée, je suis un peu trempée."

Cait soupira béatement. "Ce n'est pas grave." Xena la déposa doucement sur sa couchette, puis elle roula un peu sur le côté lorsque la guerrière s'agenouilla à ses côtés. "Je te dois des excuses."

"Pour quoi ?" Xena examina la coupure avec des mains habiles, consciente que Paladia s'était installée sur la couchette à côté de celle de Cait.

"Je n’ai pas bien accompli mon travail." Répondit doucement la jeune fille. "Je me sens très mal."

Xena s'assit, satisfaite de l’état de la blessure. "Ne le sois pas." Elle baissa les yeux sur le sol rocheux. "Vous avez risqué vos vies pour aller chercher Dori... et je vous suis redevable pour ça, à toutes les deux."

Paladia avait les yeux fixés sur le sol, refusant de croiser leurs regards. Cait était tout simplement sans voix, absorbant avec émerveillement la gratitude de son héroïne.

"Merci." Ajouta Xena, avec une sincérité sobre. Puis elle se leva et recula. "Repose-toi." Et puis les ombres avalèrent sa grande forme, les laissant dans un silence presque étouffant.

Cait eut besoin de prendre plusieurs longues respirations avant de pouvoir reprendre la parole. "Par les Dieux."

Paladia laissa son menton reposer sur ses genoux. "Ouais." Murmura-t-elle.

Elles se regardèrent sérieusement en silence. "Je pense que je dois te remercier toi aussi." Déclara finalement Cait.

"Non, tu ne le dois pas... " La grande Amazone se renfrogna. "Pour quoi ?"

L'expression sérieuse de Cait ne changea pas. "Pour m'avoir sauvé la vie."

"Aww..." Paladia fit une grimace. "Ne commence pas avec ça..." Elle s'arrêta de parler lorsque Cait se pencha vers elle et prit une de ses mains dans une poigne ferme. Puis, des yeux gris intenses accrochèrent les siens avec une puissance surprenante. "Qu’est-ce que..."

Cait rapprocha sa main, baissa la tête de façon hésitante, puis avec plus d'assurance, elle embrassa les jointures de Paladia. Elle releva lentement la tête, découvrant la stupeur et la surprise sur le visage de son amie, puis elle esquissa un sourire sincère. "Merci."

Paladia était si choquée qu'elle ne bougea pas. Elle ne respira pas. Elle ne retira pas sa main, ni même ne cligna des yeux. Elle n'avait conscience que de ces yeux, de la chaleur qui enveloppait ses doigts et de la sensation de chute à l’intérieur de son corps, qui la faisait frissonner de partout.

"Quand tu veux." Murmura-t-elle finalement d’une voix rauque, sachant que quelque chose avait changé, mais incapable de savoir exactement ce que c'était.

*******************************************

Une de moins... La guerrière traversa les tunnels en direction de la deuxième caverne réservée aux Amazones, où elle savait qu'Ephiny et Eponine partageaient une couchette. Elle passa la tête dans l'entrée et inspira profondément lorsqu'elle aperçut sa proie contre le mur du fond. Ok, Xena, Humble Princesse... sois gentille.

Elles levèrent les yeux à son approche. Ephiny lui jeta un regard noir tandis qu'Eponine se contenta de grogner.

Oh là là. Xena s'accroupit et laissa ses avant-bras reposer sur ses cuisses. "Tu veux me frapper ?" déclara-t-elle en faisant face à Eponine directement. "Tu te sentirais mieux ?"

Eponine se renfrogna. "Oui."

La guerrière haussa les épaules. "Alors vas-y."

"Tu le penses vraiment ?"

Xena hocha la tête sobrement. "Ma fille t'a fait ça... tu ne peux pas la frapper, donc oui".

Eponine la fixa farouchement, ses pensées se bousculant derrière ses yeux dorés et orageux. Puis elle se redressa et lança son poing en direction de Xena, s'attendant à ce qu’elle esquive.

Elle ne bougea pas. Le craquement retentit dans toute la pièce, projetant la guerrière contre la couchette derrière elle où sa tête frappa douloureusement la paroi rocheuse. "Ow." Xena soupira et relâcha ses muscles, se battant difficilement contre son instinct qui la poussait à faire payer cet affront.

Eponine se figea, sous le choc. La bouche ouverte, elle fixait Xena d'un regard totalement déconcerté. "Aw.. par Hadès, Xena..." Elle commença finalement à se lever, mais Ephiny, qui s’était débarrassée de sa propre stupeur, la repoussa, avant de descendre rapidement de sa couchette pour s'agenouiller aux côtés de Xena.

"C'est la chose la plus stupide que je ne t'ai jamais vue faire." La Régente tendit une main hésitante vers la guerrière assise. "Tiens... tu vas bien ?"

"Bien sûr." Xena refusait de frotter sa mâchoire douloureuse. "Tu te sens mieux ?" demanda-t-elle à Eponine, en levant un sourcil.

Eponine lui jeta un regard d’un air maussade, alors qu’elle soutenait sa main et grimaçait. "Bien sûr. Maintenant, ma main me fait tellement mal que j'ai oublié ces fichues ronces." Son expression se modifia et s’adoucit. "Désolée, Xena... Je ne pensais pas que tu resterais plantée là."

La guerrière souffla et entoura ses genoux de ses bras, ignorant son mal de tête maintenant lancinant. "Désolée que tu aies atterri au mauvais endroit." Dit-elle à son amie. "Je suis sûre que Dori ne l’a pas fait exprès."

Eponine soupira. "Par Hadès... ce n'est pas comme si c'était ta faute..." L'Amazone se pencha en arrière.

Xena jeta un coup d'œil au dortoir vide, puis elle regarda de nouveau Eponine. " Eh bien... " Elle se déplaça un peu. "Ce n'est qu'en partie vrai."

Elles restèrent silencieuses un moment, puis Ephiny pencha la tête. "En partie ?"

La guerrière hocha la tête en retour. "Les problèmes... je pense qu’elle tient ça de Gabrielle." déclara Xena d'un ton égal. "Son aptitude à semer le trouble et à y arriver, par contre, je suis presque sûre qu'elle vient de moi."

Eponine tourna la tête et fixa Ephiny, qui lui rendit son regard, puis toutes deux regardèrent la femme qui attendait tranquillement assise devant elles. "De... de ... hum... de toi ?" Ephiny goûta timidement les mots, les poussant dans l'atmosphère soudainement tendue.

"Oui. " Xena attendit simplement.

"Hum." Eponine se racla la gorge bruyamment. "Sans vouloir t'offenser, Xena... toi et moi, on est amies, non ?"

La guerrière hocha la tête. "J'aime à le penser."

Eponine se mordit la lèvre. "Je t'ai vu nue. Tu n'es pas équipée pour faire un enfant." Déclara-t-elle avec franchise, avant de rougir, de façon surprenante.

"Attends... attends... attends..." Ephiny serra sa main en même temps. "Attends... tu ne parles pas au sens propre, je sais, Xena... mais..."

Xena reposa son menton sur son avant-bras. "Non, je ne le suis pas." Répondit-elle en regardant Eponine, avant de se tourner vers Ephiny. "Et si, c’est exactement ce que je veux dire." Elle soupira. "Ecoutez... nous avons arrêté de nous demander exactement comment c'est arrivé. Nous avons... j'ai... juste accepté que c'est arrivé, et que Dori est ma fille, autant qu'elle est celle de Gabrielle." Elle fit une pause. "Puisque vous êtes ses parents adoptifs potentiels... J'ai pensé que vous devriez le savoir." Elle hésita, alors qu'Ephiny la regardait, les yeux écarquillés. Elle secoua la tête. "Je... pense... que ce qui s'est passé, c'est que … c'était quelque chose que Gabrielle voulait... voulait de tout son cœur, et quelqu'un... quelque chose... a exaucé son vœu."

"Par les Dieux... ça explique tellement de choses sur elle." Ephiny se passa une main dans les cheveux.

"Incroyable." Finit par lâcher Eponine.

Ephiny fronça les sourcils et marmonna doucement pour elle-même, puis elle leva les yeux, droit dans ceux de Xena. "Le jour où nous avons quitté Amphipolis." Murmura-t-elle. "Après que vous avez passé la nuit dehors... c'était ça ? ??"

La guerrière écarquilla les yeux. "Nous le pensons, oui... mais..."

" Par les Dieux. " chuchota la Régente. "Je me souviens avoir pensé... quand je l'ai vue ce matin-là... qu'elle avait l'air... plus heureuse que jamais... comme si elle avait été touchée par les Dieux." Elle releva alors la tête et regarda la guerrière d’un air résolument sérieux. "Xena, es-tu une demi-déesse ?"

Personne. Personne ne lui avait jamais demandé ça. Pas comme ça. Pas aussi franchement et ouvertement. Elle ne se l'était jamais posée à elle-même, même après les Furies.

Mais ce n'était pas grave, parce qu’en vérité, elle n'avait pas de véritable réponse. "Je... ne sais pas." Mal à l'aise, elle se leva. "Je dois y aller... on se voit plus tard." Elle était ébranlée et elle le savait, et elle reconnaissait sa retraite pour ce qu'elle était. Cette question n'était pas quelque chose sur laquelle elle voulait s’interroger.

Pas maintenant.

***************************************************

Gabrielle s'étira, savourant la sensation de vêtements secs et chauds après deux jours de bruine humide. Elle avait enfilé une paire de leggings chauds et sa vieille chemise préférée de Xena, et était maintenant étalée sur le lit à mettre à jour son journal intime.

D'un pied, elle berçait le berceau de Dori et grignotait le bout de sa plume en regardant sa page presque terminée. Elle sentit une présence familière et leva les yeux vers l'entrée alors que la forme sombre de sa compagne apparaissait doucement, traversant les ombres du couloir à la lueur du feu qu'elle avait allumé. "Hé... alors qu’est-ce...." Elle plissa les yeux, puis elle se leva soudainement et se rapprocha de la guerrière au silence suspect. "Xena ?"

Xena s'arrêta, les mains sur la boîte qu'elles utilisaient pour ranger leurs vêtements. "Oui ?"

Gabrielle posa une main sur la joue de la grande femme et tourna son visage vers le feu. "Par les Dieux, qu’est-ce qu’il t'est arrivé ?" Elle toucha l'ecchymose qui s’étendait sur la mâchoire de Xena.

Sa compagne poussa un petit rire d'autodérision. "Pas grand-chose... Je suis juste allée rendre visite à Pony et Eph... Je ne suis pas très douée avec les mots comme toi, alors j'ai essayé de me faire pardonner par Pony d'une autre façon."

La barde la fixa, sidérée. "Tu l'as laissée te frapper ?"

"Ouais." Xena haussa les épaules. "C'est pas si grave." Elle détacha son armure et la souleva, avant de la poser à côté de la boîte. "Tu peux me donner un coup de main ?" Elle tendit son bras et Gabrielle commença à délacer sa cuirasse avec des gestes précis et rapides. La douleur dans son crâne avait commencé à faire son chemin et elle ne voulait rien d'autre que de se débarrasser de ses cuirs humides, d’enfiler une tenue sèche et de s'asseoir quelques minutes près du feu. "Dori dort ?"

"Oui." Murmura Gabrielle, retirant le gantelet de son bras avant de commencer à défaire l'autre. "Pourquoi l'as-tu laissée te frapper ?"

" Eh bien..." La guerrière décrocha les bretelles de sa cuirasse et l'enleva, grimaçant devant les marques rouges et douloureuses qu’elle voyait, là où l’armure frottait sa peau. "C'est le moyen le plus rapide que j'ai trouvé pour évacuer sa colère... et ça a marché." Elle attrapa une chemise douce et tissée et la passa par-dessus sa tête, souriant un peu lorsque Gabrielle la réajusta autour de son corps. "Bennu m'a dit que trente autres soldats sont arrivés hier... Je dois commencer à les former demain avec les Amazones... Je veux travailler sur une force de frappe rapide."

Gabrielle remonta le pantalon de sa compagne et l’attacha autour de sa taille, laçant les liens avec des doigts soignés et efficaces. "Elle s'est sentie mieux ?"

Xena gloussa. "Pas vraiment... sa main, ma mâchoire... Je pense qu'elle a eu le pire." Dit-elle en envoyant à la barde un sourire moqueur. "Je vais aller chercher des sandwichs... ma mère s'en occupait quand je revenais ici pour me changer."

