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7 février 2009

Sassem, partie IV, chapitre 9

 

 

Chapitre 9 :

 

 

Tia fixait le plafond de sa chambre en réfléchissant intensément. Alexia avait éteint la lumière une heure auparavant et s’était blottie contre elle pour s’endormir. Elle sentait sa respiration calme et régulière chatouiller son épiderme. Elle ne parvenait pas à comprendre ce qui avait bien pu décider Alexia à lui faire une déclaration de guerre amoureuse, selon ses propres termes.

 

Après le dîner, elles étaient montées dans la chambre un peu agacées des piques continuelles de Trinity et Tia était partie se détendre dans la salle de bain. Curieusement, Alexia n’avait pas voulu l’accompagner. Elle avait compris pourquoi après.

 

Elle était entrée dans leur chambre un peignoir sur le dos, et sa compagne l’avait fait asseoir sur le lit en lui disant qu’elle avait quelque chose à déclarer. Elle s’était mise debout en face d’elle, ses jambes touchant ses genoux et ses mains jouant avec les siennes.

 

Puis elle avait prit une grande inspiration et avait planté son regard dans le sien. Elle l’avait laissée là quelques instants, jusqu’à ce que Tia ne voit plus que lui et la force qu’il dégageait. Elle avait ensuite entendu un son avant de comprendre qu’il s’agissait de mots et d’en laisser le sens l’en imprégner.

 

- Je sais que tu as entendu ce que mon père m’a dit la semaine passée et je veux que tu saches que pour moi, il n’y a jamais eu aucun doute. Tu es la personne avec qui je veux rester. Mon père… je l’aime oui, mais c’est avec toi que je vois mon avenir. Je sais que tu en doutes, que tu te poses des questions. Je ne sais pas ce que papa t’a dit et si tu m’en parlais je sais que je pourrais te rassurer.

Mais là n’est pas le propos pour l’instant.

 

Elle s’était interrompue pour respirer puis elle avait poursuivi sans lui laisser une chance de répliquer.

 

- Dans une semaine, je devrais le dire à papa et j’aimerais que se soit toi qui le lui annonce.

 

- Pourquoi ?

 

- Parce que j’ai l’impression que tu veux me quitter.

 

Elle leva la main pour l’empêcher de parler.

 

- Laisse-moi finir, s’il te plaît. J’ai une semaine. Une semaine durant laquelle je vais te faire une cour effrénée, je vais tout faire pour que tu craques pour moi, pour te convaincre que nous sommes liées, que rien ne peut ni ne doit nous séparer et ce, quelques soient les difficultés. Moi j’en suis convaincue. Il faut qu’à la fin de la semaine tu le sois aussi. C’est pour cela que je vais te séduire ma belle mercenaire...

 

Puis elle avait fait un pas en arrière et proclamée :

 

- Je t’aime Tia, c’est pourquoi je te déclare la guerre.

 

- L… la guerre ? avait-elle balbutiée abasourdie.

 

- La guerre amoureuse. Début des hostilités demain matin au lever, fit-elle en se penchant vers sa bouche, qu’elle embrassa passionnément avant de se détourner pour se glisser dans la salle de bain.

 

Tia avait tourné et retourné la scène dans sa tête, elle n’y trouvait aucun sens. A part peut-être… elle avait été distante avec elle depuis son entretien avec M. Stefanos. Elle avait de bonnes raison pour cela. Et quelque part, Alexia avait mis dans le mille. Son père avait touché tout ce qui la faisait douter de sa relation avec sa fille. Elle l’aimait infiniment, mais n’était pas certaine, ou plutôt était presque sûre de ne pas être le bon choix pour elle.

 

Alexia était si innocente. Et elle avait tant accepté en la rejoignant. Son caractère, son intransigeance, ses cauchemars, ses démons, sa violence, le danger, les morts en pagaille, l’idée de sa propre disparition, l’idée aussi qu’il puisse y avoir une raison qui rende le meurtre acceptable…

 

Sa vie était constamment en danger et elle changeait sa perception du monde en obligeant Alexia à revoir ses valeurs. Ce n’était pas normal. Alexia méritait mieux. Une vie plus sûre, où elle ne risquait pas la torture seulement parce qu’elle la connaissait. Car elle ne se faisait pas d’illusions, si Sassem lui mettait la main dessus, c’est ce qui lui arriverait… et rien que pour cela elle ne pouvait laisser Alexia repartir avec son père. Elle savait donc qu’elle serait la réponse qu’elle donnerait à M. Stefanos. Elle pourrait le dire à sa compagne et lui épargner une semaine d’angoisse, mais elle avait fini par comprendre ce qu’elle essayait de faire et ne se sentait pas le courage de lui dire que c’était inutile. 