"Non." La barde lui prit les mains et la tira jusqu'à la chaise avant de la pousser doucement dessus. "Assieds-toi." Xena obéit et Gabrielle s'agenouilla et commença à délacer ses bottes. "Je suis sèche, au chaud, et je n'ai pas de bleu de la taille d'une noix de coco sur le visage. Je vais les chercher." Elle enleva une botte et prit une grande inspiration. "Xena..." Une longue entaille rougeâtre descendait le long de la jambe de sa compagne. Un coup porté sous son armure et à travers le cuir de ses bottes.

"Mm." Xena regarda sa jambe. "J'avais oublié ça."

La barde releva la tête pour la regarder froidement. "Les Guerriers !" La barde leva les yeux au ciel puis se redressa pour aller chercher le kit de guérison dans le sac de Xena. Elle revint et s'agenouilla près d’elle, puis elle sortit du sac un peu de nettoyant et un morceau de tissu. "Quand as-tu eu ça... hier matin ?"

"Ouais." Maintenant qu'elle était assise, tout semblait la frapper. La douleur des diverses petites blessures et des petits désagréments qu'elle avait tenus à distance pendant deux jours refit surface, et s'ajouta à la douleur qui résultait du coup de poing d’Eponine. Elle ferma les yeux. "Ce gars avec la pique... quand il est tombé, il m'a frappé."

"Uh huh." Gabrielle s'assit en croisant les jambes et nettoya la saleté et les morceaux de débris de la longue coupure particulièrement moche qu’elle avait sous les yeux. Lorsqu’elle eut fini, elle continua à laver la longue jambe de Xena, déplaçant ses mains sur la peau en une douce caresse. "Tu sais quoi ?"

"Mm ?" Xena avait appuyé sa tête contre le dossier de la chaise. "Non, quoi ?"

"J'en veux vraiment à Pony de t'avoir frappée." Gabrielle posa son autre main sur le genou de sa compagne. "Presque autant que je le suis contre toi pour l'avoir laissée faire." Elle s'appuya sur la cuisse de la guerrière et la pointa sévèrement du doigt. "La prochaine fois, tu me laisseras faire les conversations sensibles, d’accord ?"

La guerrière cligna des yeux en la regardant. "Bien sûr." Xena leva une main et ébouriffa les cheveux de la barde. "Je... leur ai raconté pour Dori."

"Raconté quoi sur Dori ?" demanda Gabrielle, perplexe.

Xena pencha la tête et releva un sourcil.

"Oh. Ça." Elle fît une pause. "Pourquoi ? Je veux dire... ça ne me dérange pas vraiment, ou quoi que ce soit, mais... tu as l'habitude..."

"Je ne voulais pas qu'elles continuent à te reprocher ses bêtises." Elle plissa les lèvres. "En plus... Je voulais juste le faire." Elle laissa ses yeux dériver vers le berceau. "Laisse-les penser ce qu'elles veulent maintenant."

Ce fût au tour de Gabrielle de cligner des yeux. "Tu es pleine de surprises aujourd'hui, n'est-ce pas ?" murmura-t-elle. "D'accord... mais, chérie... peu importe d’où ça vient, nous devons faire quelque chose à propos de Dori - elle ne peut pas continuer à tenir en otage un camp armé entier quand nous ne sommes pas là."

"Hum." Xena se mordilla la lèvre et prit un air très concentré. "Ouais, tu as raison... peut-être qu'on peut l'attacher avec des lianes au plafond ou quelque chose comme ça." Elle regarda le visage stupéfait en face d’elle. "Je plaisante."

"Uh huh." Gabrielle leva les yeux au ciel puis sa voix baissa de quelques octaves, alors qu’elle montrait son inquiétude. "Tu as l'air vraiment fatiguée... tu n'as pas dormi la nuit dernière, n'est-ce pas ?" Elle secoua la tête et s'employa à délacer l'autre botte de Xena, la retirant en tirant dessus, puis elle vérifia qu'il n'y avait pas d'autres coupures.

"Quelqu'un devait faire le guet." Répondit simplement Xena en s'étirant pour soulager sa raideur.

"Oh... cinquante Amazones ne suffisaient pas ? " répliqua Gabrielle, alors qu’elle se glissait entre ses jambes et s'appuyait sur ses cuisses musclées.

"Pas lorsque ta sécurité est en jeu, non." Répondit la guerrière en la regardant sans aucune honte avant de lui faire un clin d'œil. Xena la serra alors entre ses genoux, bloquant ses chevilles derrière les jambes de la barde et sourit. "Avant, j'étais capable de rester sans dormir pendant une semaine."

"Oh... Je peux imaginer à quel point tu devais être grincheuse à ce moment-là." déclara Gabrielle en reniflant. "Laisse-moi y aller et reste tranquille, d'accord ? Je vais chercher à manger et je reviens vite."

Une petite moue commença à apparaitre.

"Xena, arrête ça."

La moue s’accentua.

"Xeeeennnaaa..... "

Avec un gloussement, la guerrière la relâcha, puis elle se glissa plus bas dans le fauteuil, posa sa tête contre le dossier et ferma les yeux. ... Elle sentit Gabrielle se redresser, puis le frôlement de doigts chauds contre son cuir chevelu alors qu'elle recevait une douce caresse. "Mmm." Le bruit suscita une autre caresse, puis Gabrielle se rapprocha, le tissu de sa chemise effleurant le bras gauche de Xena.

"Tu as une bosse ici." Commenta Gabrielle en séparant les cheveux bruns avant de l’examiner de plus près. "C'est éraflé."

"Pony m'a frappée, j'ai frappé le mur."

Elle soupira. "Je déteste ça... je déteste vraiment ça... Xena, si tu refais ça, je vais..."

Xena tourna la tête et caressa le ventre de sa compagne. "Ne crie pas." Elle garda les yeux fermés. "J'ai assez mal à la tête comme ça."

La barde soupira à nouveau. "Tu dis ça parce que tu sais que je suis une éponge quand il s'agit de toi."

Xena rouvrit un œil et regarda un peu plus haut, scrutant la courbe de la poitrine de Gabrielle avec un regard qui lui rappela beaucoup celui d'un certain petit bébé endormi non loin de là.

Incapable de s'en empêcher, Gabrielle caressa affectueusement la joue bronzée, absorbant tranquillement la douleur étrange qu'elle ressentait parfois lorsqu'elle regardait Xena, celle qui lui serrait le cœur et la faisait sourire. Ça l'avait toujours fait, mais la seule différence était que maintenant, lorsque Xena la regardait, elle laissait transparaître l'amour qu'elle ressentait en retour. Elle glissa ses doigts sous les cheveux noirs de Xena et massa son cou alors que les yeux de la guerrière se fermaient doucement et qu'elle sentit une longue et chaude respiration contre son ventre.

C'était des moments comme celui-ci. Des moments où ses mains apaisaient l'esprit sauvage qu'elle sentait battre sous la peau de sa compagne, qu'elle réalisait à quel point l'amour était une force puissante.

D'une manière étrange, Xena se dit que c'était bon d’avoir mal. La myriade de petites coupures et d'ecchymoses, de courbatures et de douleurs qui s'installaient maintenant sur elle lui rappelaient, plus que toute autre chose, son humanité. Cela lui montrait que toute action avait un prix et lui rappelait le sacrifice qu'elle avait fait pour affuter ses compétences au maximum.

Elle inspira une bouffée d'air remplie du parfum de Gabrielle et écouta les battements de son cœur sous son oreille, se sentant à cet instant très mortelle. Cette pensée la fit sourire et elle serra la barde dans ses bras avant de se pencher en arrière.

"Ne bouge pas." Gabrielle mit un doigt sur son nez, puis elle sourit et sortit.

Xena passa une jambe sur l’accoudoir de la chaise et remua ses orteils nus, absorbant la chaleur du feu avec satisfaction.

*****************************************************

Gabrielle s'arrêta un moment, laissant sa main se poser sur la paroi rocheuse avant de continuer dans la caverne principale. Il n'y avait pas beaucoup d'activité, la plupart des gens réparaient leur armure ou faisaient d'autres petits travaux, utilisant les tables à tréteaux sur lesquelles ils mangeaient comme espace de travail.

Un développement intéressant remarqua-t-elle alors qu’elle vit les groupes commencer enfin à se mélanger. Avant, elle avait l'habitude de voir les Amazones dans un groupe, la milice dans un autre, leurs combattants volontaires dans plusieurs grands groupes et les Centaures qui râlaient dans le fond où trois ou quatre tables plus grandes avaient été installées pour eux.

Maintenant, c'était plus un mélange. Certaines des Amazones, celles qui n’avaient jamais froid aux yeux, avaient entamé des discussions avec les hommes de Bennu, et au fur et à mesure qu'elle passait, elle entendait des bribes de discours portant principalement sur les poussées et les impacts. Elle était presque sûre qu'ils parlaient aussi de combat.

La milice s'était aussi fait des amies Amazones, mais elle traînait surtout avec les Centaures, qui échangeaient des conseils de construction avec eux, et les discussions portaient surtout sur la rotation des cultures et les récoltes. Tout le monde semblait plus détendu.

C'était bien. Cela ne rendait service à personne de se battre les uns contre les autres... la barde le savait, et elle était vraiment ravie que même les Amazones, parfois piquantes, se soient calmées et aient rejoint la cause commune.

Gabrielle se dirigea vers la salle que Xena avait réservée pour la planification des combats, dans l'intention de récupérer un sac qu'elle y avait laissé, mais elle s'arrêta brusquement lorsqu'elle faillit heurter quelqu'un qui en sortait. "Whoa !" Elle bascula en arrière et tendit la main, surprise de trouver sa mère debout qui la regardait en clignant des yeux. "Maman."

"Ah... Gabrielle." Hecuba lui envoya un regard soulagé. "Je te cherchais... Lila déballait des affaires qu'on avait amenées avec nous et on a trouvé ça." Elle brandit un objet très délabré, presque méconnaissable. "Tu t'en souviens ?" La voix de sa mère semblait un peu mélancolique.

"Si je m’en souviens ?" La barde prit doucement l'objet des mains de sa mère. "Bien sûr que je m'en souviens... c'est ma vieille poupée." Elle toucha le visage de la poupée avec un doigt. "Cela fait longtemps que je ne l'ai pas vue... Je pensais l'avoir perdue il y a des années."

Hecuba resta silencieuse pendant un moment, puis elle soupira. "Je me souviens quand ton père l'a fabriquée pour toi." Elle étudia le visage introspectif de sa fille, tandis que les yeux verts examinaient le jouet. "Je sais... elle tombe en morceaux, mais je pensais que tu voudrais la récupérer... Dori a beaucoup de jouets, mais je ne crois pas qu'elle ait une poupée."

"Non... elle n'en a pas." Murmura Gabrielle pensivement. "Elle a quelques peluches, mais...." Un cheval. Un cochon et une chose que les Amazones avaient envoyée et dont l'anatomie défiait même les connaissances encyclopédiques de Xena sur la faune. "Elle n'a pas de poupée."

"Eh bien. Voilà... toutes les petites filles devraient avoir une poupée." déclara Hecuba. "Tu sais, ma chère... certaines de ces femmes qui viennent d’arriver sont plutôt habiles... peut-être pourrais-tu leur demander d'en fabriquer une ou deux... ces pauvres enfants de l'hospice n'ont pas de jouets non plus."

Gabrielle acquiesça lentement. "C'est une bonne idée maman... merci." Dit-elle en relevant la tête pour la regarder. "Merci d'avoir gardé ça pour moi aussi." Elle ressentit un pincement au cœur en réalisant qu'elle n'avait pas vu sa famille depuis qu'elle était arrivée dans les cavernes. "Um... nous allions nous réunir avec Cyrène et Toris et tout le monde ce soir... est-ce que toi, Lila et Lennat vous viendriez nous rejoindre ?"

Hecuba cligna des yeux, mais son visage marqua sa satisfaction. "J'aimerais bien... Je sais à quel point vous êtes occupés ici... nous avons rarement l'occasion de vous voir." Elle hésita. "Nous avons entendu dire que Dori avait fait quelques bêtises... Est-ce que tout s'est bien passé ?"

"Euh... oui, oui, c'est vrai... nous ne l'avons découvert qu'à notre..... Eh bien, nous venons juste de rentrer en fait. Elle va bien... elle a juste eu un petit problème, c'est tout."

Sa mère hocha la tête. " C'est ce qu'a dit Cyrène... J'allais lui demander toute l'histoire plus tard... Bon, je dois aller finir mes tâches... On se voit au dîner alors, Gabrielle. " Elle tapota le bras de sa fille, et s'éloigna, disparaissant dans la pénombre de la caverne.

"Ouais." Gabrielle s'appuya contre le mur et se mordilla la lèvre intérieure. Puis elle glissa la poupée sous son bras et s’avança dans le bureau, récupérant son sac avant de retourner dans la grande caverne. Une paire d'yeux dorés familiers rencontra les siens, puis se baissa, et elle regarda avec une certaine compréhension Eponine s'esquiver de la pièce, ne voulant manifestement pas la rencontrer.

Secouant la tête, elle entra dans la cuisine et prit un petit panier avant de fouiller dans le bac à fruits et d’en sélectionner quelques-uns, l’esprit toujours tourné vers sa famille. C'était un problème, elle s’en rendait compte. Ils étaient toujours sa famille, tout autant que celle de Xena, et elle n'avait pas eu à y faire face depuis plusieurs années à cause de la distance qui les séparait. Elle s'était habituée à considérer Cyrène comme sa mère et Johan comme son père, et elle avait réalisé il y a quelque temps qu'elle était de loin plus à l'aise avec sa famille adoptive qu'avec sa famille naturelle.

Ce n'était pas juste pour sa mère et Lila. Elle le savait. Mais elle ne pouvait pas s'en empêcher, et même maintenant, alors que sa famille s'occupait d'elle, c'était toujours comme s'ils essayaient de reprendre là où ils s'étaient arrêtés, avec une version d’elle-même adolescente et maladroite qui avait fugué pour finalement revenir à la maison.

"Gabrielle ?"

La barde mit un morceau de fromage dans son panier et se retourna, pour trouver Ephiny derrière elle. "Oh... salut." La Régente Amazone avait troqué ses cuirs pour une chemise chaude et des bottes qui arrivaient à ses cuisses. Habillée comme ça, elle semblait pouvoir s'intégrer facilement à n'importe lequel des petits groupes d'Amphipolis et des autres villageois qui se déplaçaient dans la caverne. "Désolée... J'étais un peu distraite."

"Pas de souci." Ephiny appuya une hanche sur une des tables de travail. "Tu as une minute ?"

Super. "Bien sûr." Gabrielle termina ses sélections et désigna un coin tranquille. "Installons-nous là." Elle se dirigea vers la table et se laissa tomber sur l'un des bancs grossièrement taillés, regardant Ephiny faire de même en face d'elle. "Alors, qu’est-ce qu’il y a ?"

L’Amazone s'adossa au mur et déposa un pied botté sur le banc, qu’elle entoura d’un bras. "Je voulais te parler de ce qui s'est passé entre Pony et Xena... Pony est vraiment bouleversée par cette histoire."

Gabrielle prit un raisin et le mangea. "Xena ne l'est pas." Elle leva les yeux au ciel avec franchise. "En ce qui la concerne, c'était la solution la plus rapide à un problème qu'elle n'avait vraiment pas envie de régler." Elle mâcha doucement le fruit avant de l’avaler. "Je ne suis pas vraiment contente de sa façon de régler les problèmes."

"Ah." Grogna Ephiny.

"Et je ne suis pas vraiment contente de Pony non plus."

"Mm. Ouais, elle savait que tu ne le serais pas." Admit sa Régente. "Sois sûre que je ne l'étais pas."

Gabrielle regarda la peau brillante d'une pomme un moment, puis elle releva la tête. "Pour être franche... pourquoi est-ce qu’on parle de ça ?"

Ephiny cligna des yeux. "Pardon ?"

"Pourquoi est-ce qu'on... toi et moi, on parle de ça ? Ce n'est pas notre problème, Eph." La barde lui tendit une pomme. "Laisse-les s'arranger toutes les deux... si Pony se sent mal, dis-lui de venir en parler à Xena... elle n'a pas besoin d'être nerveuse.... Xena ne va rien lui faire."

"Hum." Ephiny se gratta l'oreille et baissa la tête pour se rapprocher d’elle. "Gab.. Je... hum... " Elle regarda autour d'elle. "Elle n'est pas inquiète par rapport à Xena." Elle regarda la tête de la Reine se pencher sur le côté, perplexe. "Elle a peur de ce que tu lui ferais."

La barde écarquilla les yeux. "Moi ?" Gabrielle pointa du doigt sa poitrine. "Qu'est-ce qu'elle pensait que j'allais lui faire... sortir mon bâton et la frapper comme une idiote ?"

Ephiny se racla la gorge. "Eh bien, oui, en fait."

Hades soit maudit... "C'est vraiment le genre de réputation que j'ai chez vous ?" Gabrielle sentit une piqûre de douleur la traverser.

Ephiny cligna des yeux en retour, surprise. "Quand il s'agit de Xena, oui." Répondit Ephiny, perplexe. "Gabrielle... t'es-tu déjà vue quand tu la défends ? Tu ferais peur à la queue d'un Centaure, mon amie... honnêtement." Puis elle réalisa pourquoi la barde semblait si blessée. "Oh... Dieux, non... c'est... non, Gabrielle, en général, ce n'est pas du tout ce que les gens pensent de toi. C'est pourquoi c'est toujours si choquant quand tu prends tes plumes et ta fourrure pour elle."

"Oh." Gabrielle reposa son menton sur sa main. "Ok... ouais, je suppose que je deviens un peu... um..."

"Féroce."

"Féroce ?" La barde soupira. "Si tu le dis... mais elle compte tellement pour moi, Eph."

"Non, vraiment ?" répondit son amie avec ironie. "Quoi qu'il en soit... Je dirai à Pony de se montrer gentille... maintenant que je sais que je n'aurai pas à enlever encore plus d'échardes de son derrière quand elle sortira de sa cachette."

Gabrielle se leva et récupéra son panier. "Féroce, hein ?" Elle secoua la tête. " Écoute... Je sais que je je l'ai déjà dit... mais merci pour tout ce que vous faites pour Dori... merci vraiment."

Ephiny soupira et reposa son menton sur son poing. "Tu sais ce que j'ai réalisé aujourd'hui ?"

La barde fit non de la tête.

"Je serai une Aînée quand elle sera en âge de prendre son droit de caste."

La barde s'appuya contre le mur et laissa cette pensée traverser son esprit. "Hum." Murmura-t-elle. "C'est un sacré concept."

Ephiny hocha lentement la tête.

"Ça pourrait être pire, tu sais." Renchérit la barde, les yeux pétillants. "Tu pourrais être la maîtresse d'armes des novices."

La Régente gloussa en se levant. "Gabrielle... mon cœur me dit que... quand Dori viendra chez les Amazones... elle nous apprendra plus que nous ne lui apprendrons." Ephiny se tourna et se dirigea vers la sortie, vers une paire d'yeux dorés qui regardaient de derrière un pilier de pierre.

Gabrielle resta perdue dans ses pensées pendant un long moment. "Oui." Murmura-t-elle finalement, avant de placer sa poupée en lambeaux sous son bras et de se diriger vers leur caverne.

***************************

Xena ne savait pas si c'était le mal de tête ou autre, mais elle se contentait de rester assise et de regarder la lumière qui entrait par les rochers au-dessus d’elle et qui dansait sur l'eau qui avait causé tant de problèmes à tant de gens il n'y a pas si longtemps. Elle se sentait fatiguée, mais pas vraiment endormie. La lumière gênait ses yeux, alors elle les ferma et laissa son esprit dériver, s'autorisant le rare luxe de rêvasser. Un sourire se forma paresseusement tandis que les images s'agitaient contre l'intérieur de ses paupières fermées.

****

Debout sur le flanc d'une colline, un vent vif leur soufflait aux visages tandis qu'elles regardaient une longue pente herbeuse. En bas se trouvait une petite plaine, que Xena avait vue pour la dernière fois couverte de sang et de cadavres lors d'une bataille au cours de laquelle elle avait personnellement massacré d'innombrables hommes alors que son armée avait percé les défenses improvisées de la vallée. Aujourd'hui, les fleurs sauvages s'agitaient, dégageant un parfum capiteux et épicé, même à cette hauteur de la colline.

Un groupe d'enfants jouait dans l'herbe, leurs rires résonnant dans le vent, alors que Gabrielle avait impulsivement mis ses bras autour d'elle et l'avait serrée. Et Xena avait réalisé, peut-être pour la première fois, que certaines choses pouvaient guérir, si elle les laissait faire.

***

La première fois qu'elle s'était réveillée et qu'elle avait regardé à travers un feu de camp pour trouver quelqu'un d'autre, une petite fille à moitié adulte, toute recroquevillée dans sa vieille couverture, une main sous la tête et l'autre enroulée sur le sol, et qui avait l'air si jeune et si désemparée.

L'air si jeune et si désemparée que Xena avait douté un long moment de sa propre santé mentale en laissant Gabrielle rester avec elle.

Elle s'était demandée si elle ne devait pas s'enfuir et laisser la petite ici, près de chez elle, où elle aurait plus de chance de vivre une année de plus.

Et quand ces yeux verts s’étaient ouverts et avaient rencontré les siens, elle avait compris dans un moment de clarté exceptionnelle qu'elle n'allait jamais abandonner Gabrielle. Jamais.

****

Se souvenir du courage qu'il lui avait fallu pour rester debout, le cœur serré, et laisser Gabrielle s'éloigner d'elle non pas une, mais trois fois, faisant passer les rêves de quelqu'un d'autre avant les siens pour la première fois depuis ce qui lui avait semblé être une éternité.

Se souvenir du courage qu'il lui avait fallu pour enfin comprendre et accepter que ses rêves et ceux de Gabrielle se rejoignaient, et pour abandonner sa peur de ses propres rêves et accepter la joie qu'elle pouvait sentir juste au bout de ses doigts.

****

Voir le regard de Gabrielle après qu'elle ait combattu Melosa et gagné. Quand le fait d’être devenue sa Championne personnelle les avait changées subtilement toutes les deux sans qu'elles s'en rendent compte.

*****

Se réveiller à la maison, dans un grenier à foin tacheté de soleil, avec l'odeur de l'herbe, du bois et des chevaux autour d'elles, et du corps nu de Gabrielle emmêlé au sien, réalisant qu'elles avaient laissé leur nature physique reconnaître ce que leurs cœurs savaient depuis longtemps.

Et penser, qu’il avait été vraiment temps que cela arrive.

*****

Être debout sur un tas de rochers et voir Gabrielle descendre une longue route poussiéreuse.

Vers elle.

Rentrant à la maison.

*****

Sauter d'une falaise en ruine, en direction d'une rivière de lave, tendre les mains en une fraction de seconde et sentir la chair chaude les toucher.

Voir le regard de confiance et de gratitude de Gabrielle, qui avait levé les yeux au ciel, après avoir été sauvée d'une mort horrible, une fois de plus, au dernier moment.

*****

Regarder, à travers des yeux fantomatiques, Gabrielle revendiquer le masque d'Amazone comme le sien, mettre de côté un chagrin bien trop visible pour se battre pour le plus grand bien et tenir tête à Velaska de son propre chef, en sachant qu'elle n'avait plus de Championne à ses côtés.

Voir ce chagrin visible se dissoudre dans un plaisir sincère lorsque leurs âmes s’étaient réunies dans cet endroit gris et brumeux où elle avait été piégée et savoir qu'elle avait le pouvoir de le faire.

******

Se réveiller au moment le plus sombre et le plus bas de sa vie, s'attendant à trouver une grotte vide, et être bercée dans les bras de Gabrielle à la place.

*****

Tenir dans sa main un cristal perdu depuis longtemps, qui représentait le plus beau cadeau de sa vie et qui lui avait été rendu.

*****

La nuit de la naissance de Dori.

*****

"Hé."

Xena ouvrit les yeux et secoua légèrement la tête pour s’éclaircir les idées, avant de se concentrer sur le visage amusé de Gabrielle. "Oh. Salut."

"Tu faisais une sieste ?"

"Non." Sourit Xena. "Je réfléchissais." Elle fit une pause. "Qu'est-ce qu'on mange ?"

"Mmm. " Gabrielle se posa sur l’accoudoir  et inspecta son panier. " Un peu de viande, du fromage, des fruits, et si tu es sage, des petits gâteaux… Oh et Pony sera bientôt là pour s'excuser, alors... fais-moi plaisir, chérie... sois gentille et laisse-là faire, hum ? ".