 

Quelque part, elle espérait que sa campagne de séduction aurait l’impact voulu. Qu’à la fin de cette semaine, elle serait aussi certaine qu’Alexia que leur relation n’était pas qu’une coïncidence de la vie. Que leurs deux personnes étaient aussi indissociables que le Yin et le Yang.

 

Dieu que c’était dur d’aimer ! Il y avait toujours tellement d’attentes, tellement d’angoisses. Comment une chose aussi merveilleuse pouvait-elle être aussi douloureuse ?

 

Elle examina le visage endormi de sa compagne qu’elle pouvait à demi-percevoir grâce aux rayons de la lune qui tombaient sur une partie de son visage appuyant sur certains traits en particulier.

 

Elle vit Alexia esquisser un sourire, en réaction à une image de son rêve, puis soupirer joyeusement.

 

- Il a l’air bien ton rêve mon cœur, souffla-elle.

 

- Hmmmm, répondit son amie comme en réponse à sa remarque.

 

Un petit rire lui échappa puis Tia embrassa le front de sa belle et tourna la tête vers le ciel nocturne. Elle chercha, comme toujours, le visage de ses parents ou plus simplement, un indice de leur présence parmi les cieux.

 

«  Qu’est-ce que vous en pensez maman, papa ? Je nous laisse une chance ? Et si je ne suis pas convaincue comme elle souhaite que je le sois ? Je le lui dis ? En précisant quand même qu’elle doit rester pour des raisons de sécurité ou je lui mens ? Elle ne voudra jamais rester si je ne suis pas convaincue. Alors qu’est-ce je dois faire ? J’aimerais tellement que vous soyez là… »

 

Elle soupira et revint au visage d’Alexia. « Soit honnête Tia, tu as besoin d’elle. » Elle allait lui laisser une chance de la convaincre. Parce qu’elle souhaitait être convaincue. Et si elle ne l’était pas, eh bien… elle aviserait le moment venu. Elle avait bien trop besoin d’elle pour ne pas au moins essayer.

 

 

**************************

 

 

Tia fixait les lys blancs d’un air hésitant. Alexia s’était levée avec l’aube et était partie lui préparer un petit déjeuner comme elle les aimait, c'est-à-dire plein de Nutella, de miel et beurre, et lui avait apporté le tout au lit. Elle l’avait regardé manger en la couvant du regard, ce qui l’avait rendue nerveuse. Si toute la semaine était ainsi, elle allait avoir du mal !

 

Après le petit déjeuner, Alexia avait filé hors de la villa après de légères modifications corporelles qui l’avaient beaucoup fait rire tant elle ressemblait à une vieille dame édentée ! Elle était revenue des heures plus tard et elle avait couru se réfugier dans la salle de bain avec des tas de paquets différents.

 

Elle en était ressortit deux minutes plus tôt avec un énorme bouquet de lys blancs et un sourire non moins énorme, vêtue d’une robe noir qui s’arrêtait au dessus du genou. Ses cheveux avaient été coupés au-dessus des épaules et coiffés en demi-tresses africaines. Elle avait enfilé des bracelets qui tintaient à chacun de ses mouvements et un collier en argent dont le pendentif tombait juste à la naissance de ses seins.

 

- Elles ne te plaisent pas ? s’inquiéta soudain la jeune blonde.

 

- Si, si, répondit-elle en les lui prenant des mains. C’est juste… eh bien je n’ai pas l’habitude. Je veux dire… on ne m’a jamais offert de fleur alors… enfin merci.

 

- Tu veux dire que je suis la première ? interrogea-elle les yeux brillants.

 

- Oui.

- Fantastique !

 

Elle la fixa de ses beaux yeux verts puis fit un geste vague en direction de la salle de bain.

 

- Va te changer.

 

- Hum, je ne voudrais pas gâter ton enthousiasme mais…

 

- Ne t’en fait pas, la coupa-elle, on ne sort pas. Mais ce que j’ai prévu nécessite tout de même une autre tenue.

 

- Une dans ton genre ?

 

- Si tu veux dire chic, je te réponds oui mademoiselle.

 

- Et qu’as-tu prévu ?