Xena attrapa un raisin et le mangea. "Quel genre de gâteau ?" Elle arqua un sourcil. "Est-ce qu'il en vaut la peine ?"

Gabrielle se pencha vers elle et l'embrassa, manquant de faire tomber son panier au passage et de perdre l’équilibre lorsque le léger contact devint rapidement quelque chose de plus sérieux. Elle se stabilisa en posant une main sur l'épaule de Xena, puis elle recula légèrement sa tête en respirant difficilement. "Hum."

Un raclement de gorge hésitant interrompit le moment et Gabrielle leva les yeux pour voir une Eponine à l'air très embarrassé, debout dans l'ouverture de la caverne. "Salut."

Xena regarda le corps en équilibre précaire qui se tenait au-dessus d'elle, et une petite lueur malicieuse s’alluma dans ses yeux. Elle tapota le bras de Gabrielle pour attirer son attention et lorsque la barde se retourna, elle glissa une main derrière son cou et la tira vers le bas, étouffant sa surprise en reprenant leur baiser. Elle continua pendant un long moment, jusqu'à ce qu'elle sente la peau de Gabrielle chauffer contre elle.

Puis elle relâcha sa captive, qui bougea de quelques centimètres, juste assez pour ouvrir des yeux verts suppliants et lui lancer un regard pathétiquement frustré.

Xena lui fit un clin d'œil et se lécha les lèvres. "Alors, toujours convaincue que je dois être gentille ?"

"Gentille ? Non non... tu n'as pas besoin d'être gentille." Murmura Gabrielle en se redressant. "Pas du tout."

"J'ai toujours droit à mon gâteau ?" S'enquit la guerrière enjouée.

Gabrielle lui tendit le panier entier, puis elle se leva et se frotta le visage, essayant de prétendre qu'une Eponine aux yeux exorbités ne se trouvait pas à l’entrée de leur chambre, complètement figée. "Je vais aller prendre un bain." Elle se dirigea vers la piscine naturelle et, sans même faire une pause, se jeta dedans toute habillée.

Xena sourit et tourna la tête vers Eponine, soulevant le panier vers elle. "Du raisin ?"

L'Amazone leva un doigt, puis elle disparut. Xena haussa les épaules. "Nan ? Plus pour moi alors." Et elle en reprit un autre, avec un petit rire.

************************************

"Très bien." Xena se dressa sur ses étriers et sentit le cuir bouger sous son poids tandis qu'elle passait en revue les troupes rangées dans l'herbe. "Souvenez-vous... quand vous commencerez à bouger... rappelez-vous où vous êtes, et ne vous mettez pas sur le chemin de la cavalerie." Elle examina la formation qui comprenait des troupes à cheval des deux côtés, empêchant les fantassins en armure de percer les lignes.

Ils s'étaient entraînés toute la journée à des manœuvres de frappe et de fuite, et ce n'était que maintenant, alors que le soleil se couchait sur les collines et peignait la vallée de bandes d'or et de cuivre, qu'elle les rassembla tous, au nombre de mille trois cents, pour un exercice de masse qu'elle espérait ne jamais avoir à utiliser.

Elle leva une main et observa les réactions dans la vallée. Les Centaures piétinaient sur place et les Amazones raffermissaient leurs prises sur leurs lances et leurs cimeterres qu'elles avaient passé la dernière demi-lune à apprendre à manier à cheval. Les troupes installèrent fermement leurs boucliers sur leurs bras, à l'exception du groupe de soldats qui avaient fait leurs preuves avec des armes à deux mains, et toutes se tinrent prêtes à constituer une force de choc.

C'était juste pour les habituer à se déplacer ensemble, et à ne pas se couper les bras, soupira Xena en donnant une pression de genou à Iolaus, qui se retourna proprement et piétina sur place à son tour, prêt à charger. Elle fit face à l'autre extrémité de la vallée, où des bottes de foin, des barrages en bois et des pieux avaient été installés. Ce n'était pas comme attaquer une vraie armée, mais s'ils pouvaient arriver de l'autre côté, sans que personne ne soit piétiné ou tué par un coup de hache de son propre camp, elle considérerait cela comme un succès. "Très bien ! Bougez-vous ! !"

Xena fit avancer Iolaus au trot, écoutant derrière elle la douce musique d’une armée qui se mettait en marche, alors que treize cents soldats se déplaçaient, faisant résonner leurs bottes et leurs sabots contre la terre herbeuse. Instinctivement, elle frissonna, alors que le vent soufflait contre elle, et que l'odeur des animaux et de la sueur, mélangée au cuir et à l'huile, l'accompagnait. Elle accéléra l’allure et entendit le tambourinage changer de rythme derrière elle. Elle tourna la tête pour voir la formation se déplacer, un peu timidement, alors que les chefs de groupe se battaient pour garder leurs lignes droites, et que les Amazones serraient leurs jambes autour de leurs chevaux qui commençaient à s’impatienter et à devenir nerveux.

Secouant la tête, elle se retourna. Je ne me souvenais pas que diriger une armée était aussi difficile, grommela-t-elle pour elle-même. Bien sûr... Je n'en ai jamais eu une qui était comme celle-ci. Elle leva une main et attrapa son épée dans son dos, dans un mouvement facile et familier, puis elle se mit en équilibre, légèrement en avant, accrocha ses rênes au pommeau et libéra ses mains. Un cri fort retentit derrière elle lorsque sa posture fût reconnue. Elle leva son poing et poussa Iolaus dans un galop rapide.

Le vent rejetait ses cheveux en arrière alors qu'elle avançait, menant l'attaque sur les bottes de foin. Ses doigts se resserrent sur la poignée de son épée lorsqu'elle atteignit la première rangée de mannequins de paille qui imitait une ligne retranchée de défenseurs.

Un coup de talon et Iolaus sauta par-dessus la première ligne. Elle entendit derrière elle le bruit et le hennissement des chevaux des Amazones qui suivaient son exemple, laissant la ligne aux troupes à pied, puis elle se pencha et coupa le bras empaillé d'un défenseur sur sa monture de paille.

Elle sortit finalement de la piste en dirigeant Iolaus hors du terrain pour regarder l'ensemble de l’attaque. La première ligne s’était bien débrouillée. Les troupes à cheval avaient contourné les premiers rangs, comme elle leur avait appris, pour se concentrer sur les défenses plus lourdes derrière eux. Les fantassins, quant à eux, se jetèrent sur les bottes de foin avec enthousiasme, perçant leurs tristes petits cœurs dorés avec leurs épées et détruisant les armes en bois avec leurs piques et leurs masses.

Puis ça commença à devenir désordonné. Les soldats s’entassèrent derrière les premiers rangs et les Centaures arrivèrent derrière eux, poussant sans le vouloir les hommes en avant et dans les chevaux des Amazones, qui se mirent alors à ruer lorsque des armes tranchantes entrèrent en contact avec leurs flancs sensibles. "Arrêtez ! !" cria Xena par-dessus le fracas des armes.

Trop tard. Un groupe de soldats avait poussé un grand poteau défensif en bois et en paille. Il tomba avec fracas et des morceaux volèrent partout, frappant les chevaux et les autres combattants. Un cheval hennit bruyamment et rua, écrasant ses dangereux sabots sur un second.

"C’est pas vrai !" Xena poussa Iolaus à avancer. " Allez, on y va... " Le cheval sauta un talus de paille et elle se faufila à travers la confusion, alors que les sons devenaient plus forts et que des cris de douleur et d'indignation provenaient d'un nœud de chevaux et d'hommes. "Arrêtez-vous... ARRETEZ-VOUS ! !!" Elle esquiva une pique errante et jura lorsque Iolaus rua brusquement en recevant une pointe de lance dans l'épaule.

Elle libéra ses bottes de ses étriers et sauta du dos de l'étalon, atterrissant dans le chaos, puis elle commença à faire reculer les hommes. "Baisse-toi... bon sang !" Une lance heurta son armure dorsale. Elle se tendit et l'attrapa, tirant son propriétaire avec elle, puis le repoussa brusquement.

"Pose ça avant de tuer quelqu'un."

"Je pensais que c'était l'idée, madame." Le très jeune soldat, un de Bennu, déglutit. "Désolé."

Xena lui lança un regard furieux avant de se jeter dans la mêlée désordonnée des chevaux et des hommes. Elle se sentait un peu comme un saumon luttant contre le courant. L'un des chevaux hennit et se cabra, ses gros sabots à quelques centimètres de sa tête. Elle leva rapidement un bras, prenant un coup sec sur son biceps avant que l'animal ne finisse par se calmer. "Très bien... maintenant tout le monde se calme !!!"

D'une certaine manière... ils le firent et elle se tint alors au centre d'un groupe de combattants et de chevaux agités, en sang et plein de sueur. Les Amazones descendirent de leurs montures et lentement, un calme s'installa sur le champ de boue.

Xena posa ses mains sur ses hanches et souffla. "Vous avez fait ce que j'ai dit... vous avez passé les premiers rangs... mais ensuite, il faut que vous continuiez à avancer..." cria-t-elle, en laissant sa voix résonner dans la vallée. "Vous ne pouvez vous arrêter, parce que sinon tout le monde s'entasse derrière vous et c’est l’anarchie."

Ephiny passa une main dans ses cheveux humides de sueur. "Alors... on doit passer le deuxième groupe aussi ?"

"Ne vous arrêtez pas pour combattre le deuxième groupe. On les balaie, on frappe et on avance, comme on s'est entraînés." répondit Xena. "Couper et avancer... toujours continuer à avancer, à les déséquilibrer... puis laisser le poids des troupes derrière vous les repousser. Si vous vous arrêtez..." La guerrière fit un geste de la main pour désigner une partie des troupes. "Alors ils n'ont nulle part où aller, ils ne peuvent que vous foncer dessus."

Las, les Amazones hochèrent la tête. "Bien..." Eponine se frotta le visage recouvert de boue. "C'est logique... nous avons juste vu des cibles et nous les avons attaquées."

Xena jeta un coup d'œil autour d'elle, puis elle regarda le soleil, évaluant sa progression. Elle était debout depuis bien avant le lever du soleil, réveillée par les cris de douleurs de Dori. Sa fille faisait ses dents, un nouveau développement qui les avaient accaparées, elle et Gabrielle, une bonne partie de la nuit. Elle avait mal à la tête, au bras... elle avait faim, et elle voulait désespérément un bain et des vêtements propres. Elle était certaine que tout le monde ici désirait exactement la même chose qu'elle, après cette journée particulièrement longue et épuisante. La logique voulait qu'elle mette fin à l'exercice et qu'elle envoie les troupes prendre un repas bien mérité.

"Très bien." Elle souffla un bon coup puis poussa sa voix pour qu'elle porte. "On recommence. On va refaire ça jusqu'à ce qu'on y arrive." Xena se retourna et se dirigea vers l'endroit où se tenait Iolaus, posa une main sur le pommeau de la selle et monta à cheval. "Allons-y... on retourne à notre point de départ."

Ephiny l'avait suivie discrètement. "Xena..."

" Oui ? " La guerrière se retourna en faisant faire un demi-tour à Iolaus et fit face à la Régente Amazone, en lui envoyant un regard neutre, sans expression.

"Il commence à faire nuit."

"Alors nous allumerons des torches." Répondit Xena avec fermeté.

"Ça pourrait être dangereux."

"Je suppose qu'on a intérêt à bien faire les choses cette fois, alors, hein ? Sinon j'enverrai un mot à l'hospice." Xena fit tourner Iolaus et le dirigea vers la zone de rassemblement, passant devant les troupes qui marchaient doucement vers leur point de départ en la regardant passer.

Eponine poussa son cheval à côté de celui de son amante. "Bien essayé."

Ephiny se gratta la tête, puis souffla. "J'ai l'impression que ce cheval m'a chevauchée, plutôt que l'inverse." Elle frotta l'intérieur de ses genoux, qui étaient protégés par un tissu légèrement usé. Une cavalière les rejoignit et elle fit un signe de tête à Gillen. "Peut-être que si on se rejoint et qu’on prend cette grande cible centrale, avant de passer de l’autre côté, cela libérera assez d'espace ?"

"Bonne idée." Approuva Gillen. " N'importe quoi pour descendre de cette foutue selle... J'ai des bleus à des endroits qui me font sérieusement me demander comment les hommes font ça. "

Eponine et Ephiny gloussèrent toutes deux d'un air las. "Du rembourrage, je parie." se risqua à deviner Ephiny. "Enveloppés dans de la laine douce. Je parie cinq dinars sur ça."