 

- Surprise ! Allez va te changer ! la houspilla-elle en la poussant dans le dos.

 

Tia entra en riant dans la salle de bain. Elle prit une douche puis piocha dans son armoire à la recherche d’une tenue appropriée. Elle passa un pantalon en cuir noir et un tee-shirt sans manches moulant avec une dentelle très suggestive sur le devant. Elle se demanda un instant si le port des chaussures était pertinent, avant de décider qu’avec une tenue pareille, c’était obligatoire. Elle enfila des boots de motard et se regarda vite fait dans la glace avant de juger qu’elle était bien.

 

Elle se mit ensuite en quête de sa petite amie. Elle la chercha pendant dix bonnes minutes avant de réussir à lui mettre la main dessus. Elle se trouvait dans la salle à manger et apposait une dernière touche à leur table.

 

- Waaa, laissa-elle échapper. Lex, tu… c’est dingue, tu as fais ça toute seule ?

 

La jeune femme se tourna vers elle avec un grand sourire. La lumière des bougies éclairaient un côté de son visage, laissant l’autre dans l’ombre, lui donnant un air mystérieux et sauvage et renforçant l’intensité farouche de son regard. Tia déglutit, troublée de la soudaine attitude déterminée de son amie.

 

Celle-ci s’approcha lentement d’elle en détaillant paresseusement son corps. « Purée ! Pour un peu je jurerais être nue ! » se dit-elle devant ce regard soutenu. Une fois à ses côtés, elle lui saisit la main et l’amena à sa chaise. La table était absolument superbe. Des pétales de rose et de marguerite avaient été étalés sur une nappe blanche damassée. De petits personnages, hauts de quelques centimètres seulement, étaient disposés un peu partout sur la surface blanche éclatante, dans des scénettes rigolotes.

 

L’une d’elle la fit éclater de rire. Deux petites femmes étaient posées sur un tout petit lit de pétales et la première femme avait relevé la jupe de la seconde et fixait d’un air ébahi ce qu’il y avait en dessous.

 

- Où as-tu trouvé ces figurines ?! demanda-elle en riant.

 

- Ah ah ! C’est mon secret. Allez assieds-toi et profite.

 

- C’est toi qui à préparé à manger ?

 

- Hum hum. Je m’y suis mise au réveil.

 

- J’ai hâte de voir ça.

 

 

************************

 

 

Alexia avait servi un dîner digne des plus grands maîtres queux et Tia s’était régalée. Le dessert venait d’être posé sur la table et la mercenaire ne le quittait pas des yeux. C’était une composition unique : un parfait au chocolat et au miel. Deux petits personnages surplombaient le gâteau. Elle éclata de rire en les avisant. L’un était à genoux et dévorait le gâteau, l’autre s’apprêtait à se jeter sur le premier d’un air féroce. Ce qui l’avait fait rire n’était pas tant la scène en elle-même que la tête des deux personnages. Celui qui était agenouillé avait le visage d’Alexia et l’autre avait le sien.

 

- Tu n’as pas pu faire ça toi-même, lâcha Tia en riant. C’est beaucoup trop sophistiqué pour toi !

 

- Tu veux me vexer ? fit-elle avec une grimace. Bon, ok, j’ai commandé chez un traiteur cet après-midi entre deux boutiques. Mais j’ai choisi moi-même les plats. Et demandé une création unique pour le dessert. Pas mal non ?

 

- Énorme chérie. Bel effort, confirma-elle dans un sourire railleur. J’adore déjà le dessert !

 

- Alors profites-en bien car se sera le seul.

 

Tia fronça les sourcils.

 

- Pardon ? Tu veux dire…

 

- C’est ça. Régime sec.

 

- Mais… après une soirée romantique ça n’a pas de sens.

 

- Si. Parce que si tu te souviens bien, je dois te convaincre que tu m’aimes et que tu es faite pour

moi. Le sexe à tendance à tout embrouiller, alors rien jusqu’à la fin de la semaine.

 

Tia la fixa, sciée.

 

- C’est…

 

Elle ouvrit plusieurs fois la bouche, en tentant d’en faire sortir un son, sans y parvenir.

 

- C’est… cruel, lâcha-elle finalement. Tu… me regardes comme si tu voulais me dévorer depuis le début du repas !

 

- Je n’ai jamais dit que j’allais cacher ce que tu déclenches dans chaque partie visible et invisible de mon corps.

 

La bouche de la mercenaire opéra une descente rapide et involontaire sur le bord de la table.