"Je prends le pari." Gillen tourna la tête pour jeter un coup d'œil aux cavaliers. "Et je relance de cinq dinars. Je parie qu'ils les attachent et qu’ils les décalent pour qu’elles ne frappent pas la selle." Elle leva une main et souleva une corde imaginaire. "En haut... en bas... en haut en bas... "

"Ew... quelle image." Ephiny secoua la tête, puis mit son cheval au galop vers l'endroit où la cavalerie Amazone se rassemblait.

**********************************************

Gabrielle fit une pause et prit une gorgée de sa chope, puis elle laissa sa tête reposer sur une main tandis qu'elle étudiait un parchemin. "Ok." Elle le mit de côté et en tira un autre. "C'est le convoi de ravitaillement qui est passé hier... qu'ont-ils donné ?"

"Trois d'entre eux... et douze tonneaux de poisson salé." Répondit Cyrène en les montrant du doigt. "Qu’Artémis sache ce que je vais faire avec ça... mais ils ont dit que ça venait d'un village côtier pour lequel vous aviez fait quelque chose il y a quelques temps... et qu'ils les avaient envoyés pour nous."

"Mmm." La barde grignota le bout de sa plume en essayant de trouver de quel village il s'agissait. Elle secoua finalement la tête. "Il y en a beaucoup... nous avons passé six mois sur la côte... nous avons fait beaucoup de choses là-bas."

Un cri aigu l'interrompit. "Oh bon sang... c'est reparti." Gabrielle échangea un regard ironique avec Cyrène. "Pauvre Xena... Je ne pense pas qu'elle ait dormi plus d'un quart de bougie la nuit dernière." Elle se leva et se dirigea vers le berceau situé près du grand feu de l'âtre, où Dori s'agitait, un air malheureux sur le visage. "Qu'est-ce qu'il y a, chérie... tu as encore mal."

"Maman..." s’exclama Dori faisant la moue.

"Je sais... Je sais..." La barde s'agenouilla et souleva sa fille avant de la bercer doucement. « Ça m’inquiète... la dernière série qui est arrivée était loin d'être aussi douloureuse." Elle posa une main sur le front de la petite fille. "Je pense qu'elle est un peu chaude, aussi."

Cyrène s'approcha et toucha la tête du bébé. "Un peu... ça arrive parfois." Elle soupira. "Est-ce que Xena t’a donné quelque chose pour la calmer ?"

"Oui..." Gabrielle récupéra un morceau de cuir et le donna au bébé qui s'agitait avant qu’elle ne commence à le mâchouiller avec irritation. "Mais elle ne peut pas en avoir trop souvent... en fait, pour la faire dormir la nuit dernière, Xena lui a donné un peu de ce truc froid qu'elle a fait... Dori adore ça, et ça la fait se sentir mieux, je pense."

Dori se redressa au nom familier. "Boo ?"

Gabrielle se retourna et regarda l'entrée de la caverne, où l'obscurité totale rendait impossible de distinguer le moindre détail de la vallée, à part la prolifération de torches allumées. Elle soupira en écoutant les cris et le tonnerre des sabots qui s’entendaient encore. "Pas encore, chérie."

"Ils sont dehors tard ce soir" murmura Cyrène.

"Ouais."

"Boo !" Dori avait décidé ce qu'elle voulait. "Boobooboobooboobooboo !"

Je sais ce qu'elle ressent. Gabrielle se disait intérieurement qu'elle avait très peu vu sa compagne ces derniers jours. Bien sûr, elle avait été occupée elle aussi, avec le convoi apparemment sans fin de marchands qui se dirigeaient vers les zones à risque, envoyés par des amis, par des alliés... par leur propre avarice... planifiant le ravitaillement des troupes toujours plus nombreuses et toujours plus impliquées… maintenir le calme et la paix entre les différents groupes, gérer les inévitables disputes... Pendant que Xena façonnait les volontaires en une sorte de nouvelle armée, elle s'occupait de la logistique en coulisse.

C'était épuisant pour toutes les deux.

"Boo !!!" hurla Dori.

"Oui je sais." Gabrielle se pinça les lèvres, puis elle prit une décision. "Je reviens tout de suite." Elle prit Dori dans ses bras et se dirigea vers la salle de planification où elle avait laissé un des sacs de transport du bébé et la déposa dedans. Puis elle la mit en bandoulière et se dirigea vers les écuries.

Argo mâchait tranquillement son foin, mais la jument leva la tête lorsque Gabrielle entra, reconnaissant une odeur et des sons familiers.

"Hé ma fille !" Gabrielle la gratta derrière une oreille. "Tu veux bien me rendre un service ? J'ai juste besoin d'un petit coup de pouce... d’accord ? "Elle mit le filet à la jument, puis la fit avancer vers l'entrée principale.

Dehors, il y avait, comme par hasard, un rocher assez grand pour qu'elle puisse s'y tenir et monter sur le large dos de la jument. "Voilà... c'était facile." Elle enroula ses jambes autour des flancs chauds d'Argo et souffla. "Ok, Dori... tu es prête ?" Le bébé s’était accroché à ses cheveux et elle put sentir une petite main saisir sa chemise. "Allons-y."

Il faisait très sombre, la lune ayant glissé derrière les nuages. Elle se fraya un chemin avec précaution à travers les rochers et les obstacles, guidant ses pas grâce au bruit des combats non loin de là. Elle pouvait voir là où les torches étaient installées. Les ombres vacillaient contre leur éclat rougeâtre, le cramoisi brillant sur les armes et la peau des chevaux couverte de sueur.

La voix de son âme sœur s'éleva soudainement au-dessus du vacarme. "Stop ! !! Que les Dieux soient damnés, restez où vous êtes ou c’est contre MOI que vous allez vous battre dans un instant !"

"Grincheuse, hein ?" commenta Gabrielle à sa fille, qui trouvait la scène fascinante, suffisamment pour qu'elle en ait oublié ses dents pendant un instant.

"Boo." répondit Dori.

Le simulacre de bataille s'était arrêté et maintenant des hommes et des femmes épuisés se tenaient debout, leurs armes baissées, tandis que Xena sautait sur une botte de foin et posait ses mains sur ses hanches. La guerrière ouvrit la bouche pour continuer sa tirade, mais elle s'arrêta brusquement lorsque ses yeux tombèrent sur Gabrielle.

Les têtes se tournèrent et les corps bougèrent pour lui ouvrir un passage, ainsi qu'à Argo, qui renifla les autres chevaux alors qu'elle se frayait un chemin autour des bottes de foin. Finalement, Gabrielle la fit s'arrêter à côté de sa compagne. "Salut."

"Gabrielle, nous sommes au milieu d'un combat là." Protesta Xena.

"BOOO !!!!" Dori, qui avait vu sa camarade de jeu, poussa un grand cri, manquant d'arracher l'oreille de Gabrielle.

"Bien." La barde se frotta l'oreille. "Dori pense qu'il est temps pour toi de faire une pause."

"Elle le pense, hein ?" Xena commença à s'énerver, mais elle se stoppa lorsqu’elle vit Dori se démener dans tous les sens dans le dos de Gabrielle pour essayer de se détacher et d'arriver jusqu'à elle.

"Ouaip." Répondit Gabrielle en hochant la tête. "J'ai essayé de la dissuader de venir ici pour te trouver... mais elle n'a rien voulu savoir." Elle leva les mains au ciel exagérément. "Qu'est-ce que je pouvais faire ?"

Xena plissa les yeux puis serra les lèvres lorsqu’elle comprit le problème. "Eh bien, j'étais sur le point d'abandonner de toute façon... on n’arrivera à rien ce soir." Elle se redressa et éleva la voix. "On arrête... on reprendra demain matin au lever du soleil."

Pas un bruit de protestation ou de soulagement ne s’éleva. Juste un lent murmure et un mouvement de masse. Le doux cliquetis des armes et le grognement des chevaux fatigués résonnèrent tandis que l'armée se dissolvait dans l'obscurité, ne laissant qu'un cercle de torches et une jument dorée seule avec deux âmes sœurs fatiguées et un bébé très agité.

Xena s'assit lentement sur sa botte de foin et laissa ses bras reposer sur ses cuisses. "Elle a toujours autant mal ?"

Gabrielle guida Argo plus près, jusqu'à ce que ses genoux touchent ceux de la guerrière. "Oui..." Elle passa la main par-dessus son épaule et retira le sac. "Oui, chérie... voilà ta Boo."

"Non... non... Gabrielle... " protesta Xena. "Je suis sale... couverte de boue et pire encore." Elle montra une main couverte de crasse. "Tu vois ?"

Dori s'échappa de l'emprise de sa mère et faillit tomber sur les genoux de Xena. La guerrière l'attrapa et soupira. "Dori, arrête ça." Elle tint le bébé avec précaution.

La barde sourit à la douceur soudaine qui était apparue sur son visage. " Tu sais quoi... on a pris ces énormes tonneaux dans lesquels ils ont expédié ces peaux et on les a coupés en deux pour pouvoir faire des grands bacs. J'en ai justement un avec ton nom dessus... qu'est-ce que tu en dis ?" Elle tendit la main et toucha un bleu sur la tempe de sa compagne.

Un bain chaud. Xena gémit intérieurement rien qu'à l'idée. "D'accord... et je peux donner à Dori un peu plus de ce truc froid."

"Ah. Dis plutôt que tu en veux juste un peu toi-même." Gabrielle s'avança sur le dos d'Argo et lui tendit la main. "Tu veux que je te ramène ?" Elle fit une pause. "On dirait que la journée a été longue."

Xena se leva et se hissa sur la jument en maintenant Dori contre elle, avant d’enrouler un bras autour de Gabrielle. "Très... ils n’arrivent pas à comprendre ce mouvement." La guerrière souffla. "Peut-être que je perds la main."

La barde leva les yeux au ciel d’agacement, hors du champ de vision de Xena. "Peut-être qu'un peu d'eau chaude, un repas et une sieste nous aideront." Elle tapota la cuisse de la guerrière. "Allez, tigresse..."

Ouais. Xena était contente d'être enfin au calme. "Ça ne peut pas faire de mal."

Elles sortirent du champ de lumière des torches et s'enfoncèrent dans l'obscurité en direction des grottes, tandis que les sons des grillons s'élevaient pour remplacer les bruits de bataille.


********************************

La caverne principale commençait à se remplir alors qu'elles s'y frayaient un chemin, des voix fatiguées s'élevant et s'éteignaient autour d'elles dans une vague contenue. Une bulle de silence ostensible suivait leur progression et Xena soupçonnait qu'elle était le sujet principal de leur conversation. Inconsciemment, elle redressa ses épaules et mit un peu plus d'énergie dans ses pas. Elle fronça le nez soudainement face à l’odeur qu’elle sentit venir des cuisines. "Qu'est-ce que c'est ?

"Des navets et du poisson salé". répondit Gabrielle en esquivant un couple d'Amazones à moitié endormies.

"Par les Dieux." Répliqua Xena en faisant une grimace. "Je vais peut-être passer mon tour." Elle se dirigea vers la pièce qu'ils avaient réservée pour leurs ablutions, mais elle fût retenue par une main puissante qui s’agrippa à la sangle de son armure et qui la tira dans une autre direction. "Mais... Je pensais..."

"Viens." Gabrielle traversa le chaos, la tira au-delà de la zone de nourriture et la dirigea vers leur propre espace privé.

"Ecoute... J'ai besoin d'enlever d’abord toute cette saleté, Gabrielle... Je reviens tout de suite... pourquoi ne prends-tu pas Dori et je..." Elle s’arrêta de parler lorsqu’elles entrèrent dans leur caverne éclairée par des torches complaisamment allumées. "Oh." Xena sentit un sourire fatigué se dessiner sur son visage à la vue du demi-fût disposé près du feu et du cercle de seaux remplis d'eau chaude. "Je vois."

"Mmm." La barde lui prit Dori et essuya un peu de boue sur le visage du bébé. "J'ai pensé que tu aurais besoin d'un bon bain... puisque tu as, de loin, le plus de crasse sur toi de tous ceux que j'ai vus jusqu'à présent."

"Non, c'est faux."