- Tu…, Tia déglutit péniblement, tu n’es pas obligée… de me dire ce genre de choses, fit-elle en inspirant profondément. Je… ce serait… moins… heu.

 

Le regard de la grande brune se perdit dans le décolleté que son amie avait mis en avant, par un mouvement tout sauf subtile.

 

« Ferme la bouche t’as l’air débile ! » s’engueula Tia. « Elle le fait exprès, se dit-elle de mauvais poil en posant ses yeux sur une zone plus sécurisé tel que le plafond. Elle veut m’allumer. Ça l’amuse et ça me rend dingue. Comme ça à la fin de la semaine je serai tellement obsédée que je donnerais exactement la réponse qu’elle attend ! »

 

Alexia ne put empêcher un éclat de rire la secouer en voyant l’expression dépitée et frustrée de son amie.

 

 

*************************

 

 

La fin de la semaine arriva vite et Tia était tout aussi perdue qu’au premier jour. La frustration sexuelle était telle qu’elle se retenait à grand peine de ne pas plaquer la jeune blonde contre un mur pour lui faire l’amour avec une passion brutale. Alexia lui avait organisé surprise sur attention tout au long de la semaine.

 

Honnêtement Tia n’avait jamais été à ce point courtisée et cela avait rempli d’une douce chaleur un endroit de son cœur qu’elle ne se connaissait pas. Son amie n’avait cessé de lui montrer à quel point elle était importante à ces yeux et à quel point elle avait besoin d’elle. Elle avait aussi tenté à plusieurs reprises de lui faire comprendre que toutes deux étaient destinées l’une à l’autre.

 

De ce fait, tous les soirs avant de s’endormir, Alexia lui racontait une histoire ayant pour thème les plus belles histoires amoureuses avant de décortiquer en quoi cela les rendaient si belles. Tous les classiques y étaient passé, Roméo et Juliette, Tristan et Iseult, le Roi Arthur et Guenièvre, quoi que là, ce soit plutôt un triangle amoureux avec Lancelot, Esméralda et son bossu et même des Walt Disney ! La belle et le clochard, Lilo et Stitch ! Non, mais sérieusement ?! Même Titi et gros minet avaient eu droit à un décorticage de leur relation !

 

Pour finir, hier soir, Alexia avait mis la saison 2 et 3 de L Word et pointé la relation de Bette et Tina, en montrant du doigt ce qui avait fait défaut dans leur relation ( en dehors de l’évidente trahison de Bette envers Tina évidemment ) en concluant que cela venait du fait que les deux femmes ne parlaient pas assez. Elles supposaient ce que l’autre pensait sans jamais vraiment en discuter. Bon évidemment, sur la fin de la saison 3, Tina déconnait sévère avec son père de famille, mais là n’était pas la question. Elles étaient faites l’une pour l’autre et pour une raison connue d’elles seules, ne cessaient de gâcher, à tour de rôle, ce qu’il y avait entre elles. Résultat, elles se couraient après, à tour de rôle, se rendant compte qu’elles ne pouvaient se passer l’une de l’autre

(enfin ça c’est ce qu’Alexia avait décrété).

 

Tia l’avait regardée éberluée, autant par sa volonté de lui faire comprendre qu’elles devaient rester ensemble quoi qu’il arrive, que par la façon maladroite et originale qu’elle avait de le faire.

Tout ceci était déjà très perturbant, mais ajouté aux regards enflammés qu’elle lui lançait à chacune de leurs sorties… Tia avait eu envie un millier de fois de la coller au mur en lui demandant pourquoi, mais pourquoi donc, elle se sentait obligée de l’échauffer comme ça une semaine durant ?!

En plus, chaque soir elle se blottissait contre elle pour dormir sans qu’elle ait le droit de la toucher ! Elle la mettait à l’épreuve ou elle essayait de la rendre dingue ?! Comment elle pouvait dormir ?!

 

La semaine avait donc été une oscillation constante entre la joie tranquille due aux charmantes et surprenantes attentions de sa compagne et la frustration sexuelle explosive qui avait émaillée chacune d'elles.

 

Et voilà qu’elles se retrouvaient le jour J, pour un barbecue familial où M. Stefanos devait faire une apparition pour le dessert et elle ne savait toujours pas ce qu’elle allait dire à cet idiot qui était la cause de sa très grande confusion !

 

Tia fixait d’un air mauvais sa compagne et son amie, Linya, qu’Alexia avait invité à la dernière minute, en train de converser comme si elles ne doutaient pas le moins du monde de sa réponse !

Franchement Tia était épuisée. Elle se demandait ce qu’elle détestait le plus. L’attitude assurée des filles, la jovialité énergique de son oncle ou l’hostilité glaciale de sa cousine ? Le choix était difficile. J’ai droit à un Joker Jean-Pierre ?

 

Tia soupira et avala d’un trait le cocktail de fruits - ananas, orange, citron et mangue qu’Alexia avait pressés pour elle un peu plus tôt, de manière totalement naturel. Elle aurait bien aimé un truc plus fort, mais la jeune blonde avait décidé que c’était mauvais pour elle. Non mais, de quoi je me mêle ?!

 

Soudain Alexia se leva en déclarant qu’elle leur lançait un défi à la course de voitures. « Les jeux vidéo ! » songea Tia en levant les yeux au ciel. Ça avait été le nouveau dada de son amie toute la semaine. Elle avait défié et battu tout ceux qui avaient été assez stupides pour la prendre au mot. Tout le monde accepta avec enthousiasme, même Trinity, qui apparemment était aussi une mordue.

 

- Tu viens ? lui lança sa compagne quand elle ne la vit pas bouger.

 

- Sûrement pas. Je hais, les jeux vidéo.

 

- Mais tu adores la vitesse, contra-elle.

 

- Peut-être, mais là c’est fictif.

 

- Justement, tu peux appuyer sur le champignon je ne te hurlerai pas dessus cette fois ! fit-elle avec sa logique imparable.

 

Pour éviter un nouvel argument vain, Tia garda le silence la regardant d’un air explicite.

 

- Alleeeezz, Tiiiiaaaa, s’iiiil te plaiiiiiiiiit !!!! se plaignit-elle en l’approchant.

 

Tia secoua la tête lentement de droite à gauche. Alexia se percha alors sur ses genoux et passant ses bras autour de son cou, colla son nez au sien et murmura :

 

- Je suis sûre que je peux trouver un moyen de te convaincre.

 

- Attention Lex, la menaça-elle, si tu commences un truc que tu n’as pas l’intention de terminer, je te jure que je te renverse sur la table et que je te baise là tout de suite sans plus me soucier de ta décision.

 

Alexia se figea et vit dans son regard qu’elle ne plaisantait pas. Ok, elle était peut-être allée un peu loin dans son jeu. Mais allumer Tia était presque aussi jouissif que de coucher avec elle et elle avait eu bien du mal à se retenir de jouer. D’autant plus que Linya l’avait convaincue que la frustrer lui ferait comprendre qu’elle ne pouvait décemment pas la quitter, puisqu’elle ne tenait même pas une semaine sans la toucher !

 

En attendant, bonne ou mauvaise, elle allait devoir se sortir de la situation potentiellement catastrophique qu’elle venait de créer.

 

- Euh Tia, commença-elle, c’est presque fini Ok ? Au dessert papa sera là et tu lui parleras et après ça… on fera ce que tu voudras…, finit-elle avec un sourire engageant.

 

Tia garda le silence un moment.

 

- Qu’est-ce qui peut bien te faire croire que tu m’as convaincue ? demanda-elle en définitive.

 

Une alarme raisonna dans un coin de la tête d’Alexia et l’anxiété la gagna.

 

- Tia… je… après toutes les histoires que je t’ai racontées cette semaine, tu ne vas pas me faire croire que tu ne crois toujours pas au grand amour ?

 

- Pour commencer, toutes tes histoires étaient des tragédies…

 

- Pas L Word !

 

- Tina et Bette sont séparées Lex.

 

- Et Walt Disney ?

 

- Des dessins animés. Ça ne compte pas.

 

La jeune blonde grimaça. Elle aurait peut-être dû réfléchir un peu plus à ces histoires en fait. Elle n’avait pas pris en compte le caractère foncièrement pessimiste de sa compagne qui bien évidemment, n’en avait retenu que le côté négatif !

 

- Ensuite, poursuivit-elle implacablement, en quoi être convaincue que le grand amour existe nous concerne-t-il ?

 

- Tia ! Tu me fais marcher hein ?!

 

Mais devant le visage impassible de celle-ci, Alexia dut se rendre à l’évidence.

 

- Mais c’est ce que nous vivons bon sang ! Ça me paraît évident !