Gabrielle se recula et la regarda. Il était difficile de dire où s'arrêtaient ses cuirs et où commençait sa peau à cause des taches de boue sombre qui recouvraient son grand corps en armure. Ses plaques de métal étaient recouvertes de terre et d'herbe, et de drôles de tiges de foin dépassaient d'endroits incongrus. "Si tu le dis, Générale." Répondit la barde bien que son expression faciale indiquait clairement ce qu'elle pensait du sujet. "Je serais curieuse de savoir comment tu as réussi à en mettre jusque-là..." Elle attrapa une boule de boue sous le plastron de Xena. "Déjà ça de moins." Ses yeux scintillèrent un peu quand elle regarda le visage crasseux de sa compagne qui lui rendait son sourire.

"Se battre est un travail difficile." Grogna la guerrière. "Tu devrais le savoir." Xena s'éloigna et se laissa tomber sur une caisse, avant de se pencher pour commencer à détacher son armure. "Je me souviens de moments où j'ai dû pratiquement te maintenir au sol et frotter ton..."

"Xena." Gabrielle couvrit les oreilles de Dori.

La guerrière plissa narquoisement les yeux. " … petit cul rond et plein de boue." Termina-t-elle. "Comme si elle savait déjà ce que c'est." Renâcla la guerrière puis elle recommença à frotter sa jambière gauche qui était recouverte de boue durcie. "Bon sang."

Gabrielle termina d'essuyer Dori, puis elle la posa sur le tapis, la regardant se diriger avec détermination vers la guerrière, avant d’être stoppée par la rotule encore blindée de Xena. "Bck !" protesta-t-elle en frappant la surface en question.

"Hé... laisse-moi une chance de l'enlever." Se plaignit sa victime alors que la plaque d'armure était tirée vers le bas. "Dori ! Arrête ça !"

Le bébé s’assit alors sur son derrière rembourré et fit la moue. "Maman !"

Avec un soupir moqueur, Gabrielle s'assit puis éloigna d'une claque les mains de Xena de la boucle récalcitrante. "Tu sais exactement qui appeler quand il y a un problème, hein ma chérie ?" Dori se mit à ramper pour voir ce qu'elle faisait, tirant utilement sur l'extrémité de la sangle.

"Je... suis... parfaitement... capable... d'enlever... ma... propre... armure." Marmonna Xena.

"Mmhmm." La barde hocha gravement la tête en détachant la sangle puis elle retira les plaques et découvrit alors une gerbe de foin boueux. "Oh. Joli." Elle secoua la tête, puis se retourna et se mit à genoux pour atteindre la boucle sous le bras droit de Xena. "Celle-ci est en train de s'effilocher, Xena." Fit-elle remarquer en la défaisant, baissant soudain les yeux alors que son coude frôlait la tête d'une Dori curieuse. "Attention, chérie."

"Super... juste super." Murmura Xena, déverrouillant l'autre côté avant d’attendre que Gabrielle défasse la sangle autour de sa taille qui maintenait les nouvelles plaques dorsales et stabilisait le fourreau de son épée. Elle souleva l'armure. "Hé... arrête-ça, Dori."

Dori tira sur la sangle et gloussa. "Na !"

"Dori." Xena baissa la voix et jeta un regard sévère à sa fille.

Le bébé gloussa encore plus fort et tira, manquant de tomber. "Na ! Na !"

"Désolée." Gabrielle gloussa et réussit à libérer les petites mains du cuir. "C'est la meilleure humeur qu'elle ait eue de la journée."

Xena posa l'armure et laissa ses coudes reposer sur ses genoux. "C'est bon." Elle commença à détacher un brassard. "Contente de voir qu'il y a encore quelqu'un qui n'est pas intimidé par moi." Un déplacement d'air et de peau à côté d'elle lui fit relever les yeux vers le visage de Gabrielle. "A part toi, bien sûr." Se corrigea-t-elle hâtivement, puis elle s'arrêta. "N'est-ce pas ?"

Gabrielle entendit la note d'incertitude, bien qu'elle soit bien masquée. "A ton avis…hum…" Elle laissa ses yeux parcourir la grande forme et remua les sourcils. "Des genoux." Elle avait délacé la botte droite de Xena et commençait maintenant à enlever le cuir. "Il y a un genou sous toute cette crasse, n'est-ce pas ?"

Xena sourit, un éclat de blanc saisissant sur son visage boueux. "Quelque part."

Dori trouva les lacets de la botte gauche et commença à les tirer. "Maman !" Ses yeux s’écarquillèrent lorsque quelque chose s'en échappa et tomba sur le sol. Immédiatement, elle se baissa et l'attrapa. "Bck !"

"Hé... non non..." Gabrielle se jeta sur elle. "Dori... laisse la grenouille..."

Trop tard. De minuscules doigts s'agrippaient à l'animal qui se tortillait, lui-même un bébé d'à peine quelques centimètres de long. "Na." Dori le fixait avec fascination.

"Ah ah..." Xena réussit à entourer les doigts de sa fille avant que la grenouille ne soit réduite en purée. Elle retira l’animal et l'examina. "Huh."

"Moi !" Dori griffa sa main pour essayer de le récupérer. "Boo !"

"Non." Répondit la guerrière en la regardant sévèrement et en tapotant légèrement les doigts tendus. "Maintenant arrête !" Elle fixa le bébé dans les yeux et ne sourit pas.

Dori cligna des yeux et mit un doigt dans sa bouche, incertaine. Puis elle tendit le bras pour attraper la grenouille.

"Non." Répéta Xena.

Une petite lèvre sortit et Dori s'assit, le visage plissé et l'air malheureux. "Maman." Elle regarda Gabrielle d'un air implorant.

Oh là là. La barde se sentait déchirée entre le fait de savoir que son enfant devait apprendre une certaine discipline et l'envie maternelle presque irrésistible de la réconforter. Elle appuya sa tête contre le genou de Xena. "Oh, c’est tellement dur... non, chérie... Boo a raison. Tu ne peux pas t’amuser avec la grenouille." Aussi dur que ce soit pour elle, elle savait que c'était trois fois plus dur pour Xena, qui cédait habituellement directement devant cette petite moue. "Tiens... joue avec ça pendant que je termine d’aider Boo à se déshabiller." Elle attrapa une petite peluche et la tendit au bébé.

Dori examina le jouet, puis elle soupira et commença à le mâcher.

"Ouf". Murmura Xena. "C'est la chose la plus difficile que j'ai eu à faire de toute la journée." Elle jeta la grenouille par-dessus son épaule, dans la piscine toute proche.

"Mm." Approuva sa compagne en démêlant un lacet. "Sans blague." Elle se leva et commença à soulever les seaux pour verser l'eau chaude dans la baignoire. La caverne avait un aspect un peu différent maintenant, depuis les dernières aventures de Dori. Elles avaient utilisé le bord de l'eau comme zone de stockage pour les grandes et lourdes caisses. Un mur de caisse qui empêchait l'accès des tout-petits, à la grande frustration de Dori, et au soulagement de ses parents.

L'eau chaude dégageait une odeur de minéraux et de bois du tonneau. Elle y ajouta un petit savon de bain que Salmoneus avait préparé, qui avait une odeur très agréable d'herbes. Elle pouvait entendre le doux râle de Xena qui retirait ses cuirs, puis le claquement lorsqu'elle les déposa sur la caisse. Puis sa conscience passa de l'audible à cet autre sens, alors qu'elle sentait Xena se rapprocher silencieusement, la présence dans son dos devenant de plus en plus distincte jusqu'à ce que le bout de ses doigts touche sa peau et que des mains chaudes se posent sur ses épaules.

"Tu as quelques nœuds ici." La voix de Xena l'effleura, tandis que la guerrière commençait un doux massage.

Gabrielle laissa sa tête tomber en avant. " Ouais... J'ai été embarquée dans cette dispute entre des Amazones de Gillen et deux hommes de Bennu... Honnêtement, je ne pense pas qu'ils voulaient faire du mal, Xena... mais ils étaient tous tellement en colère." Elle poussa un soupir. "Et puis, trier toutes ces caravanes... trouver quoi faire avec ces trucs... ça m’a donné mal au crâne."

"Mmm."

"Tu sais ce qui m'a permis de continuer ?"

"Mmm ?"

"Savoir que la journée allait se terminer et que je te verrais." Les mains s’arrêtèrent pendant un court moment, puis le massage reprit.

"Désolée de l'avoir rendue plus longue que nécessaire." Répondit-elle en lui caressant doucement la nuque puis ses mains glissèrent plus bas et défirent sa ceinture. Elle sentit le tissu de sa chemise se soulever, tandis qu'un courant d'air frais effleurait sa peau et la faisait picoter.

Gabrielle étendit ses mains le long du bord de la baignoire alors que le contact séduisant et implacable se déplaçait de haut en bas, le long de sa colonne vertébrale, puis sur ses épaules et le long de ses bras tendus.

"Ça valait le coup d'attendre." Chuchota-t-elle, s'en délectant.

Un léger gloussement lui caressa la nuque, puis des mains glissèrent le long de ses côtes et se posèrent sur sa taille. "Tu te joins à moi ?"

"Bien sûr."

Elle grimpa dans la baignoire et sentit l'eau chaude remonter le long de sa peau. Elle se retourna pour faire face à sa compagne qui s'était glissée juste à côté d'elle. "Regarde-toi." Murmura Gabrielle en prenant un morceau de linge, et le savon, avant de commencer à frotter ces sourcils sombres. Elle nettoya le visage de Xena, puis l'embrassa, avant de continuer plus bas, laissant ses mains et le savon faire leur travail.

"Je pense qu’ils sont définitivement propres." Un grognement taquin la fit sourire.

"On ne peut pas être trop prudent. Les infections peuvent être dangereuses, surtout à cet endroit." Elle sentit Xena rire sans bruit, juste un mouvement de ses côtes, et une contraction des muscles au niveau de sa taille. "Eh bien, elles le sont... tu te souviens de cette Amazone... quel était son nom..."

"Edisa." Lui répondit rapidement la guerrière. "Mais elle avait... une situation inhabituelle."

"Elle avait des seins de la taille d'un melon."

"C'était effectivement son problème." Les doigts de Xena tracèrent un motif autour de la poitrine de la barde, plus petite. "La seule Amazone que j'ai vue qui pouvait s'assommer en courant."

Gabrielle ricana et enfouit son visage dans le cou de Xena pendant un long moment. Puis elle se retira et elles s’embrassèrent, leurs fronts se touchant presque. Lorsqu’elles se redressèrent, elles se regardèrent un long moment.

"Tu crois que je les pousse trop fort ?" demanda Xena sérieusement.

"Je ne sais pas. Tu es l'experte en combat... tu sais ce dont ils ont besoin." Répondit sa compagne, tout aussi sérieusement. "Ils étaient vraiment fatigués ce soir."

"La guerre ne s'arrête pas juste parce que le soleil se couche". Lui rappela la guerrière.

"Je sais... et c'est une vérité... mais je sais aussi que plus tu es fatigué... plus tu as de chances de faire des erreurs. Et quand tu essaies quelque chose de nouveau, c'est encore plus difficile." Gabrielle parlait à partir d'une longue et lasse expérience personnelle. "Je me souviens de ce que je ressentais à la fin d'une longue journée... à essayer de te suivre. Et je n'avais même pas à me battre... pas au début."

Xena ne répondit pas.

"Xena... Je sais que tu ne leur demanderais jamais de faire quelque chose que tu ne ferais pas toi-même, n'est-ce pas ?"

La guerrière hocha solennellement la tête.

"Alors... essaie de garder à l'esprit que tu te pousses beaucoup plus fort qu'aucun d'entre eux ne pourrait le faire." Elle embrassa le nez bronzé à quelques centimètres d'elle. "Ce n'est pas une armée de Xena."

"Mmph." Un faible grognement lui répondit.

"Et par les Dieux heureusement."

La guerrière releva les sourcils.

"J'ai assez de travail en m'occupant d'une seule."

Un bruit sourd retentit. "Maman !"

"Et d’une demie."

Un autre bruit sourd résonna puis elles entendirent un grattement. "Maman ! !!"

"Bon d’accord... deux."

Xena l'embrassa. "On finit de se laver et ensuite, que dirais-tu de... "Un baiser. "de te mettre au lit..." Un autre. " … avec moi."

"Mmmm.... Pour dormir ?" Gabrielle goûta un lobe d'oreille à proximité.

"Non." Ferme et définitif.

"Je vérifiais juste." La barde continua à la mordre doucement. "Allons-y."

***********************************************

Xena se pencha en arrière, fléchissant un peu sa jambe pour faire rebondir Dori de haut en bas. Le bébé rit et tapa dans ses mains, appréciant le moment calme également. "Tu aimes ça, hein ?" Elle admettait en privé que ça faisait du bien de s'allonger dans le calme de leur caverne, après une longue journée de combat.

"Bck." Dori se pencha en avant et tira sur sa ceinture en tissu souple, l'examinant d'un air absorbé.

"Tu te sens mieux, Dori ?" La guerrière posa une main sur la tête du bébé, soulagée de la trouver fraîche après la fièvre qu'elle avait eue plus tôt. "Eh bien voilà qui est mieux... ta maman va être heureuse."

La petite cligna des yeux vers elle. "Maman ?" Dori regarda autour d'elle, puis se retourna. "Maman ?" Un froncement de sourcils inquiet plissa son visage.

"Elle va revenir tout de suite." Répondit Xena pour apaiser sa fille. "Elle est allée chercher le dîner." Elle chatouilla les doigts du bébé qui s'était accrochés à sa main. "Tu as faim ?" Elle sourit quand Dori atterrit sur son ventre et rampa le long de son corps, pour finir par s'accrocher curieusement au nez de la guerrière. "Hé.... "

"Mmm..." Dori explora le profil fort, touchant les cils de Xena alors que cette dernière fermait les yeux pour les protéger des petits doigts. "Boo !" protesta-t-elle, tapotant la joue de la guerrière jusqu'à ce que les yeux bleus réapparaissent prudemment. "Bien !"

"Ouais ? Alors ne les frappe pas." Grogna Xena en avertissement, obtenant un gloussement en retour. "J'ai besoin de... hé !"

Dori tira sur la lèvre qu'elle avait capturée. "Bck."

"Ah ah..." Xena libéra doucement sa peau. "Attention... ça fait mal." Elle passa le bout de son propre doigt sur les lèvres de Dori et le bébé le téta, attrapant sa main pour la tirer plus près. "Oh... Je suppose que tu as faim, mm ?"

"Bien sûr qu'elle a faim." La voix de Gabrielle la précéda, résonnant dans l'obscurité alors qu'elle entrait dans la caverne, portant un paquet de tissu plié et un petit pot.

"Maman." Dori se retourna, donnant des coups de pieds en voyant sa mère.

Xena passa ses bras autour du bébé pour l'empêcher de tomber de sa poitrine, appréciant la sensation du bébé plein de vie qui se tortillait contre elle. "Doucement, Dori." Elle échangea un sourire avec Gabrielle qui resta debout un moment, les regardant avec tendresse.

"Viens... J'ai le dîner." Finit par dire la barde.

Xena lui fit une petite moue. "Je dois vraiment me lever ?" Elle se recala confortablement contre la paillasse. "C'est si agréable et confortable ici." Elle jeta un coup d'œil au pot. "Surtout si je dois souffrir en mangeant du poisson et des navets."

Son âme sœur s'installa de l'autre côté du lit et s'étira sur un côté. "Xena, depuis combien de temps je te connais ?"

"Est-ce une question rhétorique ?"

"Tu crois vraiment que je te forcerais à manger du poisson et des navets ?"

La guerrière secoua la tête. "C'est ce que le reste des troupes mange, Gabrielle... Je n'ai pas droit à un traitement spécial."

Gabrielle ouvrit la bouche pour protester, puis la referma et se gratta le nez de manière réfléchie. "Tu as raison." Répondit-elle à sa compagne quelque peu surprise. "Tu as tout à fait raison Xena... c'est ce que le reste de l'armée mange, et... en tant que chef, tu ne dois pas avoir de traitement de faveur."

La guerrière cligna des yeux, semblant légèrement blessée.

"Moi, par contre, je suis une Reine Amazone et j’y ai droit." Continua Gabrielle. "Donc... je suppose que tu devras t'y faire." Elle découvrit la marmite et l'odeur d'un ragoût épais et charnu s'en échappa. "Pas de chance, Générale." Elle retira l'emballage de lin de son paquet et en sortit une miche de pain qu’elle cassa à une extrémité avant de la plonger dans le ragoût et de l’offrir à sa compagne toujours silencieuse.

Xena prit une bouchée et la mâcha, goûtant immédiatement les épices familières. "C'est toi qui l'as fait."

Gabrielle hocha la tête, puis elle sourit lorsque Dori s'approcha et attrapa le pain. "Oui, c’est vrai." Elle cassa un autre morceau et le tendit à sa fille. "Hé... vas-y doucement chérie... il y en a plein ici."

Dori fourra le pain dans sa bouche en faisant de petits bruits de satisfaction.

Xena s'installa et tendit un bras vers elle, soupirant quand la barde rampa et se pelotonna contre elle, avant de choisir un morceau de viande tendre et de lui présenter avec un sourire. "Merci." Lui dit la guerrière avant d’imiter les sons que Dori venait de faire. "J'apprécie que tu fasses ça."

Gabrielle souffla, sélectionnant un morceau de viande pour elle-même, puis elle donna un peu de carotte à Dori, alors que son esprit dérivait vers une nuit très différente.

Elle était partie. Rentrée chez elle, parce qu'elle était arrivée à la conclusion que sa présence mettait Xena en danger, et que ce serait mieux... pour la guerrière... si elle la laissait tranquille.

Et ensuite, elle avait découvert qu'une partie d'elle-même refusait de l'accepter, la poussant à retourner chercher Xena, en espérant qu'elle le pourrait. Espérant que Xena la verrait en premier, et disparaîtrait simplement, lui donnant la possibilité d'éviter sa jeune compagne si elle le souhaitait.

Ce fut un long chemin, avec une fin surprenante, même pour Xena... qui avait pourtant été réticente au début.

Mais la guerrière s'était renfermée après cela, rentrant encore plus dans sa coquille taciturne au fur et à mesure du temps qu'elles passaient, réduisant même ses tentatives de conversation brèves et bourrues autour de leur feu de camp du soir.

Elles s'étaient arrêtées une nuit assez tôt, dans un petit bosquet de vieux chênes épais et couverts de mousse, qui dégageaient une forte odeur musquée dans l'air. Xena avait eu de la chance à la chasse, et avait attrapé un sanglier, mais le combat avait été féroce et la guerrière s’était alors assise d’un côté du feu pour réparer un trou qu’une des défenses avait fait dans sa botte tandis que Gabrielle transformait la bête hargneuse en quelque chose de comestible.

Comme d'habitude, elle avait essayé de trouver quelque chose à dire, qui obtiendrait au moins un grognement en réponse. "Le village qu'on a traversé aujourd'hui avait un marché vraiment inhabituel, tu n’as pas trouvé, Xena ?"

La guerrière avait tourné la tête vers elle puis soupiré. "Les commerçants venaient de la côte."

Ah. "Vraiment ? Qu'est-ce que ça veut dire ?" avait demandé Gabrielle en remuant sa concoction bouillonnante.

"Ça veut dire qu'ils font du commerce avec les bateaux qui viennent d'ailleurs." Xena avait fait une phrase entière…. Elle n’en revenait pas.

"Oh... wow... c'est incroyable." Gabrielle s’était tournée à moitié, pour garder le profil de sa compagne en vue. "Certaines de ces choses étaient incroyables... as-tu vu ces choses séchées ? Et ces vases en laiton... les décorations étaient si jolies... sais-tu d'où ils viennent ? ".

"Inde."

"Vraiment ? Tu y as été ?

"Non."

"Oh." Gabrielle avait alors ajouté quelques épices, achetées dans le même marché. " "Et tu as vu le prix qu’ils demandaient pour ce truc doux... on aurait dit qu'il était fait d'or."

"C’est de la soie."

"Soie…" Gabrielle avait goûté le mot, le faisant tourner dans sa bouche avec intérêt. "C'était si fin... J'aimerais voir le métier à tisser qui la fabriquait."

"Les vers la fabriquent." Xena qui avait fini de recoudre sa botte, avait entouré ses genoux de ses bras et avait fixé le feu d'un air morose.

"Des vers ???? Tu te moques de moi Xena ? ???" Elle avait croisé le regard de la guerrière particulièrement sérieux. "Tu dois plaisanter... comment un ver pourrait-il faire ce joli foulard ?" Elles avaient échangé un autre regard. "Ok... ok... alors, d'où ça vient ?"

"Chine."

"Tu y as déjà été ?" Gabrielle avait terminé de mélanger le ragoût et avait alors arraché deux morceaux du pain riche qu'elle avait gardé du marché et les avait mit dans leurs bols, avant de verser à la louche le ragoût à l'odeur plutôt agréable dessus. Elle s’était tournée vers Xena et lui en avait tendu un avant de la relancer. "Alors ?"

"Oui." Avait répondu la guerrière en récupérant le bol offert.

Gabrielle avait pris son propre bol et s’était précipitée pour s'asseoir sur le rondin près de Xena, mais pas trop près. Elle savait à quel point la guerrière détestait être à l'étroit. "Wow." Avait-elle répondu en remuant sa portion. "C'était comment ?"

Xena avait lentement pris une bouchée après avoir soufflé dessus pour la refroidir. Elle avait mâché lentement et avalé avant de répondre. "Juste un endroit." Sa voix était basse et égale. "Une langue différente, des vêtements différents, c'est tout."

"Oh, allez, Xena... c'est à l'autre bout du monde !" Gabrielle avait arrêté de manger. "Ça ne peut pas être pareil... Je parie que c'était plein de vues incroyables et de différentes sortes de choses, et d'endroits, et..."

"Gabrielle."

Elle avait alors soupiré. "Je sais, tais-toi, c’est ça ?" Elle avait fait une petite grimace et regardé Xena qui l’avait regardée avec une expression étrange en retour. "Je bafouille encore, n'est-ce pas ?"

La guerrière avait cligné des yeux, dans un geste presque nerveux. "C'est bon... Je voulais juste..." Elle s'était arrêtée puis avait pris une grande inspiration. "Merci."

Gabrielle avait été complètement confuse. "Pour quoi ?"

"Le dîner."

Ça avait été encore plus déroutant. "Hein ? Xena, je prépare toujours le dîner... enfin, sauf si on se bat, ou si on est dans une vieille auberge, ou autre."

"Je sais." La guerrière s'était écartée légèrement, visiblement gênée. "Mais... c'est... hum... c'est très bon, et je... juste, merci, Gabrielle."

"Euh... de rien." avait répondu Gabrielle en remuant son bol pendant un long moment. "Tu sais, Xena... si tu voulais que j'arrête de demander des choses... tu aurais pu le dire... Je peux être silencieuse s’il le faut." Elle avait regardé la guerrière d'un air incertain. "Est-ce que ça te dérange vraiment ?"

Le visage de Xena s'était plissé en un étrange sourire, presque mélancolique. "Non. Je m'y suis habituée."

"Oh." Gabrielle s’était tue un moment. "Donc... tu... voulais juste me remercier... pour ça ?" avait-elle demandé en faisant un petit mouvement de tête. "Je ne comprends pas, Xena."

Xena avait soupiré. "Ça n'a pas d'importance."

"Mais... je veux comprendre." Avait-elle insisté.

La guerrière avait reporté son attention sur son bol, poignardant la viande sans ménagement. "C’est juste que …" Elle avait alors soupiré, puis avait fermé les mâchoires durement. Elle avait regardé devant elle pendant un long moment pensif, puis elle avait tourné la tête très lentement et avait alors simplement capturé Gabrielle entièrement, avec un regard si intense qu'il l’avait presque brûlée. "C'était trop calme pendant que tu étais partie."

"Oh." La barde se tût, pensive, puis ses yeux s’éclairèrent. "Je t'ai manquée ?"

Xena avait froncé les sourcils un instant puis son expression s'était transformée en un demi-sourire penaud. "Oui." Avait-elle répondu d'un ton bourru. "En fait, oui, c’est le cas."

Wow. Gabrielle savait que ses yeux s'étaient ouverts en grand. C'était comme avoir le Solstice et son anniversaire en même temps. Elle avait souri joyeusement et avait vu une ombre de sa propre joie briller très doucement dans les yeux bleus clairs qui la regardaient. "Tu m'as manquée, toi aussi."

Elles avaient mangé toutes les deux dans un silence simple et satisfaisant pendant un moment après cela, assises côte à côte, leurs épaules se frôlant, dans un compagnonnage perceptible qui avait réchauffé cette nuit pourtant froide.

"Hé, Xena ?" avait demandé finalement Gabrielle, en prenant le dernier morceau de son ragoût.

"Mm ?"

"Tu plaisantais à propos de ces vers, n'est-ce pas ?"