 

- Lex, la réprimanda la mercenaire, avant de te connaître, je ne savais même pas ce qu’était l’amour, alors reconnaître le grand amour me paraît difficile. De toute évidence tu as des points de références, « Et je donnerais cher pour connaître leurs noms à ces guignols ! » songea une Tia assez furieuse de ne pas être la première, mais en ce qui me concerne je n’ai aucun point de comparaison pour ça.

 

Alexia ouvrit la bouche pour répondre puis la referma.

- Alors ça veut dire que tu vas répondre oui à mon père ? questionna-elle découragée.

 

- Ça veut dire que je ne sais pas ce que je vais répondre Lex, la détrompa-elle.

 

Ses yeux brillèrent. Elle avait encore une chance de la convaincre.

 

- Ok, j’avoue que je n’ai pas toujours été inspiré pour mes histoires alors écoute celle-ci s’il te plaît, elle est courte. C’est un poème que tu m’as inspirée.

 

Elle respira un bon coup puis attrapa une chaise et s’assit en face d’elle. Elle posa ses mains sur les siennes et plongea son regard dans le sien. Elle entama sa récitation et sans jamais la quitter ses yeux, elle déclama son œuvre d’une voix où elle mit tout l’amour qu’elle ressentait pour cette grande femme si dangereuse et mystérieuse, dont elle n’envisageait pas une seconde de se séparer, quoi qu’il lui en coûte.

 

En regardant dans mes yeux,
S'il te plaît, souviens-toi que je suis timide.
Tu n'as rien à craindre.
Car c'est l'homme qui nous a mis sur cette terre ensemble...
Mon vœ
u  serait de ne pas être si incompris.
Après Tout, c'est l'homme qui dit que je ne suis pas bon.
Si l'homme pouvait prendre le temps d'apprendre comment je suis réellement.
Peut-être aurais-je la chance de demeurer dans ce monde
S'il ne tue pas ma famille.
C'est votre choix de m'aider.
A ce que les hommes voient,
Que je ne suis pas un tueur comme on vous l'a fais croire.
Je veux être compris et être libre.

*Texte de B. Schmit

 

- C’est… très énigmatique.

 

Alexia eut un sourire indulgent. Elle savait qu’elle ne comprendrait pas.

 

- Se sont les pensées d’une louve de ma connaissance…

 

Tia écarquilla les yeux quand elle comprit de qui elle parlait et ce qu’Alexia avait compris d’elle-même, puis posa un nouveau regard sur son amie.

 

- Je t’aime Tia, mon amour, fit-elle en posant un léger baiser sur ses lèvres.

 

Puis elle se leva et tenant toujours sa main lui demanda la permission de l’emmener dans la salle de jeux d’où l’on entendait des cris de joie et d’encouragement autant que des railleries qui fusaient jusqu’à elles.

 

- Tu ne seras pas obligée de jouer, mais j’adorerais avoir un supporter, déclara-elle avec une moue adorable.

 

Tia sourit et céda.

 

- Je pourrais avoir des pompons et une chorégraphie rien que pour moi ? quémanda Alexia avec un regard en coin.

 

- Tu veux que je me déguise en pom-pom-girl ? fit Tia outrée.

 

Alexia hocha la tête avec espoir.

 

- Jamais !

 

 

*************************

 

 

Tia observait sa cousine. Ses boucles rousses étaient maintenues en arrière par un bandeau afin qu’elles ne la gênent pas pendant sa course. Elle s’était glissée dans la machine de droite pendant qu’Alexia se glissait dans celle de gauche. Son oncle n’avait plus eu d’autre choix que celle du milieu que tous s’accordaient à trouver moins performante. « N’importe quoi ! C’est une machine pas une vraie voiture » s’était dit la mercenaire, jugeant cependant plus prudent de ne pas faire cette remarque à voix haute.

 

Trinity arborait un sourire d’une largeur qu’elle ne lui avait jamais vu. Il faut dire qu’à part une expression haineuse ou morose, elle ne lui avait pas vu grand-chose. Le sourire changeait complètement son visage, le faisant paraître plus jeune et chaleureux. On aurait vraiment dit une autre personne. D’ailleurs pendant les différentes courses auxquelles elle participa, elle oublia totalement qu’elle avait « une perverse » pour adversaire et s’adressa à elle comme elle le faisait avec son père, avec raillerie et vantardise mais chaleur. Elle plaisanta même avec elle, expliquant son refus de courir par la peur d’être ridiculisée. Tia avait ricané.