"Non." Xena s'était essuyé la bouche puis elle s'était levée pour prendre une autre portion.

"Bizarre." Gabrielle avait soupiré en regardant la guerrière. Puis elle s'était levée à son tour et avait lavé sa vaisselle, l'avait rangée dans ses affaires avant de s’allonger sur son tapis de sol. Quelques rochers qui ressortaient un peu trop du sol l’avait gênée alors elle avait pris son sac et l'avait utilisé comme oreiller supplémentaire, glissant sa main à l'intérieur. Elle s’était alors figée lorsque ses doigts avaient touché une douceur inconnue. Perplexe, elle avait retiré sa main et avait trouvé, scintillant à la lumière du feu, un petit sac de tissu soyeux, avec quelque chose de dur à l'intérieur. Elle avait ouvert le petit sac et découvert une minuscule silhouette, sculptée dans une sorte de pierre. Un ours, avait-elle reconnu.

Un doux bruit l’avait poussée à lever la tête vers l'endroit où Xena s'était assise pour aiguiser son épée. Pendant un instant, leurs regards s'étaient croisés et un soupçon de sourire avait traversé ce visage sévère et sérieux. Puis la guerrière s’était reconcentrée sur son épée et Gabrielle avait alors rangé le petit ours dans son sac de soie puis elle s’était rallongée, avait remonté ses couvertures de fourrures et s’était abandonnée au sommeil, le petit sac serré contre son cœur.

*******************************

"Était-elle vraiment grincheuse aujourd'hui ?" demanda Xena alors qu'elles terminaient leur dîner et que Gabrielle posait son pot sur la table. Dori suçait son pouce en clignant des yeux depuis sa position confortable, assise sur le ventre de Xena.

"Par les Dieux, oui." Gabrielle observa sa fille. "Elle a pleuré pendant des heures... J'ai tout essayé... maman a même essayé un peu de cette racine, mais rien n'a marché. Elle n'a même pas fait sa sieste, elle était si malheureuse." Elle s'approcha et lissa les cheveux noirs du bébé. "Pas vrai, chérie ?"

Un doux grognement lui répondit, puis Dori se laissa tomber en avant et se tortilla un peu pour prendre ses aises sur son matelas de guerrier. Elle bailla, puis posa sa tête et ferma les yeux.

"Hé..." protesta Xena. "Allez, Dori... J'ai des trucs à..." Une main couvrit sa bouche. "Mmfph."

"Ne bouge pas." Murmura la barde. "Chuutt."

La guerrière écarquilla les yeux, furieuse. "Gprfofh !"

"Chuutt!" répliqua sa compagne en continuant de lui sceller les lèvres. "Elle s’est endormie.... Xena ... c'est la première fois qu'elle dort en deux jours." Elle relâcha lentement sa main.

"Gabrielle !" siffla la guerrière très doucement, puis elle se renfrogna en observant la masse chaude posée sur elle. "Que suis-je censée faire pendant qu'elle dort ?"

Gabrielle replia les fourrures autour du bébé et de la guerrière et brossa un peu de cheveux noirs en arrière. "Faire pareil." Suggéra-t-elle. "Tu n'as pas dormi non plus la nuit dernière." Elle vit la colère éclater dans les yeux bleus qui la fixaient. "Xena... allez. Tu sais qu’elle ne dormira pas là longtemps... Fais une sieste et quand elle se réveillera, tu pourras faire ce que tu as à faire."

L'attitude orageuse se calma alors que la guerrière réfléchissait à l'idée. "Je n'ai pas sommeil." Protesta-t-elle, plus pour râler qu'autre chose.

"Très bien." Gabrielle se glissa elle-même sous les fourrures, absorbant la chaleur réconfortante qui entourait la guerrière. "Je vais juste rester ici et te tenir compagnie alors... que dirais-tu d'une histoire ?" répondit-elle d’une voix très basse.

"Mmph." Xena soupira puis étira son corps pour être un peu plus à l'aise. Elle tourna son visage vers Gabrielle et se détendit. "Très bien."

La voix douce de la barde se mit à choisir une histoire qu'elle savait que Xena aimait, une histoire douce et drôle. Elle regarda la guerrière cligner des yeux plusieurs fois, puis les fermer doucement alors que sa respiration s'apaisait sous les caresses de Gabrielle.

Elle laissa sa voix s'éteindre et resta simplement allongée pendant un moment à regarder les deux personnes les plus importantes dans sa vie. Ses propres paupières devenaient de plus en plus lourdes alors elle décida de céder à la tentation. Elle posa sa tête sur l'épaule de Xena et écouta les battements réguliers de son cœur sous son oreille. Elle était sur le point de s'endormir lorsqu'un léger bruit de frottement lui fit lever la tête et elle aperçut la forme mince et silencieuse de Cait dans l'entrée. Gabrielle mit un doigt sur ses lèvres et vit la fille hocher la tête.

Mince. La barde s'éloigna prudemment de son nid chaud, mais Xena était profondément endormie, ses traits détendus comme ils l'étaient rarement. Gabrielle se leva et se dirigea vers l'entrée, faisant signe à Cait d'avancer dans le couloir devant elle. Elle attendit qu'elle soit à bonne distance avant de s'arrêter. "Qu'est-ce qu’il y a, Cait ?"

"Je suis vraiment désolée de vous déranger." Murmura Cait. "Mais la garde m'a dit qu'un convoi de chariots arrive par ici, en provenance d'Amphipolis. Ils pensent que c'est bizarre qu’ils arrivent si tard."

Bizarre, en effet. "Ils sont à quelle distance ?"

"Difficile à dire... quatre ou cinq chandelles, je crois." répondit Cait. "Ils m'ont envoyée chercher Xena... Elle va bien ?"

"Oui, elle va bien." murmura Gabrielle. "Elle est juste... Y a-t-il quelque chose que nous puissions faire avant qu'ils n'arrivent ici ?"

"Pas vraiment."

"Très bien... Je vais attendre un peu avant de lui dire... pour la laisser se reposer."

Cait sembla troublée. "Tu crois que c'est une bonne idée ? Ce capitaine de la garde avait l'air de vouloir la voir à la porte."

"Pour qu'elle puisse s'asseoir et s'inquiéter avec lui ?" demanda Gabrielle, un peu plus brusquement qu'elle ne l'avait prévu. "Retourne là-bas et dis-lui que j'ai dit qu'il y aura suffisamment de temps dans une ou deux bougies pour arpenter les remparts."

"D'accord." Répondit Cait d'une voix prudente. "Ils m'ont dit de rester discrète... que les gens ne s’inquiètent pas inutilement, tu vois."

"Bien." Approuva la barde. "Je pense que c'est une excellente idée... à leur arrivée, nous aurons tout le temps de réagir si besoin." Elle posa une main sur l'épaule de la jeune Amazone. " C'est bon, Cait... peut-être que le convoi ne voulait simplement pas s'arrêter pour la nuit. "

Cait hocha la tête, puis elle s'éloigna vers la caverne principale.

Gabrielle soupira, retournant dans leur chambre avec une expression troublée. Que devait-elle faire maintenant ? Elle s'arrêta près d'une boîte et posa ses mains dessus, tandis que ses yeux se posaient sur les deux silhouettes endormies dans le lit. Xena allait, sans aucun doute, lui en vouloir de ne pas l'avoir réveillée.

Mais parfois, souffla la barde, en se résignant à l'ire de sa compagne, parfois il faut faire ce que notre cœur nous dicte de faire. Elle retourna vers le lit et se glissa prudemment sous les couvertures, se figeant brusquement lorsque Xena remua et que son visage tressaillit, le mouvement de ses yeux trahissant le rêve désagréable qui troublait le sommeil de la guerrière. Un petit bruit de détresse rompit le silence de la grotte et Gabrielle posa immédiatement ses deux mains sur le corps de sa compagne. "Doucement..." murmura-t-elle à une oreille proche. " Doucement... Je suis là... ça va aller."

Les tics nerveux s'apaisèrent, les peurs jamais avouées à la lumière du jour rentrèrent dans leurs cachettes et Xena retrouva un sommeil calme et paisible. Gabrielle effleura de ses lèvres le front haut. "Je suis désolée." Murmura-t-elle, sachant exactement d’où venaient ses cauchemars.

De vieilles cicatrices qu'elle avait infligées par ses propres choix et décisions.

Celles que Xena ne lui avait jamais reprochées... dont elle ne lui avait jamais parlé... et qu'elle ne lui avait révélées que par des chuchotements à moitié brisés au cours de cauchemars qui lui arrachaient des sons de douleur qui, à l'état de veille, n'auraient jamais franchi ses lèvres.

Ce n'était pas grave. Gabrielle se rapprocha de la tête sombre et enfouit son visage dans les cheveux de Xena…. Parce qu'alors elle ne pourrait s’empêcher de pleurer les larmes qu'elle ne voulait pas que son âme sœur voit.

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Le doux grattement d'une plume sur un parchemin finit par chatouiller ses sens suffisamment pour la tirer d'un sombre sommeil. Xena prit son temps, laissant les odeurs et les sons de la pièce colorer lentement ses perceptions, jusqu'à ce qu'elle puisse discerner chaque goutte d'eau, chaque tintement de pierre et chaque mouvement d'air.

Elle imagina Gabrielle, qui était lovée à côté d'elle, et laissa se former une image du visage de sa compagne, tendu par la concentration, les sourcils légèrement contractés. Le grattage s'arrêta et elle imagina la plume se soulever et le bout se frayer un chemin entre des dents blanches et soignées, tandis que les yeux dorés parcouraient les mots, réfléchissant à ce qu'il fallait écrire ensuite.

Puis elle ouvrit les yeux et découvrit la réalité, exactement comme elle l’avait imaginée, jusqu'à la légère crispation de la mâchoire de Gabrielle alors qu'elle mâchait sa plume. Puis le mouvement s'arrêta et la barde tourna la tête vers elle, se sentant observer.

"Hé."

Xena bailla, ce qui fit craquer sa mâchoire et les fit grimacer toutes deux. "Belle sieste." Elle jeta un coup d'œil à Dori, toujours assoupie, qui était occupée à baver sur sa chemise.

"J'étais sur le point de te réveiller." Gabrielle prit une inspiration et se prépara à l’orage à venir. "Les veilleurs ont repéré un groupe venant de la direction d'Amphipolis il y a quelques bougies."

Xena l'étudia sobrement. "Et tu ne m'as pas réveillée ?"

La barde prit une autre grande respiration. "Non."

La guerrière fronça les sourcils. "Bonne décision." Répliqua Xena en lui faisant un clin d’œil. "Rien de tel que de s'inquiéter toute la nuit pour gâcher une bonne sieste."

C'était l'une de ces petites surprises, celles qui arrivent au détour d’un virage et qui vous frappent en pleine figure, et qu'elle pensait ne plus avoir, après toutes ces années. C'est fou ce qu'un compliment inattendu de Xena pouvait encore la toucher et la faire se sentir comme un million de dinars. "Merci." Gabrielle savait que son visage devait le montrer car la guerrière se mit à glousser. Elle rit aussi, un peu. "J'ai cru que tu allais m'engueuler pour ça." l'admit-elle.

Xena secoua la tête. "Non... mais je me demande bien ce qui se passe." Ses yeux croisèrent ceux de Gabrielle. "Des ennuis ?"

"Quoi d'autre ?" répondit la barde avec ironie. "Je suppose que nous le saurons bien assez tôt... Laisse-moi prendre Dori... elle n’arrête pas de baver sur toi."

"J'ai eu des choses bien pires sur moi." Mais la guerrière souleva doucement le bébé endormi et le remit à sa mère. "Je vais aller voir ce qu’il se passe." Elle se leva du lit et se dirigea vers les caisses, se débarrassant du linge doux qu'elle portait pour l'échanger contre ses cuirs. Elle s’habilla rapidement, puis elle s'assit et enfila sa paire de bottes de rechange. "Ça peut être n'importe quoi... des nouvelles du sud, des problèmes à Amphipolis... plus de troupes... une fois que tu auras installé Dori, viens me trouver."

"Je le ferai." Gabrielle s'était agenouillée près du berceau et bordait le bébé. Elle leva les yeux lorsque Xena se leva et se dirigea vers l'entrée, l'énergie se dégageant de sa personne semblait presque perceptible. "J'espère que ce ne sont que des commerçants impatients." Murmura-t-elle, essayant d'ignorer le malaise qui lui tenaillait les entrailles.

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La suite au chapitre 18


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