 

- Tu n’es pas prête à concourir contre moi, crois-moi, avait-elle rétorqué. Vous êtes des petits joueurs à côté de moi.

 

- C’est ce que disent les poules mouillées pour ne pas se mouiller, justement, avait lancé sa soi-disant petite amie.

 

Tia avait plissé les yeux et décrétés qu’elle ne supportait pas les traîtres. Elle s’était donc ostensiblement déplacé vers son oncle et l’avait ignoré durant le reste de la course, laissant Linya seule supporter son amie.

 

Soudain elle sursauta. Sa fesse gauche vibrait. Elle secoua la tête devant sa nervosité et attrapa son téléphone. Elle décrocha tout en s’éloignant.

 

 

***********************

 

 

Alexia leva les deux bras en l’air en hurlant sa joie.

 

- J’ai gagné !!! J’ai gagné !!!

 

- Je ne vois pas pourquoi tu hurles, dit Gin dépité, ce n’est pas comme si c’était la première fois ou après une lutte acharnée.

Alexia se leva et entama une petite danse.

 

- Je vous ai battus, chantonna-elle, vous êtes nuls, je vous ais mis minableuuuuh.

 

Trinity éclata de rire devant le ridicule de sa danse de victoire puis secoua la tête en s’extirpant de la machine.

 

- Je vais chercher à boire.

 

- Sûr ! Ça donne soif d’avaler la poussière, jeta avec suffisance la jeune blonde.

 

Elle eut alors droit à un sourcil relevé en un signe évident de scepticisme, puis un reniflement dédaigneux suivit, la faisant sourire. Elle la regarda s’éloigner et chercha sa petite amie des yeux.

 

Elle la vit un peu plus loin, appuyée contre un mur, en pleine conversation téléphonique. Elle l’observa raccrocher, puis rester quelques instants pensive avant de la chercher du regard. Leurs regards s’accrochèrent et restèrent ainsi alors qu’elle s’approchait, le visage impassible.

 

« Oh oh, ça sent les ennuis » songea-elle.

 

- Qui était-ce ?

 

- Waco.

 

« Ha. Le boulot donc »

 

- Et ?

 

- Elle dit qu’un client à elle veut m’engager pour un job.

 

- Pourquoi ne le fait-elle pas ?

 

- Sassem. Un de ses sites se trouve dans le coin, elle veut l’étudier et elle dit qu’elle n’a pas le temps de s’en occuper et qu’elle aura besoin de mon aide, car le site est vraiment énorme et très surveillé.

 

- En gros, elle te fait venir sous un prétexte bidon pour pouvoir t’utiliser après.

 

- Non, Lex. Elle m’a demandé de l’aide et j’ai accepté, comme elle l’a fait elle-même pour moi de nombreuses fois. De toute façon pour se qui concerne Sassem on bosse ensemble, on ne se rend pas service. On veut la même chose elle et moi. Qu’il tombe. En ce qui concerne la mission, c’est un truc basique selon elle.

 

- Où ?

 

- En Italie.

 

- Et c’est quoi un truc basique pour elle ?

 

- Ça dépend. Elle est un peu spéciale.

 

- Sans blague, marmonna-elle entre ses dents. On part quand ? reprit-elle tout haut.

 

Tia la fixa et Alexia comprit ce qui allait suivre.

 

- Lex…

 

- Non Tia ! Je veux venir. Tu sais que je t’aime et que cela seul justifie mon envie. Mais ce n’est pas la seule raison. Je ne vais pas recommencer à t’expliquer les raisons qui font que j’aime ce que je fais avec toi, parce qu'à la longue, même moi ça me soûle. Mais tu sais que j’aime ça, alors arrête de faire comme si ce n’était pas le cas, ok ?

 

Tia la dévisagea longuement comme pour juger de sa détermination puis pencha la tête sur le côté et plissa légèrement les yeux.

 

- Ton père arrive.

 

Les yeux d’Alexia s’agrandirent à l’approche de la scène tant attendue. Elle se mordit la lèvre et laissa Gin aller ouvrir la porte. Elle dévisagea la mercenaire, essayant de deviner qu’elle serait sa réponse mais ayant peur que se ne soit pas celle qu’elle attendait.

 

Tia regarda le père d’Alexia approcher, l’air sévère. Il s’arrêta à bonne distance d’elle et la salua d’un petit sourire goguenard, certain de sa victoire sur elle. Il allait être surprit.

 

- Alexia. Gin. Trinity.

 

Délibérément il ignora Tia ce qui fit grincer des dents sa fille et l’oncle de Tia. Gin voulu s’interposer mais un geste de sa nièce lui fit comprendre qu’elle voulait qu’ils s’en aillent. Il hocha la tête et prenant sa fille par le bras, l’attira au dehors.

 

- Papa, le salua-elle enfin.

 

- Tu sais pourquoi je suis là, alors ne perdons pas de temps. Ta réponse ?

 

- C’est Tia qui va te la donner.

 

- Pardon ? Et pourquoi je te prie ?

 

- En fait ma réponse est prête depuis la semaine dernière mais Tia… Tia n’étant pas sûr, j’ai préféré lui laisser la responsabilité de la décision.

 

- Quoi ? fit son père en fronçant les sourcils. Je n’ai pas bien compris.

 

- Peu importe, soupira sa fille. C’est Tia qui va te répondre.

 

Puis elle concentra délibérément son regard sur la grande femme qui était à ses côtés et attendit.

Tia observa M. Stefanos. Son attitude envers sa fille, mais aussi envers elle-même et sa famille. Son sourire hautain, son assurance, son ton dominateur… il lui rappelait Sassem. Si sûr de lui et de ce qu’il fallait au monde, qu’il n’hésitait pas à décider de la vie des autres à leur place. Tia sut à cet instant quelle serait sa réponse. Elle comprit aussi en se remémorant le poème qu’Alexia lui avait déclamé un peu plus tôt, qu’elle était absolument certaine que c’était le meilleur choix pour elles deux.

- Elle reste avec moi.

 

**********************

 

Alexia respirait avec délice l’odeur de son amante. Elle était allongée sur le corps nu de sa compagne, les bras de celle-ci l’enserrant.

 

- Ça va ? s’enquit la mercenaire.

 

- Bien sûr. Je reste alors tout va bien, dit-elle satisfaite et alanguie.

 

- Certaine ?

 

Alexia repensa aux paroles que son père lui avait jeté au visage, avant de tourner les talons absolument furieux, avec un pincement au c?ur, mais sans que cela ne la fasse douter de son choix.

 

- Oui j’en suis sûr. S’il ne veut plus de moi, alors tant pis. C’est lui qui y perd sa famille pas moi.

 

- Lex, il est ta seule famille… dit Tia doucement.

 

Alexia releva la tête et croisa ses mains sur le ventre de son amie avant de poser son menton dessus. Elle plongea ses yeux dans ceux de sa compagne.

 

- Tu sais bien que c’est faux, déclara-elle gentiment. Ça fait presque un an que tu la remplaces. Tu es ma famille, amour*, mon amour. (*en malgache, amour se dit Tia )

 

Tia songea que la jeune femme prononçait son nom de telle façon qu’on ne pouvait se tromper sur la signification qu’elle lui donnait.

 

Tia pinça les lèvres puis lui prit le visage entre ses mains, la forçant à se redresser.

 

- Anata wa watashi no yume desu, Lex.

 

- Qu’est-ce que ça veut dire ? l’interrogea Alexia les sourcils froncés.

 

- Ça veut dire : Tu es mon rêve Lex. Mais j’aurais pu aussi dire watashi no taiyô, ou watashi no hoshi ou encore watashi no kokoro. Mon soleil, mon étoile, mon esprit. Tu es toutes ces choses pour moi Lex et plus encore.

 

Alexia qui n’en attendait pas tant de cette journée, laissa une larme s’échapper et rouler sur sa joue.

 

- Je t’aime.

 

- Moi aussi.

 

Une pause.

 

- Et maintenant on passe aux choses de la chair.

 

- Encore ?! fit la jeune blonde avec un petit rire. Tia, ça fait trois fois déjà !

 

- Tu me dois toute la nuit pour le petit jeu auquel tu t’es amusée cette semaine, fit son amie avec sérieux. Heureusement pour toi qu’on doit prendre le premier vol pour l’Italie demain matin car sinon…

Tia ne finit pas sa phrase et Alexia déglutit.

 

- Assume chérie, j’ai été au bord de l’explosion toute la semaine. J’ai été héroïque de ne pas me jeter sur toi alors que tu te blottissais nue contre moi chaque soir ! Tu me dois une nuit d’amour sans temps mort ! conclut-elle avec un sourire gourmand et suffisant.

 

«  J’espère que je vais y survivre… » songea la pauvre et nouvellement promue esclave de sexe.

 

Fin de la quatrième partie.

 

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